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Une conception surprenante de la "sûreté" !

L’EPR ne résisterait pas à la chute d’un avion de ligne

Article publié le 9 août 2016



En 2006, le Réseau "Sortir du nucléaire" rendait public un document "confidentiel défense" qui témoignait que la conception de l’EPR, et notamment le dimensionnement de sa "bunkérisation", n’a été faite qu’en tenant compte du risque de crash d’un avion militaire. Or, de toute évidence, la masse et le chargement en kérosène d’un avion de chasse sont très largement inférieurs à ceux d’un avion de ligne.

En d’autres termes, bien que sa construction n’ait démarré que plusieurs années après les attentats du 11 septembre 2001 sur les tours du World Trade Center, le réacteur EPR n’est pas conçu pour pouvoir résister au crash d’un avion de ligne, qu’il soit le résultat d’un accident, d’un attentat ou d’un acte suicidaire. Il convient de rappeler que les installations nucléaires déjà en service (dont les 58 réacteurs nucléaires exploités par EDF) "sont construites depuis les années 1970 pour résister sans dommage à l’impact de la chute de petits avions civils. Elles ne sont pas construites pour résister sans dommages à l’impact d’autres avions" [1], y compris militaires.

Dans la lettre d’EDF qui accompagnait ce document adressé à la DGSNR, on peut lire : "une partie de l’installation est "bunkérisée" Il s’agit en particulier du bâtiment réacteur, du bâtiment du combustible usé et du bâtiment des auxiliaires de sauvegarde qui abrite 2 des 4 trains de sauvegarde (parties mécaniques et électriques). La partie "bunkérisée", dimensionnée comme il a été rappelé pour un impact de type avion militaire, présente d’ores et déjà une résistance élevée, notamment vis-à-vis des risques de perforation ; les caractéristiques d’un avion militaire en font en effet un missile considéré comme "perforant". Ces dispositions générales confèrent au projet EPR une grande robustesse vis-à-vis de l’impact potentiel d’un avion de type commercial, et sont donc maintenues sans changement."

Selon une étude commandée par Greenpeace à l’ingénieur nucléaire spécialiste de l’évaluation des risques John Large, "la complexité des dynamiques et des forces engendrées par la chute d’un avion ne sont pas reflétées de façon adéquate" par la méthodologie "sommaire et incomplète" mise en avant par l’AIEA et "adoptée par l’industrie nucléaire de façon quasi-universelle". L’étude précise : "Il est extrêmement difficile de définir et de faire correspondre les caractéristiques d’un aéronef et celle d’une structure cible. La méthode actuelle, qui consiste à prendre en compte la simulation du crash d’un avion de combat militaire (d’environ 20 000 kilos) et de l’extrapoler à un avion commercial (pouvant peser plus de 130 000 kg), n’est ni fiable, ni réaliste." [2]

En 2014, devant la commission d’enquête parlementaire sur les coûts du nucléaire, et tout en continuant de prétendre mensongèrement que l’EPR est "calculé mécaniquement" pour affronter les crashs d’avions (sous-entendu "de ligne"), le directeur de l’IRSN Jacques Repussard ne pouvait cacher son scepticisme : "Un avion de très grand capacité ça porte dans certaines configurations des dizaines de tonnes de carburant, et les conséquences de l’incendie, bon c’est difficile, vous avez demandé de jurer de dire la vérité […] La question de la prévision, disons des calculs, c’est très difficile à faire, sur les conséquences de répandre des dizaines de tonnes de carburant en feu... bon." [3]

C’est le moins que l’on puisse dire : ainsi, dans son rapport, John Large relate que lors de l’attentat qui fit exploser un Boeing 747 en vol au-dessus de Lockerbie (Grande-Bretagne), "les réservoirs de kérosène se sont écrasés au sol avant d’exploser violemment une dizaine de secondes plus tard, lorsque le carburant a initié une déflagration qui s’est transformée en détonation, soufflant plusieurs immeubles et soulevant jusqu’à 4000 tonnes de terre et de roche pour laisser place à un énorme cratère."

Commentant les attentats du 11 septembre 2001 sur les tours du World Trade Center, John Large relève que, pour l’Autorité de Sûreté Nucléaire elle-même : "Ce qui s’est passé aux USA ne relève pas de chutes accidentelles mais de véritables actes de guerre, qui ne sont pas pris en compte dans la construction des installations nucléaires." Dans sa lettre à la DGSNR datée de 2003, EDF ne manquait pas de se dédouaner en vertu de ce raisonnement : "Nonobstant l’aptitude du projet EPR à faire face à des chutes d’avion, il convient de noter qu’EDF n’envisage pas d’assurer une capacité de résistance vis-à-vis de tout acte de guerre ou tout acte terroriste envisageable. La prévention de ceux-ci ou la limitation de leur effet relève essentiellement de la puissance publique."

Deux jours après les attentats du 11 septembre 2001, Jérôme Goellner, directeur adjoint de la DSIN, déclarait au journal Les Échos qu’ "aucune réglementation au monde ne permet de garantir qu’une centrale ne sera pas endommagée par une chute d’avion de grande taille". On ne saurait être plus clair.


