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Des accidents nucléaires partout

Ukraine : Coupure de l’électricité à la centrale de Tchernobyl

Le site fonctionne grâce aux groupes électrogènes, pour combien de temps ?




9 mars 2022


Le 9 mars 2022, l’autorité de sûreté ukrainienne a annoncé que la centrale de Tchernobyl était privée de toute alimentation électrique. Les installations nucléaires du site fonctionnent désormais uniquement grâce aux groupes électrogènes de secours.


Article mis à jour le 10 mars 2022

Les centrales nucléaires doivent toujours être alimentées en eau et en électricité, même lorsqu’elles sont arrêtées. Aucun des 4 réacteurs de Tchernobyl ne fonctionne plus, mais il reste des déchets nucléaires et du combustible usé radioactif sur le site de la catastrophe de 1986. Une partie est entreposé à sec, une autre sous eau car il a encore besoin d’être refroidi. Même si la chaleur que dégage encore le combustible après son usage dans les réacteur est résiduelle, elle doit être évacuée. Si le combustible se réchauffe trop il peut faire bouillir l’eau des piscines dans lequel il baigne, et leur dénoyage accélérera encore leur surchauffe. Le risque à terme est qu’il fonde ou explose, ce qui provoquerait des rejets radioactifs dans l’environnement. Risque que l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) estime improbable, le combustible usé de Tchernobyl étant déjà depuis longtemps en piscine de refroidissemen. Cependant, dans un communiqué du 10 mars, l’Autorité de sûreté nucléaire ukrainienne (SNRIU) n’est pas de cet avis. La perte d’alimentation électrique sur le site nucléaire peut engendrer d’autres problèmes, notamment des dégagements radioactifs provoqués par de la vapeur formée par le réchauffement des piscines de combustible. Mais pas que.

Car sans électricité, plus aucun système ne peut fonctionner, qu’il s’agisse de pompes faisant circuler l’eau de refroidissement des piscines ou de la ventilation permettant de protéger le personnel et les équipements en maintenant une atmosphère saine dans les locaux par filtration des radioéléments. La ventilation sert aussi à confiner l’air contaminé dans les bâtiments en cas de besoin. Sans électricité, les systèmes de surveillance de radioactivité et les alarmes ne peuvent pas non plus fonctionner. Les systèmes d’extinction en cas d’incendie non plus. Or si le combustible n’est plus suffisamment refroidit, de l’hydrogène peut se dégager et constituer une atmosphère explosive dans les locaux. N’oublions pas non plus le sarcophage qui recouvre le réacteur 4, hautement contaminé depuis son explosion en 1986 et tous les systèmes afférents qui permettent le maintient de la radioactivité dans le bâtiment.

Tous les sites nucléaires sont équipés de groupes électrogènes de secours pour pallier les coupures électriques, mais ils manquent souvent d’entretien et leurs réserves de carburant ne leur permettent de fonctionner que quelques jours (48 heures). Qui plus est, ils ne peuvent fournir autant d’électricité que nécessaire à tout le site, ils n’alimentent que certains équipements, les dispositifs jugés les plus importants pour la sûreté. Le site fonctionne donc a minima, dans un mode accidentel et dégradé. On ne sait rien de ce qu’il adviendra une fois que les réserves de carburant des groupes électrogènes seront épuisées. Comme l’AIEA le dit elle-même, l’alimentation électrique des sites nucléaires est une condition sine qua non à leur fonctionnement et à la maîtrise du risque d’accident. Tout comme l’apport en eau pour le refroidissement. La guerre qui ravage le pays ne fait que mettre en exergue la vulnérabilité des installations nucléaires, tributaires de lignes électriques et de conduites d’eau au risque de provoquer une catastrophe environnementale. Sans même parler du risque afférent aux tirs, missiles, incendies et autres atteintes physiques aux équipements causés par les combats.

La centrale de Tchernobyl est occupée depuis le 24 février 2022, suite à l’invasion du pays par l’armée russe. Les équipes qui étaient sur place, privées de relève depuis, assurent seules le travail de surveillance et de conduite des installations. Leur état de fatigue et de stress soulève de très sérieuses inquiétudes au sein des différentes autorités de sûreté européennes et mondiales.

