24 septembre 2018
Le 21 septembre 2018, EDF a déclaré une nouvelle anomalie dite "générique" car retrouvée sur plusieurs sites nucléaires. Au Blayais, à Chinon, à Cruas, à Dampierre, à Gravelines, Saint-Laurent et au Tricastin, le circuit d’eau qui refroidit la ventilation des locaux électriques des installations n’aurait pas résisté à un tremblement de terre. Surchauffe assurée des locaux et donc perte de l’alimentation électrique de nombreux équipements des installations. Une petite trentaine de réacteurs sur les 58 jalonnant l’hexagone sont potentiellement concernés. Les premières constations ont été faites au Tricastin, mais on ne sait pas quand. L’exploitant a attendu pour informer le public de procéder à diverses vérifications. Il annonce dans le même temps avoir déclaré l’évènement comme significatif pour la sûreté, avoir pris des mesures pour que les locaux électriques puissent malgré tout être refroidis et avoir déjà terminé les travaux à certains endroits, justifiant ainsi qu’il n’y ait pas eu d’arrêt de réacteurs malgré les risques encourus. La liste des réacteurs restant à réparer est quant à elle bien floue, puisque l’exploitant ne détaille pas précisément sur quels réacteurs l’anomalie a été repérée. En revanche la liste des réacteurs où les réparations sont déjà terminées est elle bien précise. EDF annonce également très clairement que tout sera réglé d’ici mi-octobre 2018. Et que ces "défauts" n’ont "aucun impact sur la sécurité des salariés ni sur l’environnement". Et sur la sûreté ?
L’année 2017 avait déjà vu passer de nombreuses déclarations d’anomalies sur le parc nucléaire français relatives aux séismes. Devant leur foisonnement et pour faciliter le recoupage des informations distillées au compte goutte, nous avions créé une rubrique spéciale incrémentée au fur et à mesure, "Et si la terre tremble ?", que vous pouvez consulter ici.
Difficile pour l’exploitant de garantir que ses installations nucléaires composées de multiples systèmes, circuits et de kilomètres de câbles et de tuyauteries résisteraient à un tremblement de terre. D’autant que bon nombres d’entre elles sont construites sur des zones sismiques (voir ces zones sur une carte de la France). Et que viennent se surajouter des problèmes d’entretien des installations, de défauts de conception de certains systèmes de fixation, voire des pièces carrément absentes. Perte d’alimentation électrique - y compris de l’alimentation électrique de secours censée prendre le relai en cas justement de séisme - perte de refroidissement des réacteurs, inondations... Autant d’éléments qui remettent sérieusement en cause la sûreté des installations nucléaires et démontrent que l’exploitant a bien du mal à respecter les référentiels de sûreté (où sont définis les équipements qui doivent obligatoirement résister aux séismes).
Dernier en date : la perte des circuits d’eau glacée de 2 systèmes de ventilation. À première vue pas si grave, sauf que cette ventilation permet aux locaux électriques de ne pas surchauffer. Dans ces locaux sont concentrés câbles, tableaux et armoires électriques qui servent à alimenter divers systèmes et équipements des réacteurs. Un feu dans ces locaux aurait des conséquences désastreuses pour toute l’installation, les populations et l’environnement. Là encore à l’origine du problème : un "défaut d’ancrage", c’est-à-dire de système de fixation, qui a été sous-dimensionné et ne tiendrait pas le choc en cas de tremblement de terre. Là encore, la communication officielle d’EDF, un même texte mis en ligne le même jour sur tous les sites des centrales concernées, en dit bien peu.
L.B.
Déclaration d’un événement de niveau 1 (échelle INES) concernant des défauts pouvant fragiliser la tenue au séisme des vases d’expansion des circuits d’eau glacée
Publié le 24/09/2018
Suite à la détection de défauts sur les ancrages* des vases d’expansion** du circuit d’eau glacée*** de deux systèmes de ventilation, à la centrale EDF de Tricastin, les investigations menées n’ont pas permis de démontrer que ces ancrages demeuraient suffisamment dimensionnés en cas de séisme équivalent aux séismes dits « de référence »**** sur les unités de production des centrales de Blayais, Chinon, Cruas-Meysse, Dampierre-en-Burly, Gravelines, Saint-Laurent-des-Eaux et Tricastin.
Les analyses des conséquences potentielles de ces défauts ont montré que la perte du circuit d’eau glacée de ces deux circuits de ventilation, suite à un séisme équivalent aux séismes de référence, aurait pu conduire à un échauffement dans certains locaux électriques. Cependant, la réparation du circuit d’eau glacée aurait, dans ce cas, pu être réalisée dans des délais permettant le maintien de conditions ambiantes acceptables dans les locaux électriques et la maîtrise de la sûreté des installations.
Dès la découverte de ces défauts et de leurs conséquences potentielles, des mesures relatives à la configuration des circuits de ventilation ont été immédiatement mises en place dans l’ensemble des unités de production concernées. Ces mesures permettent de garantir le refroidissement des locaux électriques en cas de perte du circuit d’eau glacée, suite à un séisme équivalent aux séismes de référence. Elles permettent donc le maintien en production de ces réacteurs en toute sûreté.
Les travaux de renforcement de ces ancrages ont d’ores et déjà été effectués dans les unités de production de Blayais 1, Chinon B2, Dampierre 1, Gravelines 1, 5 et 6 et Tricastin 1 et 2. Ils sont en cours de réalisation ou de préparation pour tous les autres réacteurs concernés. Tous les travaux seront achevés mi-octobre 2018.
Par conséquent, EDF a déclaré à l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), le 21 septembre 2018, un événement significatif de sûreté dit « générique », car commun à plusieurs unités de production, classé au niveau 1 de l’échelle INES, échelle internationale de classement des événements nucléaires qui en compte 7.
Les défauts à l’origine de cette déclaration n’ont eu aucun impact sur la sécurité des salariés ni sur l’environnement.
* Un ancrage est un dispositif de fixation d’un matériel au génie civil assurant notamment sa tenue au séisme.
** Un vase d’expansion est un récipient destiné à compenser l’augmentation de volume liée à l’échauffement d’un liquide.
*** Les circuits d’eau glacée assurent le refroidissement de certains systèmes de ventilation.
**** Le dimensionnement des systèmes d’une centrale nucléaire implique la définition de deux niveaux de séisme de référence : le séisme maximal historiquement vraisemblable (SMHV) qui est supérieur à tous les séismes s’étant produit au voisinage de la centrale depuis mille ans, et le séisme majoré de sécurité (SMS), séisme hypothétique d’intensité encore supérieure.