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Des accidents nucléaires partout

France : Gravelines : La pression chute, le refroidissement menacé

Sorties de route du réacteur 4 : EDF répète ses erreurs




10 novembre 2021


Le 5 novembre 2021, le réacteur 4 de la centrale de Gravelines (Hauts de France) doit être arrêté à cause d’un problème sur un capteur du circuit secondaire [1] situé dans le bâtiment réacteur. Lors de cet arrêt, EDF a perdu le contrôle de la pression du circuit primaire [2] . Elle a chuté jusqu’à passer en dessous des limites autorisées. L’industriel a eu beau faire, ses manœuvres n’ont pas suffit à la faire remonter. Sans une pression suffisante, si la température de l’eau est trop élevée, le risque est qu’elle s’évapore et que les pompes du circuit soient endommagées. Aucune explication n’est donnée sur le pourquoi de cette sortie de route, ni par EDF ni par l’Autorité de sûreté. L’incident a pourtant menacé le refroidissement du combustible nucléaire et le confinement de la radioactivité. Les faits ont été déclarés le 9 novembre par EDF et sont significatifs [3] pour la sûreté [4] .


Tout juste 2 mois plus tôt, le 9 septembre 2021, EDF déclarait exactement le même incident sur le réacteur 2 cette fois : la pression du circuit primaire est passée en dessous de la limite minimale lors de la mise à l’arrêt du réacteur. Et EDF n’a pas réussi à la rétablir rapidement malgré les actions de l’équipe de conduite : la pression est restée en dessous du minimum autorisé durant près de trois quart d’heure.

Le réacteur 4 de Gravelines a redémarré il y a moins de 3 mois après plusieurs semaines de travaux et le renouvellement d’une partie du combustible nucléaire. Qu’il faille déjà arrêter le réacteur pour un problème de capteur sur le circuit secondaire à de quoi surprendre  [1] . Lors du redémarrage à la mi août, un problème matériel suivi d’un incident étaient survenus : EDF a dû stopper le redémarrage, mais au lieu de diriger la vapeur produite vers l’extérieur, l’industriel s’est trompé et a tout simplement fermé les soupapes. L’exploitant mettra 15 heures à s’en rendre compte.
Ce même réacteur 4 est aussi resté plusieurs heures avec 1 seule pompe pour assurer son refroidissement (au lieu de 4) fin juillet, là encore suite à une erreur de son exploitant. Et lors de cet arrêt estival, EDF a ouvert en grand les portes du bâtiment réacteur pour sortir le combustible nucléaire de la cuve sans s’être assuré avant que la radioactivité serait confinée dans le bâtiment en cas d’accident. Or une partie de la ventilation qui permet notamment de filtrer l’iode radioactif n’était pas branchée. Là aussi erreur de l’industriel. Une erreur qui avait déjà été commise l’année précédente sur ce site nucléaire. Manifestement, EDF n’apprend rien de ses erreurs. Les problèmes se ressemblent et se répètent. Jusqu’à quand ?

L.B.

Ce que dit EDF :

Déclaration d’un événement significatif de sûreté de niveau 1, relatif à la sortie du domaine d’exploitation par basse pression dans le circuit primaire

Evénement sûreté

Publié le 10/11/2021

Le 5 novembre 2021, l’unité de production n°4 est en phase de mise à l’arrêt programmé afin de réaliser un diagnostic sur du matériel situé en partie nucléaire de l’installation.

La mise à l’arrêt du réacteur passe par une succession d’états, appelés domaines d’exploitation, correspondant à des limites de pression et de température. Le passage d’un domaine d’exploitation à un autre constitue un transitoire encadré par des procédures de conduite de l’installation.

Lors d’un transitoire, l’opérateur en salle de commande constate une baisse continue de la pression dans le circuit primaire jusqu’à atteindre 22,1 bars relatifs, une valeur inférieure à la limite autorisée par les Spécifications Techniques d’Exploitation qui est de 23 bars relatifs.

L’équipe en salle de commande engage aussitôt les actions permettant de retrouver une pression conforme dans le circuit primaire. L’atteinte de l’équilibre entre la phase liquide et la phase vapeur du pressuriseur [2] permet d’interrompre la baisse de pression dans le circuit primaire. La pression du circuit primaire remonte alors jusqu’à retrouver des valeurs conformes.

Cette sortie du domaine d’exploitation sous la limite basse de pression autorisée durant 20 minutes, n’a pas eu de conséquence réelle sur la sûreté des installations, ni sur l’environnement. Néanmoins, constituant un non-respect des règles d’exploitation, cet événement a été déclaré par la direction de la centrale nucléaire de Gravelines à l’Autorité de sûreté nucléaire le 9 novembre 2021, comme significatif pour la sûreté au niveau 1 de l’échelle INES, qui en compte 7.

https://www.edf.fr/la-centrale-nucleaire-de-gravelines/les-actualites-de-la-centrale-nucleaire-de-gravelines/declaration-d-un-evenement-significatif-de-surete-de-niveau-1-relatif-a-la-sortie-du-domaine-d-exploitation-par-basse-pression-dans-le-circuit-primaire-0


Ce que dit l’ASN :

Sorties du domaine de fonctionnement autorisé du réacteur 4 de la centrale nucléaire de Gravelines

Publié le 18/11/2021

Centrale nucléaire de Gravelines Réacteurs de 900 MWe - EDF

Le 9 novembre 2021, EDF a déclaré à l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) un événement significatif pour la sûreté relatif à la sortie du domaine de fonctionnement autorisé par les règles générales d’exploitation du réacteur 4, en raison d’une pression trop basse du circuit primaire principal.