Si l’Autorité de sûreté nucléaire française (ASN) en dit peu, des associations citoyennes et indépendantes qui contrôlent de la radioactivité comme la Criirad ou l’Acro proposent des fils infos actualisés très régulièrement sur la situation des installations nucléaires en Ukraine (voir ici pour le suivi des actualités par la Criirad, et ici pour celui de l’Acro). Par ailleurs, le quotidien Reporterre a fait le point le 8 mars sur les différents risques générés par la guerre sur les installations nucléaires ukrainiennes. Mais le manque d’informations précises, notamment de part les coupures des communications avec les sites nucléaires occupés par l’armée russe, rend très difficile, voire impossible, de savoir précisément quels équipements sont touchés et quels sont les risques. Dans son communiqué du 10 mars, l’Autorité de sûreté nucléaire ukrainienne (SNRIU) le dit elle-même : "The actual situation on the site is currently unknown" (la situation réelle du site est actuellement inconnue)

Mise à jour du 11 mars 2022 :

D’après un communiqué de la SNRIU daté du 11 mars, des réserves de carburant pour les groupes électrogènes de secours qui assurent l’alimentation électrique des 2 entreposages de combustibles (ISF1 et ISF2) ainsi que le sarcophage de confinement du réacteur 4 seraient arrivées sur le site.
Par ailleurs, des tentatives sont en cours pour restaurer l’alimentation électrique par le réseau national.
Le système qui mesure le niveau de radiations dans la zone d’exclusion n’a quant à lui pas été remis en marche.

Mise à jour du 13 mars 2022 :

D’après les informations reçues par l’AIEA, l’alimentation électrique a été rétablie sur le site de Tchernobyl au bout de 4 jours, le 13 mars 2022 en fin de journée. Les équipes d’Ukrenergo, l’opérateur du réseau de transport national ukrainien, ont réussi à réparer une des 2 lignes électriques qui alimente normalement le site. Fonctionnant toujours sur les moteurs diesels de secours, l’alimentation pourra être basculée sur le réseau électrique le lendemain.
La communication avec le personnel de la centrale est toujours coupée. Épuisées physiquement et psychologiquement, les 211 personnes sur place depuis la veille de l’invasion le 24 février ne sont plus en capacité d’assurer les réparations et la maintenance des équipements.
Par ailleurs, les données de surveillance de la radioactivité dans la zone d’exclusion ne sont toujours pas disponibles.

Mise à jour du 14 mars :

Selon l’AIEA qui a reçu ces informations de l’agence de distribution d’électricité ukrainienne, la ligne électrique réparée le 13 mars a été endommagée par les forces armées russes. Le site est donc resté alimenté uniquement par les groupes électrogènes de secours. Un peu plus tard dans la journée du 14 mars, il a été confirmé que l’alimentation électrique externe a été rétablie et que le personnel de la centrale prennait les mesures pour reconnecter les installations au réseau. En revanche, les transmissions de données de la centrale ne sont pas toujours pas rétablies.

Mise à jour du 16 mars :

Le 16 mars, l’Autorité de sûreté nucléaire ukrainienne a confirmé que l’alimentation électrique externe du site avait été rétablie le 14 mars en fin de journée. Les installations ne sont donc plus alimentées par l’électricité produite par des groupes électrogènes à moteur diesel, une ligne haute tension du réseau électrique national a pu être remise en état et raccordée.

En revanche, le système automatique de mesure de la radioactivité dans la zone d’exclusion n’est toujours pas réparé. Aucune information n’est disponible quant à la situation actuelle sur la centrale de Tchernobyl, et aucun contact n’a pu être établi avec le personnel.

Les équipes, sur place depuis maintenant 21 jours sans avoir été remplacées, épuisées moralement et physiquement, ne sont plus en mesure d’assurer les opérations de maintenance et de réparation des installations. Ce qui peut engendrer une baisse de la sûreté du site, la défaillance de certains équipements et d’éventuels accidents.

La situation du personnel de la centrale de Tchernobyl inquiète particulièrement l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). La veille, celle-ci publiait un communiqué faisant le point sur la situation, où elle précisait que la SNRIU avait précisé ne pas pouvoir répondre à toutes les questions de l’agence, car toutes les informations qu’elle détient sur l’état des sites de Zaporizhzhya et de Tchernobyl sont contrôlées par les forces armées russes occupantes.

