Faire un don

Débat public sur les nouveaux réacteurs

Le Réseau "Sortir du nucléaire" a pris la décision de participer au débat public sur le projet de construction de nouveaux réacteurs. Cette participation, à l’issue d’une longue période historique de refus de cautionner un débat biaisé d’avance, est pourtant sans naïveté. Le Réseau n’est pas dupe sur l’instrumentalisation de ce débat mais étant donné l’enjeu monumental nous avons cru bon de défendre haut et fort notre opinion à propos de ces projets complètement insensés.

Actualités autour de notre participation à ce débat :

28 avril 2023 à 12 heures
Débat public sur la construction d’EPR2 : un gouvernement sans boussole qui méprise la parole citoyenne

Du 27/10/22 au 27/02/23, un débat public a été organisé pour "débattre de l’opportunité, des objectifs et des caractéristiques principales du projet" de construction de deux EPR2 sur le site de Penly, dans le cadre d’un programme de 6 réacteurs. Hier, la CNDP en a présenté le compte-rendu. Ses conclusions renforcent notre position : ce débat est une mascarade démocratique au service d’une politique énergétique sans boussole.

En savoir plus
2 février 2023 à 21 heures
Intervention de nos porte-paroles lors de la séance lyonnaise du débat public

Discours de nos porte-paroles qui ont expliqué ce 2 février à Lyon pourquoi le Réseau "Sortir du nucléaire" a décidé de sortir de ce débat fantoche, dans un contexte où le gouvernement multiplie déjà les actions et déclarations pour la relance du nucléaire avant même d’attendre la fin du débat public.

Télécharger le texte de ce discours
24 janvier 2023 à 12 heures
Débat public sur le nucléaire : le Réseau "Sortir du nucléaire" et Greenpeace France claquent la porte

Face au passage en force d’un projet de loi d’accélération du nucléaire présenté par le gouvernement et actuellement voté au Sénat, Greenpeace France et le Réseau "Sortir du nucléaire" annoncent quitter le débat public sur l’éventuelle relance de la filière nucléaire française et le projet de construction de nouveaux réacteurs nucléaires. Les associations dénoncent une mascarade démocratique et un sabotage en règle du débat public par le gouvernement.

En savoir plus
8 décembre 2022 à 13 heures
Que s’est-il passé à Flamanville et quels enseignements en a-t-on tirés ?

"Que s’est-il passé à Flamanville et quels enseignements en a-t-on tirés ?". Telle est la question posée le 1er décembre 2022, lors de la 4ème séance du débat public sur le projet de construction de nouveaux réacteurs EPR à Penly et ailleurs.

De fait, alors qu’EDF compte se lancer dans la construction de 6 nouveaux réacteurs, dont deux à Penly, un bilan doit s’imposer. Avec ses 11 années de retard, sa litanie de malfaçons et ses coûts multipliés par 6, l’EPR de Flamanville illustre de façon criante l’état calamiteux d’une filière nucléaire qui ne s’est jamais si mal portée - et dont les turpitudes n’appartiennent pas au passé, quoi qu’en disent ses partisans.

En savoir plus
21 novembre 2022 à 16 heures
Lettre du Réseau "Sortir du nucléaire" et de Greenpeace France aux membres de la Commission Particulière du Débat Public

À l’attention des membres de la CPDP en charge de l’organisation du débat public "Nouveaux réacteurs nucléaires et projet Penly"

Mesdames, Messieurs,

Suite aux premières séances du débat public sur les projets de nouveaux réacteurs nucléaires à Penly et ailleurs, nos organisations souhaitent revenir vers vous pour vous faire part de nos constats.

Relevant la prise de conscience de la CPDP quant à la spécificité des débats sur le nucléaire, et prenant note de votre intention de questionner pleinement l’opportunité du projet tout en refusant d’entretenir le mythe d’un débat "décisionnel", nous avons fait le choix - qui pour certaines de nos organisations n’allait pas de soi - de participer à cette procédure. Nous étions tout à fait conscients des limites de l’exercice, qui ont déjà mené certains d’entre nous à boycotter de précédentes consultations et ont d’ailleurs encore été soulignées par plusieurs composantes du mouvement antinucléaire récemment. Nous nous interrogions fortement sur la portée de ce débat, dans un contexte où le gouvernement affirme clairement sa volonté d’un développement à "marche forcée" du nucléaire et où une délégation interministérielle au nouveau nucléaire a déjà été nommée. Mais au regard même de ce contexte, il nous a paru pertinent d’appuyer une démarche qui permettait de questionner ouvertement la pertinence de ce programme.

