Le 8 juillet 2024, des associations d’experts et de protection de l’environnement se sont alliées pour déposer un recours contre la mise en service de l’EPR de Flamanville.
Malgré de nombreux problèmes techniques, un coût qui a doublé et un délai de mise en service largement dépassé, l’ASN a autorisé la mise en service de l’EPR de Flamanville le 7 mai 2024. Cette décision a permis à EDF d’engager le chargement des 241 assemblages de combustible nucléaire. Cette décision, problématique sur le plan éthique et politique, qui intervient précipitamment au vu des incidents et des récentes découvertes de falsifications de certaines pièces soulève aussi des problèmes juridiques.
Le 8 juillet 2024, les associations « Commission de Recherche et d’Information Indépendantes sur la Radioactivité » (CRIIRAD), « Comité de Réflexion, d’Information et de lutte Anti-Nucléaire » (CRILAN), Global Chance, Greenpeace, Robins des Bois, et le Réseau "Sortir du nucléaire" ont déposé, ensemble, un recours contre cette décision de l’ASN.
Une mise en service pressée par le temps
Le 7 mai 2024, l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a donné son accord pour que l’EPR de Flamanville soit mis en service, c’est-à-dire pour qu’il reçoive son premier chargement de combustible. Une décision prise avant tout pour éviter les conséquences juridiques d’un énième report. En effet, la mise en service de l’EPR de Flamanville a déjà été repoussée par décret deux fois par le passé, en 2017 et en 2020, car l’installation n’était pas prête à démarrer.
On aurait pu penser que ces deux reports allaient fournir à EDF une marge confortable pour s’assurer que son installation pourrait démarrer sans risque en 2024. Pourtant, malgré les délais supplémentaires accordés à l’exploitant, celui-ci n’a pas réussi à mettre en service l’EPR de Flamanville dans les temps impartis :
La mise en service du réacteur nucléaire aurait dû intervenir avant le 10 avril 2024, d’après le décret d’autorisation de création. Elle est finalement intervenue près d’un mois après, le 7 mai 2024. Problème : les délais de mise en service existent pour protéger la population et l’environnement d’un projet devenu trop ancien. C’est l’ASN elle-même qui indiquait dans un avis que ces délais visent à "éviter la mise en service d’une installation dont l’environnement ne serait plus compatible avec le fonctionnement et/ou à ne pas laisser perdurer l’autorisation de création d’une installation dont l’exploitant ne serait pas en mesure d’achever la construction".
Le délai d’instruction de la demande de mise en service, d’une durée d’un voire deux ans si le dossier est complexe, n’a pas été respecté non plus. Le dossier de mise en service de l’EPR a été déposé par EDF en 2021 auprès des services de l’ASN, qui avaient jusqu’au 7 mai 2023 pour instruire le dossier. Mais la complexité de ce dernier et les problèmes techniques du chantier ont poussé l’ASN à s’octroyer un délai supplémentaire d’un an – contrairement à ce qui est autorisé par le code de l’environnement. Avec ce nouveau délai, elle avait jusqu’au 7 mai 2024 pour instruire le dossier, sans quoi une décision tacite de rejet de la demande d’autorisation de mise en service déposée par EDF intervenait .
C’est à la lumière de ce contexte que nous comprenons que la mise en service de l’EPR de Flamanville est intervenue non pas parce que l’installation était prête à accueillir du combustible mais pour des raisons juridiques et sous la contrainte de délais très serrés : malgré les multiples retards et reports qu’a connus l’EPR de Flamanville, c’est bien dans la précipitation que s’est faite cette mise en service.
Une actualisation de l’évaluation environnementale lacunaire
EDF a réalisé une évaluation environnementale pour analyser les impacts de l’EPR de Flamanville au moment de sa demande d’autorisation de création en 2007. Cette évaluation environnementale n’avait depuis fait l’objet d’aucune actualisation alors que le chantier avait subi de nombreux déboires et que l’EPR a du s’adapter en conséquence.
Pour la mise en service, EDF a enfin actualisé cette étude d’impact, sauf que l’actualisation ne porte que sur la recherche des « incidences de la phase de mise en service de l’installation, à l’échelle globale du réacteur 3. »
Ainsi, et alors que le III de l’article L 122-1-1 impose l’actualisation de l’étude d’impact dès lors qu’existent des incidences sur l’environnement qui n’avaient pas pu être complètement identifiées ni appréciées avant l’octroi de la première autorisation, l’actualisation n’a porté strictement que sur la mise en service du réacteur.
L’actualisation de l’évaluation des incidences sur l’environnement doit être menée à l’échelle globale du projet de l’EPR, et non en se focalisant sur la seule opération de mise en service qui exclut un bilan de la phase chantier. Le bilan de cette phase aurait du permettre au public de mieux comprendre les incidences sur l’environnement de ces 17 années de chantier, alors que l’étude d’impact initiale promettait un chantier de 5 années.
Par ailleurs, il est évident que les exigences réglementaires pesant sur l’étude d’impact étaient moindres en 2007. Un certain nombre d’incidences n’ont donc pas été évaluées parce que leur évaluation n’était pas imposée.
On ne saurait donc circonscrire l’actualisation de l’étude d’impact aux seuls impacts de la mise en service du réacteur sans dénaturer les textes. L’échelle globale du projet est celle de la construction du réacteur EPR dont la mise en service n’est qu’une étape.
