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Des accidents nucléaires partout

France : Flamanville : Oubli et vérifications tardives

EDF redémarre un réacteur sans vérifier son bon refroidissement avant




15 septembre 2023


Le réacteur 1 de la centrale nucléaire de Flamanville (Normandie) est resté trois jours avec un système de refroidissement amputé d’une pompe. Alors que les règles imposent de baisser la puissance, EDF a poursuivit le redémarrage de son réacteur.


Lors des phases d’arrêt et de démarrage, c’est un système particulier qui refroidit le réacteur nucléaire, le circuit ASG  [1] . Il est redondant comme tous les circuits les plus importants, c’est à dire qu’il est composé de deux parties indépendantes l’une de l’autre, chacune étant dotée de deux pompes. Au cas où un problème surviendrait sur une portion du circuit, l’autre partie peut prendre le relai. Une mesure de précaution fort utile quant il s’agit d’assurer des fonctions vitales, comme refroidir le cœur du réacteur nucléaire. Les deux voies doivent donc être pleinement opérationnelles lorsque le circuit est requis, c’est à dire qu’il est utilisé ou susceptible de l’être.

Le 1er septembre 2023, avant le redémarrage du réacteur 1 de Flamanville, une intervention de maintenance a nécessité la fermeture d’une des pompes du circuit ASG. Mais on ne sait pas pourquoi, elle n’a pas été ré-ouverte une fois l’intervention terminée. Personne n’a pensé à vérifier avant que le circuit de refroidissement ne soit requis, le 6 septembre. Ce n’est que trois jours après, lors d’un essai de bon fonctionnement, qu’EDF s’est rendu compte du problème. Les règles imposent pourtant à l’exploitant de baisser la puissance de son réacteur dans les huit heures si le circuit ASG n’est pas pleinement fonctionnel.

Erreur lors d’une intervention de maintenance, contrôle technique fait à la va-vite qui n’a pas permis de détecter l’oubli de remise en configuration, démarrage poursuit 3 jours durant avec un système de refroidissement partiellement hors-service sans que EDF ne s’en rende compte du fait d’essais faits tardivement, les faits ont significativement [2] entaché les mesures prises pour limiter les risques d’accidents [3] dans la centrale nucléaire normande. L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) précise qu’elle sera attentive à ce que EDF se penche sur les facteurs à l’origine de l’incident, pointant des causes organisationnelles et humaines. En d’autres termes, EDF donne-t-il les moyens à ses équipes de travailler correctement ?

Ce que dit EDF :

Détection tardive d’un non-respect des spécifications techniques d’exploitation sur l’unité de production n°1

Publié le 15/09/2023

Le 1er septembre 2023 à 11h, une intervention est réalisée sur un circuit de refroidissement de l’unité n°1, alors en phase de redémarrage après son arrêt pour maintenance. Cette intervention nécessite la mise en sécurité du circuit, impliquant le verrouillage en position « fermée » d’une vanne permettant d’alimenter en vapeur l’une des deux turbopompes qui assurent l’alimentation de secours en eau des générateurs de vapeur.

Le 2 septembre à 11h, l’intervention est terminée. La vanne d’alimentation en vapeur de la turbopompe de secours reste en position fermée sans que l’exploitant ne le détecte, rendant la pompe indisponible.

L’unité n°1 poursuit ses opérations de démarrage. Son circuit primaire monte en pression et en température pour atteindre 90°C le 6 septembre à 1h du matin.

En cas d’indisponibilité de ce matériel, et à compter du passage au-dessus de 90°C, les spécifications techniques d’exploitation  [4] du réacteur prescrivent de diminuer la pression et la température du circuit primaire sous 8 heures.

L’indisponibilité de la pompe n’ayant pas été détectée, la conduite à tenir selon ces spécifications techniques d’exploitation n’est pas tenue.

Le 9 septembre, à 4h20, durant une phase d’essai, les opérateurs constatent que la vanne est fermée. A 5h54, après sa remise en conformité, la vanne s’ouvre correctement.

Cet événement n’a pas eu d’impact réel sur la sûreté des installations, les motopompes de secours et la seconde turbopompe de secours étant toujours restées disponibles.

