Des équipements importants pour la sûreté dans un état alarmant Le 13 septembre 2017, l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) plaçait la centrale nucléaire de Belleville sous surveillance renforcée après une inspection menée en avril 2017.
De nombreux équipements importants pour la sûreté ont été découverts dans un état de délabrement avancé. Leur usure était aggravée par un manque évident d’entretien et des réparations de l’ordre du rafistolage. De plus, cette inspection a fait apparaître des problèmes organisationnels, un manque dans la rigueur et la traçabilité des opérations de maintenance et, trop souvent, une sous-estimation de la gravité des dysfonctionnements [1] .
La situation n’était par ailleurs pas nouvelle : en 2015, le Réseau “Sortir du nucléaire“ avait déjà porté plainte pour une trentaine d’infractions à la réglementation environnementale et nucléaire à la centrale de Belleville [2].
La culpabilité d’EDF reconnue en justice malgré de nombreuses entraves C’est sur la base du rapport établi par l’ASN en 2017 que le Réseau “Sortir du nucléaire“ et l’association locale SDN Berry-Giennois-Puisaye ont adressé une plainte au Procureur de Bourges le 20 octobre 2017.
Malgré la gravité de ces nombreuses alertes, la justice a pris son temps pour reconnaître les fautes de l’exploitant. En effet, EDF, et le Parquet, ont toujours estimé que les irrégularités constatées ne relevaient pas de la justice. Ainsi, notre plainte a d’abord été classée sans suite par le Parquet de Bourges. Après une relaxe par le tribunal que nous avions saisi le 9 novembre 2018, et une décision d’appel qui déclarait l’action de nos associations irrecevable "au motif que seule l’ASN aurait la possibilité de relever des infractions à l’encontre des exploitants nucléaires", nous n’avons eu d’autre choix que de nous pourvoir en cassation.
L’affaire n’est examinée sur le fond que le 30 janvier 2023, après une décision d’annulation de la cour de Cassation.
Ces longueurs procédurales ne sont malheureusement pas exceptionnelles en droit du nucléaire et le simple fait de défendre notre légitimité à assigner EDF en justice pour les fautes dont elle est responsable est un combat en soi.
Le géant du nucléaire devra s’acquitter d’une amende Dans son arrêt rendu le 3 mai, la cour d’appel d’Orléans a reconnu que les manquements relevés par nos associations étaient constitutifs de trois différentes contraventions.
Elle condamne EDF notamment pour un défaut de maintenance d’un Élément Important pour la Protection (EIP), ce qui caractérise un manquement aux obligations réglementaires. Elle le condamne aussi pour la fuite significative de soude qui a été causée par le manque d’étanchéité d’un circuit EAS (circuit d’aspersion dans l’enceinte). EDF est condamnée à verser trois amendes de 1500 €, soit au total 4500€.
Cette décision doit être une sonnette d’alarme pour EDF ! En 2022, l’ASN considérait toujours que "concernant la maintenance des installations, les performances de la centrale nucléaire restent à améliorer" [3]. La même année, de nouvelles erreurs ont en effet été commises sur le site de Belleville [4] Pour nous, ces phénomènes continuent de questionner les compétences industrielles d’EDF et la rigueur d’exploitation du site. On ne rappellera jamais assez que la sûreté d’un site nucléaire impose une constance dans la rigueur. Après six années de "feuilleton" juridique, nos associations se félicitent d’avoir persévéré : la négligence systémique d’EDF a enfin été reconnue et condamnée. Tout vient à point à qui sait se défendre.
Retrouvez le dossier juridique : https://www.sortirdunucleaire.org/Belleville-sur-Loire-delabrement
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