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N’en déplaise à Orano, le nucléaire n’est pas l’ami du climat !


Victoires / Installation : Orano


À la radio, au cinéma, dans les suppléments féminins de la presse régionale... ces derniers mois, Orano nous a bombardés de publicités vantant les mérites du nucléaire et notamment ses faibles émissions de CO2. Avec cette communication, l’entreprise cherche-t-elle à améliorer l’acceptabilité sociale d’une technologie dangereuse et polluante pour préparer le terrain pour de futurs nouveaux réacteurs ?

Le Réseau “Sortir du nucléaire“ a porté plainte devant le Jury de déontologie publicitaire pour dénoncer cette campagne fallacieuse.



Une communication fallacieuse sur les émissions du nucléaire

« Hé non, on ne réchauffe pas la planète ! », « Pour faire du nucléaire avec du CO2, il va falloir charbonner »… voilà les messages diffusés par Orano à l’occasion d’une campagne de publicité massive et sur son site dénommé « idées reçues ». De nouveau, l’industrie nucléaire joue sur l’idée fausse d’un nucléaire « décarboné » et donc ami du climat.

Cette communication passe outre le fait que les installations nucléaires émettent bien des gaz à effet de serre – dont certains ont d’ailleurs un pouvoir de réchauffement bien supérieur à celui du CO2 [1].

Surtout, en focalisant sur ses émissions peu élevées de CO2, Orano tente de verdir son image, passant ainsi sous silence le risque d’accident, la pollution des mines d’uranium et la production de déchets (dont seule une infime partie est « recyclée », contrairement à ce qu’elle prétend dans une autre publicité [2]). Pour le Groupement Intergouvernemental d’Experts sur le Climat (GIEC), ces nuisances vont d’ailleurs à l’encontre des Objectifs de Développement Durable [3]

Orano n’a rien à vendre aux citoyen.es. Pourquoi ce greenwashing massif à destination du grand public, si ce n’est pour améliorer l’acceptabilité sociale du nucléaire en surfant sans complexe sur la légitime préoccupation pour le climat ? S’agit-il de préparer le terrain, alors que les projets pour 6 nouveaux réacteurs sont dans les cartons ?

Pour dénoncer cette communication fallacieuse, nous déposons plainte devant le Jury de déontologie publicitaire, qui a d’ailleurs condamné plusieurs fois EDF pour des publicités de même teneur [4].

Le nucléaire, une fausse solution pour le climat

Pour Orano, une industrie peu émettrice de gaz à effet de serre est forcément une alliée du climat. Pourtant, comme l’explique le World Nuclear Industry Status Report [5], cela ne suffit pas pour attester la pertinence d’une technologie pour réduire les émissions. Celle-ci doit aussi pouvoir être déployée rapidement et à des coûts non prohibitifs. Or, comme l’illustrent les retards et surcoûts de l’EPR de Flamanville, le nucléaire est hors délai face à l’urgence climatique et bien trop cher.

Investir dans de nouveaux réacteurs – voire dans des travaux hasardeux de prolongation du fonctionnement de centrales en fin de vie - revient à gaspiller des moyens financiers qui font défaut aux vraies solutions plébiscitées par le GIEC, à savoir les économies d’énergie et les énergies renouvelables.

En France, mettre en avant le nucléaire et ses émissions apparaît comme un alibi pour l’inaction, notre pays étant très en retard sur ses objectifs climatique. Mais encenser une option technologique, comme le font Orano et Emmanuel Macron, n’est-ce pas une façon d’esquiver la question du changement de système de production et de consommation requis pour une action climatique ambitieuse ?

Le Jury de déontologie publicitaire a examiné l’affaire le 6 mars 2020 [6] et a publié son avis le 4 mai 2020.

Le Jury reconnaît la plainte du Réseau comme totalement fondée et relève notamment que "l’allégation « nucléaire : eh non, on ne réchauffe pas la planète », en ce qu’elle n’est pas relativisée et suggère une absence totale d’impact négatif, n’exprime pas avec justesse les conséquences de la production d’énergie nucléaire. La publicité est donc de nature à induire le public en erreur sur la réalité écologique des actions de l’annonceur".

