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Des accidents nucléaires partout

France : Chinon : Un système de secours du réacteur 3 mis hors service par erreur, 5 jours pour s’en rendre compte : 3ème incident déclaré en quelques semaines




3 décembre 2018


Après un essai réalisé sur un équipement du réacteur 3, des disjoncteurs sont mis en position ouverte alors qu’ils devaient rester en position fermée. De par cette erreur de manipulation, le démarrage automatique de 2 pompes d’alimentation de secours en eau des générateurs de vapeur devient impossible. Le circuit d’alimentation de secours des générateurs de vapeur (ASG*) fournit l’eau nécessaire au refroidissement du réacteur en cas de défaillance de l’alimentation principale en eau des générateurs de vapeur. Selon les règles générales qui régissent la conduite de l’installation nucléaire, ce circuit était requis à partir 18 novembre, date à laquelle le réacteur 3 change de domaine d’exploitation. Toujours selon ces règles , l’exploitant aurait dû procéder à la réparation sous 24h. Mais ce n’est que 5 jours plus tard, lors d’un essai en vu du redémarrage du réacteur, que le problème sera détecté par EDF.


Ce nouvel incident vient s’ajouter à une liste de problèmes sur le site nucléaire qui commence à devenir longue. En août 2018, l’exploitant détectait, près d’un an après, un défaut de confinement du réacteur 2. Un robinet était resté ouvert après une opération de maintenance en octobre 2017 (voir notre article à ce sujet). L’erreur s’est répétée très rapidement : le 25 août 2018, un robinet est laissé ouvert sur une canalisation traversant cette même enceinte de confinement du réacteur 2. Du combustible sera manipulé durant 2 jours début octobre pour recharger le réacteur sans que la brèche dans la 3ème barrière de confinement ne soit détectée (voir notre article à ce sujet). Le 26 octobre 2018, l’Autorité de sûreté nucléaire mènera une inspection réactive sur le site après avoir été informée de la découverte d’une épaisseur inférieure au minimum requis sur un assemblage boulonné du circuit d’eau brute secourue (SEC**) du réacteur 2. Vérifications faites : les 2 voies des circuits SEC des réacteurs 1 et 2 sont concernées. À cause de cette sous-épaisseur de brides, ces circuits ne résisteraient pas à une secousse sismique, alors qu’ils sont censés être dimensionnés aux séismes. L’ASN a imposé des mesures compensatoires et une surveillance renforcée dans l’attente des réparations et a demandé à EDF de procéder à une déclaration d’incident, ce que l’exploitant a fait le 2 novembre 2018 (voir notre article à ce sujet). Il n’aura pas fallu attendre bien longtemps pour de nouvelles déclarations d’évènements significatifs pour la sûreté. Le 29 novembre, EDF en fait 2 simultanément qui présentent de sérieuses similitudes. Toutes 2 concernent le réacteur 3, et toutes 2 sont relatives à des détections tardives d’équipements hors fonction à un moment où ils étaient pourtant requis. Une déclaration est relative à l’indisponibilité de la fonction de recirculation sur une des 2 voies du circuit d’injection de sécurité (voir notre article à ce sujet). L’autre, présentée ici, concerne l’indisponibilité du démarrage automatique des pompes d’alimentation de secours en eau des générateurs de vapeur suite à une erreur de manipulation.

Ce que dit EDF :

Déclaration d’un ESS niveau 1 concernant l’indisponibilité de l’ordre de démarrage de deux pompes assurant l’alimentation en eau de secours des Générateurs de Vapeur [1]

Le 03/12/2018

Le 23 novembre 2018, l’unité de production n°3 est en cours de redémarrage suite à un arrêt programmé pour renouvellement d’une partie de son combustible depuis le 20 octobre 2018.

Lors de la réalisation d’un test de fonctionnement sur deux pompes du système d’alimentation de secours en eau des générateurs de vapeur, les équipes de la centrale constatent qu’elles ne démarrent pas. Un diagnostic est immédiatement engagé. Après analyse, il est constaté que les disjoncteurs des 2 pompes sont restés ouverts depuis le dernier test réalisé le 30 octobre 2018. Ces derniers ont été remis en position immédiatement.

