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Sortir du nucléaire n°78



Été 2018

Figure de la lutte

Helen Caldicott : le nucléaire n’est pas un roman

Article paru dans la revue Sortir du nucléaire n°78 - Été 2018

 Luttes et actions


Pour évoquer la vie foisonnante et la lutte sur tant de fronts de ce personnage audacieux et parfois contesté, délimitons d’emblée la géographie de son combat : l’arrêt du nucléaire et la protection de la santé. Femme, mère, militante, médecin pédiatre, Helen Caldicott peut donner l’impression de trop multiplier les initiatives et mélanger les rôles.

C’est pourtant sa principale force.



Née à Melbourne en 1938, la lecture, en 1957, du roman On the Beach  [1], lui ouvre les yeux sur les dangers du nucléaire. Elle y découvre celles et ceux qui attendent, en Australie, l’arrivée de radiations mortelles provoquées par une guerre nucléaire dans l’hémisphère nord. Elle y lit les conséquences réelles de ce qui reste jusqu’alors pour tou.tes, en pleine “guerre froide“, une abstraction.

Helen est diplômée de médecine en 1961 et, à partir de 1973, exerce à l’hôpital pour enfants d’Adelaïde (Australie). Elle intègre en 1977 celui de Boston (États-Unis), enseignant la pédiatrie à la Harvard Medical School. Parallèlement, la voici à l’origine, dès 1971, du mouvement australien et néo-zélandais contre les essais nucléaires français dans le Pacifique, et, en 1975, d’une campagne alertant les syndicats australiens sur les dangers sanitaires et militaires du nucléaire. Trois ans plus tard, elle fonde l’association Physicians for Social Responsibility  [2], regroupant vingt-trois mille médecins, afin d’informer la population. En 1980, c’est la Nuclear Freeze Voter Initiative Campaign  [3], destinée à faire pression sur les U.S.A. et l’U.R.S.S. pour le gel des essais, de la production et du déploiement des armes nucléaires. La même année, elle abandonne sa carrière pour se consacrer au militantisme. “La fission de l’atome a tout changé, sauf la façon de penser de l’homme. Nous nous acheminons donc vers une catastrophe sans précédent.“ déclare-t-elle après Einstein, dans le documentaire canadien de 1982, If you love this planet  [4]. Enregistrement d’une conférence donnée par le Dr Helen Caldicott au Plattsburg State College, l’administration de Ronald Reagan y voit une “propagande politique étrangère“ et lui assure la notoriété en faisant interdire le film aux USA. Le film n’en obtient pas moins l’Oscar du meilleur court métrage documentaire.

Fondatrice en 1983 du Women’s Action for Nuclear Disarmament  [5] visant à réduire l’usage de l’énergie nucléaire, nominée en 1985 au Prix Nobel de la Paix, Helen Caldicott ancre l’originalité et la force de son discours dans le corps de la vie. Elle imagine envahir l’assemblée gouvernementale avec mille bébés pour éveiller les consciences à la protection des plus fragiles, interpelle ses auditoires en appelant à la lutte : une centrale nucléaire près de chez vous ? Battez-vous jusqu’à obtenir sa fermeture !

Exposant le point de vue du médecin, elle démonte le discours des gouvernants. On lui reproche son émotivité, ou de détourner sa fonction de praticienne ? Elle assume, affirme réagir en “femme“, en tenant compte du corps et des affects. Car, en cas de “guerre“ nucléaire, aurions-nous le temps de courir aux abris que nous le regretterions, tant seraient atroces les conditions de survie : infrastructures détruites, raréfaction du personnel médical, disparition de millions de personnes, épidémies, manque d’oxygène, couche d’ozone en lambeaux, écosystème carbonisé, etc.

C’est contre cette réalité insuffisamment exprimée qu’elle entend lutter.

Hélène Caldicott en quelques prix

Helen Caldicott a obtenu 21 doctorats honorifiques – 1983, If you love this planet (participation), Oscar du meilleur court métrage documentaire – 1985, nominée au Prix Nobel de la Paix – 1992, Peace Abbey Courage of Conscience Award – 2003, Prix de la Fondation Lannan – 2006, Prix australien de la Paix.

Hélène Caldicott en quelques œuvres

1979, Nuclear Madness – 1984, Missile Envy – 2001 et 2004, The New Nuclear Danger : George W. Bush’s Military Industrial Complex – 2006, Nuclear Power Is Not the Answer to Global Warming or Anything Else – 1982, Participe au documentaire canadien If You Love This Planet – 2004, Film de sa nièce la réalisatrice Anna Broinowski – Helen’s War : portrait of a dissident.

