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Sortir du nucléaire n°31



Juin 2006

Scénario

La France pourrait abandonner le nucléaire en 30-40 ans

Article paru dans la revue Sortir du nucléaire n°31 - Juin 2006

 Sortie du nucléaire
Article publié le : 1er juin 2006


Que se passerait-il si la France abandonnait le nucléaire civil, qui représente aujourd’hui près de 80% de sa production électrique, au profit d’énergies plus propres ?



Le cas a été étudié par l’institut de recherche américain, Institute for Energy and Environmental Research (IEER), qui joue un rôle de consultant sur les énergies alternatives auprès du conseil des gouverneurs des Etats américains. Il a publié un rapport en mai 2006, Low-Carbon Diet without Nukes in France (Faibles émissions de dioxyde de carbone sans nucléaire).

Etude américaine sur la France
Malgré son option majoritairement nucléaire, énergie dite propre, la France voit ses émissions de gaz à effet de serre augmenter à cause des transports polluants, l’étude démontre qu’avec des technologies déjà existantes et une nouvelle politique énergétique, le pays pourrait se passer du nucléaire d’ici trois ou quatre décennies et en même temps réduire les émissions de dioxyde de carbone de 40 pour cent.
Pour les partisans du nucléaire, la France est souvent présentée comme l’exemple à suivre puisqu’elle produit presque 80 pour cent de son électricité à partir du nucléaire, lequel produit une quantité négligeable de gaz à effet de serre. Le rapport de l’Institute for Energy and Environmental Research (IEER) est le premier à présenter les technologies et la politique énergétique qui permettent de respecter les mêmes choix de mode de vie et les mêmes options économiques qu’une politique énergétique basée sur la poursuite d’une forte production nucléaire et de fortes émissions de carbone, mais sans énergie nucléaire et avec une réduction substantielle des émissions de dioxyde de carbone.

“L’industrie nucléaire met en avant l’énergie nucléaire comme une des solutions pour lutter contre le réchauffement de la planète” déclare Annie Makhijani, coauteur du rapport et responsable scientifique à l’IEER. “Mais l’énergie nucléaire est, à long terme, à l’origine de graves problèmes par les risques liés à la prolifération, par les accidents nucléaires graves et par la vulnérabilité vis-à-vis du terrorisme. C’est un compromis qui n’est pas souhaitable. L’analyse de l’IEER montre qu’il est possible, même en France, d’envisager un avenir avec de faibles émissions de dioxyde de carbone, sans recourir à l’énergie nucléaire.”

En France, l’énergie nucléaire fournit 75 à 80 pour cent de l’électricité. En conséquence les émissions de carbone par unité de Produit national brut (PNB) sont parmi les plus basses des pays européens. Ainsi, à l’horizon 2008-12, selon le Protocole de Kyoto, la France devra seulement stabiliser ses émissions de gaz à effet de serre à leur niveau de 1990 alors que les autres pays européens sont tenus de réduire les leurs de 8 pour cent.

Le nucléaire n’empêche pas l’effet de serre
Pourtant, l’énergie nucléaire n’a pas pu empêcher l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre. L’étude montre qu’en dépit de la quasi élimination du fioul dans le secteur électrique français, à partir de 1973 et de la réduction du charbon, les émissions de gaz à effet de serre demeurent élevées et continuent de croître. Ceci tient au fait que les émissions de gaz à effet de serre sont dues au secteur des transports ainsi qu’à l’utilisation du fioul et du gaz naturel dans les secteurs résidentiel, commercial et industriel.

Selon le rapport, la difficulté n’est pas liée à une pénurie de sources d’énergie sans carbone mais réside dans le fait que les ressources sont affectées d’une façon disproportionnée à l’énergie nucléaire au détriment des autres énergies. Des études officielles, sur l’utilisation du plutonium comme combustible dans 20 réacteurs français, indiquent que ce secteur de l’énergie nucléaire est annuellement subventionné à hauteur d’environ 1 milliard d’euros. Pourtant, jusqu’à ces dernières années l’investissement total dans l’éolien n’avait même pas atteint le subventionnement accordé chaque année au plutonium.