Les règles générales d’exploitation sont un recueil de règles approuvées par l’ASN qui définissent le domaine autorisé de fonctionnement de l’installation et les prescriptions de conduite associées. La régulation de la pression du circuit primaire est assurée par un pressuriseur, réservoir qui contient, lorsque le réacteur est en fonctionnement, de l’eau sous forme liquide dans sa partie inférieure et sous forme vapeur dans sa partie supérieure.

Le 5 novembre 2021, le réacteur était en phase de mise à l’arrêt afin de réaliser une opération de maintenance de capteurs sur le circuit secondaire. Cette phase consiste en une baisse progressive de la pression et de la température du circuit primaire du réacteur, à travers plusieurs domaines successifs de fonctionnement autorisés. Lors de la descente en pression et température du circuit primaire du réacteur, l’opérateur a détecté une baisse anormale de la pression. L’équipe de conduite a alors mis en œuvre les mesures nécessaires afin de rétablir la pression du circuit. Ces actions n’ont toutefois pas été suffisantes pour maintenir la pression dans le domaine de fonctionnement autorisé.

En cas de poursuite de la baisse de pression sous la limite autorisée, les pompes assurant la circulation dans le circuit primaire auraient pu être endommagées.

Cet événement n’a pas eu de conséquence sur les installations, les personnes et l’environnement. Toutefois, l’événement ayant affecté les fonctions de sûreté liées au confinement et au refroidissement du réacteur, il a été classé au niveau 1 de l’échelle INES (échelle internationale des événements nucléaires et radiologiques, graduée de 0 à 7 par ordre croissant de gravité).

Le réacteur a retrouvé la plage de fonctionnement autorisée au bout de vingt minutes.

https://www.asn.fr/l-asn-controle/actualites-du-controle/installations-nucleaires/avis-d-incident-des-installations-nucleaires/sorties-du-domaine-de-fonctionnement-autorise-du-reacteur-4


[1Le circuit secondaire est un circuit fermé dans lequel la vapeur produite dans le générateur de vapeur est conduite à la turbine, qui transforme son énergie en énergie mécanique. Il comprend : la partie secondaire des générateurs de vapeur, la turbine, le condenseur, les systèmes d’extraction et de réchauffage de l’eau condensée jusqu’au retour au générateur de vapeur, ainsi que les tuyauteries associées. https://www.asn.fr/Lexique/C/Circuit-secondaire

[2Le circuit primaire est un circuit fermé, contenant de l’eau sous pression. Cette eau s’échauffe dans la cuve du réacteur au contact des éléments combustibles. Dans les générateurs de vapeur, elle cède la chaleur acquise à l’eau du circuit secondaire pour produire la vapeur destinée à entraîner le groupe turboalternateur. Le circuit primaire permet de refroidir le combustible contenu dans la cuve du réacteur en cédant sa chaleur par l’intermédiaire des générateurs de vapeur lorsqu’il produit de l’électricité ou par l’intermédiaire du circuit de refroidissement à l’arrêt lorsqu’il est en cours de redémarrage après rechargement en combustible. La température du circuit primaire principal est encadrée par des limites afin de garantir le maintien dans un état sûr des installations en cas d’accident. https://www.asn.fr/Lexique/C/Circuit-primaire

[3Événements significatifs : incidents ou accidents présentant une importance particulière en matière, notamment, de conséquences réelles ou potentielles sur les travailleurs, le public, les patients ou l’environnement. https://www.asn.fr/Lexique/E/Evenement-significatif

[4La sûreté nucléaire est l’ensemble des dispositions techniques et des mesures d’organisation relatives à la conception, à la construction, au fonctionnement, à l’arrêt et au démantèlement des installations nucléaires de base, ainsi qu’au transport des substances radioactives, prises en vue de prévenir les accidents ou d’en limiter les effets. https://www.asn.fr/Lexique/S/Surete-nucleaire

[5Actualité de l’unité de production n°4 :
Ce mardi 2 novembre à 23h00, l’unité de production n°4 a été déconnectée du réseau d’électricité. Cet arrêt programmé vise à réaliser des diagnostics sur une mesure de niveau de l’un de ses trois générateurs de vapeur. https://www.edf.fr/la-centrale-nucleaire-de-gravelines/les-actualites-de-la-centrale-nucleaire-de-gravelines/actualite-de-l-unite-de-production-ndeg4-0

[6La régulation de la pression du circuit primaire est assurée par un pressuriseur, réservoir qui contient, lorsque le réacteur est en fonctionnement, de l’eau sous forme liquide dans sa partie inférieure et sous forme vapeur dans sa partie supérieure.


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Installation(s) concernée(s)

Gravelines

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168