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Des accidents nucléaires partout

France : Dampierre : Problème de refroidissement du réacteur 3

Matériel mal fixé et débit insuffisant : les vérifications et les diagnostics d’EDF en question




7 décembre 2021


Le 27 novembre 2021, EDF s’apprête à redémarrer le réacteur 3 de la centrale nucléaire de Dampierre (Centre - Val de Loire) après avoir changé le combustible et "réalisé de nombreuses opérations de maintenance, contrôles et essais de matériels" annonce l’exploitant. La température du circuit primaire dans lequel baignent les assemblages de combustible monte progressivement [1] . Le redémarrage d’un réacteur nucléaire est une phase sensible, différents critères de pression et de température doivent être scrupuleusement respectés. Mais un problème survient sur le circuit qui permet le refroidissement du réacteur (le circuit RRA [2]) : il n’y a pas assez de débit. Une des ses vannes ne s’ouvre pas.


EDF envoie des équipes voir ce qu’il se passe : une partie de cette vanne n’est pas correctement fixée. Ce qui rend impossible toute commande d’ouverture ou de fermeture à distance. EDF ne dit pas si cette vanne du circuit RRA a été l’objet de maintenance ou de vérifications durant les 2 mois d’arrêt du réacteur. Il aura fallu plus de 10 heures à l’exploitant nucléaire pour remettre en état la vanne et que le circuit RRA retrouve une configuration conforme. L’industriel a dû utiliser une autre voie pour refroidir le réacteur.

Le défaut de fixation du dispositif qui permet la commande de la vanne du circuit RRA n’a pas été détecté avant que le redémarrage soit lancé. Étonnant que l’industriel n’ait pas pris le temps de vérifier l’état des circuits nécessaires avant. Étonnant aussi, si une intervention de maintenance a été faite sur cette vanne, que le contrôle technique qui s’ensuit n’ait pas détecté la mauvaise fixation.
Il apparaît encore plus étonnant qu’EDF n’ait rien fait avant de se trouver devant le fait accompli, avec une réaction nucléaire lancée mais un débit du circuit de refroidissement inférieur au minimum requis, quand on sait que quelques jours avant, le 24 novembre, une baisse de débit avait déjà été observée. Mais personne n’a fait le lien avec un possible problème de fonctionnement du circuit de refroidissement.

Maintenance de qualité insuffisante, contrôles incomplets, laxisme dans les vérifications des configurations des circuits, manque de questionnement face à un dysfonctionnement manifeste, par cet incident EDF se montre en piètre industriel. Un industriel aux commandes d’un réacteur nucléaire. Les faits ont été déclarés le 2 décembre 2021 comme étant significatifs [3] pour la sûreté [4] - c’est à dire qu’ils ont une importance particulière en terme de conséquences potentielles ou réelles puisque EDF a directement mis à mal les dispositifs qui servent à éviter un accident dans l’installation nucléaire . Ils n’ont toutefois eu aucune conséquence réelle souligne l’industriel, puisque la seconde voie du circuit RRA a bien fonctionné. Heureusement qu’elle n’avait pas elle aussi un défaut de configuration qui n’aurait pas été détecté.

Ce que dit EDF :

  • Actualité de l’unité de production n°3 de la centrale de Dampierre-en-Burly

Publié le 18/09/2021

Le réacteur n°3 de la centrale de Dampierre-en-Burly a été arrêté samedi 18 septembre 2021 à 00h18. Cet arrêt programmé permettra de renouveler une partie de son combustible et de procéder à de nombreuses opérations de maintenance, des contrôles et des essais de matériels.