“En l’absence d’importants progrès dans l’efficacité énergétique du secteur des transports et dans le chauffage résidentiel et commercial, il ne sera pas possible de réduire significativement les émissions de gaz à effet de serre en France” déclare le Dr Arjun Makhijani, président de l’IEER et coauteur du rapport. “Les technologies sont parvenues à un stade commercial ou pré-commercial. Malheureusement, la fascination des pouvoirs publics pour l’énergie nucléaire, qui se traduit, entre autres, par des subventions massives en faveur de la production du combustible au plutonium, réserve un rôle secondaire aux autres aspects de la politique énergétique.”

Faire appel aux technologies de pointe
L’IEER présente deux scénarios s’appuyant sur des projections économiques officielles de forte consommation d’énergie pour montrer que l’élimination progressive de l’énergie nucléaire se ferait sur une période de 30 à 40 ans avec, parallèlement, une mise en place de mécanismes de réduction importante des émissions de dioxyde de carbone. Les scénarios se tournent vers des technologies déjà commerciales et des technologies avancées pour atteindre 20 et 40 pour cent de réductions de CO2 avec une élimination progressive de l’énergie nucléaire. L’IEER admet qu’il faudra éliminer l’énergie nucléaire progressivement plutôt qu’abruptement, non seulement parce que celle-ci représente une large part de la production d’électricité mais aussi parce que l’abandon prématuré des centrales existantes risquerait de détourner des ressources économiques qui pourraient être investies dans une amélioration de l’efficacité énergétique et les énergies renouvelables, notamment l’éolien.

“Il est inévitable que pour aboutir au même pourcentage de réduction des émissions de dioxyde de carbone qu’aux Etats-Unis, la France devra faire plus largement appel aux technologies de pointe,” déclare le Dr Arjun Makhijani, l’auteur, en 2001, d’une étude similaire sur le secteur énergétique des Etats-Unis. “Mais le pays qui investit dans cet avenir se trouvera en position de leadership technique et économique pour la réduction des gaz à effet de serre.”

“La France a malheureusement choisi d’être le leader de la technologie nucléaire,” remarque Annie Makhijani. “Mais la France et le reste du monde ignorent les signes avant-coureurs, notamment la déclaration du leader du parti travailliste japonais, Ichiro Ozawa, selon lequel le secteur civil de l’énergie nucléaire pourrait produire du plutonium pour les armes nucléaires.”

Important changement de politique énergétique
La compagnie française AREVA, en majorité détenue par l’Etat français fournit des services de retraitement des combustibles irradiés aux électriciens japonais. Le Japon possède un important stock de plutonium séparé, dont une partie est entreposée en France et l’autre au Japon.

Le rapport note qu’un avenir sans émissions de carbone et sans énergie nucléaire pour la France, pour le milieu du 21ème siècle, fera appel à d’importants changements technologiques et de politique énergétique, notamment :
- des réglementations imposant une consommation d’essence de 2,4 litres/100 kilomètres aux voitures neuves dès 2020 et des améliorations de la consommation d’essence des voitures de livraisons et des camions.
- des améliorations des systèmes de chaleur et de refroidissement dans les secteurs résidentiel et commercial qui utilisent des technologies existantes comme la cogénération et les pompes à chaleur géothermiques.
- des achats de la part du gouvernement de technologies de pointe en vue de stimuler l’innovation au lieu de crédits d’impôts pour les technologies existantes.
- l’abandon du retraitement et l’arrêt des centrales nucléaires au fur et à mesure qu’elles atteignent la fin de leur durée de vie (40-45 ans après leur mise en service).
- une politique nationale pour mettre l’éolien, le gaz naturel et le pompage hydroélectrique et, dans le scénario faisant appel à des technologies très avancées, des cellules photovoltaïques solaires, au centre du secteur électrique.

