13 juillet 2023
D’abord 2, puis 4, puis 8 réacteurs touchés. Encore une histoire au compte-goutte et au long court comme l’industrie nucléaire sait si bien faire. Au Bugey, au Tricastin (Auvergne-Rhône-Alpes), mais aussi à Dampierre (centre - val de Loire) et à Gravelines (Hauts de France), des équipements importants pour la sûreté n’ont pas été fixés conformément aux plans. Les diamètres mais aussi le nombre et l’emplacement des systèmes de fixations de ces matériels, qui les empêchent de bouger en cas de choc et donc de s’abîmer, ne sont pas ce qu’ils devraient être. Les plans de construction n’ont pas été respectés. Et EDF a mis plus de 40 ans à s’en apercevoir.
La première annonce d’EDF remonte à 2021. Des contrôles de conformité faits à l’occasion des 4ème visites décennales du réacteur 1 de la centrale du Tricastin et du réacteur 2 de celle du Bugey ont révélé ces "anomalies" dites génériques (de même nature et communes à plusieurs réacteurs). EDF a annoncé que les contrôles de son parc nucléaire s’étaleraient jusqu’en 2024. Une durée particulièrement longue au regard des enjeux de sûreté, puis le risque lorsque des équipements importants sont mal fixés, c’est qu’un choc provoqué par exemple par un séisme ou une explosion ou la chute d’un objet ou encore par un accident de manutention, ne les abîme et que ces équipements ne puissent alors plus fonctionner. La liste des équipements affectés n’est pas communiquée par l’industriel. Pas plus que le détail des "anomalies" (nombre de fixations impactées) ni les raisons de ces non-conformités aux plans de conception.
EDF avait annoncé qu’une mise à jour de sa déclaration serait faite chaque année (et non au fur et à mesure de ses contrôles). Au printemps 2022, il avait révélé que 2 autres réacteurs, toujours au Tricastin et au Bugey (puisque ce sont les 1ères centrales à passer leur 4ème visite décennales) étaient également touchés. En plus de Tricastin 1 et de Bugey, il faut compter Tricastin 2 et Bugey 4. Et de 4 donc.
Depuis l’industriel a poursuivi ses 4èmes visites décennales. Sans surprise, d’autres réacteurs de ces mêmes centrales sont touchés par les mêmes problèmes : Tricastin 3 et Bugey 5. Mais aussi sur d’autres centrales nucléaires qui ont depuis entamés leur 4ème visite décennale : le réacteur 1 de Dampierre et le réacteur 1 de Gravelines. Et de 8.
On peut s’attendre à ce que les découvertes s’étendent et se multiplient aux fils des contrôles. La question est : pourquoi ne pas avoir vérifié ces fixations plus tôt ? Une autre question pourrait-être : pourquoi les plans de conception n’ont pas été respectés à la construction ? Et logiquement, on pourrait alors se demander : si les fixations n’ont pas été faites conformément aux plans et que c’est resté inaperçu durant plus de 40 ans, et ce alors même qu’il y a un véritable enjeu pour la sûreté des réacteurs nucléaires, qu’est-ce qui nous dit que d’autres erreurs du même acabit n’ont pas aussi été faites ailleurs et n’ont pas encore été découvertes ? De quoi questionner très sérieusement de l’existence d’une quelconque certitude de sûreté dans les réacteurs nucléaires. De quoi douter aussi très sérieusement, ou encore un peu pus, de la compétence d’EDF en maître d’ouvrage et en exploitant nucléaire.
L.B.
Défauts d’ancrage d’équipements importants pour la sûreté de quatre réacteurs des centrales nucléaires du Tricastin, du Bugey, de Dampierre-en-Burly et de Gravelines
Publié le 13/07/2023
Centrale nucléaire du Tricastin Réacteurs de 900 MWe - EDF
Centrale nucléaire du Bugey Réacteurs de 900 MWe - EDF
Centrale nucléaire de Dampierre-en-Burly Réacteurs de 900 MWe - EDF
Centrale nucléaire de Gravelines Réacteurs de 900 MWe - EDF
Le 8 juin 2023, EDF a déclaré à l’ASN un événement significatif pour la sûreté portant sur des défauts d’ancrage au génie civil de certains équipements importants pour la sûreté. Ces défauts concernent le réacteur 3 de la centrale nucléaire du Tricastin, le réacteur 5 de la centrale nucléaire du Bugey, le réacteur 1 de la centrale nucléaire de Dampierre-en-Burly et le réacteur 1 de la centrale nucléaire de Gravelines.
Dans le cadre du contrôle de l’état de ses installations, EDF vérifie la conformité des ancrages [1] au génie civil des équipements [2] importants pour la sûreté. EDF met actuellement en œuvre des contrôles de tous ses réacteurs qui doivent être achevés avant fin 2024.
La déclaration d’EDF constitue une deuxième mise à jour de celle du 21 septembre 2021. Jusqu’à présent, quatre réacteurs étaient concernés : les réacteurs 1 et 2 de la centrale nucléaire du Tricastin et les réacteurs 2 et 4 de la centrale nucléaire du Bugey. L’événement significatif concerne maintenant huit réacteurs.
Les nouveaux contrôles ont mis en évidence des écarts sur certains ancrages portant notamment sur le nombre, le diamètre et l’implantation des chevilles. Ces écarts datent de la construction des réacteurs et auraient pu remettre en cause la tenue des équipements supportés en cas de séisme.
Cet événement n’a pas eu de conséquence sur, les installations, les personnes et l’environnement. Compte tenu de ses conséquences potentielles pour ces réacteurs, cet événement est classé au niveau 1 de l’échelle INES (échelle internationale des événements nucléaires et radiologiques graduée de 0 à 7 par ordre croissant de gravité).
Les écarts constatés ont été corrigés par EDF.
EDF poursuit les contrôles sur ses autres réacteurs.