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Des accidents nucléaires partout

France : Cattenom : Capteurs HS et difficultés de réparations

Le réacteur 1 redémarre avec un incident significatif pour la sûreté




24 juin 2021


20 juin 2021, le réacteur 1 de la centrale nucléaire de Cattenom (Moselle) redémarre après 3 mois de travaux d’entretien. Et avec plusieurs capteurs de pression en panne. Mal réglés ou défectueux ? EDF ne le dit pas. Quoiqu’il en soit, les tests et vérifications de ces 3 derniers mois sont manifestement passés à côté. Embêtant pour des équipements qui contribuent à déclencher les arrêts d’urgence du réacteur nucléaire.


Les capteurs en question sont des capteurs de pression au niveau de la turbine  [1] . Si la vapeur produite avec la chaleur du cœur du réacteur nucléaire ne peut plus s’échapper, sa puissance non plus. La pression est donc un des paramètres essentiels à surveiller dans une centrale nucléaire, tout comme la température.

Or deux des quatre capteurs équipant la turbine du réacteur 1 se sont avérés dysfonctionner. Dès le 20 juin pour l’un, l’autre a été repéré le lendemain. Ce second capteur avait aussi pour fonction de déclencher l’ouverture des soupapes pour permettre à la vapeur de s’échapper en cas de blocage au niveau de la turbine. Des capteurs importants pour surveiller le fonctionnement de l’installation et éviter un accident. Dont les dysfonctionnements n’ont pas été détectés par l’exploitant malgré des mois de travaux. À moins que ne soient justement des opérations de maintenance réalisées sur ces équipements durant l’arrêt qui n’ont été correctement réalisées ? D’après les informations de l’Autorité de sûreté nucléaire, pour ces deux capteurs, le problème venait d’une vanne qui était dans une mauvaise position. Dix jours avant, le réacteur 3 du site nucléaire, en pleine visite décennale, a été entièrement privé d’électricité à cause d’une intervention de maintenance. La ventilation en zone nucléaire a été coupée et un assemblage de combustible est resté suspendu à la machine de manutention durant plus d’une heure. Quoiqu’il en soit, l’exploitant nucléaire n’a pas suffisamment vérifié l’état des différents éléments de son réacteur nucléaire avant de le redémarrer. Ou pire, il a bien vérifié mais n’a pas vu le problème. Et il n’a pas non plus été capable de réparer dans les temps impartis. Puisqu’au lieu de 24 heures, tel qu’exigé dans les règles de sûreté, il en a mis 7 de plus. Un quart du temps alloué en plus (vous avez 4 heures, vous en prenez 5), un laps de temps qui n’a rien de négligeable lorsqu’il s’agit de surveiller l’un des paramètres essentiels d’une installation nucléaire.
Cette nouvelle déclaration d’évènement significatif pour la sûreté en dit long sur la manque d’anticipation et les carences dans les vérifications matérielles sur le site nucléaire. Mais aussi sur les difficultés qu’a EDF à faire face une fois que les pannes surviennent. Lorsque la maintenance préventive est insuffisante et la maintenance curative laborieuse, un réacteur nucléaire peut-il être "sûr" ?

Ce que dit EDF :

Dépassement du délai de remise en conformité d’un capteur mesurant la pression de la turbine de l’unité de production n°1

Publié le 24/06/2021

Dimanche 20 juin 2021, lors des opérations de redémarrage de l’unité de production n°1 après son arrêt programmé pour maintenance, les équipes de la centrale ont détecté un défaut sur un des quatre capteurs mesurant la pression de la turbine. Ces capteurs permettent, en cas de défaillance de la turbine, de déclencher des ordres automatiques d’arrêt du réacteur. Deux capteurs suffisent pour assurer cette fonction. Dès détection, le capteur a été remis en conformité et les opérations de redémarrage se sont poursuivies.

Lundi 21 juin, les analyses réalisées par les équipes d’ingénierie de la centrale ont mis évidence que les mesures d’un deuxième capteur du même type présentaient également un défaut. Dès détection, le capteur a été remis en conformité. Les autres capteurs redondants ont été vérifiés et ne présentaient pas d’écart. Les règles d’exploitation prescrivent un délai de 24 heures pour remettre en conformité le capteur, or, dans ce second cas, le délai a été dépassé d’environ 7 heures.

Ce deuxième capteur a aussi pour fonction de déclencher l’ouverture d’un circuit qui permet, également en cas de défaillance de la turbine, d’évacuer la vapeur présente dans la turbine vers le condenseur. En cas d’indisponibilité de ce circuit, des soupapes d’évacuation de la vapeur sont disponibles et auraient permis d’assurer cette fonction.