Toutefois, les conditions dans lesquelles se sont déroulées les premières séances n’ont fait que confirmer nos craintes.

Ce débat porte sur un sujet d’envergure nationale. Le choix d’une politique énergétique est un choix sociétal pour le siècle à venir, avec plusieurs voies possibles identifiées, dont la plupart sont largement ignorées. La voie privilégiée dans ce débat par le porteur de projet engagerait lourdement notre pays tant en ce qui concerne les conséquences environnementales que les implications financières ou les choix sociétaux énergétiques pour le siècle à venir. Or nous relevons que les moyens mis à disposition pour débattre de ces choix cruciaux sont sans rapport avec l’ampleur de l’enjeu.

Nous faisons d’abord le constat d’une publicité officielle pour promouvoir la participation au débat faible voire inexistante : alors que la présidence et le gouvernement annoncent un plan de relance du nucléaire et une concertation sur le mix énergétique, aucune mention ou presque n’est faite du débat public qui, au-delà de Penly, s’élargit pourtant à l’ensemble des réacteurs en projet et concerne donc profondément les choix énergétiques de la France sur le long terme. Pour une participation de toute la société civile et a fortiori de la population française, on pourrait attendre que la publicité autour de ce débat soit dotée de moyens bien plus conséquents, permettant une médiatisation large, à même de permettre une information préalable à la hauteur de ces enjeux.

De plus, certains manquements logistiques et organisationnels doivent être soulignés. Outre la piètre qualité technique du son lors de la première séance pour les personnes qui tentaient de suivre en ligne, nous nous étonnons de la capacité très réduite des salles mises à disposition pour les deux séances parisiennes, dont la première était initialement censée se tenir au Sénat. Ce repli dans de petits espaces est d’autant plus surprenant qu’en 2010, la séance parisienne du débat sur un premier projet de réacteur EPR à Penly avait pu se tenir dans un auditorium vaste à l’Institut du Monde Arabe. En raison de cette faible capacité d’accueil, la jauge a été si vite atteinte que beaucoup de nos sympathisant·e·s n’ont pu s’inscrire pour participer aux ateliers de la seconde séance ni en présentiel, ni même par zoom (dès le 4 novembre, cela n’était plus possible).

Sans pour autant questionner votre bonne volonté, nous nous interrogeons fortement sur les raisons de ces dysfonctionnements et manque de moyens, surprenants pour une institution comme la vôtre, habituée à organiser de tels événements. S’agit-il d’une dotation insuffisante du maître d’ouvrage pour réaliser le débat dans des conditions suffisantes, révélatrice du peu de cas que celui-ci fait de l’avis des citoyen·ne·s ?

Ces considérations logistiques ont en effet un impact très concret sur la possibilité de participer au débat. Loin d’un débat inclusif ouvert au grand public, seules des personnes initiées ont pu participer.

Surtout, nos quelques membres et sympathisant·e·s qui ont pu être présent·e·s dans la salle ou dans les ateliers via Zoom ont fait le constat unanime de la surreprésentation écrasante de personnes liées à l’industrie nucléaire, travaillant ou ayant travaillé dans la filière, ou représentant des lobbies comme les Voix du nucléaire, qui se succédaient pour répéter les mêmes éléments de langage. Plusieurs personnes sont parties avant la fin, désespérées par la perspective d’une non-discussion stérile.

Les personnes qui tentaient de suivre la séance sur Youtube et d’intervenir dans le chat ont également été confrontées à l’attitude insultante et méprisante des partisan·e·s de la filière nucléaire, qui se sont livré·e·s à un phénomène de "trollage" en règle. Si cette posture ne nous surprend malheureusement plus, tant les soutiens de l’industrie nucléaire en sont coutumiers sur les réseaux sociaux, nous avons fait le constat de l’impuissance de la CPDP non seulement à modérer, mais aussi à faire remonter les questions posées dans leur diversité, sans donner toujours la parole aux mêmes.

