Quand la musique dénonce le nucléaire
Retour sur l’histoire de plus de 60 ans de chansons engagées contre le nucléaire civil ou militaire. À travers différentes langues, styles musicaux et époques nous avons sélectionné pour vous cette playlist :
Une chanson cocasse sur un tonton savant fou qui fait disparaître l’élite mondiale lors d’une démonstration de sa bombe atomique, si le sujet reste léger, 10 ans après Hiroshima, les questionnements sur la bombe entrent dans la chanson française sur un air plutôt antimilitariste.
Ce n’est pas la plus connue des chansons du célèbre chanteur toulousain mais elle est poignante. Enregistrée lors des débuts de la carrière de Nougaro, cette description d’un bombardement atomique par un simple badaud victime et une orchestration musicale parfaitement adéquate résonnent encore comme une alerte encore très audible sur ce à quoi ressemble le fait d’être victime d’un bombardement atomique.
Les allemands de Kraftwerk, pionniers du genre electro ont su reproduire le caractère insaisissable de la radioactivité dans l’air à travers ce morceau intemporel, créé à l’aide de synthétiseurs, des ondes sonores qui appelle à des émotions froides et tristes qui préfigureront l’avènement du genre new wave. Si le morceau conserve des paroles relativement neutres, quand le groupe jouera Radioactivity sur scène à partir des années 2010, ils le commenceront d’une introduction dédiée aux victimes d’Hiroshima/Nagasaki/Tchernobyl/Fukushima.
C’est un des morceaux les plus connus du chanteur jurassien et il fait d’abondantes divergences dans ce délire halluciné sur le sujet du nucléaire. Thiéfaine déclarera plus tard sur scène avoir écrit ce morceau en s’inspirant des manifestations auxquelles il avait participé contre l’ouverture de la centrale de Fessenheim.
Le mythique groupe de rock anglais sort en 1979 ce titre afin de dénoncer un obscur politicien réactionnaire australien (Joh Bjelke-Petersen) qui s’était fait une spécialité de déloger des populations aborigènes pour vendre leurs terres afin de développer des mines d’uranium et réaliser des essais d’armes nucléaires. Les britanniques ont réalisé 12 essais nucléaires en Australie sur le site de Maralinga de 1952 à 1957 entrainant de nombreuses conséquences sanitaires sur les Aborigènes et les soldats de la région.
Gil Scott-Heron, était un musicien, poète et romancier américain. Il est célèbre pour ses chansons-poèmes et textes engagés dont le très important "the revolution will not be televised". Ses textes militants ont abordé de très nombreux sujets dont le nucléaire : dans Shut ’um down il appelle sur un accompagnement soul-funk à la fermeture des centrales nucléaires face au risque des erreurs humaines dans leur exploitation, il faut dire que la même année s’est produit l’accident nucléaire de Three Mile Island...
C’est l’un des morceaux les plus connus du genre new-wave des années 80, et il conte l’histoire du l’avion et le pilote qui ont bombardé Hiroshima en 1945. S’il n’est pas explicitement engagé ce morceau nous place dans la tête des éxécutants qui ont largué la bombe et qui se sont pue se poser la question ou hésité sur la nécessité réelle d’employer une telle arme sur des populations civiles.
Auteur engagé, Castelhemis signe en 1982 l’un des morceaux les plus revendicatifs contre les centrales nucléaires de la chanson française. Soulignant qu’une centrale nucléaire n’est pas une installation infaillible comme toute autre technologie contrairement à ce que les décideurs tentaient alors de faire croire. 4 ans plus tard Tchernobyl rappellera tout le monde à l’ordre.
L’un des tubes de la Movida espagnole, le mouvement culturel post-franquiste qui embrasera les pistes des discothèques du monde entier commence pourtant avec un couplet acide : « la bombe a explosé, les radiations grillent et nuancent le bleu du ciel »… Et si on allait à la plage, nager dans l’eau fluorescente sous la chaleur d’un vent radioactif ? Et vous vous feriez quoi si vous saviez que le monde est foutu ? Sous un air débonnaire une chanson qui reflète l’ambiance des dernières années de la Guerre Froide pendant lesquelles la bombe faisait encore partie des préoccupations principales de tout le monde.