Cet événement n’a donc pas eu d’impact sur la sûreté des installations, les matériels redondants étant restés disponibles. Cependant, le dépassement du délai de remise en conformité du second capteur constituant un non-respect des règles d’exploitation, la direction de la centrale de Cattenom a déclaré un événement significatif sûreté au niveau 1 de l’échelle INES, qui en compte 7, le 23 juin 2021 à l’Autorité de sûreté nucléaire.

https://www.edf.fr/la-centrale-nucleaire-de-cattenom/les-actualites-de-la-centrale-nucleaire-de-cattenom/depassement-du-delai-de-remise-en-conformite-d-un-capteur-mesurant-la-pression-de-la-turbine-de-l-unite-de-production-ndeg1


Ce que dit l’ASN :

Détection tardive de l’indisponibilité de plusieurs capteurs de pression de la turbine lors du redémarrage du réacteur 1 de la centrale nucléaire de Cattenom

Publié le 30/06/2021

Centrale nucléaire de Cattenom - Réacteurs de 1300 MWe - EDF

Le 23 juin 2021, l’exploitant de la centrale nucléaire de Cattenom a déclaré à l’ASN un événement significatif pour la sûreté relatif à la détection tardive de l’indisponibilité de capteurs de mesure de pression de la vapeur alimentant la turbine du réacteur 1.

Plusieurs capteurs surveillent en permanence les paramètres de fonctionnement de la turbine, dont la pression de la vapeur du circuit secondaire qui l’alimente. Les informations délivrées par ces capteurs sont utilisées à la fois par le système de régulation permettant le pilotage du réacteur et par le système de protection du réacteur.

Le 20 juin 2021, le réacteur 1 de la centrale nucléaire de Cattenom a redémarré à la suite de son arrêt pour maintenance programmée et rechargement en combustible. Les opérations de mise en service de la turbine étaient en cours.

À 5h10, l’exploitant a détecté qu’un des capteurs de mesure de pression de la vapeur à l’entrée de la turbine du réacteur 1 n’évoluait pas. Un diagnostic a identifié un mauvais positionnement d’une vanne isolant ce capteur comme cause de ce dysfonctionnement.

Le 21 juin 2021, l’exploitant a observé qu’un autre capteur de mesure de pression de la vapeur à l’entrée de la turbine du réacteur 1 indiquait des valeurs non attendues. Le positionnement de la vanne d’isolement était également en cause.

Ainsi, ces capteurs de mesure de pression n’étaient pas disponibles au moment de la mise en service de la turbine alors qu’ils sont requis par les spécifications techniques d’exploitation dès le redémarrage du réacteur. Cependant, malgré l’indisponibilité des capteurs concernés, d’autres capteurs et dispositifs de sécurité auraient permis d’assurer le fonctionnement des systèmes de protection du réacteur.

Cet événement n’a pas eu de conséquence sur le personnel ni sur l’environnement de l’installation. Toutefois, en raison du caractère tardif de sa détection au regard des règles générales d’exploitation, cet événement a été classé au niveau 1 de l’échelle INES.

Dès la détection de l’écart, l’exploitant a procédé à la remise en conformité des vannes d’isolement de ces capteurs et a engagé une analyse approfondie de cet événement. L’ASN veillera à la qualité de l’analyse approfondie de l’événement et aux actions prises pour en éviter son renouvellement lors des prochains arrêts pour maintenance.

https://www.asn.fr/Controler/Actualites-du-controle/Avis-d-incident-des-installations-nucleaires/Detection-tardive-de-l-indisponibilite-de-plusieurs-capteurs-de-pression-de-la-turbine


[1Fonctionnement d’un réacteur nucléaire, base de connaissances IRSN : Un réacteur nucléaire est une installation industrielle qui utilise le principe de la fission nucléaire pour produire de l’électricité.

Dans un réacteur nucléaire, des noyaux d’uranium remplacent le combustible fossile (charbon, pétrole) utilisé dans les centrales thermiques. Lorsqu’un neutron vient heurter un noyau d’uranium, celui-ci se casse en libérant d’autres neutrons et de l’énergie sous forme de chaleur. Les neutrons libérés vont percuter d’autres noyaux d’uranium et ainsi de suite : la réaction s’auto-entretient, on parle alors de réaction en chaîne.

La chaleur dégagée durant la réaction en chaîne est utilisée pour produire de la vapeur d’eau. De la même manière que dans les centrales thermiques, c’est cette vapeur qui entraîne une turbine et son alternateur pour produire l’électricité. https://www.irsn.fr/FR/connaissances/Installations_nucleaires/Les-centrales-nucleaires/reacteurs-nucleaires-France/Pages/1-reacteurs-nucleaires-France-Fonctionnement.aspx#.YNtE7Do6_Eo


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Installation(s) concernée(s)

Cattenom

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158