Le format contraint et la surreprésentation de l’industrie nucléaire, qui très visiblement avait pris d’assaut les inscriptions à leur ouverture, n’a donc pas ou peu laissé de possibilité de rebondir publiquement sur les propos exprimés, notamment certaines affirmations du maître d’ouvrage extrêmement discutables (postulat d’une augmentation de 50% de la consommation électrique d’ici à 2050 alors que la sobriété est sur toutes les lèvres, scénario sans nucléaire forcément plus "risqué" que le renouvellement du parc, en décalage total avec le fiasco de Flamanville et les dynamiques de développement comparées du nucléaire et des renouvelables dans le monde) assénées comme des évidences, sans possibilité d’un véritable échange factuel sur le sujet.

Malgré la volonté affichée de pluralisme de la CPDP dans le choix des intervenant·e·s, nous constatons que, comme nous le craignions, le débat est en train de se transformer en une énième tribune utilisée par une industrie nucléaire à la fois maître d’ouvrage et participante pour marteler ses messages et obtenir à tout prix leur inscription dans le compte-rendu du débat ; et ce alors que l’industrie nucléaire dispose par ailleurs de moyens de communication conséquents sans avoir besoin d’empiéter sur cette procédure.

Enfin, nous nous interrogeons sur l’intervention de Mme Sophie Mourlon, représentante de la Direction Générale de l’Énergie et du Climat, qui n’était d’ailleurs pas prévue dans le déroulé. L’administration est soumise au principe de neutralité (art L 100-2 du Code des relations entre le public et l’administration) et doit donc, à ce titre, se tenir en retrait dans ce type de procédure pour laisser la place au débat. Or, dans une séquence censée permettre de discuter ouvertement de l’opportunité de relancer un programme nucléaire, et alors que différents intervenants venaient de rappeler la faisabilité technique de scénarios sans nouveaux réacteurs compatibles avec nos objectifs climatiques, celle-ci, tout en prétendant que ce n’était pas l’administration qui décidait la politique énergétique, est venue insister sur le fait que les travaux de l’administration étaient en cours, présentant la perpétuation du nucléaire comme une évidence qui s’imposerait et n’aurait pas vocation à être discutée. Cette prise de parole revient à court-circuiter le débat public, sans même parler de la publicité faite à la concertation organisée par le gouvernement (laquelle n’offre pas de possibilité de refuser de nouveaux réacteurs).

Force est donc de constater, que les conditions d’un débat serein, constructif et éclairé ne sont à ce stade pas remplies. Nous nous interrogeons donc sur la poursuite de notre participation à ce processus dans de pareilles conditions et resterons extrêmement attentifs aux conditions dans lesquelles se dérouleront les prochaines sessions du débat public.

Recevez, Mesdames, Messieurs, nos salutations respectueuses,

Elisabeth Laporte, pour le Conseil d’administration du Réseau "Sortir du nucléaire"

Pauline Boyer, Chargée de campagne Transition énergétique et nucléaire à Greenpeace France

 

Téléchargez le courrier à la CPDP
Lettre à la CPDP - 21/11/2022
9 novembre 2022 à 12 heures
Notre retour sur la 2ème séance du débat public

La question posée aujourd’hui était « avons-nous besoin d’un nouveau programme nucléaire ? ». Montrant le peu de cas qu’il fait de ce débat, le gouvernement avait déjà créé la veille une délégation interministérielle au nouveau nucléaire : https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000046534037

Le jour J, la participation à l’intérieur et même par internet a été restreinte par une jauge basse, (révélatrice du peu de moyens alloués à la CPDP ?), avec des partisans du nucléaire venus en force dans les ateliers.

À l’extérieur, la mobilisation bat son plein. En plus des collectifs antinucléaires parisiens, de nombreuses personnes sont venues de La Hague ou de Bure pour clamer leur refus des déchets que générerait un nouveau programme nucléaire !