Ce que dit l’ASN :

Point de situation sur l’évolution de la situation à Tchernobyl (Ukraine)

Publié le 09/03/2022

Note d’information

A la suite des évènements en Ukraine, l’ASN est en veille active depuis vendredi 4 mars.

Le 9 mars 2002, l’Autorité de sûreté nucléaire ukrainienne (SNRIU) a annoncé la perte des alimentations électriques externes de la centrale nucléaire de Tchernobyl. L’alimentation électrique est désormais assurée par des groupes électrogènes. Les installations nucléaires présentes à Tchernobyl sont les suivantes :

- une piscine d’entreposage de combustible usé - un entreposage à sec de combustible usé - des installations de stockage de déchets solides et liquides - trois réacteurs en cours de démantèlement - le réacteur n° 4 accidenté en 1986, placé sous sarcophage.

Un paramètre essentiel pour la sûreté de telles installations nucléaires est l’énergie résiduelle dégagée par les substances radioactives. En raison du phénomène de décroissance radioactive, cette énergie est considérablement plus faible qu’à l’époque du fonctionnement de la centrale. Dans ces conditions, la perte des alimentations électriques externes n’a pas de conséquence à court terme sur la sûreté des installations ni sur le risque de relâchement de radioactivité.

Néanmoins, la situation des équipes d’exploitation du site, qui n’ont toujours pas été relevées, continue de rester préoccupante.

L’ASN reste en lien avec ses homologues pour échanger et recouper les informations techniques en particulier à l’échelle européenne (Wenra, Herca, ENSREG) et avec l’AIEA.

https://www.asn.fr/l-asn-informe/actualites/point-de-situation-sur-l-evolution-de-la-situation-a-tchernobyl-ukraine


Ce que dit la SNRIU :

  • Chornobyl NPP facilities, current situation as of 10 March 2022 at 15:00

Published 10 March 2022 20:00

All Chornobyl NPP facilities in the exclusion zone remain under the aggressor’s control.

On 9 March 2022 at 11:22, the last power supply line on the site was lost. There is no possibility to communicate with personnel directly on site. Regulatory control over nuclear and radiation safety at the Chornobyl site and in the exclusion zone, as well as control of nuclear materials at the ChNPP, has been completely lost.

Restoration of electricity supply and, accordingly, communication with the operational personnel of the Chornobyl NPP are not currently possible because of hostilities in the area where high-voltage lines are damaged.

Prior to the loss of communication, all spent nuclear fuel of the Chornobyl NPP was stored in two interim spent fuel storage facilities (ISFs) :

 ISF-1 (wet storage facility)
 ISF-2 (dry cask storage facility).

There is no nuclear fuel at Chornobyl NPP Units 1, 2, 3.

Scheduled transport of spent fuel from ISF-1 to ISF-2 was suspended before the Russian troops captured the site.

The actual situation on the site is currently unknown.

According to the information available to SNRIU after loss of power, the emergency diesel generators have been turned on to supply power to systems important to safety of the facilities, including ISF-1, ISF-2 and New Safe Confinement over the Shelter (Shelter NSC).

In case of failure-free operation, the amount of diesel fuel for diesel generators will be sufficient for 48 hours since the instant the external power is lost.

Potential threats at the Chornobyl NPP facilities in case of loss of emergency power supply

ISF -1  :

As of 10 March 2022, 19,442 spent fuel assemblies are placed at ISF-1. The decay heat is removed from the nuclear fuel by circulation of the coolant (water) in the cooling pool. This function requires power supply.

In case of total blackout, including loss of emergency power supply, ISF-1 personnel will lose the possibility of :

 remote monitoring of the radiological situation in the storage facility rooms ;
 remote control of the water level and temperature in the cooling pool ;
 makeup of the cooling pool and its water treatment ;
 fire alarm monitoring ; - maintenance of required temperature in ISF-1 rooms.

When water temperature in the cooling pool reaches 40 °С because of intensive evaporation, this will lead to conditions in which instrumentation may fail and it will be very complicated for the personnel to take measures to control potential emergencies and accidents. The radiological situation at ISF-1 will also significantly deteriorate and the personnel will be subjected to additional doses.

Also, according to the design, if the ventilation system becomes inoperable and compensatory measures cannot be taken, explosive concentrations of hydrogen may be generated through radiolysis.

ISF -2 :

Spent nuclear fuel is stored at ISF-2 according to the passive principle.