Contact :

INSTITUTE FOR ENERGY AND ENVIRONMENTAL RESEARCH (IEER) Arjun Makhijani ou Annie Makhijani
Tél : (301) 270-5500
Fax : (301) 270-3029
e-mail : ieer@ieer.org

Le rapport intégral est téléchargeable sur le site web de l’IEER : https://www.ieer.org/reports/energy/france/

Le cas a été étudié par l’institut de recherche américain, Institute for Energy and Environmental Research (IEER), qui joue un rôle de consultant sur les énergies alternatives auprès du conseil des gouverneurs des Etats américains. Il a publié un rapport en mai 2006, Low-Carbon Diet without Nukes in France (Faibles émissions de dioxyde de carbone sans nucléaire).

Etude américaine sur la France
Malgré son option majoritairement nucléaire, énergie dite propre, la France voit ses émissions de gaz à effet de serre augmenter à cause des transports polluants, l’étude démontre qu’avec des technologies déjà existantes et une nouvelle politique énergétique, le pays pourrait se passer du nucléaire d’ici trois ou quatre décennies et en même temps réduire les émissions de dioxyde de carbone de 40 pour cent.
Pour les partisans du nucléaire, la France est souvent présentée comme l’exemple à suivre puisqu’elle produit presque 80 pour cent de son électricité à partir du nucléaire, lequel produit une quantité négligeable de gaz à effet de serre. Le rapport de l’Institute for Energy and Environmental Research (IEER) est le premier à présenter les technologies et la politique énergétique qui permettent de respecter les mêmes choix de mode de vie et les mêmes options économiques qu’une politique énergétique basée sur la poursuite d’une forte production nucléaire et de fortes émissions de carbone, mais sans énergie nucléaire et avec une réduction substantielle des émissions de dioxyde de carbone.

“L’industrie nucléaire met en avant l’énergie nucléaire comme une des solutions pour lutter contre le réchauffement de la planète” déclare Annie Makhijani, coauteur du rapport et responsable scientifique à l’IEER. “Mais l’énergie nucléaire est, à long terme, à l’origine de graves problèmes par les risques liés à la prolifération, par les accidents nucléaires graves et par la vulnérabilité vis-à-vis du terrorisme. C’est un compromis qui n’est pas souhaitable. L’analyse de l’IEER montre qu’il est possible, même en France, d’envisager un avenir avec de faibles émissions de dioxyde de carbone, sans recourir à l’énergie nucléaire.”

En France, l’énergie nucléaire fournit 75 à 80 pour cent de l’électricité. En conséquence les émissions de carbone par unité de Produit national brut (PNB) sont parmi les plus basses des pays européens. Ainsi, à l’horizon 2008-12, selon le Protocole de Kyoto, la France devra seulement stabiliser ses émissions de gaz à effet de serre à leur niveau de 1990 alors que les autres pays européens sont tenus de réduire les leurs de 8 pour cent.

Le nucléaire n’empêche pas l’effet de serre
Pourtant, l’énergie nucléaire n’a pas pu empêcher l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre. L’étude montre qu’en dépit de la quasi élimination du fioul dans le secteur électrique français, à partir de 1973 et de la réduction du charbon, les émissions de gaz à effet de serre demeurent élevées et continuent de croître. Ceci tient au fait que les émissions de gaz à effet de serre sont dues au secteur des transports ainsi qu’à l’utilisation du fioul et du gaz naturel dans les secteurs résidentiel, commercial et industriel.

Selon le rapport, la difficulté n’est pas liée à une pénurie de sources d’énergie sans carbone mais réside dans le fait que les ressources sont affectées d’une façon disproportionnée à l’énergie nucléaire au détriment des autres énergies. Des études officielles, sur l’utilisation du plutonium comme combustible dans 20 réacteurs français, indiquent que ce secteur de l’énergie nucléaire est annuellement subventionné à hauteur d’environ 1 milliard d’euros. Pourtant, jusqu’à ces dernières années l’investissement total dans l’éolien n’avait même pas atteint le subventionnement accordé chaque année au plutonium.