 

Téléchargez notre plainte
Orano carbone - Plainte JDP 16/01/20

Notes

[1Le raffinage du concentré de minerai d’uranium effectué à l’usine d’Orano Malvési émet d’importantes quantités de protoxyde d’azote (N2O), au pouvoir de réchauffement global 265 fois supérieur à celui du CO2. Par ailleurs, l’Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire indique que les deux types d’évènements qui ressortent de l’analyse des déclarations d’EDF en matière d’évènement significatif pour l’environnement (ESE) sont les événements liés à la maîtrise des rejets et les événements liés aux gaz à effet de serre. Pour ce qui concerne les gaz à effet de serre, les émissions de fluides frigorigènes contenus dans les groupes frigorifiques constituent la source principale des déclarations d’ESE par EDF.Les fuites d’hexafluorure de souffre, utilisé comme isolant électrique, n’étaient quant à elles l’objet d’aucune déclaration d’évènement significatif pour l’environnement jusqu’à 2018, alors que le pouvoir de réchauffement global de ce gaz est 22 800 fois supérieur à celui du CO2

[2Cette publicité a fait l’objet d’une autre plainte devant le Jury de déontologie publicitaire, déposée par Greenpeace et le Réseau "Sortir du nucléaire"

[3Voir le chapitre 5 du rapport spécial sur les 1,5°C de réchauffement. Voir notre analyse sur le rôle du nucléaire dans ce rapport.

[4Condamnations pour une publicité sur une électricité "sans CO2" en Alsace, pour la publicité d’EDF "The Race"...

[5Voir notamment le chapitre "Climate Change and Nuclear Power"

[6Compte-rendu audience JDP Orano carbone et GES :

Plainte Rézo + deux plaintes de deux citoyens.

 Les publicités attaquées

1 – La publicité diffusée par Orano SA sur Internet intitulée « Idées reçues » Sur le site Internet d’Orano SA1, page intitulée « Idées reçues » qui porte sur le nucléaire, le carbone et les gaz à effet de serre (GES). Nous pouvons notamment lire, en haut de page, en majuscules et en gras, « Pour faire du CO2 avec du nucléaire, il va falloir charbonner » et en plus petit, mais toujours en majuscules, « Le nucléaire émet 40 fois moins de CO2 que le gaz et même 70 fois moins que le charbon ».

2 – Les publicités diffusées par Orano SA dans la presse papier telles que celle parue dans Femina entre le 18 et le 24 novembre 2019 intitulée « nucléaire : eh non, on ne réchauffe pas la planète » Sur fond jaune, en dessous du titre écrit en gros et gras, cette page présente un dessin représentant deux tours de refroidissement de centrale nucléaire desquelles s’échappe un nuage blanc. Sous ce dessin, il est indiqué « La preuve : selon les chiffres du GIEC*, le nucléaire émet 40 fois moins de CO2 que le gaz ».

 Sur la violation des règles déontologiques publicitaires par les publicités d’Orano

• * Sur la véracité des actions (Point 1 de la Recommandation DD), la présentation honnête et véridique (Article E1 du Code ICC) et la minimisation des conséquences pour l’environnement (Point 9 de la Recommandation DD)
 Lorsqu’Orano met en avant l’énergie nucléaire comme peu émettrice de gaz à effet de serre, elle induit le public en erreur sur les propriétés de celle-ci et exploite son manque de connaissance en la matière = cf avis IRSN du 21 mai 2019 qui analyse trois années de déclarations d’évènements significatifs dans le nucléaire (2015, 2016, 2017) indique que les évènements liés aux gaz à effet de serre sont l’une des deux principales causes de déclaration d’évènement significatif pour l’environnement (ESE) en matière nucléaire. Emissions de SF6 (l’hexafluorure de soufre) sont seulement depuis 2018 soumises aux déclarations d’ESE. Donc pas prises en compte dans les déclarations analysées par l’IRSN dans cet avis. Le SF6 est pourtant l’un des six types de gaz à effet de serre visés par le protocole de Kyoto. Son potentiel de réchauffement global est 22 800 fois supérieur à celui du CO2.
 Par ailleurs, la formulation « Grâce au nucléaire, la France a déjà atteint les objectifs fixés par le protocole de Kyoto en termes d’émissions de CO2 » est trompeuse dans la mesure où elle sous-entend que l’atteinte de ces objectifs est à mettre sur le compte du seul nucléaire. Or la réduction des émissions survenue en France depuis 1990 résulte de différents facteurs et principalement de la désindustrialisation et délocalisation hors de France d’industries polluantes. Et cette référence au protocole de Kyoto est trompeuse dans la mesure où elle pourrait laisser entendre que le nucléaire fait partie des mécanismes de réduction des émissions reconnus au titre de cet accord. Or, le nucléaire a été explicitement exclu des mécanismes de Kyoto.
 La formulation « 95 % d’électricité décarbonée en France » peut être interprétée par le grand public comme signifiant que la quasi totalité de l’électricité produite en France n’implique aucune émission de dioxyde de carbone. Il en est de même, concernant la publicité parue dans la presse papier, et notamment Femina, qui met en avant l’affirmation « nucléaire : eh non, on ne réchauffe pas la planète ». Or, il est constant que la production d’énergie, quelle qu’elle soit, implique nécessairement de tels dégagements gazeux. Le JDP avait d’ailleurs estimé, dans son avis n° 373/15 "EDF Alsace" que « la publicité en faveur de l’énergie nucléaire doit veiller à lever toute ambiguïté quant à ses incidences environnementales... et qu’elle ne saurait suggérer que ces émissions sont nulles ».
 Orano pose ici le nucléaire en champion de la lutte contre le changement climatique alors que ce dernier n’apporte qu’une contribution médiocre à la réduction des émissions de gaz à effet de serre et qu’il bloque le développement des vraies solutions. Et le nucléaire génère d’importantes nuisances environnementales autres, que le GIEC lui-même considère comme des impacts négatifs au regard des Objectifs de Développement Durable (ODD) : rejets quotidiens chimiques et radioactifs, déchets radioctifs, risques de catastrophe... Dans ces conditions, les publicités en cause sont susceptibles d’induire le public en erreur sur les propriétés de l’énergie nucléaire, en méconnaissance du Point 1 de la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP, de l’article E1 du Code ICC et du Point 9 de la même Recommandation, selon lequel « la publicité doit éviter, dans son discours, de minimiser les conséquences de la consommation de certains produits ou services susceptibles d’affecter l’environnement ».