In case of total blackout, including loss of emergency power supply, the ISF-2 personnel will lose the possibility of :

 remote monitoring of the radiological situation in the storage facility rooms and site ;
 maintenance of required temperature in ISF-2 rooms ;
 fire alarm monitoring.

Shelter NSC :

Total blackout of the Shelter NSC, including loss of emergency power, will cause :

 loss of automated monitoring over the parameters that characterize nuclear and radiation safety and condition of unstable structures destroyed in the April 1986 accident at Unit 4 ;

 inactivation of safety-significant ventilation systems and integrated control system ;

 inability to use safety-significant systems that are on standby in normal operation, such as the neutron absorber introduction system, liquid radioactive waste management system and fire protection system.

Therefore, long-term loss of power at the Chornobyl NPP, together with the limited capabilities of the operating personnel, who are now physically and psychologically exhausted because of the impossibility to change shift and the constant presence of armed occupants, will lead to loss of control over the safety parameters and inability to effectively respond to internal and external initiating events, such as fires if they occur, which in turn can lead to severe radiation effects.

In addition, after loss of emergency power supply, the ventilation and air conditioning systems will stop their operation in rooms of all radiologically hazardous facilities of the Chornobyl NPP ; this will cause additional doses to personnel, including those during walkdowns and mitigation of potential accident consequences.

Radioactive contamination on the Chornobyl NPP site and in the exclusion zone will increase as well because the occupant fails to comply with radiation safety requirements and strict access control procedures.

https://snriu.gov.ua/en/news/chornobyl-npp-facilities-current-situation-10-march-2022-1500

  • Chornobyl NPP facilities, current situation (March 11, 2022)

Published 11 March 2022 15:05

All the Chornobyl NPP facilities located in the Exclusion Zone continue to remain under the control of the aggressor country.

On 9 March 2022, starting from 11:22, the power supply is not available at the Chornobyl NPP site, and, accordingly, there is no connection with the ChNPP personnel present directly at the site. Regulatory control over the state of nuclear and radiation safety at the Chornobyl NPP site and in the Exclusion Zone, as well as control over nuclear materials at the enterprise is impossible to exercise.

The operation of the Exclusion Zone automated radiation monitoring system has not been restored yet.

The real situation at the site is currently unknown.

According to the management of the Chornobyl NPP, currently located in Slavutych, an additional supply of diesel fuel for diesel generators ensuring emergency power supply to the spent nuclear fuel storage facilities (ISF-1 and ISF-2), as well as to the New Safe Confinement above the Shelter, was delivered to the NPP site. Attempts to restore the external power supply to the site are in progress.

https://snriu.gov.ua/en/news/chornobyl-npp-facilities-current-situation-march-11-2022

  • Chornobyl NPP facilities, current situation (March 16, 2022)

Published 16 March 2022 15:05

The SNRIU continues informing on the state of the Chornobyl NPP.

Until now, all Chornobyl NPP facilities, and facilities located in the Exclusion Zone are under the control of the aggressor country’s military.

At present, the regulatory control over the state of nuclear and radiation safety at the Chornobyl NPP site and in the Exclusion Zone, as well as control over nuclear materials at the enterprise is impossible to exercise.

According to the information received from the Chornobyl NPP management, the power supply of all facilities located on the Chornobyl NPP site was restored on 14 March 2022, and at 17:45, operation of all diesel generators providing emergency power supply to these facilities was stopped.

At 18:14, the ChNPP-Slavutych high-voltage line was connected.

The operation of the Exclusion Zone automated radiation monitoring system has not been restored up to now. There is no information on the real situation at the Chornobyl NPP site, as there is no contact with the NPP personnel present directly at the site for the 21st day in a row without rotation.

Given the psychological, moral, and physical fatigue of the personnel, as well as the absence of day-time and repair staff, maintenance and repair activities of equipment important to the safety of the facilities at the Chornobyl NPP site are not carried out, which may lead to the reduction of its reliability, which in turn can lead to equipment failures, emergencies, and accidents.

https://snriu.gov.ua/en/news/chornobyl-npp-facilities-current-situation-march-16-2022


Ce que dit l’AIEA :

  • Mise à jour 16 – Déclaration du Directeur général de l’AIEA sur la situation en Ukraine

Publiéle 09/03/2022

L’Ukraine a informé l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) aujourd’hui que la centrale nucléaire de Tchornobyl avait été déconnectée du réseau électrique et n’avait plus d’alimentation électrique externe, deux semaines après que les forces russes ont pris le contrôle du site de l’accident de 1986, a déclaré le Directeur général, Rafael Mariano Grossi.