La diversité des scénarios énergétiques présentés montre qu’un avenir énergétique sans nouveau nucléaire. Pourtant, EDF comme le gouvernement se refusent à envisager d’autres choix. Dans ce cas, à quoi sert ce débat ?

Contraste criant entre les discours présentant la construction de nouveaux réacteurs comme le choix le moins risqué pour atteindre nos objectifs climatiques, et la réalité des faits : 11 ans de retard pour l’EPR de Flamanville, des malfaçons et retards sur tous les EPR dans le monde !

Tous les scénarios de relance du #nucléaire partent du principe que les nouveaux réacteurs seront disponibles vers 2035, un postulat complètement irréaliste au regard des difficultés de la filière.

Nous le rappelons : tabler sur de nouveaux réacteurs, lents à construire et susceptibles de connaître retards et malfaçons, pour produire l’électricité "bas-carbone" de demain, c’est mettre en danger nos objectifs climatiques ! Au final, nous constatons une prise de contrôle sur le débat de la part d’une industrie nucléaire omniprésente et méprisante, qui fait preuve d’une agressivité inouïe sur les réseaux sociaux et assume le fait accompli.

8 novembre 2022 à 15 heures
"Avons-nous besoin d’un nouveau programme nucléaire ?" La réponse est NON !

Ce mardi 8 novembre se tiendra la 2ème séance du débat public, dédiée à la question "Avons-nous besoin d’un nouveau programme de réacteurs nucléaires ?".

Il sera proposé aux participant·es (sur place à Paris et en virtuel) d’échanger d’abord par petits groupes, puis de faire remonter leurs questions et observations, suite à quoi différents scénarios énergétiques seront présentés par RTE, l’ADEME et l’association négaWatt (retrouvez le déroulé).

Pour nous, la réponse à la question posée est claire : non, nous n’avons absolument pas besoin d’un nouveau programme nucléaire !

Sur le plan énergétique et climatique, on peut s’en passer - et ce serait même plus prudent !

Plusieurs scénarios (négaWatt, ADEME, trois scénarios élaborés par RTE...) démontrent que se passer du nucléaire est techniquement réalisable et parfaitement compatible avec nos objectifs climatiques.

Pourtant, dans son dossier versé au débat, EDF présente la construction de nouveaux réacteurs comme le seul choix rationnel possible pour répondre aux défis climatiques et énergétiques. Elle s’appuie pour cela sur le scénario le plus nucléarisé élaboré par RTE, présenté comme le plus sûr et le moins coûteux.

Nous considérons que cette approche est profondément biaisée, pour plusieurs raisons.

  • EDF se base sur une lecture sélective des scénarios élaborés par RTE, en se focalisant sur une variante "médiane" où la consommation d’électricité sera très élevée et où l’on suppose qu’il faudra faire un effort considérable de déploiement des énergies renouvelables pour répondre à des besoins élevés. Mais RTE a aussi prévu une variante "sobriété", bien plus d’actualité dans les temps actuels, et où les efforts de déploiement des énergies renouvelables sont bien moins importants. Or EDF se garde bien de rentrer dans le détail !
  • Surtout, pour élaborer ses scénarios, RTE s’est basée sur les données fournies par EDF elle-même, dont certaines sont pourtant très contestables. En octobre 2021, le média Contexte a fait fuiter un rapport interne de la Direction Générale de l’Énergie et du Climat qui vient contredire ces données. En particulier, on y apprend que les nouveaux réacteurs seraient bien plus coûteux qu’annoncé, et surtout que leur construction prendrait beaucoup plus de temps que prévu. Les premiers réacteurs ne seraient pas opérationnels en 2035, mais plutôt en 2040, voire 2043 ou même 2045 !

Si l’on en croit le dossier d’EDF, les nouveaux réacteurs seraient construits encore plus rapidement que les réacteurs EPR chinois. Quelle est la crédibilité d’un tel scénario, au regard de l’état de la filière nucléaire française et des 11 ans de retard de l’EPR de Flamanville ? Qui peut croire que ces nouveaux réacteurs sortiraient de terre dans les temps, sans retard ni surcoût ni malfaçon ?

Non seulement nous n’avons pas besoin de ces nouveaux réacteurs pour atteindre nos objectifs climatiques, mais miser sur ce programme nucléaire, susceptible de connaître retards et malfaçons, revient à les mettre en péril !