Et si 99 ballons de baudruche traversaient une frontière du Rideau de fer, étaient pris pour une tentative d’invasion et déclenchaient une guerre nucléaire ? C’est le scénario de ce hit allemand des années 80 qui a su s’imposer dans le monde entier. Encore un morceau on ne peut plus vindicatif contre la bombe et les élites qui en ont le contrôle en plus d’être un classique des dancefloors.
Hymne antimilitariste des années 80 par Renaud encore au meilleur de sa forme, la chanson aborde brièvement le nucléaire civil et militaire.
Groupe de punk-hardcore japonais originaire d’Hiroshima, GAS aura eu une courte carrière de 1982 à 1986, plusieurs de leurs morceaux auront pour thème la dénonciation du crime d’Hiroshima et des armes nucléaires dont ce morceau sorti lors d’une période du groupe ou c’est une chanteuse qui prendra alors le micro.
Sting, ex-frontman de Police appellait à un message d’appel à la paix et à l’apaisement des tensions de la Guerre Froide à travers son morceau Russians qui scande :« J’espère que les russes aiment leurs enfants aussi ». C’est un morceau essentiel de la culture anti-militariste/pacifiste.
Du rap à la sauce années 80, cette petite production indépendante américaine aux sonorités hip hop old-school reste un morceau assez confidentiel et sur lequel il est difficile d’obtenir des informations mais son message est on ne peut plus clair contre les bombes atomiques. Le clip a gagné quelques prix dans le domaine de la réalisation indépendante. Les bombes c’est pas cool !
The Blue Hearts ont officié de 1985 à 1995, c’est l’un des groupes de punk-rock japonais les plus reconnus dont les compositions sont encore comparées aux Clash ou encore aux Sex Pistols. Leur tube Linda-Linda les propulsera dans le top 50 japonais mais c’est surtout leur morceau Chernobyl (チェルノブイリ) qui nous intéressera. Ce morceau aux sonorités ska leur vaudra même quelques problèmes avec leur label Medac Records car celui-ci était financé en grande par Mitsubishi, une entreprise liée à l’industrie nucléaire... le morceau finira par sortir en single sur un autre label. Les paroles nous placent vraisemblablement dans la tête d’un liquidateur qui ne veut pas aller à Tchernobyl et préférerait profiter de la vie…
Encore la Guerre Froide qui a marqué la pop-culture : l’une des grandes stars du reggae des années 80 a sorti l’album No nuclear wars dont le titre éponyme se présente comme un appel pacifiste global.
Peu de chances que vous en ayez entendu parler si vous ne gravitez pas dans la sphère des musiques underground : les anarcho-punks écossais d’Oi Polloi qui officient depuis 1981 n’ont écrit que des chansons militantes et bien souvent écologistes. Leur morceau Nuclear Waste résonne comme un réquisitoire contre les dangers de continuer à produire des déchets radioactifs ingérables et une ode aux énergies renouvelables. Le nucléaire est aussi un thème abordé en profondeur dans leur EP Resist the atomic menace.
Les Ludwig von 88, célèbre groupe de punk-alterno français à boite à rythmes, n’ont pas vraiment bâti leur carrière sur des chansons très engagées mais plutôt dans un délire flirtant avec l’absurde ou le dadaïsme. Pourtant force est de constater que le nucléaire est un sujet auxquels ils ont voué une haine féroce. Cs 137 sorti sur leur album Ce jour heureux est plein d’allégresse en 1990 est une ode au sacrifice des liquidateurs de Tchernobyl. La plume de Karim Berrouka (le chanteur devenu écrivain depuis) nous livre une véritable poésie du désespoir avec un grand souci du détail. Fait rare dans l’histoire de la musique, les Ludwig ont également sorti un album concept de six titres entièrement dédié au bombardement d’Hiroshima en 1995 – 50 ans après la catastrophe - là-aussi il n’y aura pas de place à l’humour habituel du groupe dans ce « film musical », où chaque titre est un chapitre de cette tragédie, accompagné d’un épais livret constitué de témoignages aussi divers que poignants.