Le Directeur général s’est dit vivement préoccupé par cette évolution, « une alimentation électrique hors site sécurisée à partir du réseau pour tous les sites nucléaires » étant l’un des sept piliers indispensables de la sûreté et de la sécurité nucléaires qu’il a mentionnés lors d’une réunion du Conseil des gouverneurs de l’AIEA convoquée le 2 mars pour examiner les incidences de la situation en Ukraine sur la sûreté, la sécurité et les garanties.

Dans le cas de la centrale de Tchornobyl, cependant, il a déclaré que l’AIEA rejoignait l’avis de l’organisme de réglementation ukrainien selon lequel la déconnexion du réseau n’aurait pas un effet majeur sur les fonctions de sûreté essentielles sur le site, où se trouvent diverses installations de gestion des déchets radioactifs. S’agissant en particulier de l’installation d’entreposage du combustible usé présente sur le site, le volume de l’eau de refroidissement contenu dans la piscine est suffisant pour assurer une évacuation efficace de la chaleur du combustible usé sans électricité. De plus, des groupes électrogènes diesel et des batteries sont disponibles sur le site pour assurer une alimentation électrique de secours.

Cette perte d’électricité risque toutefois de compromettre encore davantage la sûreté radiologique opérationnelle sur le site et de soumettre à une pression supplémentaire les quelque 210 techniciens et gardes qui n’ont pas pu être relayés depuis deux semaines et vivent en fait sur le site en permanence, a ajouté M. Grossi.

« Nous voyons la situation à la centrale nucléaire de Tchornobyl se dégrader de jour en jour, en particulier en ce qui concerne la sûreté radiologique et le personnel qui assure le fonctionnement de l’installation dans des conditions extrêmement difficiles et éprouvantes », a-t-il dit. « Une fois encore, je demande d’urgence aux forces qui assurent le contrôle effectif de la centrale de respecter les procédures internes de radioprotection, de faciliter la rotation du personnel en toute sûreté et de prendre d’autres mesures importantes pour garantir la sûreté. »

Par ailleurs, M. Grossi a annoncé que l’AIEA avait récemment perdu la télétransmission des données de ses systèmes des garanties installés pour surveiller les matières nucléaires à la centrale de Tchornobyl et dans une autre installation nucléaire ukrainienne à présent contrôlée par les forces russes, la centrale de Zaporizhzhia. Il s’est dit préoccupé par l’interruption soudaine de la transmission au Siège de l’AIEA, à Vienne, des données provenant de ces deux sites, qui abritent de grandes quantités de matières nucléaires sous la forme, entre autres, de combustible nucléaire neuf ou usé.

La raison de l’interruption de la transmission des données des garanties n’était pas claire dans l’immédiat. L’AIEA continue de recevoir de telles données des autres installations nucléaires ukrainiennes, dont les trois autres centrales nucléaires du pays.

« La télétransmission des données provenant du matériel des garanties de l’AIEA installé sur les sites nucléaires partout dans le monde est une composante majeure de l’application de nos garanties, en Ukraine et dans le monde », a affirmé M. Grossi. « Ces systèmes sont installés dans plusieurs installations en Ukraine, y compris dans toutes les centrales nucléaires, ce qui nous permet de surveiller les matières et activités nucléaires sur ces sites lorsque nos inspecteurs n’y sont pas. »

Des dispositifs techniques sont en place pour garantir le stockage local des données, mais la capacité de stockage et l’état de fonctionnement des systèmes de surveillance restent incertains, a ajouté le Directeur général.

Grâce à des mesures techniques de contrôle, l’AIEA vérifie que les pays respectent leurs obligations juridiques internationales et utilisent les matières et la technologie nucléaires exclusivement à des fins pacifiques.

En ce qui concerne la situation des centrales nucléaires ukrainiennes en service, l’organisme de réglementation a indiqué que huit des 15 réacteurs du pays restaient en exploitation, dont deux à la centrale de Zaporizhzhia. Les niveaux de radiation sur les sites étaient normaux, a indiqué le Directeur général.