Nous n’avons pas besoin des déchets radioactifs que produirait ce nouveau programme

Les sites d’entreposage de déchets radioactifs approchent déjà de la saturation. Le projet Cigéo, à Bure, dans la Meuse, où seraient enfouis les déchets les plus dangereux, présente d’importantes failles en terme de sûreté et les provisions constituées seront insuffisantes pour le financer. Surtout, il n’a pas été conçu pour accueillir d’autres déchets que ceux du parc nucléaire actuel. Il faudrait donc l’étendre encore pour accueillir ceux d’un nouveaux programme !

Les générations futures seront déjà confrontées à des défis suffisamment lourds, elle n’ont pas besoin de ce fardeau supplémentaire de nouveaux déchets à gérer !

Dans un monde incertain, nous n’avons pas besoin de continuer à supporter le risque d’un accident

Le monde actuel est marqué par la montée des tensions géopolitiques et par la multiplication des phénomènes climatiques extrêmes. Dans ce contexte, ce dont nous avons besoin, c’est d’un système énergétique qui soit sûr, sobre, décentralisé, résilient, non-polluant et renouvelable. À l’inverse, miser sur la poursuite d’une technologie complexe, dangereuse, vulnérable aux actes de malveillance et conflits (comme la centrale de Zaporijjia, en Ukraine, en fournit l’exemple) est un choix qui met en danger les générations futures et actuelles.

La montée des eaux, l’accroissement des tempêtes, canicules... constituent autant de phénomènes susceptibles d’affecter la sûreté nucléaire. Construite sur un polder, la centrale de Penly est vulnérable à la montée des eaux (tout comme celle de Gravelines, dans le Nord, elle aussi censée accueillir deux réacteurs).

Ce nouveau programme ne concernerait pas seulement les nouveaux réacteurs, à Penly et ailleurs, mais aussi toute l’infrastructure technique et organisationnelle que doit maintenir l’industrie nucléaire pour perdurer : transports de matières radioactives, bon fonctionnement des usines, sécurité des infrastructures de transport électrique... Autant de points de vulnérabilité dans un monde de plus en plus incertain.

28 octobre 2022 à 00 heures
Prise de parole du Réseau lors de la séance d’inauguration du débat

Lors de la séance inaugurale du débat public, le Réseau "Sortir du nucléaire" a été invité à répondre à la question "À quoi sert ce débat ?", et plus précisément à exprimer ses doutes quant à l’écoute que pourraient recevoir ses arguments.

Cliquez ici pour lire le verbatim

Historiquement, le Réseau « Sortir du nucléaire » a toujours été critique des débats publics sur le nucléaire. Un bon nombre de groupes de notre fédération refusent d’ailleurs d’y participer, par scepticisme envers la procédure ou en raison de leurs doutes sur l’issue et même l’utilité du débat.

En effet, jusqu’ici, nous avons constaté que ces débats (que ce soit pour l’EPR de Flamanville ou le projet Cigéo) ne servaient généralement qu’à donner un vernis démocratique à une décision déjà prise et intangible, en laissant croire qu’une réelle délibération avait eu lieu. Pour les maîtres d’ouvrage, le débat est avant tout une opération de communication, destinée à mettre en scène l’acceptabilité sociale de leur projet en offrant une tribune à certaines parties prenantes.

Mais une fois n’est pas coutume - et c’est pour cela que nous acceptons de parler ici - il semble que le but de la CPDP, aujourd’hui, ne soit pas de fournir ce vernis d’acceptabilité sociale à un projet, mais réellement de questionner son opportunité.

Aujourd’hui, il ne s’agit pas seulement de discuter du projet de deux EPR à Penly, mais de l’ensemble du programme de construction de six nouveaux réacteurs, et de ce qu’il implique, notamment en termes géopolitiques, climatiques, production de déchets…

Aujourd’hui, la CPDP n’a pas la prétention d’organiser un débat décisionnel (une décision qui serait prise on ne sait trop comment, et au nom de qui, au regard de l’ampleur des enjeux ?), mais de recueillir un maximum d’avis, dont ceux de personnes que l’on entend peu, sans prétendre produire une pseudo-synthèse consensuelle ; et ce, dans l’optique que ces avis à charge et à décharge éclairent le vote des parlementaires qui voteront la prochaine loi énergie-climat.