Marie Gagnard Volta


Notes

[1Roman de Nevil Shute.

[2Des médecins pour la responsabilité sociale.

[3Campagne des électeurs pour le gel du nucléaire.

[4Si cette planète vous tient à cœur.

[5Mouvement des femmes pour le désarmement nucléaire, ensuite rebaptisé Women’s Action for New Directions (Mouvement des femmes pour des orientations nouvelles).

Née à Melbourne en 1938, la lecture, en 1957, du roman On the Beach  [1], lui ouvre les yeux sur les dangers du nucléaire. Elle y découvre celles et ceux qui attendent, en Australie, l’arrivée de radiations mortelles provoquées par une guerre nucléaire dans l’hémisphère nord. Elle y lit les conséquences réelles de ce qui reste jusqu’alors pour tou.tes, en pleine “guerre froide“, une abstraction.

Helen est diplômée de médecine en 1961 et, à partir de 1973, exerce à l’hôpital pour enfants d’Adelaïde (Australie). Elle intègre en 1977 celui de Boston (États-Unis), enseignant la pédiatrie à la Harvard Medical School. Parallèlement, la voici à l’origine, dès 1971, du mouvement australien et néo-zélandais contre les essais nucléaires français dans le Pacifique, et, en 1975, d’une campagne alertant les syndicats australiens sur les dangers sanitaires et militaires du nucléaire. Trois ans plus tard, elle fonde l’association Physicians for Social Responsibility  [2], regroupant vingt-trois mille médecins, afin d’informer la population. En 1980, c’est la Nuclear Freeze Voter Initiative Campaign  [3], destinée à faire pression sur les U.S.A. et l’U.R.S.S. pour le gel des essais, de la production et du déploiement des armes nucléaires. La même année, elle abandonne sa carrière pour se consacrer au militantisme. “La fission de l’atome a tout changé, sauf la façon de penser de l’homme. Nous nous acheminons donc vers une catastrophe sans précédent.“ déclare-t-elle après Einstein, dans le documentaire canadien de 1982, If you love this planet  [4]. Enregistrement d’une conférence donnée par le Dr Helen Caldicott au Plattsburg State College, l’administration de Ronald Reagan y voit une “propagande politique étrangère“ et lui assure la notoriété en faisant interdire le film aux USA. Le film n’en obtient pas moins l’Oscar du meilleur court métrage documentaire.

Fondatrice en 1983 du Women’s Action for Nuclear Disarmament  [5] visant à réduire l’usage de l’énergie nucléaire, nominée en 1985 au Prix Nobel de la Paix, Helen Caldicott ancre l’originalité et la force de son discours dans le corps de la vie. Elle imagine envahir l’assemblée gouvernementale avec mille bébés pour éveiller les consciences à la protection des plus fragiles, interpelle ses auditoires en appelant à la lutte : une centrale nucléaire près de chez vous ? Battez-vous jusqu’à obtenir sa fermeture !

Exposant le point de vue du médecin, elle démonte le discours des gouvernants. On lui reproche son émotivité, ou de détourner sa fonction de praticienne ? Elle assume, affirme réagir en “femme“, en tenant compte du corps et des affects. Car, en cas de “guerre“ nucléaire, aurions-nous le temps de courir aux abris que nous le regretterions, tant seraient atroces les conditions de survie : infrastructures détruites, raréfaction du personnel médical, disparition de millions de personnes, épidémies, manque d’oxygène, couche d’ozone en lambeaux, écosystème carbonisé, etc.

C’est contre cette réalité insuffisamment exprimée qu’elle entend lutter.

Hélène Caldicott en quelques prix

Helen Caldicott a obtenu 21 doctorats honorifiques – 1983, If you love this planet (participation), Oscar du meilleur court métrage documentaire – 1985, nominée au Prix Nobel de la Paix – 1992, Peace Abbey Courage of Conscience Award – 2003, Prix de la Fondation Lannan – 2006, Prix australien de la Paix.

Hélène Caldicott en quelques œuvres

1979, Nuclear Madness – 1984, Missile Envy – 2001 et 2004, The New Nuclear Danger : George W. Bush’s Military Industrial Complex – 2006, Nuclear Power Is Not the Answer to Global Warming or Anything Else – 1982, Participe au documentaire canadien If You Love This Planet – 2004, Film de sa nièce la réalisatrice Anna Broinowski – Helen’s War : portrait of a dissident.

Marie Gagnard Volta



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