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Sortir du nucléaire n°103



Automne 2024
Crédit photo : Nicolas Gallon / Contextes

Dossier : Combustible, mon (dés)amour

Orano Malvési : un site aussi stratégique que dangereux

À deux kilomètres de Narbonne, une discrète usine purifie de l’uranium extrait à l’étranger pour produire du combustible nucléaire français. Porte d’entrée de l’uranium dans l’hexagone, l’usine Orano Malvési cumule les dangers pour la santé et pour l’environnement.

Industrie nucléaire Pollution radioactive Le nucléaire et l’eau Déchets radioactifs Uranium et mines Sites nucléaires Malvési

Première étape de la chaîne de fabrication du combustible nucléaire, l’usine de Malvési raffine le yellowcake, concentré d’uranium issu de mines situées à l’étranger. Pendant les années 2010, l’usine a été entièrement remise à neuf. Elle fonctionne aujourd’hui à plein régime pour fournir en tétrafluorure d’uranium (UF4) le complexe nucléaire du Tricastin qui enrichit l’uranium. En 2024, elle s’est aussi équipée d’une Nouvelle Voie Humide (NVH) pour fournir en oxyde d’uranium l’usine Mélox de Marcoule qui produit le combustible MOX dopé au plutonium de La Hague (voir schéma p.17).

Un stock colossal de déchets radioactifs

Malvési a obtenu toutes les autorisations administratives pour retraiter les déchets produits lors de ces transformations, avec un projet de traitement des nitrates qui vise à incinérer des centaines de milliers de mètres cubes d’effluents radioactifs. Saisies par plusieurs associations d’opposants, les cours administratives de Montpellier et de Marseille ont malgré tout validé le projet.

Dans les inventaires de matières et déchets radioactifs liés au site de Malvési, l’Andra fait état d’environ 380 000 m³ d’effluents nitratés, 200 à 300 000 m³ de stériles miniers contaminés et 40 000 m³ de boues radioactives [1]. Ce dernier chiffre peut largement être réévalué autour de 400 000 m³, les bassins B1 et B2 d’entreposage temporaire de déchets radioactifs où figurent la majorité des boues radioactives ne figurant pas dans les inventaires les plus récents de l’Andra.

Contamination du vivant

Ces mêmes bassins, qui n’ont pas été équipés de membranes étanches, ont contaminé par infiltrations les nappes phréatiques qui se trouvent en dessous [2]. Les eaux rejetées par l’usine alimentent les canaux qui traversent le centre-ville, puis se jettent dans l’étang de Bages-Sigean au bord de la Méditerranée.

En 2020, des citoyens ont monté le collectif Vigilance Malvézy pour surveiller la pollution radioactive autour de l’usine. Radiations aux alentours de la clôture, niveau d’uranium 5 à 28 fois supérieur à la normale dans les feuilles de cyprès prélevées autour du site : leur travail a permis de mettre en évidence l’exposition chronique à l’uranium subie par les riverains.

Les travailleurs aussi sont menacés : plusieurs salariés sont malades ou décédés suite à des cancers des poumons, du sang et de la moelle osseuse [3]. Pourtant, Orano estime qu’il n’y a pas d’impact sanitaire de ses activités sur les riverains ou l’environnement.

Tout est fait pour prétendre que ce lieu hautement stratégique pour le nucléaire en France ne représente qu’un risque mineur. Seuls les bassins d’entreposage de déchets radioactifs sont considérés par l’Autorité de Sûreté Nucléaire comme relevant d’une Installation Nucléaire de Base (INB). Le reste du site dépend de la réglementation applicable en matière d’Installations Classées pour la Protection de l’Environnement (ICPE), et se soustrait ainsi aux réglementations et surveillances liées au nucléaire [4]. Pratique.

  • Hervé Loquais, SDN 11

Notes

[1Inventaires 2022 usine, bassins et ECRIN de Malvési, disponibles sur https://inventaire.andra.fr

[2Pollution, radioactivité : une enquête sur l’usine Orano Malvési à Narbonne, documentaire de Martin Boudot dans la série "Vert de Rage", France 3, octobre 2020

[3Une si discrète usine, Viviane Thivent, Revue XXI n° 29, janvier 2015

[4Le site Orano de Malvési, IRSN – www.irsn.fr

Première étape de la chaîne de fabrication du combustible nucléaire, l’usine de Malvési raffine le yellowcake, concentré d’uranium issu de mines situées à l’étranger. Pendant les années 2010, l’usine a été entièrement remise à neuf. Elle fonctionne aujourd’hui à plein régime pour fournir en tétrafluorure d’uranium (UF4) le complexe nucléaire du Tricastin qui enrichit l’uranium. En 2024, elle s’est aussi équipée d’une Nouvelle Voie Humide (NVH) pour fournir en oxyde d’uranium l’usine Mélox de Marcoule qui produit le combustible MOX dopé au plutonium de La Hague (voir schéma p.17).

Un stock colossal de déchets radioactifs

Malvési a obtenu toutes les autorisations administratives pour retraiter les déchets produits lors de ces transformations, avec un projet de traitement des nitrates qui vise à incinérer des centaines de milliers de mètres cubes d’effluents radioactifs. Saisies par plusieurs associations d’opposants, les cours administratives de Montpellier et de Marseille ont malgré tout validé le projet.

Dans les inventaires de matières et déchets radioactifs liés au site de Malvési, l’Andra fait état d’environ 380 000 m³ d’effluents nitratés, 200 à 300 000 m³ de stériles miniers contaminés et 40 000 m³ de boues radioactives [1]. Ce dernier chiffre peut largement être réévalué autour de 400 000 m³, les bassins B1 et B2 d’entreposage temporaire de déchets radioactifs où figurent la majorité des boues radioactives ne figurant pas dans les inventaires les plus récents de l’Andra.

Contamination du vivant

Ces mêmes bassins, qui n’ont pas été équipés de membranes étanches, ont contaminé par infiltrations les nappes phréatiques qui se trouvent en dessous [2]. Les eaux rejetées par l’usine alimentent les canaux qui traversent le centre-ville, puis se jettent dans l’étang de Bages-Sigean au bord de la Méditerranée.

En 2020, des citoyens ont monté le collectif Vigilance Malvézy pour surveiller la pollution radioactive autour de l’usine. Radiations aux alentours de la clôture, niveau d’uranium 5 à 28 fois supérieur à la normale dans les feuilles de cyprès prélevées autour du site : leur travail a permis de mettre en évidence l’exposition chronique à l’uranium subie par les riverains.

Les travailleurs aussi sont menacés : plusieurs salariés sont malades ou décédés suite à des cancers des poumons, du sang et de la moelle osseuse [3]. Pourtant, Orano estime qu’il n’y a pas d’impact sanitaire de ses activités sur les riverains ou l’environnement.

Tout est fait pour prétendre que ce lieu hautement stratégique pour le nucléaire en France ne représente qu’un risque mineur. Seuls les bassins d’entreposage de déchets radioactifs sont considérés par l’Autorité de Sûreté Nucléaire comme relevant d’une Installation Nucléaire de Base (INB). Le reste du site dépend de la réglementation applicable en matière d’Installations Classées pour la Protection de l’Environnement (ICPE), et se soustrait ainsi aux réglementations et surveillances liées au nucléaire [4]. Pratique.

  • Hervé Loquais, SDN 11


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