Cet événement n’a eu aucun impact sur la sûreté des installations. En situation accidentelle nécessitant le démarrage de ces pompes, deux autres moyens complémentaires auraient pu être utilisés pour assurer le démarrage de celles-ci. Néanmoins, suite à la détection tardive de cet événement, la direction de la centrale nucléaire de Chinon a déclaré un événement significatif sûreté, le 29 novembre 2018, à l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN) de niveau 1 de l’échelle internationale des événements nucléaires (INES), qui en compte 7.

https://www.edf.fr/groupe-edf/nos-energies/carte-de-nos-implantations-industrielles-en-france/centrale-nucleaire-de-chinon/actualites/declaration-d-un-ess-niveau-1-concernant-l-indisponibilite-de-l-ordre-de-demarrage-de-deux-pompes-assurant-l-alimentation-en-eau-de-secours


Ce que dit l’ASN :

Indisponibilité de l’ordre automatique de démarrage de deux pompes d’alimentation de secours en eau des générateurs de vapeur du réacteur 3

Le 05/12/2018

Centrale nucléaire de Chinon B - Réacteurs de 900 MWe - EDF

Le 29 novembre 2018, l’exploitant de la centrale nucléaire de Chinon a déclaré à l’Autorité de sûreté nucléaire un événement significatif pour la sûreté relatif à l’indisponibilité de l’ordre automatique de démarrage des pompes d’alimentation de secours en eau des générateurs de vapeur du réacteur 3.

Le circuit d’alimentation de secours des générateurs de vapeur (ASG) fournit l’eau nécessaire au refroidissement du réacteur en cas de défaillance de l’alimentation principale en eau des générateurs de vapeur.

Le 14 novembre 2018, le réacteur 3 est en arrêt programmé pour maintenance et rechargement du combustible. A la suite de l’essai d’un matériel, des disjoncteurs sont mis en position ouverte alors qu’ils auraient dû rester fermés. Cette manœuvre rend indisponible la fonction de démarrage automatique des pompes ASG. Le 18 novembre 2018, compte tenu du changement du domaine d’exploitation du réacteur, cette fonction devient requise selon les règles générales d’exploitation.

Le 23 novembre 2018, lors de la réalisation d’un essai de fonctionnement en vue du redémarrage, l’exploitant détecte l’indisponibilité de l’ordre automatique de démarrage de deux pompes d’alimentation de secours en eau des générateurs de vapeur. Après analyse, l’exploitant referme les disjoncteurs mis en cause. En conséquence, l’ordre de démarrage automatique des pompes ASG n’a pas été disponible pendant plus de 5 jours alors que les règles générales d’exploitation imposent à l’exploitant d’effectuer la réparation sous 24 heures.

Cet évènement n’a pas eu de conséquence sur le personnel ni sur l’environnement.

Toutefois, compte tenu de la détection tardive de cet événement et du non-respect de la conduite à tenir prescrit par les règles générales d’exploitation, il a été classé au niveau 1 de l’échelle INES.

https://www.asn.fr/Controler/Actualites-du-controle/Avis-d-incident-des-installations-nucleaires/Indisponibilite-de-l-ordre-automatique-de-demarrage-de-deux-pompes-d-alimentation-de-secours


* Circuit d’Alimentation de secours des générateurs de vapeur (ASG) : Lorsque l’alimentation normale en eau est défaillante, le système ASG permet alors d’alimenter les générateurs de vapeur pour évacuer la chaleur transmise par le circuit primaire. L’alimentation de secours peut se faire à partir d’une turbopompe ou de deux motopompes aspirant dans un réservoir de stockage d’eau déminéralisée. https://www.asn.fr/Lexique/A/ASG

** Circuit d’eau brute secourue (SEC) : ce circuit sert à refroidir un autre circuit, appelé circuit de refroidissement intermédiaire, qui assure le refroidissement des matériels importants pour la sûreté du réacteur. C’est un circuit « de sauvegarde » constitué de deux lignes redondantes, comportant chacune deux pompes et deux échangeurs. Il fonctionne en permanence, même lorsque le réacteur est à l’arrêt, afin d’assurer, entre autres, le refroidissement de la piscine de stockage du combustible. https://www.asn.fr/Lexique/C/circuit-d-eau-brute-secourue


[1Les générateurs de vapeur servent à transformer l’énergie thermique issue du cœur du réacteur en vapeur. Cette vapeur alimente le turboalternateur qui produit l’électricité délivrée par la centrale.


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Installation(s) concernée(s)

Chinon

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99