30 juin 2023
Crédit photo : André Paris
Après l’huile [1], l’essence. Le carburant des groupes électrogènes du site nucléaire de Chinon (Centre - Val de Loire) a fui, et pas qu’un peu, lors d’un transfert réalisé le 23 juin 2023. 120 litres ont été déversés sur la chaussée et ont rejoint le réseau de collecte des eaux pluviales, un réseau directement relié à la nature.
On ne sait pas ce qui s’est mal passé. Mais pour que 120 litres soient répandus sur la chaussée, on peut déduire qu’il y a eu un problème lors du déroulement de cette activité.
Le combustible (du gasoil) devait être transféré entre deux groupes électrogènes à moteur diesel, ces sources électrique de secours qui équipent tout réacteur nucléaire pour pallier une éventuelle coupure d’électricité (et éviter une interruption du refroidissement, ce qui ne doit jamais arriver sous peine de générer un accident). Ce type d’opération représente un risque pour l’environnement, comme toute activité induisant une manipulation de produits dangereux. Encore plus quand elle se passe en extérieur. Elle est censée être l’objet d’une étude préalable des risques induits et respecter une procédure élaborée spécifiquement pour éviter leur survenue. Problème lors de cette étude ? Problème de définition de la procédure ? Problème d’application de la procédure ? Le communiqué d’EDF déclarant l’incident significatif pour l’environnement ne le dit pas [1]
. Il dit seulement "non-respect des procédures liées à l’activité". Une explication pour le moins floue. Mais un pluriel à noter.
Une fuite de 120 litres implique a minima un manque de surveillance lors du transfert. Et probablement un défaut de raccordement. L’essence s’est écoulée dans les caniveaux et a rejoint le réseau de collecte des eaux pluviales, un système directement relié au canal de rejets du site nucléaire et qui se jette dans la Loire. Ce réseau est souvent le déversoir des produits polluants déversés accidentellement sur le site.
D’après EDF, le réseau a pu être fermé à temps, avant que l’essence n’atteigne le canal et la Loire. Aucune trace d’irisation sur l’eau affirme l’industriel.
Si le milieu naturel a été épargné d’une nouvelle pollution, cet incident survient très peu de temps après que la centrale de Chinon ait déclaré avoir déversé trop d’hydrocarbures dans ce même canal. Bien plus que ce qui lui était autorisé. Là non plus EDF n’a pas fourni d’explication précise quant à l’origine de cette pollution de l’eau, qu’il a d’ailleurs détecté tardivement, après avoir effectué ses rejets dans l’eau. Le mauvais fonctionnement d’un système de dépollution des résidus liquides sortant de la salle des machines semble en cause.
Si le 23 juin EDF a pu réagir à temps et "rattraper" le gasoil avant qu’il n’atteigne l’eau de la Loire, il n’en reste pas moins que l’industriel a généré un nouvel incident et a provoqué des risques pour l’environnement qui n’auraient jamais dû arriver. De tout temps, mais encore plus maintenant, les ressources naturelles et tout particulièrement l’eau doivent être préservées au maximum. Tout transfert de substance radiologique ou chimique doit être fait dans les règles de l’art et avec une attention extrême. À se demander si EDF se donne réellement les moyens de préserver l’environnement et si les questions écologiques liées à ses activités sont pour lui une priorité.
L.B.
Déclaration d’un événement significatif environnement
Publié le 30/06/2023
Vendredi 23 juin 2023, lors de la réalisation d’une activité consistant à transférer du gasoil non routier entre deux diesels de l’unité de production numéro 1 *, 120 litres ont été déversés sur la voirie. Une partie s’est écoulée dans le réseau de réception des eaux pluviales, sans atteinte du milieu récepteur. Les obturateurs, permettant de confiner les écoulements ont immédiatement été déclenchés, ce qui a permis d’éviter l’atteinte de l’environnement.
Une opération de nettoyage du réseau de réception des eaux fluviales de la centrale a alors été effectuée. L’absence d’irisation du réseau à l’issue des contrôles réalisés a permis sa remise en service. Aucune trace de gasoil n’a été observée sur le canal de rejet de la centrale, ni en Loire. Cet évènement n’a eu aucune conséquence sur l’environnement.
En raison du non-respect des procédures liées à l’activité, la direction de la centrale nucléaire de Chinon a déclaré à l’Autorité de Sûreté Nucléaire un évènement significatif environnement le 29 juin 2023.
*L’unité de production numéro 1 est à l’arrêt pour visite décennale depuis le 7 février 2023.
[1] récemment, des hydrocarbures ont été mesurés en concentration bien supérieures aux limites autorisées dans les rejets de la centrale de Chinon. Le site a déclaré aux autorités un incident significatif pour l’environnement le 7 juin. Voir notre article à ce sujet.
[2] Événements significatifs : incidents ou accidents présentant une importance particulière en matière, notamment, de conséquences réelles ou potentielles sur les travailleurs, le public, les patients ou l’environnement. https://www.asn.fr/Lexique/E/Evenement-significatif En dessous des évènements significatifs, il y a les évènements dits « intéressants », et encore en dessous les « signaux faibles ». Un évènement catégorisé « significatif » est donc déjà « en haut de l’échelle » d’importance des évènements