La centrale nucléaire de Zaporizhzhia dispose de quatre lignes électriques hors site à haute tension (750 kV) et d’une ligne supplémentaire en réserve. L’exploitant a informé l’AIEA que deux d’entre elles avaient été endommagées et qu’il n’y avait donc plus que deux lignes électriques disponibles, en plus de celle en réserve. Il a également indiqué que les besoins en électricité hors site de la centrale pouvaient être satisfaits avec une seule ligne électrique. De plus, des générateurs diesel sont prêts et fonctionnels pour fournir une alimentation électrique de secours. « Néanmoins, il s’agit d’un autre exemple de mise en cause du pilier de la sûreté consistant à garantir une alimentation électrique hors site sécurisée à partir du réseau pour tous les sites nucléaires », a déclaré le Directeur général, M. Grossi.

En outre, l’organisme de réglementation a indiqué que le transformateur de l’unité 6 avait été mis hors service et faisait l’objet d’une réparation d’urgence, un endommagement de son système de refroidissement ayant été détecté à la suite des événements du 4 mars.

Ces récents événements renforcent les préoccupations croissantes de l’AIEA concernant les incidences du conflit en Ukraine sur la sûreté, la sécurité et les garanties des installations nucléaires du pays, y compris ses quatre centrales nucléaires en service et le site de Tchornobyl.

Dans le cadre de sa nouvelle initiative concernant l’Ukraine, le Directeur général, M. Grossi, a déclaré qu’il se rendrait demain à Antalya sur l’invitation du Ministre turc des affaires étrangères, Mevlüt Çavuşoğlu. « J’espère que les réunions qui se tiendront à Antalya permettront de progresser sur la question urgente de la sûreté et de la sécurité des installations nucléaires de l’Ukraine. Nous devons agir maintenant », a-t-il déclaré.

https://www.iaea.org/fr/newscenter/pressreleases/mise-a-jour-16-declaration-du-directeur-general-de-laiea-sur-la-situation-en-ukraine

  • Mise à jour 20 – Déclaration du Directeur général de l’AIEA sur la situation en Ukraine

Publié le 13/03/2022 à 20h50

L’Ukraine a informé aujourd’hui l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) que des équipes de spécialistes ukrainiens étaient parvenus à réparer une ligne électrique nécessaire à la reprise de l’alimentation électrique externe de la centrale nucléaire de Tchornobyl, quatre jours après une coupure totale sur le site contrôlé par la Russie, a déclaré le Directeur général Rafael Mariano Grossi.

C’est le chef de la société ukrainienne d’énergie nucléaire Energoatom, Petro Kotin, qui a annoncé la nouvelle au Directeur général, ajoutant que les spécialistes avaient réparé l’une des deux lignes endommagées et pourraient maintenant fournir toute l’énergie extérieure nécessaire à la centrale, où diverses installations de gestion des déchets radioactifs se trouvent depuis l’accident de 1986.

L’organisme de réglementation ukrainien a informé séparément l’AIEA que la ligne d’alimentation électrique avait été rétablie à 18 h 38, heure d’Europe centrale, par le personnel de réparation d’Ukrenergo, l’opérateur du réseau de transport national. La centrale nucléaire de Tchornobyl continue de fonctionner avec des groupes électrogènes diesel de secours et sera à nouveau connectée au réseau électrique ukrainien dans la matinée, a-t-il déclaré.

Comme indiqué précédemment, la déconnexion du réseau, survenue la semaine dernière, n’a pas eu d’effet majeur sur les fonctions de sûreté essentielles au site, puisque la quantité d’eau de refroidissement de l’installation d’entreposage du combustible usé suffisait pour assurer l’évacuation de la chaleur sans alimentation électrique.

« C’est une évolution positive car la centrale nucléaire de Tchornobyl dépendait de groupes électrogènes diesel de secours depuis maintenant plusieurs jours », a déclaré le Directeur général, M. Grossi. « Je reste toutefois vivement préoccupé par la sûreté et la sécurité de Tchornobyl et des autres installations nucléaires de l’Ukraine ».

Plus tôt dans la journée, l’organisme de réglementation ukrainien a informé l’AIEA que le personnel de la centrale nucléaire de Tchornobyl n’assurait plus la réparation ni la maintenance du matériel lié à la sûreté, en partie parce qu’il est fatigué physiquement et psychologiquement après avoir travaillé en continu pendant près de trois semaines.

