À Alternatiba Paris : dénoncer les fausses solutions énergétiques, promouvoir les alternatives
Publié initialement dans la revue Sortir du nucléaire n°100 le 15 janvier 2024, mis en ligne le 4 juillet 2024
Branche locale du mouvement citoyen Alternatiba, Alternatiba Paris milite depuis 2013 pour le climat et la justice sociale, tout en menant des actions de désobéissance civile. Face aux enjeux climatiques, le collectif dénonce le nucléaire comme une fausse solution. Rencontre avec Antoine, son porte-parole.
Comment s’organise Alternatiba Paris ?
Nous luttons grâce à deux piliers : nous dénonçons les responsables politiques et économiques en menant des actions, et nous promouvons les alternatives pour une transition sociale et écologique. Avant 2021 ces deux piliers étaient divisés en deux groupes : les actions de résistance, notamment de désobéissance civile, étaient menées par Action Climat Paris, tandis qu’Alternatiba Paris se chargeait de la promotion des alternatives. Mais depuis 2021 nous sommes réunis à Alternatiba Paris. Nous avons pris cette décision car la lutte que nous menons nécessite d’être efficace.
Notre stratégie passe par quatre grands axes : Résister, cela signifie que nous nous opposons et bloquons le système, notamment capitaliste ; Transformer, c’est-à-dire faire changer les alternatives d’échelle ; Mobiliser, massifier le mouvement, ce que nous avons pu faire avec les marches climat par exemple ; et S’organiser, ce qui passe par la création d’alliances, de réseaux.
Quel « avenir souhaitable » promeut Alternatiba et comment y parvenir ?
Il y a des batailles à mener, notamment celle des imaginaires, c’est-à-dire faire voir d’autres perspectives que celle capitaliste. Pour cela nous avons écrit le livre Notre Grand Pari : métamorphoser l’Île-de-France [1]. Il dresse un état des lieux de la situation en Île-de-France et propose une vision souhaitable et envisageable à horizon 2050.
Pour y parvenir nous nous appuyons sur le triptyque de l’association négaWatt : efficacité, renouvelables, sobriété. Cette dernière ne signifie pas une société de privation, mais une sobriété qui permettrait de satisfaire les besoins essentiels de tous·tes, des générations actuelles et futures, dans le respect des limites planétaires. Pour y parvenir il faut laisser les énergies fossiles dans le sol et éviter les fausses solutions, comme le recours à l’énergie nucléaire.
Dans cet avenir souhaitable il y a également une dimension sociale : démanteler les systèmes d’oppression coloniaux, patriarcaux, racistes, validistes, etc. La méthode que nous promouvons est celle de l’écologie populaire. Nous nous attaquons aux responsables en les nommant et en dénonçant leurs doubles discours. Dans nos actions, il y a une approche non violente, par notre manière de lutte nous souhaitons préfigurer la monde dans lequel nous voulons vivre.
Quelle est la position d’Alternatiba Paris sur le nucléaire ?
Alternatiba Paris est antinucléaire du fait de notre vision politique : le nucléaire est une fausse solution qui ne répond pas à l’urgence climatique, et c’est également une énergie coloniale. Le nucléaire fait partie du package techno-solutioniste pour la « croissance verte ».
Comment abordez-vous cette question au sein d’Alternatiba Paris ?
C’est un sujet technique qui divise, qui polarise les débats. Nous comprenons pourquoi certains collectifs d’activistes pour le climat ne veulent pas prendre position là-dessus. Dans notre stratégie d’écologie populaire c’est l’aspect colonialiste que nous voulons mettre en avant : la reproduction des systèmes de domination colonialiste, comme entre le France et le Niger, ainsi que l’exploitation des corps dans les mines d’uranium. Il y a également la problématique de la ressource en eau : ça ne nous semble pas raisonnable d’investir dans le nucléaire avec tous les impacts environnementaux qui l’accompagnent.
Pour dénoncer cette énergie nous participons à des actions et nous organisons des conférences sur le sujet. Par exemple, nous avons organisé des Rencontres Radicales en octobre, où une formation sur le nucléaire était proposée. Nous nous appuyons sur les travaux d’alliés comme le Réseau "Sortir du nucléaire" ou de Greenpeace pour construire nos réflexions. Enfin, nous soutenons ou relayons les communications d’actions de nos partenaires sur le sujet. À côté, nous menons des campagnes qui promeuvent des alternatives.