Nos associations ont donc saisi le Conseil d’État le 8 juillet 2024 pour contester cette décision précipitée et non conforme au droit de l’environnement.
Téléchargez le recours
Malgré de nombreux problèmes techniques, un coût qui a doublé et un délai de mise en service largement dépassé, l’ASN a autorisé la mise en service de l’EPR de Flamanville le 7 mai 2024. Cette décision a permis à EDF d’engager le chargement des 241 assemblages de combustible nucléaire. Cette décision, problématique sur le plan éthique et politique, qui intervient précipitamment au vu des incidents et des récentes découvertes de falsifications de certaines pièces soulève aussi des problèmes juridiques.
Le 8 juillet 2024, les associations « Commission de Recherche et d’Information Indépendantes sur la Radioactivité » (CRIIRAD), « Comité de Réflexion, d’Information et de lutte Anti-Nucléaire » (CRILAN), Global Chance, Greenpeace, Robins des Bois, et le Réseau "Sortir du nucléaire" ont déposé, ensemble, un recours contre cette décision de l’ASN.
Une mise en service pressée par le temps
Le 7 mai 2024, l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a donné son accord pour que l’EPR de Flamanville soit mis en service, c’est-à-dire pour qu’il reçoive son premier chargement de combustible. Une décision prise avant tout pour éviter les conséquences juridiques d’un énième report. En effet, la mise en service de l’EPR de Flamanville a déjà été repoussée par décret deux fois par le passé, en 2017 et en 2020, car l’installation n’était pas prête à démarrer.
On aurait pu penser que ces deux reports allaient fournir à EDF une marge confortable pour s’assurer que son installation pourrait démarrer sans risque en 2024. Pourtant, malgré les délais supplémentaires accordés à l’exploitant, celui-ci n’a pas réussi à mettre en service l’EPR de Flamanville dans les temps impartis :
La mise en service du réacteur nucléaire aurait dû intervenir avant le 10 avril 2024, d’après le décret d’autorisation de création. Elle est finalement intervenue près d’un mois après, le 7 mai 2024. Problème : les délais de mise en service existent pour protéger la population et l’environnement d’un projet devenu trop ancien. C’est l’ASN elle-même qui indiquait dans un avis que ces délais visent à "éviter la mise en service d’une installation dont l’environnement ne serait plus compatible avec le fonctionnement et/ou à ne pas laisser perdurer l’autorisation de création d’une installation dont l’exploitant ne serait pas en mesure d’achever la construction".
Le délai d’instruction de la demande de mise en service, d’une durée d’un voire deux ans si le dossier est complexe, n’a pas été respecté non plus. Le dossier de mise en service de l’EPR a été déposé par EDF en 2021 auprès des services de l’ASN, qui avaient jusqu’au 7 mai 2023 pour instruire le dossier. Mais la complexité de ce dernier et les problèmes techniques du chantier ont poussé l’ASN à s’octroyer un délai supplémentaire d’un an – contrairement à ce qui est autorisé par le code de l’environnement. Avec ce nouveau délai, elle avait jusqu’au 7 mai 2024 pour instruire le dossier, sans quoi une décision tacite de rejet de la demande d’autorisation de mise en service déposée par EDF intervenait .
C’est à la lumière de ce contexte que nous comprenons que la mise en service de l’EPR de Flamanville est intervenue non pas parce que l’installation était prête à accueillir du combustible mais pour des raisons juridiques et sous la contrainte de délais très serrés : malgré les multiples retards et reports qu’a connus l’EPR de Flamanville, c’est bien dans la précipitation que s’est faite cette mise en service.
Une actualisation de l’évaluation environnementale lacunaire
EDF a réalisé une évaluation environnementale pour analyser les impacts de l’EPR de Flamanville au moment de sa demande d’autorisation de création en 2007. Cette évaluation environnementale n’avait depuis fait l’objet d’aucune actualisation alors que le chantier avait subi de nombreux déboires et que l’EPR a du s’adapter en conséquence.
Pour la mise en service, EDF a enfin actualisé cette étude d’impact, sauf que l’actualisation ne porte que sur la recherche des « incidences de la phase de mise en service de l’installation, à l’échelle globale du réacteur 3. »
Ainsi, et alors que le III de l’article L 122-1-1 impose l’actualisation de l’étude d’impact dès lors qu’existent des incidences sur l’environnement qui n’avaient pas pu être complètement identifiées ni appréciées avant l’octroi de la première autorisation, l’actualisation n’a porté strictement que sur la mise en service du réacteur.
L’actualisation de l’évaluation des incidences sur l’environnement doit être menée à l’échelle globale du projet de l’EPR, et non en se focalisant sur la seule opération de mise en service qui exclut un bilan de la phase chantier. Le bilan de cette phase aurait du permettre au public de mieux comprendre les incidences sur l’environnement de ces 17 années de chantier, alors que l’étude d’impact initiale promettait un chantier de 5 années.
Par ailleurs, il est évident que les exigences réglementaires pesant sur l’étude d’impact étaient moindres en 2007. Un certain nombre d’incidences n’ont donc pas été évaluées parce que leur évaluation n’était pas imposée.
On ne saurait donc circonscrire l’actualisation de l’étude d’impact aux seuls impacts de la mise en service du réacteur sans dénaturer les textes. L’échelle globale du projet est celle de la construction du réacteur EPR dont la mise en service n’est qu’une étape.
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