"EDF évalue désormais à 67,4 milliards d’euros le coût de construction prévisionnel des six réacteurs EPR2 commandés par les pouvoirs publics". On imagine sans mal quelle pourrait être la réaction de notre président de la République : "qui aurait pu prédire" de tels dépassements de coûts ? Le Réseau "Sortir du nucléaire" fournit quelques éléments de réponse.
EDF avait prédit
En juin dernier, dans ses Réponses au débat public sur la construction d’EPR2, EDF assumait déjà qu’il faudrait envisager "les conditions d’un partage des risques, notamment le risque d’éventuels dépassements des coûts résultant du non-respect des délais" [1]. Tout était déjà dit ! L’estimation des coûts était par ailleurs annoncée "overnight", c’est-à-dire "correspondant à une situation où il serait possible d’acheter et de construire instantanément sans coût de financement ("en une seule nuit") l’ensemble du programme des trois paires de réacteurs EPR2." [2] Or, les réacteurs nucléaires ont, à l’échelle mondiale, quasi systématiquement plusieurs années de retard sur leur planning prévisionnel de construction et de raccordement [3]. En France, l’EPR de Flamanville a, pour sa part, accumulé 12 ans de retard et n’est toujours pas en fonctionnement. Et les réacteurs EPR2 sont déjà en train d’en prendre.
Par ailleurs, à ce stade, cette estimation du coût n’intègre pas les coûts de financement. Alors que le gouvernement fait des pieds et des mains pour s’assurer d’autres sources de financement que les maigres fonds d’EDF pour ces projets de réacteurs EPR2 et que les taux d’intérêt s’envolent, c’est extrêmement préoccupant.
D’autres coûts ne sont par ailleurs pas évoqués, comme ceux de la gestion des déchets des potentiels futurs EPR2 (le projet Cigéo a été dimensionné sans les prendre en compte) ou encore ceux de la remise à niveau de toute la filière d’approvisionnement en uranium.
Mais qui aurait pu prédire ?
Les associations écologistes avaient prédit
Le Réseau "Sortir du nucléaire" a documenté la situation de l’EPR de Flamanville tout au long de ces longues et laborieuses années de construction. Il y a un an, nous alertions sur le risque que les livrets A des Français·es soient mis à contribution pour financer de nouveaux réacteurs nucléaires.
En juillet 2023, l’association "Agir pour l’environnement" avait consacré toute une partie d’un rapport à la sous-évaluation systématique du coût des réacteurs nucléaires en France.
Mais qui aurait pu prédire ?
L’histoire avait prédit... et l’actualité lui donne raison
Les coûts du nucléaire s’envolent, et cela depuis longtemps. Les coûts de construction des réacteurs EPR de la centrale d’Hinkley Point ont doublé, ceux du réacteur EPR de Flamanville ont été multipliés par six. Et il en est de même pour les coûts de production. Le coût de production du MWh du nouveau nucléaire à l’échelle nationale et internationale montre son augmentation permanente, qui lui fait atteindre un niveau stratosphérique alors que le coût de production des énergies renouvelables dégringole d’année en année et n’a augmenté récemment qu’à la faveur de l’inflation [4]. En France, EDF a été incapable de fournir la moindre estimation au sujet du coût de production du MWh pendant le débat public sur les projets d’EPR2. Pourtant, le gouvernement s’obstine à relancer cette industrie, au détriment des énergies renouvelables et d’une réelle politique de sobriété énergétique.
Mais effectivement, qui aurait pu prédire ?
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