Ces interventions ont été minutieusement préparées pendant plusieurs mois par les ingénieurs et techniciens du site et se déroulent selon un planning très précis. Au total, plus de 1 000 salariés EDF et prestataires sont mobilisés. 80 entreprises interviendront

https://www.edf.fr/la-centrale-nucleaire-de-dampierre-en-burly/les-actualites-de-la-centrale-nucleaire-de-dampierre/actualite-de-l-unite-de-production-ndeg3-de-la-centrale-de-dampierre-en-burly-0

  • Déclaration d’un événement significatif de sûreté de niveau 1 relatif à la détection tardive de l’indisponibilité partielle d’un circuit

Evénement sûreté

Publié le 07/12/2021

Chaque réacteur nucléaire est équipé d’un circuit de Refroidissement du Réacteur à l’Arrêt (circuit RRA), qui assure le refroidissement des installations lorsque le réacteur est arrêté. Ce circuit est composé de 2 voies identiques A et B et redondantes, chacune capable d’assurer la mission de refroidissement. Ce circuit comporte plusieurs vannes pilotées depuis la salle de commande, qui permettent de régler la température du circuit primaire.

Le 27 novembre 2021, l’unité de production n°3 de la centrale de Dampierre-en-Burly est à l’arrêt pour maintenance programmée. Les premières opérations de redémarrage, qui consistent à monter la température du circuit primaire principal à 90°C, sont en cours. Le refroidissement du réacteur est assuré par le circuit RRA.

A 5h30, les équipes de pilotage situées en salle de commande, détectent que l’ouverture de l’une des vannes du circuit RRA n’est pas conforme à celle demandée depuis le poste de pilotage. Cet écart d’ouverture génère un débit du circuit RRA inférieur à celui requis par les spécifications techniques d’exploitation, rendant le circuit partiellement indisponible.

L’intervention des équipes de maintenance sur la vanne permet d’identifier que le capot du positionneur [5] de la vanne n’était pas conformément fixé. Une intervention sur le positionneur est réalisée et permet de retrouver une configuration conforme du circuit RRA à 16h25.

Après analyse, il s’avère que la baisse de débit avait déjà été observée sur le circuit RRA le 24 novembre à 3h45, sans détecter l’indisponibilité partielle du circuit.

Cet événement n’a pas eu de conséquence réelle sur la sûreté des installations, le refroidissement ayant été assuré par la seconde voie du circuit RRA. Cependant, en raison du non-respect des spécifications technique d’exploitation et de sa détection tardive, la direction de la centrale nucléaire de Dampierre-en-Burly a déclaré le 2 décembre 2021 à l’Autorité de sûreté nucléaire, un événement significatif de sûreté au niveau 1 de l’échelle INES qui en compte 7.

https://www.edf.fr/la-centrale-nucleaire-de-dampierre-en-burly/les-actualites-de-la-centrale-nucleaire-de-dampierre/declaration-d-un-evenement-significatif-de-surete-de-niveau-1-relatif-a-la-detection-tardive-de-l-indisponibilite-partielle-d-un-circuit


Ce que dit l’ASN :

Non-respect de la conduite à tenir prévue par les règles générales d’exploitation du réacteur 3

Publié le 10/12/2021

Centrale nucléaire de Dampierre-en-Burly Réacteurs de 900 MWe - EDF

Le 2 décembre 2021, l’exploitant de la centrale nucléaire de Dampierre-en-Burly a déclaré à l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) un évènement significatif pour la sûreté relatif au non-respect de la conduite à tenir prévue par les règles générales d’exploitation du réacteur 3 concernant l’indisponibilité partielle du circuit de refroidissement du réacteur à l’arrêt (RRA).

Les règles générales d’exploitation sont un recueil de règles approuvées par l’ASN qui définissent le domaine autorisé de fonctionnement de l’installation et les prescriptions de conduite des réacteurs associées. Elles prescrivent notamment les délais maximums de réparation et les conduites à tenir en cas d’indisponibilité des systèmes requis pour assurer la sûreté des réacteurs.

