La guerre engagée le 24 février dernier par la Russie à l’encontre de l’Ukraine fait peser une lourde menace nucléaire — civile et militaire —, non seulement pour la population ukrainienne, mais également pour les populations envi- ronnantes. Un fait dont les médias se sont emparés à différentes reprises sous un angle catastrophique, mais sans interroger véritablement les moyens de l’endiguer et d’y mettre fin.
Le nucléaire "civil" hors sanction
Outre la menace d’utilisation des armes nucléaires, jamais un conflit ne s’était déroulé dans un pays autant nucléarisé : quinze réacteurs !
Chaque centrale, installation nucléaire et stock de déchets afférents, représente une cible et des menaces pour la population et l’environnement. Car la sûreté des installations est complètement fragilisée : les enceintes de confinement ne sont pas conçues pour résister à des tirs de missiles ; les capacités de refroidissement peuvent être entravées ; la chaîne logistique désorganisée, compliquant l’arrivée, par exemple, de pièces de rechange indispensables ; les combats qui se déroulent à proximité peuvent entraîner des destructions mettant en cause la sûre- té ; la surveillance des stocks de matières radioactives face au risque de leur détournement ; sans oublier la dégradation des conditions de travail pour le personnel, etc. Même l’AIEA s’inquiète. "La situation actuelle est intenable. [...] Le risque d’accident ou de violation de la sécurité augmente" souligne M. Rafael Mariano Grossi, son directeur, dans un discours prononcé le 9 juin dernier.
Et pourtant, le régime de sanctions mis en place immédiatement contre la Russie par les dirigeants occidentaux exclut le nucléaire civil ! Tous les pays de l’Union européenne notamment sont d’accord pour maintenir les coopérations commerciales avec la Russie en la matière. Par exemple, les seuls avions russes autorisés à se poser sur le sol européen depuis le début de la guerre, ont été ceux chargés d’uranium pour les centrales de Slovaquie et Hongrie... Rosatom, l’organisme à la tête de l’industrie nucléaire russe et chargé d’entretenir son arsenal, n’a subi à ce jour aucune sanction. Les nombreux partenariats développés depuis déjà de longues années avec la Russie sont au mieux gelés, mais en tout cas pas dénoncés suite au déclenchement du conflit.
La dissuasion nucléaire en échec
De même, Vladimir Poutine et les nucléaire dirigeants russes agitent régulièrement la menace d’une frappe nucléaire contre tous ceux qui voudraient entraver son ambition de conquête territoriale : renforcement du niveau d’alerte, exercice de tir d’un missile réputé "invincible", journaux télé- visés russes vantant les effets d’une bombe sur telle ou telle capitale, etc. Même si, dans les médias, de nombreux experts tentent de minimiser le risque de déclenchement d’une guerre nucléaire, un dérapage ne peut être exclu. D’autant que cer- tains responsables occidentaux ont renchéri en bombant le torse pour rappeler qu’eux aussi avaient la bombe et "que l’Alliance atlantique est une alliance nucléaire". Ils ont eux aussi augmenté le niveau d’alerte de leur arsenal, comme l’a fait la France en mettant à la mer deux sous-marins nucléaires lanceurs d’engins au lieu d’un seul, ou en organisant ostensiblement des exercices nucléaires.
Cette guerre dévoile la nature profonde de cette arme qui, contrairement aux discours officiels à l’usage des opinions publiques, n’est pas un outil au service de la paix et de la liberté, destiné à prévenir la guerre. La réalité de la stratégie de dissuasion est tout autre. L’arsenal nucléaire est bien un facteur de liberté, mais à destination des dirigeants des puissances nucléaires, dans leur volonté de domination, y com- pris d’agression physique à l’encontre d’un autre pays, d’une autre population sans crainte de subir une riposte massive. La stratégie de la dissuasion nucléaire permet et renforce la guerre, comme l’a bien montré Poutine en envahissant l’Ukraine... C’est une arme d’exercice de la puissance pour ceux qui la possèdent afin d’exercer leur domination comme ils l’entendent sous la menace d’un chantage à l’extermination en totale impunité.
Le danger d’utilisation est renforcé par la présence des armes nucléaires dites "tactiques", c’est-à-dire à courte portée, dont la puissance de destruction va de quelques kilotonnes à 350 kilotonnes. Pour rappel, celle larguée sur Hiroshima était de 15 kilotonnes.
Que se passerait-il si, mus par leur propre rationalité, ne voyant pas d’autre issue, les dirigeants passaient malgré tout à l’acte au risque de provoquer une escalade incontrôlable ? Sans tomber dans un catastrophisme, l’hypothèse d’une guerre nucléaire ne peut être écartée. D’ailleurs "pour 70 % des Français et Françaises l’arme nucléaire met en péril la sécurité du monde", souligne un sondage réalisé en mars 2022 pour Initiatives pour le Désarmement Nucléaires (IDN).
La ruée sur les pastilles d’iode ou la construction d’abris anti- atomiques mises en avant par de nombreux médias ne peuvent-être la seule réaction à cette insécurité que le nucléaire engendre. Pas plus que le renforcement des dépenses militaires et la modernisation des arsenaux nucléaires, qui ne font que favoriser la prolifération. La véritable réponse se trouve dans la réactivation du régime de désarmement nucléaire au sein de l’ONU et le renforcement de la mobilisation en vue de l’élimination de toutes les armes nucléaires.
