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Sortir du nucléaire n°57



Printemps 2013

Nucléaire militaire

La bombe, c’est combien ?

Article paru dans la revue Sortir du nucléaire n°57 - Printemps 2013

 Nucléaire militaire


Un des arguments mis en avant par les promoteurs de l’arme nucléaire est son faible coût par rapport à la garantie de sécurité qu’elle apporterait. À l’heure où tous les budgets sociaux sont revus à la baisse, pour cause d’austérité, qu’en est-il réellement ?



Le chiffre mis en avant par les partisans de l’arme nucléaire est celui de 3,4 milliards d’euros par an. En fait, ce montant correspond à la part du budget du ministère de la Défense consacrée à la dissuasion. Un chiffre généralement rapporté à l’ensemble du budget de l’État — soit 1,2% —, histoire d’en minimiser l’importance ou au PIB : 0,2%. Mais qui représente tout de même 21% des crédits d’équipements militaires.

"3,4 milliards d’euros, c’est presque bon marché !" assurait l’amiral Édouard Guillaud, chef d’état-major des armées, devant les députés de la commission de la défense. Il serait "déraisonnable" de s’en priver à ce prix-là, surenchérissait Bruno Tertrais, ce thuriféraire notoire devenu l’expert incontournable des médias ! Michel Rocard venait quelques jours auparavant de lâcher sa "bombe" au micro de BFMTV sur de possibles économies pour le budget de l’État : "On supprime la force de dissuasion nucléaire, 16 milliards d’euros par an qui ne servent absolument à rien." Certes, il s’était trompé en indiquant le montant total prévu dans la dernière loi de programmation militaire qui s’étale sur… 5 ans !

Toujours est-il que le débat s’ouvre. Mais la levée de boucliers qui s’en est suivie montre qu’il s’agit bien d’une question sensible, et ce depuis le début de la mise en place de la force de frappe. "Vous ne trouverez nulle part dans le budget militaire, la possibilité de calculer exactement notre armement atomique. C’est très volontairement que nous l’avons fait", avait reconnu Pierre Messmer, ancien ministre de la Défense du général de Gaulle, dans une interview au magazine L’Express en 1973.

Aujourd’hui encore, il est impossible de reconstituer le coût total de l’arsenal nucléaire. L’agrégat élaboré par le ministère de la Défense comprend les études, la fabrication des armes et de leurs vecteurs, l’entretien programmé du matériel et l’infrastructure liés à la dissuasion ; mais elle ne comprend pas toutes les dépenses de fonctionnement (notamment formation, salaire, personnels…) ! Autre exemple : quelle part du coût des avions Rafale, utilisés pour des missions à la fois conventionnelles et nucléaires, est-elle intégrée dans le buget "nucléaire" ? Idem pour le porte-avions Charles de Gaulle qui sert également de base pour la force nucléaire aéroportée ? Et on peut ainsi multiplier les exemples avec le système de satellites sans lequel la force nucléaire est aveugle, les avions-ravitailleurs indispensables, eux aussi polyvalents, etc. Et là encore, nous sommes loin d’établir le coût total de la force nucléaire. L’arme nucléaire présente également cette particularité de générer des dépenses qui se poursuivront bien au-delà de son existence… En effet, l’élimination des armes nucléaires ne signifiera pas la fin des dépenses, avec le coût du démantèlement, de la gestion des déchets nucléaires militaires. Sans parler du coût social, environnemental, ni de celui provoqué par son utilisation ou par un accident !

Patrice Bouveret Observatoire des armements, www.obsarm.org

Audit atomique : Dans une étude réalisée par l’Observatoire des armements à la fin des années 1990, Bruno Barrillot avait estimé le coût de l’arsenal nucléaire français pour la période de 1945 à 2010 à 1500 milliards de francs. Une recherche qui s’inscrivait dans le cadre d’un programme international conduit par des fondations américaines. Y sont inclus le coût de fabrication, du déploiement, des systèmes de transmission et de contrôle, des estimations sur le démantèlement ainsi que le coût de la prolifération. Actualisées en euros, les dépenses réalisées par la France, de 1945 à nos jours, pour sa force de frappe s’élèvent à environ 380 milliards d’euros (valeur 2011).