Les 211 membres du personnel technique et les gardes n’ont toujours pas pu être relevés depuis la veille de l’entrée des forces russes sur le site, le 24 février, a indiqué l’organisme de réglementation, qui s’est également dit inquiet de la sécurité du personnel en cas de transport hors de la zone d’exclusion créée après l’accident. L’organisme de réglementation n’a pas de communication directe avec le personnel mais reçoit des informations de la direction de la centrale hors site.

Le Directeur général, M. Grossi, a déclaré que la situation de plus en plus critique du personnel de l’installation, ainsi que les problèmes persistants de communication avec le site et le problème d’alimentation électrique maintenant résolu, rendaient encore plus urgente une initiative de l’AIEA visant à garantir la sûreté et la sécurité des centrales nucléaires ukrainiennes.

Le Directeur général a proposé un cadre qui permettrait à l’AIEA de fournir une assistance technique et autre pour l’exploitation sûre et sécurisée de toutes les installations nucléaires d’Ukraine. Il en a discuté la semaine dernière avec les ministres ukrainien et russe des affaires étrangères, MM. Dmytro Kuleba et Sergei Lavrov.

« Nous ne pouvons plus perdre de temps. L’AIEA est prête à agir immédiatement, sur la base du cadre que nous proposons et dont la mise en œuvre nécessite l’accord préalable des parties au conflit. Nous ne pouvons prêter assistance aux sites nucléaires ukrainiens qu’après signature de l’accord. Je fais tout ce que je peux pour que cela se fasse très bientôt », a-t-il déclaré.

L’AIEA prépare actuellement des propositions techniques détaillées pour son assistance, fondées sur lessept piliers indispensables de la sûreté nucléaire que le Directeur général a exposés au début du mois lors d’une réunion du Conseil des gouverneurs de l’AIEA.

Ces piliers - notamment ceux concernant l’intégrité physique des installations nucléaires, la possibilité pour le personnel d’exploitation de prendre des décisions sans pression indue, la sécurité de l’alimentation électrique hors site et la fiabilité des communications avec l’organisme de réglementation - ont été compromis ou menacés durant le conflit qui a débuté le 24 février.

L’organisme de réglementation ukrainien a également informé l’AIEA aujourd’hui qu’il surveillait de près la situation dans la zone d’exclusion de la centrale nucléaire de Tchornobyl à l’approche de la « saison des feux », lors de laquelle, chaque année, de fréquents incendies spontanés surviennent dans la zone, toujours contaminée par les matières radioactives de l’accident survenu il y aura 36 ans le mois prochain.

https://www.iaea.org/fr/newscenter/pressreleases/mise-a-jour-20-declaration-du-directeur-general-de-laiea-sur-la-situation-en-ukraine

  • Mise à jour 21 – Déclaration du Directeur général de l’AIEA sur la situation en Ukraine

Publié le 14/03/2022

L’Ukraine a informé aujourd’hui l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) que les efforts se poursuivaient pour rétablir l’alimentation électrique externe de la centrale nucléaire de Tchornobyl, un jour après que des équipes de spécialistes ukrainiens ont réparé une des deux lignes électriques endommagées reliant le site au réseau, a déclaré le Directeur général, Rafael Mariano Grossi.

Des groupes électrogènes diesel de secours fournissent de l’électricité au site de l’accident de 1986 depuis que l’alimentation électrique externe a été coupée le 9 mars. L’Ukraine avait indiqué le 13 mars que ses spécialistes avaient réparé l’une des lignes électriques et que la centrale serait à nouveau connectée au réseau électrique ukrainien le lendemain matin.

Cependant, l’opérateur du réseau de transport ukrainien, Ukrenergo, a déclaré aujourd’hui que la ligne avait de nouveau été endommagée « par les forces d’occupation » avant que le courant ne soit entièrement rétabli dans la centrale nucléaire. Plus tard dans la journée, l’organisme de réglementation a indiqué à l’AIEA qu’à 13 h 10, heure d’Europe centrale, l’alimentation électrique externe avait de nouveau été rétablie et que le personnel de la centrale nucléaire de Tchornobyl avait repris ses activités pour connecter à nouveau la centrale au réseau.

https://www.iaea.org/fr/newscenter/pressreleases/mise-a-jour-21-declaration-du-directeur-general-de-laiea-sur-la-situation-en-ukraine


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