Patrice Bouveret, Observatoire des armements (www.obsarm.org)
Le nucléaire "civil" hors sanction
Outre la menace d’utilisation des armes nucléaires, jamais un conflit ne s’était déroulé dans un pays autant nucléarisé : quinze réacteurs !
Chaque centrale, installation nucléaire et stock de déchets afférents, représente une cible et des menaces pour la population et l’environnement. Car la sûreté des installations est complètement fragilisée : les enceintes de confinement ne sont pas conçues pour résister à des tirs de missiles ; les capacités de refroidissement peuvent être entravées ; la chaîne logistique désorganisée, compliquant l’arrivée, par exemple, de pièces de rechange indispensables ; les combats qui se déroulent à proximité peuvent entraîner des destructions mettant en cause la sûre- té ; la surveillance des stocks de matières radioactives face au risque de leur détournement ; sans oublier la dégradation des conditions de travail pour le personnel, etc. Même l’AIEA s’inquiète. "La situation actuelle est intenable. [...] Le risque d’accident ou de violation de la sécurité augmente" souligne M. Rafael Mariano Grossi, son directeur, dans un discours prononcé le 9 juin dernier.
Et pourtant, le régime de sanctions mis en place immédiatement contre la Russie par les dirigeants occidentaux exclut le nucléaire civil ! Tous les pays de l’Union européenne notamment sont d’accord pour maintenir les coopérations commerciales avec la Russie en la matière. Par exemple, les seuls avions russes autorisés à se poser sur le sol européen depuis le début de la guerre, ont été ceux chargés d’uranium pour les centrales de Slovaquie et Hongrie... Rosatom, l’organisme à la tête de l’industrie nucléaire russe et chargé d’entretenir son arsenal, n’a subi à ce jour aucune sanction. Les nombreux partenariats développés depuis déjà de longues années avec la Russie sont au mieux gelés, mais en tout cas pas dénoncés suite au déclenchement du conflit.
La dissuasion nucléaire en échec
De même, Vladimir Poutine et les nucléaire dirigeants russes agitent régulièrement la menace d’une frappe nucléaire contre tous ceux qui voudraient entraver son ambition de conquête territoriale : renforcement du niveau d’alerte, exercice de tir d’un missile réputé "invincible", journaux télé- visés russes vantant les effets d’une bombe sur telle ou telle capitale, etc. Même si, dans les médias, de nombreux experts tentent de minimiser le risque de déclenchement d’une guerre nucléaire, un dérapage ne peut être exclu. D’autant que cer- tains responsables occidentaux ont renchéri en bombant le torse pour rappeler qu’eux aussi avaient la bombe et "que l’Alliance atlantique est une alliance nucléaire". Ils ont eux aussi augmenté le niveau d’alerte de leur arsenal, comme l’a fait la France en mettant à la mer deux sous-marins nucléaires lanceurs d’engins au lieu d’un seul, ou en organisant ostensiblement des exercices nucléaires.
Cette guerre dévoile la nature profonde de cette arme qui, contrairement aux discours officiels à l’usage des opinions publiques, n’est pas un outil au service de la paix et de la liberté, destiné à prévenir la guerre. La réalité de la stratégie de dissuasion est tout autre. L’arsenal nucléaire est bien un facteur de liberté, mais à destination des dirigeants des puissances nucléaires, dans leur volonté de domination, y com- pris d’agression physique à l’encontre d’un autre pays, d’une autre population sans crainte de subir une riposte massive. La stratégie de la dissuasion nucléaire permet et renforce la guerre, comme l’a bien montré Poutine en envahissant l’Ukraine... C’est une arme d’exercice de la puissance pour ceux qui la possèdent afin d’exercer leur domination comme ils l’entendent sous la menace d’un chantage à l’extermination en totale impunité.
Le danger d’utilisation est renforcé par la présence des armes nucléaires dites "tactiques", c’est-à-dire à courte portée, dont la puissance de destruction va de quelques kilotonnes à 350 kilotonnes. Pour rappel, celle larguée sur Hiroshima était de 15 kilotonnes.
Que se passerait-il si, mus par leur propre rationalité, ne voyant pas d’autre issue, les dirigeants passaient malgré tout à l’acte au risque de provoquer une escalade incontrôlable ? Sans tomber dans un catastrophisme, l’hypothèse d’une guerre nucléaire ne peut être écartée. D’ailleurs "pour 70 % des Français et Françaises l’arme nucléaire met en péril la sécurité du monde", souligne un sondage réalisé en mars 2022 pour Initiatives pour le Désarmement Nucléaires (IDN).
La ruée sur les pastilles d’iode ou la construction d’abris anti- atomiques mises en avant par de nombreux médias ne peuvent-être la seule réaction à cette insécurité que le nucléaire engendre. Pas plus que le renforcement des dépenses militaires et la modernisation des arsenaux nucléaires, qui ne font que favoriser la prolifération. La véritable réponse se trouve dans la réactivation du régime de désarmement nucléaire au sein de l’ONU et le renforcement de la mobilisation en vue de l’élimination de toutes les armes nucléaires.
Patrice Bouveret, Observatoire des armements (www.obsarm.org)
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