Audit atomique. Le coût de l’arsenal nucléaire français 1945-2010, Éditions Observatoire des armements/CDRPC, février 1999, 376 pages, 27,50 € (port compris), à commander auprès de l’éditeur.

Le chiffre mis en avant par les partisans de l’arme nucléaire est celui de 3,4 milliards d’euros par an. En fait, ce montant correspond à la part du budget du ministère de la Défense consacrée à la dissuasion. Un chiffre généralement rapporté à l’ensemble du budget de l’État — soit 1,2% —, histoire d’en minimiser l’importance ou au PIB : 0,2%. Mais qui représente tout de même 21% des crédits d’équipements militaires.

"3,4 milliards d’euros, c’est presque bon marché !" assurait l’amiral Édouard Guillaud, chef d’état-major des armées, devant les députés de la commission de la défense. Il serait "déraisonnable" de s’en priver à ce prix-là, surenchérissait Bruno Tertrais, ce thuriféraire notoire devenu l’expert incontournable des médias ! Michel Rocard venait quelques jours auparavant de lâcher sa "bombe" au micro de BFMTV sur de possibles économies pour le budget de l’État : "On supprime la force de dissuasion nucléaire, 16 milliards d’euros par an qui ne servent absolument à rien." Certes, il s’était trompé en indiquant le montant total prévu dans la dernière loi de programmation militaire qui s’étale sur… 5 ans !

Toujours est-il que le débat s’ouvre. Mais la levée de boucliers qui s’en est suivie montre qu’il s’agit bien d’une question sensible, et ce depuis le début de la mise en place de la force de frappe. "Vous ne trouverez nulle part dans le budget militaire, la possibilité de calculer exactement notre armement atomique. C’est très volontairement que nous l’avons fait", avait reconnu Pierre Messmer, ancien ministre de la Défense du général de Gaulle, dans une interview au magazine L’Express en 1973.

Aujourd’hui encore, il est impossible de reconstituer le coût total de l’arsenal nucléaire. L’agrégat élaboré par le ministère de la Défense comprend les études, la fabrication des armes et de leurs vecteurs, l’entretien programmé du matériel et l’infrastructure liés à la dissuasion ; mais elle ne comprend pas toutes les dépenses de fonctionnement (notamment formation, salaire, personnels…) ! Autre exemple : quelle part du coût des avions Rafale, utilisés pour des missions à la fois conventionnelles et nucléaires, est-elle intégrée dans le buget "nucléaire" ? Idem pour le porte-avions Charles de Gaulle qui sert également de base pour la force nucléaire aéroportée ? Et on peut ainsi multiplier les exemples avec le système de satellites sans lequel la force nucléaire est aveugle, les avions-ravitailleurs indispensables, eux aussi polyvalents, etc. Et là encore, nous sommes loin d’établir le coût total de la force nucléaire. L’arme nucléaire présente également cette particularité de générer des dépenses qui se poursuivront bien au-delà de son existence… En effet, l’élimination des armes nucléaires ne signifiera pas la fin des dépenses, avec le coût du démantèlement, de la gestion des déchets nucléaires militaires. Sans parler du coût social, environnemental, ni de celui provoqué par son utilisation ou par un accident !

Patrice Bouveret Observatoire des armements, www.obsarm.org

Audit atomique : Dans une étude réalisée par l’Observatoire des armements à la fin des années 1990, Bruno Barrillot avait estimé le coût de l’arsenal nucléaire français pour la période de 1945 à 2010 à 1500 milliards de francs. Une recherche qui s’inscrivait dans le cadre d’un programme international conduit par des fondations américaines. Y sont inclus le coût de fabrication, du déploiement, des systèmes de transmission et de contrôle, des estimations sur le démantèlement ainsi que le coût de la prolifération. Actualisées en euros, les dépenses réalisées par la France, de 1945 à nos jours, pour sa force de frappe s’élèvent à environ 380 milliards d’euros (valeur 2011).

Audit atomique. Le coût de l’arsenal nucléaire français 1945-2010, Éditions Observatoire des armements/CDRPC, février 1999, 376 pages, 27,50 € (port compris), à commander auprès de l’éditeur.



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