21 avril 2022
Pour solutionner un problème de prolifération bactérienne dans le Rhône, problème créé par trop de rejets d’eaux chaudes provenant de la centrale nucléaire de Cruas (Ardèche), EDF a déversé dans le milieu naturel des doses massives de produits chimiques biocides, de l’ammoniac et de l’eau de javel, des substances qui tuent les agents pathogènes mais aussi d’autres organismes vivants présents dans l’écosystème.
Brève déclaration sur le site internet de la centrale nucléaire de Cruas, intitulée sobrement "Dépassement d’un seuil réglementaire sur une valeur calculée de concentration en amibes". Les eaux trop chaudes rejetées par la centrale dans le fleuve provoquent la multiplication des amibes et légionelles, et pas qu’un peu : les agents pathogènes sont deux fois plus nombreux que le seuil maximal réglementaire. Cette concentration anormale, qui a atteint plus du double du maximum autorisé (< 200 Nf/litre alors que le seuil maximal à ne pas dépasser est à 100 Nf/l) suggère en premier lieu une surveillance insuffisante par EDF de l’impact de son installation nucléaire sur le milieu naturel. Des contrôles plus fréquents, réactifs et adaptés au contexte et non uniquement basés sur des dates choisies de manière standardisée, auraient permis de détecter l’augmentation des amibes avant d’en arriver à une telle concentration.
Le second problème est la solution d’EDF : "renforcer son traitement biocide" à la monochloramine, un mélange d’eau de Javel et d’ammoniac. Des produits chimiques qui tuent le vivant, rejetés dans le fleuve en quantités massives par l’industriel pour éliminer les amibes et légionelles, mais qui auront aussi un effet dévastateur sur le reste de la faune et la flore du milieu aquatique. Si EDF avait détecté plus tôt la prolifération des amibes, les quantités de produits chimiques nécessaires au "traitement" auraient été moindres.
Parce que ses installations rejettent des eaux trop chaudes en trop grande quantité dans le Rhône, EDF provoque la prolifération de micro-organismes pathogènes. Pour les éliminer, l’industriel déverse des substances dangereuses dans le milieu naturel. Parce qu’EDF ne respecte pas la capacité naturelle du fleuve à absorber ses rejets d’eaux chaudes, il provoque de multiples altérations de l’écosystème aquatique. À l’exploitant nucléaire en revanche, il ne lui en coûtera que le prix des produits chimiques déversés dans le fleuve et une brève déclaration d’incident significatif pour l’environnement [1] .
L.B.
Dépassement d’un seuil réglementaire sur une valeur calculée de concentration en amibes
Publié le 21/04/2022
Evénement environnement
La centrale nucléaire de Cruas-Meysse réalise une surveillance environnementale et des traitements vis-à-vis des amibes. Ces micro-organismes naturellement présents dans l’eau du Rhône, en amont des installations, peuvent trouver un terrain favorable de développement [2] dans les eaux tièdes qui circulent, en dehors de la zone nucléaire, au niveau des tours aéroréfrigérantes des unités de production en fonctionnement. Pour l’amibe potentiellement pathogène Naegleria fowleri (Nf), la réglementation fixe une limite de 100 Nf/litre.
L’installation de traitement biocide de la centrale a notamment pour objectif de maintenir en aval du rejet d’eaux dans le Rhône une concentration inférieure à 100 Nf/litre. Conformément à nos procédures, elle est mise en service à titre préventif à partir du 15 avril.
Entre le 16 octobre et le 14 avril, des prélèvements mensuels effectués au niveau des aéroréfrigérants permettent de calculer, en fonction du débit du Rhône, la concentration des Naegleria fowleri. Les échantillons prélevés nécessitent une mise en culture, les résultats sont obtenus deux jours plus tard et analysés sur plusieurs jours (de J+2 à J+5). A partir du 15 avril et jusqu’au 15 octobre, ces prélèvements sont quotidiens.
Dimanche 17 avril 2022, les équipes de la centrale ont renforcé le traitement biocide (monochloramine) car les analyses des prélèvements effectués le 15 avril, avant la mise en œuvre du traitement biocide, ont mis en évidence une concentration calculée en aval du rejet d’eaux dans le Rhône supérieure à 200 Nf/litre, dépassant le seuil réglementaire. Lundi 18 avril 2022, la concentration calculée sur la base des prélèvements réalisés le 16 avril, soit avant le renforcement du traitement, est inférieure à 30 Nf/litre. Par ailleurs, la température du Rhône, de l’ordre de 13 °C, était défavorable au développement d’amibes.
Cet événement n’a eu aucun impact réel sanitaire ni environnemental. En raison du dépassement du seuil de 100 Nf/litre, la direction de la centrale nucléaire de Cruas-Meysse a déclaré à l’Autorité de sûreté nucléaire, un événement significatif pour l’environnement, le 20 avril 2022.
[1] Événements significatifs : incidents ou accidents présentant une importance particulière en matière, notamment, de conséquences réelles ou potentielles sur les travailleurs, le public, les patients ou l’environnement. https://www.asn.fr/Lexique/E/Evenement-significatif
[2] Naturellement présentes dans l’environnement, les amibes apprécient les milieux humides, spécialement les eaux douces chaudes dont la température s’échelonne de 20°C à 45°C