Alternatiba Paris a participé à la fermeture du Ministère de la « Trahison » écologique à Paris le 6 novembre 2023, aux côtés de 7 autres associations du mouvement climat dont le Réseau "Sortir du nucléaire". Pourquoi était-ce important pour vous d’y participer ?
Nous avions vraiment la volonté de montrer l’unité du mouvement autour de la question de la justice climatique et du nucléaire. Notre prise de parole avait pour objectif à la fois de dénoncer le nucléaire comme une fausse solution face à l’urgence climatique, qui revêt de plus une dimension coloniale, et également de proposer des alternatives, de mettre en avant la rénovation thermique des bâtiments.
Comment Alternatiba Paris a fait évoluer ses façons de militer depuis sa création ?
Au début, Alternatiba Paris était plus axée sur l’écologie et le climat, puis nous nous sommes ouverts à d’autres sujets à travers les alliances que nous avons tissées. Nous avons participé au mouvement des gilets jaunes, à la création de Verdragon, première maison de l’écologie populaire [2]., à la marche pour le futur, etc.
Cette année nous avons participé aux grèves contre la réforme des retraites, et plus récemment nous avons communiqué sur le conflit israélo-palestinien, et nous prenons part aux mobilisations de soutien à la Palestine.
Quels sont les défis ou obstacles actuels pour une lutte comme la vôtre ? Comment les dépasser ?
Il y a deux obstacles majeurs : d’un côté le gouvernement reste sourd face aux mobilisations, et de l’autre la répression policière est de plus en plus forte, notamment contre les actions de désobéissance civile. Pour faire face à cette dernière nous organisons des formations à la garde à vue, et de défense juridique. Nous menons également des actions innovantes pour déjouer la répression policière et avoir un impact médiatique fort.
Nous pouvons décrire notre objectif de faire changer le système capitaliste comme une montagne que nous gravissons grâce à plein de petites victoires.
Une de nos forces pour dépasser tout ça repose dans le réseau des alliances : à la fois au sein du mouvement climat, mais également en dehors des alliances traditionnelles, comme lors des rencontres radicales. Pendant une semaine avaient lieu des rencontres sur une thématique qui a priori ne rentrait pas dans nos sujets habituels. Nous avons pu rencontrer des collectifs féministes comme Nous toutes et les Dévalideuses, le collectif antifasciste la Jeune Garde, etc. C’est en renforçant ces alliances que nous pourrons nous faire entendre.
Propos recueillis par Mathilde Damecour, chargée de campagne.
Notes
[1] Notre Grand Pari : métamorphoser l’Île-de-France, Alternatiba, octobre 2022, 172 p., 12€
[2] Verdragon a ouvert ses portes en juin 2021 en Seine-Saint-Denis. Son objectif : réunir les habitants des quartiers populaires autour de l’écologie
Comment s’organise Alternatiba Paris ?
Nous luttons grâce à deux piliers : nous dénonçons les responsables politiques et économiques en menant des actions, et nous promouvons les alternatives pour une transition sociale et écologique. Avant 2021 ces deux piliers étaient divisés en deux groupes : les actions de résistance, notamment de désobéissance civile, étaient menées par Action Climat Paris, tandis qu’Alternatiba Paris se chargeait de la promotion des alternatives. Mais depuis 2021 nous sommes réunis à Alternatiba Paris. Nous avons pris cette décision car la lutte que nous menons nécessite d’être efficace.
Notre stratégie passe par quatre grands axes : Résister, cela signifie que nous nous opposons et bloquons le système, notamment capitaliste ; Transformer, c’est-à-dire faire changer les alternatives d’échelle ; Mobiliser, massifier le mouvement, ce que nous avons pu faire avec les marches climat par exemple ; et S’organiser, ce qui passe par la création d’alliances, de réseaux.
Quel « avenir souhaitable » promeut Alternatiba et comment y parvenir ?
Il y a des batailles à mener, notamment celle des imaginaires, c’est-à-dire faire voir d’autres perspectives que celle capitaliste. Pour cela nous avons écrit le livre Notre Grand Pari : métamorphoser l’Île-de-France [1]. Il dresse un état des lieux de la situation en Île-de-France et propose une vision souhaitable et envisageable à horizon 2050.
Pour y parvenir nous nous appuyons sur le triptyque de l’association négaWatt : efficacité, renouvelables, sobriété. Cette dernière ne signifie pas une société de privation, mais une sobriété qui permettrait de satisfaire les besoins essentiels de tous·tes, des générations actuelles et futures, dans le respect des limites planétaires. Pour y parvenir il faut laisser les énergies fossiles dans le sol et éviter les fausses solutions, comme le recours à l’énergie nucléaire.