• * Sur la proportionnalité du message (Point 2 de la Recommandation DD) Dans sa publicité parue dans la presse papier « nucléaire : eh non, on ne réchauffe pas le climat » et en indiquant sur son site Internet « Idées reçues » que « Pour faire du CO2 avec du nucléaire, il va falloir charbonner » et que « Pourtant, d’après une récente étude BVA pour Orano (2019), 69% des Français pensent que le nucléaire produit du CO2 et contribue au dérèglement climatique. Cette idée est fausse : au contraire, l’énergie nucléaire fait partie des solutions pour diminuer nos émissions de gaz à effet de serre (GES). », Orano laisse entendre que le nucléaire n’aurait pas d’impact négatif sur le climat, voire aurait un impact favorable sur celui-ci. Or, il est constant que la production d’énergie, quelle qu’elle soit, implique nécessairement des dégagements de CO2 et de gaz à effet de serre qui ont un impact sur le climat, y compris concernant le nucléaire. En outre, si la production électrique en tant que telle peut être qualifiée de moins émettrice de CO2 que d’autres formes de production d’énergie, on peut s’interroger sur ce qu’il en est concernant l’ensemble de la chaîne nucléaire (de l’extraction du minerai à la gestion des déchets). De plus, le nucléaire génère d’autres formes de pollution dont il est totalement fait fi dans ces publicités : des pollutions quotidiennes (rejets chimiques et radioactifs, gazeux et liquides, dans l’environnement) ainsi que des milliers de tonnes de déchets radioactifs produits chaque année, en France, dont on ne sait que faire. Et les conséquences sanitaires et environnementales d’un accident nucléaire de type Fukushima ou Tchernobyl seraient dramatiques. Enfin, l’usine de retraitement des combustibles usés exploitée aujourd’hui par Orano à La Hague (France) est l’une des installations les plus polluantes sur le plan radiologique. Elle rejette en particulier dans l’atmosphère de très grandes quantités d’un gaz radioactif, le krypton 85 conduisant à multiplier par 60 la radioactivité moyenne annuelle de l’air dans les villages voisins. De manière générale, les émissions totales du groupe Orano s’élevaient en 2018 à plus de 260 000 tonnes équivalent CO2. Dans ces conditions, les publicités en cause ne sont pas proportionnées à l’ampleur des actions menées par l’annonceur en matière de développement durable ainsi qu’aux propriétés du produit dont il fait la promotion et ne saurait suggérer une absence totale d’impact négatif. Elle méconnaît ainsi le Point 2 de la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP.