Si nous saluons l’orientation de la CPDP, nous souhaitons souligner les importantes limites de l’exercice.

Pourquoi mettre en débat uniquement la construction de ces nouveaux réacteurs, et pas le projet global de relance comprenant la prolongation du fonctionnement de l’ensemble du parc au-delà de 50 ans (ce qui fait d’ailleurs fi des réserves de l’ASN), puisqu’Emmanuel Macron a annoncé unilatéralement vouloir revenir sur les fermetures de 12 réacteurs prévues dans la précédente Programmation Pluriannuelle de l’Énergie ?

Comment prétendre faire le tour, en quelques séances, d’un sujet aussi vertigineux, qui engagerait la France sur quasiment un siècle, voire des millénaires si on considère la question des déchets ?

Comment garantir une information honnête des citoyen·ne·s au regard des biais du dossier du maître d’ouvrage qui, dans son interprétation partiale des scénarios de RTE, ignore la variante « sobriété » et présente la construction de nouveaux réacteurs comme seul choix rationnel possible ?

Comment garantir que ce débat ne se transforme pas en une énième tribune pour l’industrie nucléaire et ses soutiens, dont les moyens de communication sont déjà démesurés comparés à ceux de la société civile ?

Peut-on espérer que les parlementaires, déjà abreuvé·e·s des éléments de langage et des kits de lobbyingde l’industrie, qui leur offrent un prêt à penser bien commode, se saisissent vraiment du sujet au-delà des clichés ?

Et surtout, quel poids peut réellement avoir ce débat, tant que le gouvernement assume, selon les mots prononcés par Emmanuel Macron à St Nazaire, un "déploiement à marche forcée"du nucléaire ?

Alors que les projets de 6 EPR font l’objet de discussions entre EDF et le gouvernement depuis 2018 au moins ? Alors que, dès 2019, le gouvernement a envoyé à EDF une lettre de mission lui demandant d’attester de sa capacité à construire ces réacteurs ?

Alors que des appels d’offres ont été passés dès septembre 2019 ? Alors que des pièces ont déjà été commandées ?

Alors que le gouvernement prépare une loi pour accélérer la construction de ces réacteurs, quitte à raboter le droit de l’environnement ?

Certes, la CPDP a rappelé au gouvernement qu’il n’avait légalement pas le droit de décider seul de ces constructions, ce choix revenant aux parlementaires. Mais s’en soucie-t-il vraiment, alors qu’il semble considérer les phases délibératives et même le vote de la loi de programmation énergétique comme une pure formalité ?

Fait révélateur : une semaine avant le lancement de ce débat, le gouvernement a lui-même lancé une « concertation nationale sur le mix énergétique ». Loin d’une véritable consultation sur ce sujet de société, il s’agit d’une pure opération de communication qui vise à présenter les orientations d’Emmanuel Macron comme incontournables. Et là, pas question de solliciter l’avis des citoyen·ne·s sur la relance du nucléaire ou la prolongation des réacteurs promis à la fermeture. On leur demande juste de voter pour les priorités dans le cadre de cette relance ! Est-ce ça, la démocratie ?

Dans cette situation – illisible pour le grand public ! -, comment garantir la mise en œuvre effective de l’article 7 de la Charte de l’environnement, qui dispose que "Toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d’accéder aux informations relatives à l’environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l’élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement." ? Comment les conventions internationales d’Aarhus et Espoo peuvent-elles être respectées ?

