Bure : c’est dans ce petit village de la Meuse que l’industrie nucléaire veut enfouir ses déchets les plus dangereux, qui resteront radioactifs pendant des centaines de milliers d’années.
31 janvier 2020 |
L’université américaine de l’Ohio a publié une étude sur le conditionnement des déchets nucléaires en grande profondeur. Et cette étude [1] interroge !
Voir Déchets nucléaires : une étude émet des doutes sur le conditionnement
Selon l’auteur principal de l’étude, Xiaolei Guo : "Cela indique que les modèles actuels ne sont peut-être pas suffisants pour garantir la sûreté du stockage de ces déchets". Il semble que certains paramètres de taille ne soient pas pris en compte dans les recherches. En stockage profond, l’eau remplira toujours les vides, ce qui accélèrerait la corrosion de l’acier, en provoquant la dégradation du verre et le risque de libération des éléments radioactifs.
A quelques mois du dépôt de sa demande de création de Cigéo, que va répondre l’Andra ? L’Agence affichait, à son habitude, des certitudes quasi "magiques" lors de ses voeux (27/01 2020). Droite dans ses bottes, elle continue de "cadrer, consolider et démontrer", et elle prépare activement son dossier de demande de feu vert à Cigéo (DAC).
Où que ce soit dans le monde, le projet d’enfouissement bute sur l’emballage : idem en Suède
Le projet de stockage géologique de Forsmark, vanté comme le plus avancé, a été stoppé début 2018. Son dossier de demande de lancement a été recalé. Raison ? Une histoire de corrosion. Le cuivre utilisé ne retiendrait pas longtemps la radioactivité. Rapport après rapport, SKB (Andra suédoise) n’arrive pas à prouver que la sûreté du site serait assurée. Le gouvernement suédois a bloqué le processus et attend... d’hypothétiques réponses.
La France doit cesser d’engloutir des fonds en recherche inutile. Le stockage géologique n’est pas la solution pour les déchets nucléaires les plus dangereux. Cigéo accumule les retards : les premiers colis devaient initialement arriver en 2025/2030. L’Andra annonce aujourd’hui le début du chantier vers 2025. Les enfouisseurs de déchets nucléaires savent très bien que cette voie est sans issue.
Cigéo se résumera-t-il à la "phase pilote" annoncée, soit une seule et énorme opération de BTP à Bure ? Cette fumeuse étape engloutirait en 5 ans l’ensemble des réserves financières disponibles (7 MDS €) pour gérer les déchets (HA-MAVL). Elle engagerait la construction de toutes les infrastructures lourdes de Cigéo... sans gérer aucun déchet. Un chantier phénoménal destiné à poursuivre l’illusion que le nucléaire sait gérer ses déchets, peut prolonger ses vieilles centrales et construire de nouveaux réacteurs...
Enfin, quelle marge de manoeuvre laisserions-nous à nos descendants ?
A ce niveau d’inconséquence financière ou de cynisme politique, on est en droit d’exiger toute la transparence sur un projet qui concerne avant tout un territoire vivant. Sa population a toute légitimité lorsqu’elle conteste ce projet destructeur et demande à participer aux choix en cours et à venir. Elle mérite respect et considération, aux antipodes de l’inquiétante création locale d’une zone de non-droit, vantée récemment par l’Andra [2].
[1] EXTRAIT : la corrosion du verre ou de la céramique utilisés pour confiner ces déchets est “accélérée de façon significative” dans certaines conditions. “C’est inattendu. Jusqu’à présent, on considérait que l’acier inoxydable était inerte, qu’il finirait par s’oxyder malgré son nom, mais que vis-à-vis du verre qui contient les radioéléments il ne jouait aucun rôle”, a expliqué un des auteurs de l’étude Stéphane Gin, chercheur au Commissariat à l’énergie atomique (CEA) en France.
[2] Pierre-Marie Abadie (directeur général de l’Andra) a aussi eu un mot sur le travail des forces publiques, « ce sont eux qui ont rétabli l’ordre public localement , [.. .] ce n’est pas parce que l’année 2019 a été calme qu’il faut oublier l’effort que ça a représenté ». Est Republicain 28/01 2020
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