L’analyse réalisée ayant conclu au non-respect à posteriori des spécifications techniques d’exploitation vis-à-vis de la conduite à tenir en cas d’indisponibilité d’une turbopompe de secours, la direction de la centrale de Flamanville 1&2 a déclaré le 12 septembre 2023, à l’Autorité de sûreté nucléaire, un événement significatif sûreté au niveau 1 de l’échelle INES, qui en compte 7.

https://www.edf.fr/la-centrale-nucleaire-de-flamanville-1-2/les-actualites-de-la-centrale-nucleaire-de-flamanville-1-2/detection-tardive-dun-non-respect-des-specifications-techniques-dexploitation-sur-lunite-de-production-ndeg1


Ce que dit l’ASN :

Détection tardive de l’indisponibilité d’une turbopompe du circuit d’alimentation de secours des générateurs de vapeur du réacteur 1 de la centrale nucléaire de Flamanville

Publié le 18/09/2023

Centrale nucléaire de Flamanville Réacteurs de 1300 MWe - EDF

Le 12 septembre 2023, EDF a déclaré à l’Autorité de sureté nucléaire (ASN) un événement significatif relatif à la détection tardive de l’indisponibilité d’une turbopompe du circuit d’alimentation de secours des générateurs de vapeur du réacteur 1 de la centrale nucléaire de Flamanville.

Le circuit d’alimentation de secours des générateurs de vapeur (ASG) est utilisé en cas de défaillance de leur alimentation normale en eau afin d’assurer le refroidissement du réacteur. Il est également utilisé lors des phases de mise à l’arrêt et de démarrage du réacteur. Le circuit ASG comprend deux voies redondantes. Chacune de ces voies est équipée d’une motopompe entraînée par un moteur électrique et, en redondance, d’une turbopompe entraînée par une turbine à vapeur.

Le 9 septembre 2023, le réacteur 1 était en cours de redémarrage à l’issue d’un arrêt pour maintenance et rechargement en combustible. Dans le cadre de la réalisation d’un essai périodique, EDF a détecté qu’une vanne du circuit ASG était incorrectement positionnée. Cette mauvaise configuration a rendu indisponible une turbopompe depuis le 2 septembre 2023, date de la dernière manœuvre de la vanne. Or dans le cadre du redémarrage du réacteur 1, la turbopompe était requise par les spécifications techniques d’exploitation (STE) depuis le 6 septembre 2023. L’exploitant n’a donc pas respecté les STE, qui en cas d’indisponibilité imposent le repli du réacteur sous 8 heures.

Cet événement n’a pas eu de conséquence sur les personnes et l’environnement. Toutefois, compte tenu de la détection tardive de l’indisponibilité de la turbopompe du circuit d’alimentation de secours des générateurs de vapeur, requise par les spécifications techniques d’exploitation, cet événement a été classé au niveau 1 de l’échelle INES (échelle internationale des événements nucléaires et radiologiques, graduée de 0 à 7 par ordre croissant de gravité).

Dès la détection de l’événement le 9 septembre 2023, l’exploitant a procédé à la remise en conformité de la voie du système ASG en repositionnant la vanne correctement. L’ASN sera vigilante quant à l’analyse des causes humaines et organisationnelles ayant entraîné cette anomalie et aux actions prises pour éviter son renouvellement.

https://www.asn.fr/l-asn-controle/actualites-du-controle/installations-nucleaires/avis-d-incident-des-installations-nucleaires/detection-tardive-de-l-indisponibilite-d-une-turbopompe-du-circuit-d-alimentation-de-secours-des-gv3


[1ASG : alimentation de secours des générateurs de vapeur. Lorsque l’alimentation normale en eau est défaillante, le système ASG permet alors d’alimenter les générateurs de vapeur pour évacuer la chaleur transmise par le circuit primaire. L’alimentation de secours peut se faire à partir d’une turbopompe ou de deux motopompes aspirant dans un réservoir de stockage d’eau déminéralisée https://www.asn.fr/lexique/a/ASG

[2Événements significatifs : incidents ou accidents présentant une importance particulière en matière, notamment, de conséquences réelles ou potentielles sur les travailleurs, le public, les patients ou l’environnement. https://www.asn.fr/Lexique/E/Evenement-significatif En dessous des évènements significatifs, il y a les évènements dits « intéressants », et encore en dessous les « signaux faibles ». Un évènement catégorisé « significatif » est donc déjà « en haut de l’échelle » d’importance des évènements

[3La sûreté nucléaire est l’ensemble des dispositions techniques et des mesures d’organisation relatives à la conception, à la construction, au fonctionnement, à l’arrêt et au démantèlement des installations nucléaires de base, ainsi qu’au transport des substances radioactives, prises en vue de prévenir les accidents ou d’en limiter les effets. https://www.asn.fr/Lexique/S/Surete-nucleaire

[4Le pilotage d’un réacteur s’inscrit dans un cadre de prescriptions à respecter, parmi lesquelles les spécifications techniques d’exploitation (STE). Les STE sont un recueil de règles d’exploitation approuvées par l’Autorité de sûreté nucléaire, qui définissent le domaine autorisé de fonctionnement d’une centrale nucléaire et les prescriptions de conduite du réacteur associées.


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Installation(s) concernée(s)

Flamanville

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