Cette situation verrouillée, où la décision est volée aux citoyen·ne·s, est d’autant plus révoltante au regard de l’état de la filière. Nous constatons un hiatus énorme : d’un côté, les discours de l’industrie nucléaire sur une technologie fiable, performante, disponible… De l’autre, les faits sont là : près de la moitié du parc (dont la centrale de Penly) est toujours à l’arrêt, en partie minée par des défauts de corrosion. L’EPR de Flamanville, avec sa litanie de malfaçons, de surcoûts et ses 11 ans de retard, n’est toujours pas en service. Et on prétend maintenant rééditer ce fiasco en 6 exemplaires ? Qu’on ne se paie pas de mots sur le prétendu "retour d’expérience" : qui peut sérieusement croire que les EPR de Penly seraient livrés à temps, sans malfaçons, sans retards (avec un temps de construction inférieur à celui des réacteurs chinois !), sans surcoûts ? Qui peut croire à l’échéance de 2035, alors qu’un rapport fuité de l’administration précisait que la mise en service ne pourrait se faire avant 2040, voire 2043-45 ?

Articuler notre futur énergétique autour de l’hypothétique disponibilité de ces réacteurs, c’est mettre en péril nos objectifs climatiques. C’est une perte de temps et de ressources impardonnable, alors que de nombreux scénarios prouvent la faisabilité du 100 % renouvelable.

Si ces réacteurs démarraient un jour, cela signifierait plus de déchets radioactifs à gérer, la poursuite de la pollution radioactive de la Manche, faire perdurer le risque d’accident nucléaire… dans un contexte où les phénomènes climatiques extrêmes et les tensions géopolitiques accroissent encore les risques.

Dangereuse, chère, polluante, inadaptée face à l’urgence climatique, l’énergie nucléaire n’est pas une solution, mais une impasse totale qui empêche de nous projeter dans un avenir énergétique sobre, sûr et résilient. Voilà ce sur quoi nous comptons alerter lors de ce débat – même si nous sommes lucides quant au traitement que lui réserve un gouvernement aveuglé par son soutien inconditionnel au nucléaire.

27 octobre 2022 à 10 heures
Le débat débute ce soir à 19h et vous pouvez y assister en ligne

Aujourd’hui se tient la première séance du débat public relatif à la construction de nouveaux réacteurs à Penly et ailleurs. Il nous semble capital d’en profiter pour mettre en lumière les mensonges de l’industrie nucléaire, même si nous ne sommes absolument pas dupes sur l’issue de cette procédure.

📢 Notre porte parole, Charlotte Mijeon, interviendra d’ailleurs pour dénoncer la politique du fait accompli menée par EDF et le gouvernement depuis des années. Comment espérer que l’avis des citoyen·nes soit entendu si, dans le même temps, Emmanuel Macron assume un "développement à marche forcée" du nucléaire ?

#DebattonsDesVraiesQuestions et non pas de comment imposer à la société un programme de relance du nucléaire déjà ficelé, coûteux, dangereux et anti-écologique, qui nous engagerait pour plus d’un siècle !

Pour suivre la séance, inscrivez-vous par ici : https://www.debatpublic.fr/nouveaux-reacteurs-nucleaires-et-projet-penly/quoi-sert-ce-debat-3374

26 octobre 2022 à 10 heures
Le débat commence demain

Le débat public sur les nouveaux réacteurs nucléaires à Penly et ailleurs va s’ouvrir ce jeudi pour une durée de 4 mois. Nous sommes lucides sur l’absence de volonté du gouvernement de prendre vraiment en compte l’avis des citoyens en matière énergétique, tant tout semble déjà écrit d’avance pour lui ! Mais, même si nous ne sommes pas dupes, nous avons décidé de porter une vision antinucléaire au sein de ce débat public. Contrairement à la « concertation sur le mix énergétique » lancée par le gouvernement en parallèle, qui nous propose juste d’approuver les orientations du gouvernement, ce débat public, lui, questionne ouvertement le fait de construire de nouveaux réacteurs. D’où notre choix d’y participer.

Notre position sera ferme et intransigeante : nous ne voulons pas de nouveaux réacteurs dans notre pays – ni de la prolongation des réacteurs existants ! Débattons des vraies questions : celle d’un avenir énergétique sûr, sobre, démocratique et renouvelable. Bref d’un avenir énergétique SANS nucléaire.

25 octobre 2022 à 14 heures
Positionnement du Conseil d’admnistration du Réseau "Sortir du nucléaire" sur le débat public autour de la construction de nouveaux réacteurs

Le Conseil d’administration du Réseau "Sortir du nucléaire" a pris la décision de participer à la séance d’ouverture du débat public sur le projet de construction de nouveaux réacteurs à Penly, qui aura lieu le jeudi 27 octobre. Nous serons à la tribune, pour répondre à la question posée : "À quoi sert ce débat ?"