Notes

[1Note d’information sur la protection des installations nucléaires contre les chutes d’avion, ASN / DSIN (Direction de la Sûreté des Installations Nucléaires), 13 septembre 2001

[2Large and Associates,La vulnérabilité des centrales nucléaires françaises aux chutes d’avion, Greenpeace, 12 novembre 2011

[3Voir extraits vidéos pertinents de l’audition de Jacques Repussard dans notre vidéo Centrales nucléaires : survol de drones aujourd’hui... crash d’avion demain ?

En 2006, le Réseau "Sortir du nucléaire" rendait public un document "confidentiel défense" qui témoignait que la conception de l’EPR, et notamment le dimensionnement de sa "bunkérisation", n’a été faite qu’en tenant compte du risque de crash d’un avion militaire. Or, de toute évidence, la masse et le chargement en kérosène d’un avion de chasse sont très largement inférieurs à ceux d’un avion de ligne.

En d’autres termes, bien que sa construction n’ait démarré que plusieurs années après les attentats du 11 septembre 2001 sur les tours du World Trade Center, le réacteur EPR n’est pas conçu pour pouvoir résister au crash d’un avion de ligne, qu’il soit le résultat d’un accident, d’un attentat ou d’un acte suicidaire. Il convient de rappeler que les installations nucléaires déjà en service (dont les 58 réacteurs nucléaires exploités par EDF) "sont construites depuis les années 1970 pour résister sans dommage à l’impact de la chute de petits avions civils. Elles ne sont pas construites pour résister sans dommages à l’impact d’autres avions" [1], y compris militaires.

Dans la lettre d’EDF qui accompagnait ce document adressé à la DGSNR, on peut lire : "une partie de l’installation est "bunkérisée" Il s’agit en particulier du bâtiment réacteur, du bâtiment du combustible usé et du bâtiment des auxiliaires de sauvegarde qui abrite 2 des 4 trains de sauvegarde (parties mécaniques et électriques). La partie "bunkérisée", dimensionnée comme il a été rappelé pour un impact de type avion militaire, présente d’ores et déjà une résistance élevée, notamment vis-à-vis des risques de perforation ; les caractéristiques d’un avion militaire en font en effet un missile considéré comme "perforant". Ces dispositions générales confèrent au projet EPR une grande robustesse vis-à-vis de l’impact potentiel d’un avion de type commercial, et sont donc maintenues sans changement."

Selon une étude commandée par Greenpeace à l’ingénieur nucléaire spécialiste de l’évaluation des risques John Large, "la complexité des dynamiques et des forces engendrées par la chute d’un avion ne sont pas reflétées de façon adéquate" par la méthodologie "sommaire et incomplète" mise en avant par l’AIEA et "adoptée par l’industrie nucléaire de façon quasi-universelle". L’étude précise : "Il est extrêmement difficile de définir et de faire correspondre les caractéristiques d’un aéronef et celle d’une structure cible. La méthode actuelle, qui consiste à prendre en compte la simulation du crash d’un avion de combat militaire (d’environ 20 000 kilos) et de l’extrapoler à un avion commercial (pouvant peser plus de 130 000 kg), n’est ni fiable, ni réaliste." [2]

En 2014, devant la commission d’enquête parlementaire sur les coûts du nucléaire, et tout en continuant de prétendre mensongèrement que l’EPR est "calculé mécaniquement" pour affronter les crashs d’avions (sous-entendu "de ligne"), le directeur de l’IRSN Jacques Repussard ne pouvait cacher son scepticisme : "Un avion de très grand capacité ça porte dans certaines configurations des dizaines de tonnes de carburant, et les conséquences de l’incendie, bon c’est difficile, vous avez demandé de jurer de dire la vérité […] La question de la prévision, disons des calculs, c’est très difficile à faire, sur les conséquences de répandre des dizaines de tonnes de carburant en feu... bon." [3]

C’est le moins que l’on puisse dire : ainsi, dans son rapport, John Large relate que lors de l’attentat qui fit exploser un Boeing 747 en vol au-dessus de Lockerbie (Grande-Bretagne), "les réservoirs de kérosène se sont écrasés au sol avant d’exploser violemment une dizaine de secondes plus tard, lorsque le carburant a initié une déflagration qui s’est transformée en détonation, soufflant plusieurs immeubles et soulevant jusqu’à 4000 tonnes de terre et de roche pour laisser place à un énorme cratère."

Commentant les attentats du 11 septembre 2001 sur les tours du World Trade Center, John Large relève que, pour l’Autorité de Sûreté Nucléaire elle-même : "Ce qui s’est passé aux USA ne relève pas de chutes accidentelles mais de véritables actes de guerre, qui ne sont pas pris en compte dans la construction des installations nucléaires." Dans sa lettre à la DGSNR datée de 2003, EDF ne manquait pas de se dédouaner en vertu de ce raisonnement : "Nonobstant l’aptitude du projet EPR à faire face à des chutes d’avion, il convient de noter qu’EDF n’envisage pas d’assurer une capacité de résistance vis-à-vis de tout acte de guerre ou tout acte terroriste envisageable. La prévention de ceux-ci ou la limitation de leur effet relève essentiellement de la puissance publique."

Deux jours après les attentats du 11 septembre 2001, Jérôme Goellner, directeur adjoint de la DSIN, déclarait au journal Les Échos qu’ "aucune réglementation au monde ne permet de garantir qu’une centrale ne sera pas endommagée par une chute d’avion de grande taille". On ne saurait être plus clair.



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