5 mai 2021
En moins de cinq mois, la centrale nucléaire de Flamanville (Normandie) a rejeté dans l’atmosphère bien plus de gaz à effet de serre que le maximum autorisé sur toute l’année 2021. Et pourtant, un seul de ses réacteurs fonctionnait. Le problème provient de fuites. Des fuites de fluides frigorigènes, qui servent à refroidir les équipements et la ventilation de l’installation nucléaire. Un problème récurrent sur ce site nucléaire.
Les fluides frigorigènes se transforment en de puissants gaz à effet de serre lorsqu’ils sont relâchés dans l’atmosphère. Les émissions induites varient selon le type de fluide utilisé et auront un effet différent sur le climat, d’autant qu’ils ont des durées de vies différentes. Mais chaque fuite de ces liquides de refroidissement revient à rejeter dans l’air des gaz à effet de serre dont certains ont un pouvoir réchauffant global bien plus grand que le CO2 (Par exemple, 1 kg de fluide de type HFC-134a vaut 3710 kgeqCO2 à l’horizon de 20 ans. Voir l’article Certains gaz à effet de serre des centrales nucléaires de Bernard Laponche pour plus de détails). Sans parler du SF6 (Hexafluorure de soufre), utilisé dans les centrales nucléaires comme isolant électrique, qui une fois relâché dans l’atmosphère devient le plus puissant des gaz à effet de serre (1 kg de SF6 émis dans l’atmosphère a le même impact sur l’effet de serre global à long terme que 22 800 kg de CO2) et qui y restera plus de 3 000 ans avant de se décomposer. Pour autant, jusqu’en 2018, ces fuites ne faisaient pas l’objet de déclaration d’évènement significatif pour l’environnement par EDF.
Le problème est connu des industriels et des autorités. Et si un seuil maximum est fixé - 100 kg/ an de fuites de ces fluides frigorigènes sont autorisés pour chacune des 18 centrales nucléaires en France - il n’est pas rare qu’il soit dépassé. Cela a déjà été le cas à Belleville-sur-Loire (Centre-Val de Loire), au Bugey (Rhône-Alpes), et à Flamanville.
Bis repetita pour le site nucléaire normand, qui après avoir déclaré à l’été 2020 avoir dépassé le seuil maximum autorisé pour toute l’année en terme d’émissions de SF6, déclare le 29 avril 2021 avoir dépassé le maximum autorisé pour toute l’année de fluides frigorigènes. En moins de cinq mois, le site à laissé fuiter plus de 140 kg de ces fluides (sans préciser lesquels), alors qu’il n’a droit "qu’à" 100 kg sur 12 mois. Ces fuites, allant de quelques kilos à plus d’une soixantaine d’un coup, seraient dues selon EDF à la technologie des équipements. Et ce alors même qu’un seul des 2 réacteurs du site nucléaire a fonctionné depuis le début de l’année. Il faut se rappeler que le site nucléaire a été placé sous surveillance renforcée de l’Autorité de sûreté, notamment en raison de l’état de délabrement avancé des équipements. Le réacteur 1 est resté arrêté depuis mi-septembre 2019 pour maintenance (alors qu’il sortait juste d’une visite décennale de presque 2 ans) et n’a redémarré que tout récemment, le 3 mai 2021. Quant au réacteur 2, il est resté arrêté de janvier 2019 à décembre 2020. Il était donc le seul à fonctionner les premiers mois de l’année 2021.
Bien que le problème soit connu, récurrent et délétère pour l’environnement, l’exploitant n’est manifestement pas à même d’éviter qu’il ne se reproduise. Peu d’explications sur le pourquoi de ces fuites de fluides de refroidissement, si ce n’est que 5 équipements différents sont à l’origines de ces 140 kg de fuites en moins de 5 mois. Une déclaration d’EDF qui ne fait que quelques lignes, mais qui ne laisse rien présager de bon pour la suite de l’année 2021 en terme d’émissions de gaz à effet de serre par cette installation nucléaire.
L.B.
Dépassement du seuil de 100kg d’émission de fluides frigorigènes
Publié le 06/05/2021
Depuis le début de l’année 2021, la centrale nucléaire de Flamanville 1&2 a comptabilisé 140,17 kg d’émission de fluide frigorigènes. Le dépassement du seuil de 100 kg/an conduit le site à déclarer un événement significatif pour l’environnement (ESE). Ces émissions ont été relevées sur 5 équipements de réfrigération ou de climatisation répartis sur le site et sont comprises entre quelques kilos et 62 kg. Ces pertes cumulées depuis le début de l’année 2021 représentent 1,3 % de la masse de fluide frigorigène exploitée sur le site. Ces pertes s’expliquent majoritairement par des pertes liées à la technologie du matériel. Ce dépassement de la limite autorisée a été déclaré à l‘Autorité de sûreté nucléaire le 29 avril 2021.