Sorti sur le 11è album du talentueux chanteur français, Imprudence, Le dimanche à Tchernobyl souligne à travers des paroles quelque peu énigmatiques comment les conséquences de la catastrophe continueront d’irradier encore longtemps, et ce même après notre fin. Sur un fond instrumental aussi prodigieux que déprimant, on ne peut que pleurer la disparition de ce grand artiste, c’est toujours les meilleurs qui partent en premier...
Rankin Taxi est un pionnier de la scène reggae japonaise apparue à la fin des années 1980. Il s’agit ici d’une nouvelle version d’un morceau sorti en 1996, intitulé "Personne ne peut la voir, ni la sentir" (Dare ni mo mienai, nioi mo nai). Écrites dans les semaines qui ont suivi le début de l’accident de Fukushima, les paroles expriment l’angoisse de la population face aux substances radioactives rejetées par la centrale dans l’air et dans l’océan Pacifique. On notera la présence de Sarkozy dans les personnages dénoncés par le morceau.
Obscur groupe de la toujours florissante scène hardcore japonaise, Strange Factory est une bande de punks de Koriyama, une grande ville toute proche de la centrale nucléaire accidentée de Fukushima. Ayant choisi de rester dans la région malgré les retombées, ils ont décidé d’expier la rage que la catastrophe leur a inspiré à travers ce 45 tours . Une violence musicale inouïe proche du bruitisme, à l’image de ce qui s’est passé là-bas en 2011... Il faut aimer le genre !
Les enfants terribles de l’electro-clash française s’éloignaient eux aussi en 2013 de leur dérision habituelle dans ce morceau dédié à l’angoisse de la bombe. À travers des paroles simples et efficaces Rebekka Warrior renouvelle le genre des morceaux contre le nucléaire militaire avec cette chanson.
François Hollande avait promis de fermer la centrale vieillissante de Fessenheim avant 2016. Mais en 2018, rien n’avait encore changé et le duo de hiphop Zweierpasch, les jumeaux Felix et Till Neumann, rappaient dans cette chanson franco-allemande : Stop, Fessenheim, stop, il faut fermer la centrale. Si cette fermeture s’est enfin profilée, il aura fallu encore attendre le 30 juin 2020 pour que les 2 réacteurs de cette vieille carlingue soient arrêtés. Victoire !
Toujours dans la veine electro-clash, ce duo issu de la scène alternative et proche des milieux militants, notamment de la lutte contre CIGÉO, nous livre dans leur dernier album ce morceau à charge contre l’ANDRA et l’industrie nucléaire.
Une playlist assemblée par Benoît Skubich
Pour aller plus loin :
Parce que cette liste est loin d’être exhaustive et que le nucléaire peut-être considéré comme un sujet abondant dans la chanson mais que cette page est déjà très chargée en contenu multimedia nous rajoutons ici en vrac les suggestions reçues de nos visiteurs, à vous de piocher dans la caisse de disques pour vous en faire une idée :
Les Zoufris Maracas - La fée électricité
HK et les saltimbanks - Fukushima mon amour
Crass - Nagasaki nightmare
Flower Travellin’ Band - Hiroshima
Parabellum - La bombe et moa
Dick Annegarn - Tchernobyl blues
Jacques Higelin - Irradiés
André Bialek - La ptite centrale
Mopo Mogo - Pouvoir
Julos Beaucarne - Je me souviens
Arno Hintjes - Nuclear-Summer
Philippe Anciaux - Chooz, Chooz les Marrons Chauds - Si la Vie
Philippe Ancieux de l’album Survire à Couvin - Le tango du nucléaire
Dynamo IV - Bienvenue à la centrale nucléaire
François de Roubaix - Atolls à l’heure nucléaire du Capitaine Darret (1967)
Font et Val - La centrale nucléaire
La Rue Kétanou - L’âge nucléaire
Eric Meunier - Président Nucléaire
Kaba Joseph & Le Groupe Rythmique Ngoma - Bana T’Atomic Jazz
Olivia Ruiz - La java des bombes atomiques
Massive Attack Feat. Robert Del Naja, Grant Marshall & Horace Andy - Splitting The Atom
Sun Ra - Nuclear War
Fatboy Slim - Radioactivity (Exclusive Cover Version)
Electric Electric - La Centrale
Moving Ninja - Uranium
Duval MC - Sortir du nucléaire