• * Sur la clarté du message (Point 3 de la Recommandation DD) Les nombreux chiffres et affirmations présentées par Orano dans ses publicités ne sont pour la plupart pas sourcés, ni explicités. Par exemple, sur l’affirmation « le nucléaire émet 40 fois moins de CO2 que le gaz et même 70 fois moins que le charbon », il n’est pas précisé si ces chiffres portent sur l’ensemble du cycle de vie du nucléaire ou seulement sur la phase production. Il en est de même pour l’ensemble des chiffres avancés en la matière sur la page Internet « Idées reçues » et sur la publication « nucléaire : eh non, on ne réchauffe pas la planète ». Dans son avis n° 385/15 "EDF", le JDP observait « que le pourcentage de 98 % est totalement dépourvu d’explication ou de renvoi qui permettrait au public auquel ce slogan s’adresse de comprendre à quoi se réfère cette donnée et ce qu’elle contient. (...) ». Ainsi, l’absence d’explicitation des chiffres et données mis en avant par Orano dans ses publicités est contraire au Point 3 de la Recommandation « Développement durable ».

• * Sur le vocabulaire du message (Point 6 de la Recommandation DD) En l’espèce, les affirmations telles que « nucléaire : eh non, on ne réchauffe pas la planète » et « 95% d’électricité décarbonnée en France » induisent le public en erreur sur l’impact du recours à l’énergie nucléaire comme source de production électrique sur le climat et la planète pour toutes les raisons précédemment évoquées. Au vu du point 6.3, les formulations « nucléaire : eh non, on ne réchauffe pas la planète » et « 95% d’électricité décarbonnée » devraient être relativisées. Enfin, les expressions « décarbonnée » et « on ne réchauffe pas la planète » traduisent indument une absence d’impact négatif en ce qui concerne les activités nucléaires, contrairement à ce que recommande le point 6.4. Dans ces conditions, la publicité en cause méconnait le Point 6 de la Recommandation DD de l’ARPP.

Orano : Accusations très graves que nous prenons très au sérieux. Dépasse le champ de ce Jury. Procès d’une filière. Cautionner une assimilation entre réchauffement climatique et nucléaire, c’est dangereux. Orano est un acteur de l’énergie. Incendies en Australie / Mer de Glace. Prise de conscience au niveau mondial du réchauffement. Accord de Paris de 2015 sur le climat. Publication de 2018 du GIEC = sonnette d’alarme. On ne respectera pas l’objectif d’1,5°. Il faut faire appel aux technologies bas carbone pour lutter contre le réchauffement climatique. Etude BVA : pour beaucoup de français, le nucléaire contribue au dérèglement. Pas un calcul sur le CO2 uniquement mais sur l’équivalent CO2. Calcul sur l’ensemble du cycle de vie. Energies carbonées et énergies bas carbone (solaire, hydrolique, nucléaire, éolien). Ces dernières contribuent à régler le problème. Il faut lutter contre l’amalgame entre la lutte contre le réchauffement climatique et la lutte contre le nucléaire. Message est simple. Image bonne = pas du CO2, mais de la vapeur d’eau. Exclue du champ de la comptabilité carbone. Image proportionnée et objectivée en utilisant la référence au GIEC.

JDP : Vous parlez d’énergie bas carbone, cela signifie donc que le nucléaire en produit un peu tout de même et donc que vous réchauffez un peu la planète ?

Orano : La formulation est couplée avec l’image des tours de refroidissement. Lutter contre la perception des français. Ce n’est pas parce que ça dégage de la vapeur d’eau que réchauffement.

Femina : On est simplement support donc on ne comprend pas sur quoi on est poursuivi. La pub présente les choses de la meilleure manière possible. Je suis choquée par l’utilisation qui est faite de votre Jury à des fins militantes.

JDP : Ne vous inquiétez pas, ça va bien se passer.

Rézo : Vous utilisez la sémantique scientifique pour donner de la crédibilité à vos propos qui sont de la pure com et ne reposent pas sur des vérités scientifiques. Votre affirmation "Nous ne réchauffons pas la planète" est fausse : si, vous la réchauffez un peu tout de même. De plus, vous utilisez un visuel qui ne correspond pas à l’activité que vous faites : la production d’électricité est du fait d’EDF. C’est sur Orano que repose le plus lourd bilan carbone de la flilière. Ce qui compte ici, c’est la perception du public. Or, quand vous dites "nucléaire, eh non, on ne réchauffe pas la planète", le grand public ne se dit pas : ah oui, ils parlent seulement des tours de refroidissement des centrales et non de toute la filière".

JDP : pourquoi ne reprenez-vous pas le chiffre de l’ADEME plutôt que le GIEC ? 1er GES = la vapeur d’eau.