Le circuit de refroidissement du réacteur à l’arrêt (RRA) assure l’évacuation de la puissance résiduelle dégagée par le combustible, quand il est en place dans la cuve du réacteur, pendant les périodes d’arrêt. Chaque réacteur dispose de deux voies RRA indépendantes, constituées notamment de plusieurs vannes pilotées depuis la salle de commande du réacteur.

Durant les opérations de redémarrage du réacteur 3 de Dampierre-en-Burly, le 27 novembre 2021, EDF a constaté un mauvais positionnement d’une vanne du circuit RRA provoquant une baisse de débit dans une voie de ce circuit. Cette situation ne permettait pas d’obtenir les débits requis pour poursuivre les opérations de redémarrage du réacteur. La vanne a été remise dans la bonne position dès la découverte de l’écart.

Les investigations menées a postériori par l’exploitant ont révélé que cette baisse du débit du circuit RRA avait été observée dès le 24 novembre 2021, sans que cette situation ait fait l’objet d’une intervention d’EDF. Dans ces conditions le circuit RRA a été considéré comme partiellement indisponible depuis cette date. Les règles générales d’exploitation, qui prévoient une réparation sous 3 jours, n’ont donc pas été respectées a posteriori.

Toutefois, la seconde voie du circuit RRA est restée disponible pendant toute cette période ; celle-ci est suffisante pour assurer le refroidissement du combustible.

Cet événement n’a pas eu de conséquence sur les installations, les personnes et l’environnement. Toutefois, compte tenu de la détection tardive de l’indisponibilité partielle d’un système requis par les règles générales d’exploitation, cet événement a été classé au niveau 1 de l’échelle INES (échelle internationale des événements nucléaires et radiologiques, graduée de 0 à 7 par ordre croissant de gravité).

https://www.asn.fr/l-asn-controle/actualites-du-controle/installations-nucleaires/avis-d-incident-des-installations-nucleaires/non-respect-de-la-conduite-a-tenir-prevue-par-les-regles-generales-d-exploitation-du-reacteur-33


[1Le circuit primaire est un circuit fermé, contenant de l’eau sous pression. Cette eau s’échauffe dans la cuve du réacteur au contact des éléments combustibles. Dans les générateurs de vapeur, elle cède la chaleur acquise à l’eau du circuit secondaire pour produire la vapeur destinée à entraîner le groupe turboalternateur. Le circuit primaire permet de refroidir le combustible contenu dans la cuve du réacteur en cédant sa chaleur par l’intermédiaire des générateurs de vapeur lorsqu’il produit de l’électricité ou par l’intermédiaire du circuit de refroidissement à l’arrêt lorsqu’il est en cours de redémarrage après rechargement en combustible. La température du circuit primaire principal est encadrée par des limites afin de garantir le maintien dans un état sûr des installations en cas d’accident. https://www.asn.fr/Lexique/C/Circuit-primaire

[2RRA : Circuit de refroidissement du réacteur à l’arrêt. Ce circuit assure l’évacuation de la puissance résiduelle dégagée par le combustible, quand il est encore dans la cuve, pendant les périodes d’arrêt. https://www.asn.fr/lexique/R/RRA

[3Événements significatifs : incidents ou accidents présentant une importance particulière en matière, notamment, de conséquences réelles ou potentielles sur les travailleurs, le public, les patients ou l’environnement. https://www.asn.fr/Lexique/E/Evenement-significatif

[4La sûreté nucléaire est l’ensemble des dispositions techniques et des mesures d’organisation relatives à la conception, à la construction, au fonctionnement, à l’arrêt et au démantèlement des installations nucléaires de base, ainsi qu’au transport des substances radioactives, prises en vue de prévenir les accidents ou d’en limiter les effets. https://www.asn.fr/Lexique/S/Surete-nucleaire

[5le positionneur est un mécanisme utilisé pour piloter à distance l’ouverture d’une vanne


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Installation(s) concernée(s)

Dampierre-en-Burly

Nombre d'événements enregistrés dans notre base de données sur cette installation
94