Alternatives
Un village turc se passe du réseau électrique
Dans le village d’Akbıyık, les lumières se sont éteintes il y a un an et demi, lorsque la société turque de distribution d’électricité a coupé le courant en raison d’une facture impayée de 33000 lires (13 150 €). Désormais, les villageois étaient confrontés au dilemme suivant : s’acquitter de la dette et se raccorder au réseau électrique national ou trouver une nouvelle source d’énergie, qu’ils pourraient maîtriser eux-mêmes.
Ils ont choisi d’abandonner le réseau et d’opter pour l’électricité éolienne, assurant ainsi leur approvisionnement énergétique futur et devenant l’un des villages les plus écologiques de Turquie.
Une décision soigneusement pesée
Les habitants et le chef du village d’Akbıyık se sont mis en quête de différentes sources d’énergie renouvelables avant d’opter pour l’énergie éolienne. Ils ont alors proposé un projet d’éolienne d’un montant de 160 000 lires au gouvernement de leur province, à Bursa. Les villageois ont contribué à hauteur de 20 000 lires, mais la plus grande partie des coûts initiaux a été prise en charge par l’administration provinciale de Bursa.
D’une puissance de 50 kW, cette turbine ne va pulvériser aucun record de production d’énergie éolienne. Elle a toutefois d’ores et déjà permis à Akbıyık de rembourser sa dette auprès de la compagnie d’électricité et, aujourd’hui, elle alimente une pompe à eau qui permet au village de rester totalement indépendant des services publics.
"Nous avons déjà remboursé notre dette à TEDAŞ et, sans devoir faire appel à aucune autre société, nous produisons librement notre électricité," confie Mustafa Çiçek, chef du village.
Le ton est donné pour le gouvernement
La turbine a fait ses premiers tours quelques jours avant l’annonce par le gouvernement turc d’un ambitieux nouveau programme national pour l’énergie éolienne. Dans le cadre de cette initiative, la Turquie prévoit de concevoir et de produire des éoliennes elle-même plutôt que de faire appel à du matériel et à une expertise en ingénierie étrangers.
Bien que l’éolienne d’Akbıyık ne soit pas à 100 % turque, la décision du village montre que l’homme de la rue a une longueur d’avance sur le gouvernement turc en matière de solutions durables dans le domaine de l’énergie.
Retour à la tradition turque du respect de l’environnement
À la différence des autres éoliennes implantées en Turquie, détenues par des sociétés privées, celle d’Akbıyık appartient entièrement aux villageois, explique Kemal Demirel, secrétaire général du gouvernement provincial de Bursa. Pour l’avenir, M. Demirel table sur la mise en œuvre de projets similaires dans d’autres villages de la province.
En Turquie, la production durable d’énergie par la population n’a rien d’une nouveauté. L’année dernière, une mosquée du village de Büyükeceli a installé des panneaux photovoltaïques sur son toit, afin de protester contre un projet gouvernemental de construction de centrale nucléaire dans la région. Cette année, lors des premières compétitions aux énergies alternatives organisées à Izmir, le public a pu découvrir toute une gamme de véhicules fonctionnant à l’énergie solaire et à l’hydrogène construits par des étudiants et des professeurs d’université turcs.
La Turquie en pointe sur l’hydrogène
Pendant ce temps, l’International Centre for Hydrogen Energy Technologies (ICHET), projet de l’Organisation des Nations Unies pour le Développement Industriel (ONUDI), lançait l’un de ses projets pilotes sur l’île égéenne de Bozcaada. La production a démarré le 12 octobre 2011. Un toit photovoltaïque de 20 kW et une éolienne de 30 kW alimente une installation d’électrolyse, qui produit de l’hydrogène stocké sous pression, qui délivre à la demande de l’électricité à la maison du gouverneur et à l’hôpital, soit l’équivalent de la consommation de 20 foyers turcs.
Julia Harte
Initialement publié le 13 octobre 2011 sur
www.greenprophet.com
Traduction de l’anglais par Gilles Chertier
pour le Réseau "Sortir du nucléaire",
reproduite ici dans une version remaniée.