Citoyen : Les tours de refroidissement dégagent de la chaleur. Consommation d’énergie primaire. Plus de 40% de l’énergie primaire sur transforme en chaleur. Analyses du cycle de vie = données sur les émissions de CO2 équivalent. Fourchettes très importantes pour le nucléaire. En utilisant la valeur médiane, vous trompez le public. Le GIEC ne fait pas d’analyse. Il utilise des données collectées par d’autres. ACV = études technico-économiques.

Orano : Analyse de l’ADEME = vapeur d’eau d’origine humaine ne veut pas dire que réchauffe la planète. Jancovici = ne contribue pas. Le nuage de vapeur d’eau émis par les tours est bénin.

JDP : Choix du visuel des tours de refroidissement reposait sur des pré-tests. Des post-tests ont-ils été effectués ?

Orano : Non

JDP : C’est dommage.

Un projet d’avis sera communiqué d’ici 2 à 3 semaines. Si les parties ne sont pas d’accord avec ce projet, il est possible de demander leur modification auprès du réviseur. Puis l’avis définitif sera publié.

Une communication fallacieuse sur les émissions du nucléaire

« Hé non, on ne réchauffe pas la planète ! », « Pour faire du nucléaire avec du CO2, il va falloir charbonner »… voilà les messages diffusés par Orano à l’occasion d’une campagne de publicité massive et sur son site dénommé « idées reçues ». De nouveau, l’industrie nucléaire joue sur l’idée fausse d’un nucléaire « décarboné » et donc ami du climat.

Cette communication passe outre le fait que les installations nucléaires émettent bien des gaz à effet de serre – dont certains ont d’ailleurs un pouvoir de réchauffement bien supérieur à celui du CO2 [1].

Surtout, en focalisant sur ses émissions peu élevées de CO2, Orano tente de verdir son image, passant ainsi sous silence le risque d’accident, la pollution des mines d’uranium et la production de déchets (dont seule une infime partie est « recyclée », contrairement à ce qu’elle prétend dans une autre publicité [2]). Pour le Groupement Intergouvernemental d’Experts sur le Climat (GIEC), ces nuisances vont d’ailleurs à l’encontre des Objectifs de Développement Durable [3]

Orano n’a rien à vendre aux citoyen.es. Pourquoi ce greenwashing massif à destination du grand public, si ce n’est pour améliorer l’acceptabilité sociale du nucléaire en surfant sans complexe sur la légitime préoccupation pour le climat ? S’agit-il de préparer le terrain, alors que les projets pour 6 nouveaux réacteurs sont dans les cartons ?

Pour dénoncer cette communication fallacieuse, nous déposons plainte devant le Jury de déontologie publicitaire, qui a d’ailleurs condamné plusieurs fois EDF pour des publicités de même teneur [4].

Le nucléaire, une fausse solution pour le climat

Pour Orano, une industrie peu émettrice de gaz à effet de serre est forcément une alliée du climat. Pourtant, comme l’explique le World Nuclear Industry Status Report [5], cela ne suffit pas pour attester la pertinence d’une technologie pour réduire les émissions. Celle-ci doit aussi pouvoir être déployée rapidement et à des coûts non prohibitifs. Or, comme l’illustrent les retards et surcoûts de l’EPR de Flamanville, le nucléaire est hors délai face à l’urgence climatique et bien trop cher.

Investir dans de nouveaux réacteurs – voire dans des travaux hasardeux de prolongation du fonctionnement de centrales en fin de vie - revient à gaspiller des moyens financiers qui font défaut aux vraies solutions plébiscitées par le GIEC, à savoir les économies d’énergie et les énergies renouvelables.

En France, mettre en avant le nucléaire et ses émissions apparaît comme un alibi pour l’inaction, notre pays étant très en retard sur ses objectifs climatique. Mais encenser une option technologique, comme le font Orano et Emmanuel Macron, n’est-ce pas une façon d’esquiver la question du changement de système de production et de consommation requis pour une action climatique ambitieuse ?

Le Jury de déontologie publicitaire a examiné l’affaire le 6 mars 2020 [6] et a publié son avis le 4 mai 2020.

Le Jury reconnaît la plainte du Réseau comme totalement fondée et relève notamment que "l’allégation « nucléaire : eh non, on ne réchauffe pas la planète », en ce qu’elle n’est pas relativisée et suggère une absence totale d’impact négatif, n’exprime pas avec justesse les conséquences de la production d’énergie nucléaire. La publicité est donc de nature à induire le public en erreur sur la réalité écologique des actions de l’annonceur".

 

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Orano carbone - Plainte JDP 16/01/20

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Thèmes
 Nucléaire et climat  Orano