26 avril 2023
La centrale du Bugey (Auvergne-Rhône-Alpes) pompe l’eau du Rhône, la filtre et en enlève tous les sels et minéraux (déminéralisation) pour l’utiliser ensuite dans ses circuits de refroidissement. Les éléments extraits de l’eau et ceux résultant du procédé de déminéralisation forment des boues qui doivent être traitées avant d’être répandues dans la nature. Oui mais...
Parce que l’équipement censé traiter les boues de 2 des 4 réacteurs de la centrale du Bugey est en panne depuis des semaines, parce que le dispositif temporaire installé a débordé (suite à "une manœuvre d’exploitation" dont on ne sait rien, mais dont on peut induire qu’elle était inappropriée), et parce que EDF a mis du temps à s’apercevoir que ces boues se déversaient sur la chaussée, elles ont atteint le fleuve. L’industriel estime - à la louche - avoir ainsi rejeté entre 20 et 50 m3 de matières en suspension dans le Rhône en moins de 2 heures. Un volume colossal quand il est déversé d’un coup dans un écosystème.
Sans donner plus d’explications sur les raisons de l’incident, EDF clôture sa communication sur l’absence d’impact pour l’environnement. L’industriel en veut pour preuve que les paramètres qu’il surveille (oxygène dissout, pH et conductivité de l’eau du Rhône) n’ont pas montré d’évolution. On ne sait cependant rien de la période écoulée entre les mesures de ces paramètres (combien de temps après l’écoulement ?), ni de leur suffisance pour évaluer l’impact à court, moyen et long terme sur l’écosystème (d’autres paramètres n’auraient-ils pas été pertinents pour évaluer l’impact des matières en suspension déversées dans le Rhône ?). Sans parler de la quantité estimée par EDF qui varie du simple à plus du double (de 20 à 50 m3)... Quant au contenu précis de ces boues qui, rappelons-le, sont traitées par un procédé industriel et peuvent contenir des substances chimiques, là non plus, l’industriel ne donne aucun élément. Si ce n’est que les valeurs des "substances réglementées" n’ont pas été dépassées.
Une fois de plus, le manque d’entretien des équipements, de préparation des activités et de surveillance du site industriel nucléaire se traduit en rejets incontrôlés dans l’environnement (voir par exemple la pollution du Rhône à l’ammoniaque, les fuites de gaz dans l’atmosphère, ou encore la pollution des eaux souterraines suite à une fuite radioactive pour les incidents les plus récents). Une preuve de plus que la centrale du Bugey a bien du mal à maîtriser ce qu’il se passe sur son périmètre. Et que les erreurs d’EDF se retrouvent, in fine, dans la nature.
Déclaration d’un événement significatif environnement relatif à un écoulement d’eau boueuse en dehors des voies normales de rejets
Publié le 25/04/2023
Evénement environnement
Pour son fonctionnement, la centrale du Bugey utilise de l’eau du Rhône qu’elle filtre de ses sédiments et matières organiques avant utilisation. Ces éléments filtrés, issus du Rhône et d’un procédé de déminéralisation, appelés « boue » - sont des produits classés comme non dangereux et non radioactifs selon la réglementation en vigueur, et sont par la suite valorisés pour de l’épandage agricole. Cette séparation des boues et de l’eau claire est réalisée par une station de traitement des boues.
Depuis mi-mars, la station de traitement des boues pour les réacteurs 4 et 5 est indisponible. Ce traitement est assuré par une station mobile de remplacement. Le 19 avril vers 15h30, une opération d’exploitation entraine un débordement d’eau boueuse sur la voirie de la centrale, détectée à 16h50.
L’alerte en interne a été donnée immédiatement et les procédures requises ont été déployées. Le système d’isolement, par baudruches (obturateurs de canalisation), en aval du réseau d’eaux pluviales vers le canal de rejet a été activé. Les équipes de la centrale sont intervenues au sein de la station de déminéralisation et ont stoppé l’écoulement.
Une relecture des enregistrements vidéos a mis en évidence que l’écoulement boueux avait atteint le canal de rejet (traces marrons en surface) avant l’obturation complète du réseau d’eaux pluviales, réalisée à 17h35. La surveillance mise en place confirme l’absence d’écoulement depuis ce moment.
L’ASN et la Préfecture de l’Ain ont été informés le jour même du suivi de cet évènement.
Un volume de boues estimée entre 20 et 50m3 a été rejeté dans le canal de rejet sous forme de matière en suspension.
La surveillance permanente en place sur le Rhône a permis de montrer que l’écoulement de ces boues non nocives n’a eu aucun impact sur les paramètres suivis : oxygène dissous, pH et Conductivité. Il n’a pas conduit à un dépassement de valeurs de substances réglementées.
Toutefois, en raison de l’écoulement d’un effluent en dehors des voies normales de rejets, la direction de la centrale nucléaire du Bugey a déclaré, le 21 avril 2023, auprès de l’Autorité de sûreté nucléaire, un événement significatif pour l’environnement.
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