Cliquez ici pour voir le texte de positionnement du CA

Cette participation, à l’issue d’une longue période historique de refus de cautionner un débat biaisé d’avance, est pourtant sans naïveté. Le Réseau n’est pas dupe sur l’instrumentalisation de ce débat et de la CPDP elle-même, manipulation faite au service de projets industriels inutiles et désastreux pour la planète et ses habitant·es. La « relance du nucléaire » à marche forcée promue par l’État est un enjeu qui engagerait les générations futures, de manière irréversible, sur des centaines de milliers d’années pour ce qui concerne les déchets radioactifs.

Par ailleurs, le gouvernement vient également d’annoncer en grande pompe une "concertation nationale sur le mix énergétique" suite à l’annonce du plan présidentiel de construction de 14 EPR. Nous avons conscience que c’est une pure opération de communication gouvernementale pour l’industrie du nucléaire, afin de faire avaler la pilule de projets déjà décidés sinon déjà amorcés. Mais celle-ci, qui va se dérouler en parallèle du débat, propose juste de cautionner les orientations gouvernementales sans possibilité de les contester !

Alors pourquoi avoir accepté d’être à la tribune ?

Nous confondrons lors de ce débat tronqué les partisans nucléophiles. Nous parlerons de l’inutilité et même du caractère nuisible du programme de relance du nucléaire face à l’urgence climatique (et face au respect des engagements internationaux de la France au sens large), face à l’urgence sociale. Nous parlerons de l’état de la filière, de la pollution des eaux, de l’impasse des déchets radioactifs, des tensions géopolitiques actuelles et futures afférentes au nucléaire, de l’approvisionnement en combustible jusqu’à la production en passant par le transport. Nous parlerons de l’illusion d’un tel modèle, de la nécessité d’un système fondé sur la sobriété et l’efficacité énergétiques et sur les énergies renouvelables. Nous serons là pour exiger une réelle information du public sur son environnement, et sur les atteintes que l’industrie du nucléaire y porte. Nous pointerons du doigt les passe-droits et régressions que le gouvernement prévoit sur le droit de l’environnement et de l’urbanisme : le projet de loi sur l’accélération du nucléaire, la loi ASAP de simplification des procédures d’aménagement des territoires au détriment des populations et de l’environnement... Nous pousserons les contradictions du débat public en son propre sein, nous attaquerons l’industrie du nucléaire, EDF, RTE, Orano, Framatome et l’État sur leurs manquements, et nous nous réserverons la possibilité de claquer la porte dès que nos objectifs seront accomplis.

L’heure est grave pour la démocratie comme pour le droit de l’environnement et vis à vis des générations futures. La raison de cette participation historique est de faire connaître et entendre la voix du Réseau "Sortir du nucléaire" au niveau national, et surtout le soutien qu’il veut apporter à ses organisations membres, notamment aux collectifs de Penly, de Gravelines, du Bugey et du Tricastin, dont le ciblage des sites représente un passage en force pour la construction de 6 puis 8 EPR. Mais ce soutien va prendre plusieurs formes : le Réseau appuiera toutes ses organisations, tous les fronts contre les EPR, quelles que soient leurs stratégies d’opposition. Que ce soit pour participer aux débats publics, pour les enrichir ou en démontrer l’absurdité, que ce soit pour démonter et dénoncer les débats publics à l’extérieur de l’institution, ou encore pour imposer un agenda propre, nous serons là avec vous, toujours en appui.

Face aux intérêts néo-coloniaux et à la dépendance à l’uranium, face aux intérêts militaristes, et de prédation sur la nature, le Réseau "Sortir du nucléaire" sera la voix de la complémentarité des luttes, de la diversité des pratiques, des alternatives, des rencontres et des mobilisations. Contre la relance du nucléaire dans son ensemble.

Sortir du nucléaire, c’est maintenant !

… et pas demain !

Le Conseil d’Administration du Réseau "Sortir du nucléaire"