“En l’absence d’importants progrès dans l’efficacité énergétique du secteur des transports et dans le chauffage résidentiel et commercial, il ne sera pas possible de réduire significativement les émissions de gaz à effet de serre en France” déclare le Dr Arjun Makhijani, président de l’IEER et coauteur du rapport. “Les technologies sont parvenues à un stade commercial ou pré-commercial. Malheureusement, la fascination des pouvoirs publics pour l’énergie nucléaire, qui se traduit, entre autres, par des subventions massives en faveur de la production du combustible au plutonium, réserve un rôle secondaire aux autres aspects de la politique énergétique.”

Faire appel aux technologies de pointe
L’IEER présente deux scénarios s’appuyant sur des projections économiques officielles de forte consommation d’énergie pour montrer que l’élimination progressive de l’énergie nucléaire se ferait sur une période de 30 à 40 ans avec, parallèlement, une mise en place de mécanismes de réduction importante des émissions de dioxyde de carbone. Les scénarios se tournent vers des technologies déjà commerciales et des technologies avancées pour atteindre 20 et 40 pour cent de réductions de CO2 avec une élimination progressive de l’énergie nucléaire. L’IEER admet qu’il faudra éliminer l’énergie nucléaire progressivement plutôt qu’abruptement, non seulement parce que celle-ci représente une large part de la production d’électricité mais aussi parce que l’abandon prématuré des centrales existantes risquerait de détourner des ressources économiques qui pourraient être investies dans une amélioration de l’efficacité énergétique et les énergies renouvelables, notamment l’éolien.

“Il est inévitable que pour aboutir au même pourcentage de réduction des émissions de dioxyde de carbone qu’aux Etats-Unis, la France devra faire plus largement appel aux technologies de pointe,” déclare le Dr Arjun Makhijani, l’auteur, en 2001, d’une étude similaire sur le secteur énergétique des Etats-Unis. “Mais le pays qui investit dans cet avenir se trouvera en position de leadership technique et économique pour la réduction des gaz à effet de serre.”

“La France a malheureusement choisi d’être le leader de la technologie nucléaire,” remarque Annie Makhijani. “Mais la France et le reste du monde ignorent les signes avant-coureurs, notamment la déclaration du leader du parti travailliste japonais, Ichiro Ozawa, selon lequel le secteur civil de l’énergie nucléaire pourrait produire du plutonium pour les armes nucléaires.”

Important changement de politique énergétique
La compagnie française AREVA, en majorité détenue par l’Etat français fournit des services de retraitement des combustibles irradiés aux électriciens japonais. Le Japon possède un important stock de plutonium séparé, dont une partie est entreposée en France et l’autre au Japon.

Le rapport note qu’un avenir sans émissions de carbone et sans énergie nucléaire pour la France, pour le milieu du 21ème siècle, fera appel à d’importants changements technologiques et de politique énergétique, notamment :
- des réglementations imposant une consommation d’essence de 2,4 litres/100 kilomètres aux voitures neuves dès 2020 et des améliorations de la consommation d’essence des voitures de livraisons et des camions.
- des améliorations des systèmes de chaleur et de refroidissement dans les secteurs résidentiel et commercial qui utilisent des technologies existantes comme la cogénération et les pompes à chaleur géothermiques.
- des achats de la part du gouvernement de technologies de pointe en vue de stimuler l’innovation au lieu de crédits d’impôts pour les technologies existantes.
- l’abandon du retraitement et l’arrêt des centrales nucléaires au fur et à mesure qu’elles atteignent la fin de leur durée de vie (40-45 ans après leur mise en service).
- une politique nationale pour mettre l’éolien, le gaz naturel et le pompage hydroélectrique et, dans le scénario faisant appel à des technologies très avancées, des cellules photovoltaïques solaires, au centre du secteur électrique.

Contact :

INSTITUTE FOR ENERGY AND ENVIRONMENTAL RESEARCH (IEER) Arjun Makhijani ou Annie Makhijani
Tél : (301) 270-5500
Fax : (301) 270-3029
e-mail : ieer@ieer.org

Le rapport intégral est téléchargeable sur le site web de l’IEER : https://www.ieer.org/reports/energy/france/



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