Retour sur une anomalie déjà observée à Cattenom
Le 18 janvier 2012, EDF a déclaré une anomalie sur les piscines de combustible 2 et 3 de la centrale nucléaire de Cattenom (Moselle) : il y manquait un dispositif censé empêcher la vidange accidentelle des piscines de combustible en cas de problème sur les circuits de purification et de traitement des eaux. Ce dispositif, dénommé "casse-siphon", prend la forme d’un orifice de 20 mm de diamètre sur les tuyauteries [1].
La vidange accidentelle d’une piscine de combustible constituerait un événement grave : en effet, les combustibles usés, extrêmement chauds et radioactifs, doivent être refroidis en permanence. S’ils n’étaient plus recouverts d’eau, ils pourraient libérer des radioéléments, voire entrer en fusion. Ces scénarios pourraient aboutir à d’importants rejets dans l’environnement, dans la mesure où les piscines, à la différence des réacteurs, ne possèdent pas d’enceinte de confinement.
Le problème remarqué à Cattenom, d’ailleurs signalé très tardivement à l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN), a été classé au niveau 2 de l’échelle INES. Le Réseau "Sortir du nucléaire" avait porté plainte, menant à l’ouverture d’une enquête par le Parquet de Thionville [2].
Une anomalie similaire détectée sur 8 réacteurs :
Le Réseau "Sortir du nucléaire" a reçu récemment de source anonyme des documents d’EDF et de l’IRSN, accompagnés d’une note explicative, qui font état de problèmes similaires à ceux de Cattenom sur d’autres réacteurs nucléaires français. Ainsi, sur les 8 réacteurs de Flamanville (Manche), Paluel (Seine-Maritime) et Saint-Alban (Isère), les fameux "casse-siphons" sont d’un diamètre insuffisant pour permettre le bon fonctionnement du dispositif et prévenir efficacement la vidange des piscines [3].
De plus, sur les piscines de ces huit réacteurs, une partie des tuyauteries du circuit de réfrigération et de filtration des eaux n’est pas dimensionnée pour résister aux séismes [4] ! En conséquence, en cas de séisme, la conjugaison de ces deux anomalies pourrait aboutir en une heure environ à un début de découvrement des combustibles entreposés dans les piscines [5]. Si ceux-ci entraient en fusion, toute intervention sur le site pourrait devenir impossible du fait du haut niveau de radiation.
Des risques pris à la légère :
Ce scénario catastrophe ne peut être balayé, la centrale de Saint-Alban étant située dans la vallée du Rhône, une zone de sismicité "modérée".
Il est frappant que le risque ne soit identifié que vingt-cinq ans après la construction des réacteurs concernés ; cette anomalie s’ajoute donc à la longue liste de toutes celles qu’EDF "découvre" tous les ans, invalidant largement l’idée d’une sûreté sous contrôle.
Il est déplorable que l’ASN, informée depuis trois mois de ces graves anomalies, n’ait à ce jour publié aucun avis d’incident à ce sujet.
Enfin, les centrales concernées étaient censées avoir passé avec succès l’épreuve des "évaluations complémentaires de sûreté", qui devaient étudier entre autres leur vulnérabilité au séisme. Les anomalies récemment découvertes confirment une nouvelle fois qu’il ne s’agissait que d’un exercice de communication.
Retrouvez tous les documents et une analyse plus détaillée sur notre site : https://www.sortirdunucleaire.org/Piscines-de-8-reacteurs-et-seisme
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