Projet de relance du nucléaire : un débat public chasse l’autre
Organisé par la Commission Nationale du Débat Public (CNDP), le débat public sur la construction d’une paire de réacteurs EPR2 sur le site de Gravelines débutera ce 17 septembre pour une durée de 4 mois. Le Réseau "Sortir du nucléaire" dénonce que de nombreuses questions restent à ce jour sans réponse concernant les projets d’EPR2 souhaités par Emmanuel Macron.
Communiqué du 16 septembre 2024
C’est en 1995 que la CNDP voit le jour grâce au tout nouveau locataire de Matignon : Michel Barnier. Alors ministre de l’environnement, il souhaitait favoriser la participation du public à l’élaboration de grands projets d’intérêt national. Un vœu pieux concernant les 6 EPR2 souhaités par Emmanuel Macron. C’est en effet cette même CNDP qui, la semaine dernière, avertit l’État et EDF à ce sujet dans un communiqué [1] : elle rappelle que "les débats publics doivent permettre au public de débattre de l’opportunité des projets, et pas seulement sur leurs caractéristiques et leurs impacts". Comprendre en sous-titre que cela n’a pas été le cas pour les projets d’EPR2, pour lesquels la population a été consultée l’année dernière [2] . Au même moment, la loi d’accélération du nucléaire était en effet votée au Sénat.
Dans un document de synthèse de 17 années de concertations sur le sujet du nucléaire paru en 2022, la CNDP relevait pourtant déjà très clairement "un sentiment constant que les décisions concernant le nucléaire sont prises sans tenir compte de la parole citoyenne".
La CNDP rappelle également que "l’opportunité de la création de nouveaux réacteurs nucléaires relève de décisions législatives et réglementaires à caractère programmatique, en l’occurrence dans l’état actuel du droit, une Loi de Programmation Énergie-Climat (LPEC) et une Programmation Pluriannuelle de l’Énergie (PPE)". Elle recommande que des réponses soient enfin apportées au sujet de ce cadre législatif toujours inexistant.
À ce jour, en effet, la France ne s’est toujours pas dotée de stratégie énergétique malgré la loi stipulant qu’elle aurait dû le faire il y a un an déjà [3]. Le projet de relance du nucléaire n’est donc actuellement justifié que par des déclarations politiques [4].
Encore plus inquiétant, la CNDP recommande également que soient enfin fournies des réponses aux questions concernant le financement des projets d’EPR2, mais aussi la maîtrise des risques de dépassement des coûts d’investissement. Une recommandation légitime au vu de la récente augmentation de 30% de l’évaluation du coût de construction des projets d’EPR2, estimée aujourd’hui à plus de 67 milliards d’euros, alors même que n’est pas prise en compte la totalité des coûts.
L’État ne respecte ainsi pas lui-même les bases légales qu’il s’est fixées. Dans ce contexte, ce débat public apparaît tout particulièrement comme une illusion démocratique. Le Réseau "Sortir du nucléaire" respecte et soutient la diversité d’actions de ses membres, néanmoins, il ne participera pas directement au débat public cette fois-ci. Alors que les travaux préparatoires aux réacteurs EPR2 à Penly ont été autorisés malgré l’absence de cadre législatif digne de ce nom, nous appelons par ailleurs à nous mobiliser les 12 et 13 octobre pour y protester contre la construction d’EPR2 à Penly et contre la relance du fiasco du nucléaire !
Image de couverture : sincerely media - unsplash
Notes
[1] Ce communiqué, en date du 4 septembre 2024, explicite l’avis de la CNDP au sujet des réponses en attente concernant le projet d’EPR2 à Penly dans le cadre d’un programme de nouveaux réacteurs nucléaires pour lequel elle a été sollicitée pour organiser un débat public en 2022-2023. Voir aussi son bilan complet.
[3] Le seul document dans lequel la France expose ses objectifs énergétiques est le Plan National Intégré Energie Climat (PNIEC) dans lequel figure une part d’Energie Renouvelables (EnR) dans la consommation finale d’énergie brute française en 2030, bien en-deça des objectifs fixés par la Commission européenne (33% contre 44%).
[4] Entre autres et en premier lieu, le discours d’Emmanuel Macron à Belfort le 10 février 2022.
C’est en 1995 que la CNDP voit le jour grâce au tout nouveau locataire de Matignon : Michel Barnier. Alors ministre de l’environnement, il souhaitait favoriser la participation du public à l’élaboration de grands projets d’intérêt national. Un vœu pieux concernant les 6 EPR2 souhaités par Emmanuel Macron. C’est en effet cette même CNDP qui, la semaine dernière, avertit l’État et EDF à ce sujet dans un communiqué [1] : elle rappelle que "les débats publics doivent permettre au public de débattre de l’opportunité des projets, et pas seulement sur leurs caractéristiques et leurs impacts". Comprendre en sous-titre que cela n’a pas été le cas pour les projets d’EPR2, pour lesquels la population a été consultée l’année dernière [2] . Au même moment, la loi d’accélération du nucléaire était en effet votée au Sénat.
Dans un document de synthèse de 17 années de concertations sur le sujet du nucléaire paru en 2022, la CNDP relevait pourtant déjà très clairement "un sentiment constant que les décisions concernant le nucléaire sont prises sans tenir compte de la parole citoyenne".
La CNDP rappelle également que "l’opportunité de la création de nouveaux réacteurs nucléaires relève de décisions législatives et réglementaires à caractère programmatique, en l’occurrence dans l’état actuel du droit, une Loi de Programmation Énergie-Climat (LPEC) et une Programmation Pluriannuelle de l’Énergie (PPE)". Elle recommande que des réponses soient enfin apportées au sujet de ce cadre législatif toujours inexistant.
À ce jour, en effet, la France ne s’est toujours pas dotée de stratégie énergétique malgré la loi stipulant qu’elle aurait dû le faire il y a un an déjà [3]. Le projet de relance du nucléaire n’est donc actuellement justifié que par des déclarations politiques [4].
Encore plus inquiétant, la CNDP recommande également que soient enfin fournies des réponses aux questions concernant le financement des projets d’EPR2, mais aussi la maîtrise des risques de dépassement des coûts d’investissement. Une recommandation légitime au vu de la récente augmentation de 30% de l’évaluation du coût de construction des projets d’EPR2, estimée aujourd’hui à plus de 67 milliards d’euros, alors même que n’est pas prise en compte la totalité des coûts.
L’État ne respecte ainsi pas lui-même les bases légales qu’il s’est fixées. Dans ce contexte, ce débat public apparaît tout particulièrement comme une illusion démocratique. Le Réseau "Sortir du nucléaire" respecte et soutient la diversité d’actions de ses membres, néanmoins, il ne participera pas directement au débat public cette fois-ci. Alors que les travaux préparatoires aux réacteurs EPR2 à Penly ont été autorisés malgré l’absence de cadre législatif digne de ce nom, nous appelons par ailleurs à nous mobiliser les 12 et 13 octobre pour y protester contre la construction d’EPR2 à Penly et contre la relance du fiasco du nucléaire !
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