Dans cet avenir souhaitable il y a également une dimension sociale : démanteler les systèmes d’oppression coloniaux, patriarcaux, racistes, validistes, etc. La méthode que nous promouvons est celle de l’écologie populaire. Nous nous attaquons aux responsables en les nommant et en dénonçant leurs doubles discours. Dans nos actions, il y a une approche non violente, par notre manière de lutte nous souhaitons préfigurer la monde dans lequel nous voulons vivre.
Quelle est la position d’Alternatiba Paris sur le nucléaire ?
Alternatiba Paris est antinucléaire du fait de notre vision politique : le nucléaire est une fausse solution qui ne répond pas à l’urgence climatique, et c’est également une énergie coloniale. Le nucléaire fait partie du package techno-solutioniste pour la « croissance verte ».
Comment abordez-vous cette question au sein d’Alternatiba Paris ?
C’est un sujet technique qui divise, qui polarise les débats. Nous comprenons pourquoi certains collectifs d’activistes pour le climat ne veulent pas prendre position là-dessus. Dans notre stratégie d’écologie populaire c’est l’aspect colonialiste que nous voulons mettre en avant : la reproduction des systèmes de domination colonialiste, comme entre le France et le Niger, ainsi que l’exploitation des corps dans les mines d’uranium. Il y a également la problématique de la ressource en eau : ça ne nous semble pas raisonnable d’investir dans le nucléaire avec tous les impacts environnementaux qui l’accompagnent.
Pour dénoncer cette énergie nous participons à des actions et nous organisons des conférences sur le sujet. Par exemple, nous avons organisé des Rencontres Radicales en octobre, où une formation sur le nucléaire était proposée. Nous nous appuyons sur les travaux d’alliés comme le Réseau "Sortir du nucléaire" ou de Greenpeace pour construire nos réflexions. Enfin, nous soutenons ou relayons les communications d’actions de nos partenaires sur le sujet. À côté, nous menons des campagnes qui promeuvent des alternatives.
Alternatiba Paris a participé à la fermeture du Ministère de la « Trahison » écologique à Paris le 6 novembre 2023, aux côtés de 7 autres associations du mouvement climat dont le Réseau "Sortir du nucléaire". Pourquoi était-ce important pour vous d’y participer ?
Nous avions vraiment la volonté de montrer l’unité du mouvement autour de la question de la justice climatique et du nucléaire. Notre prise de parole avait pour objectif à la fois de dénoncer le nucléaire comme une fausse solution face à l’urgence climatique, qui revêt de plus une dimension coloniale, et également de proposer des alternatives, de mettre en avant la rénovation thermique des bâtiments.
Comment Alternatiba Paris a fait évoluer ses façons de militer depuis sa création ?
Au début, Alternatiba Paris était plus axée sur l’écologie et le climat, puis nous nous sommes ouverts à d’autres sujets à travers les alliances que nous avons tissées. Nous avons participé au mouvement des gilets jaunes, à la création de Verdragon, première maison de l’écologie populaire [2]., à la marche pour le futur, etc.
Cette année nous avons participé aux grèves contre la réforme des retraites, et plus récemment nous avons communiqué sur le conflit israélo-palestinien, et nous prenons part aux mobilisations de soutien à la Palestine.
Quels sont les défis ou obstacles actuels pour une lutte comme la vôtre ? Comment les dépasser ?
Il y a deux obstacles majeurs : d’un côté le gouvernement reste sourd face aux mobilisations, et de l’autre la répression policière est de plus en plus forte, notamment contre les actions de désobéissance civile. Pour faire face à cette dernière nous organisons des formations à la garde à vue, et de défense juridique. Nous menons également des actions innovantes pour déjouer la répression policière et avoir un impact médiatique fort.
Nous pouvons décrire notre objectif de faire changer le système capitaliste comme une montagne que nous gravissons grâce à plein de petites victoires.
Une de nos forces pour dépasser tout ça repose dans le réseau des alliances : à la fois au sein du mouvement climat, mais également en dehors des alliances traditionnelles, comme lors des rencontres radicales. Pendant une semaine avaient lieu des rencontres sur une thématique qui a priori ne rentrait pas dans nos sujets habituels. Nous avons pu rencontrer des collectifs féministes comme Nous toutes et les Dévalideuses, le collectif antifasciste la Jeune Garde, etc. C’est en renforçant ces alliances que nous pourrons nous faire entendre.
Propos recueillis par Mathilde Damecour, chargée de campagne.
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