Mobilisation
Radioactivité
En plein cur de la plaine du Forez
Deux milliards cinq cents millions de becquerels
vont transiter par Feurs chaque année
A Feurs, dans la Loire, si une opposition suffisamment forte ne se fait pas sentir, la plus grande fonderie dacier de France pourrait refondre des ferrailles radioactives issues de la filière nucléaire (plus de 150 000 tonnes prévues à ce jour). Au niveau local, la population serait exposée au risque daugmentation de cancers, et au niveau national, ces ferrailles radioactives se retrouveraient dans tous les équipements métalliques usuels tels que chaises, voitures, radiateurs... Nous sommes tous concernés !
Lentreprise Feurs Métal, située en plein cur du Forez entre Saint-Etienne et Roanne, pourrait fondre des ferrailles issues de la filière nucléaire. Dans les 1000 tonnes dacier produites chaque mois, lentreprise va incorporer 200 tonnes récupérées auprès de la société Socatri, filiale dEurodif, appartenant au groupe Eureva. Feurs Métal et la Drire Rhône-Alpes se réfèrent aux normes en vigueur pour nous présenter un projet idéal. Une phase expérimentale de six mois doit avoir lieu ; or, le dossier la concernant ébauche le spectre funeste dune activité définitive. Ce projet nous inquiète gravement.
Un arrêté préfectoral aux limites peu claires
Le 30 septembre dernier, le préfet de la Loire, par arrêté, a donné lautorisation à lentreprise Feurs-Métal dintroduire dans son activité de fonte daciers des ferrailles issues de la filière amont du nucléaire faiblement contaminées par de lhexafluorure duranium. Ces ferrailles après décontamination, devraient présenter des teneurs radioactives de 1 à 3 becquerels par gramme.
Or, les règles définies par larrêté préfectoral nous semblent nettement insuffisantes. En effet, la phase dessai nenvisage pas le moindre scénario concernant les apports, le transport, le stockage des matériaux et se range béatement derrière lidée que les essais vont tout déterminer. Peut-on avancer en aveugle dans ce type dexpérience ?
Par ailleurs, si le dossier évoque lentreprise Socatri comme lieu dorigine des ferrailles, larrêté préfectoral ne la cite pas une seule fois. Les risques de dérive quant à linterprétation de cet arrêté nous semblent importants et quasi inévitables si une autorisation dactivité définitive était formulée dans les mêmes termes.
Que dire de la démarche ? Scientifique ou pas ?
Le dossier ne fait référence à aucune activité similaire dont les analyses et données nous auraient permis de fonder une opinion sappuyant sur une expérience scientifique. Les représentants de Feurs Métal nous ont dit clairement quils ne connaissaient pas dentreprise ayant conduit ce type dexpérience ou dactivité, quil sagirait dune première peut-être mondiale. Un scientifique averti aurait, dans cette situation, poussé ses investigations jusquà trouver une société satellite du Tricastin située dans le Gard, sur la commune de Codolet, et qui sappelle Centraco. Elle traite des déchets métalliques de faible activité et à vie courte, issus de lexploitation courante des installations nucléaires. Ces renseignements sont accessibles au commun des mortels sur son site Internet.
Le dossier ne nous éclaire en rien sur le comportement de la radioactivité dans du métal en fusion et nous craignons fortement sa concentration dans les fumées. Bien que le dossier nous annonce des doses de radioactivité faibles pour les matériaux apportés, les phénomènes daccumulation et de concentration risquent de faire exploser ces chiffres dans les rejets.
Dès les faibles doses, les rayonnements sont responsables dune augmentation des cancers et anomalies génétiques
Depuis des années déjà, les scientifiques nous ont démontré quen traversant la matière, les rayonnements alpha et bêta provoquent des phénomènes dionisation et que les particules alpha et bêta sont les plus dangereuses en cas dinhalation. Elles pénètrent dans la matière en arrachant les électrons aux atomes. Ainsi, lorsque les rayonnements sont absorbés, ils perdent leur énergie en ionisant la matière et provoquent une mutation ou une destruction des cellules. Cest pourquoi, dès les faibles doses, les rayonnements sont responsables dune augmentation des cancers et des anomalies génétiques.
Des techniques insuffisantes de détection de la radioactivité
A partir de ce point, nous constatons que les techniques de détection de la radioactivité mises en place pour lactivité Feurs Métal sont totalement insuffisantes :
Pas plus un portique de détection des rayons gamma et bêta que les radiamètres ambiants proposés par larrêté, ne nous informeront de la présence de particules et de rayonnements alpha et bêta dans les fumées.
Par ailleurs, luranium libéré dans lenvironnement produit des éléments radioactifs (éléments fils) qui saccumulent année après année, même si les rejets sont stoppés. Lactivité de ces éléments est supérieure à lactivité de luranium lui-même. Le phénomène est irréversible et provoque une tache de contamination qui grossit au fil du temps. Suite à nos questions et nos inquiétudes, lentreprise nous dit vouloir réduire le plus possible les fumées lors de la phase dessai. Cette initiative qui pourrait paraître salutaire, nous préoccupe gravement dans la mesure où elle compromet lourdement la démonstration scientifique. Avec la réduction des fumées, leurs teneurs en différents éléments seront beaucoup plus difficiles à déterminer et toute extrapolation risque dêtre faussée. Cela nest que la confirmation de la complexité de cette expérience, qui devrait pour le moins être conduite par des spécialistes compétents.
Quen est-il des risques pour la santé ?
Larrêté préfectoral ne fait à aucun moment référence à lautorisation du Ministère de la Santé. La réglementation sappliquant à ces ferrailles issues de lactivité du nucléaire les soumet à décision ministérielle.
Il est plus que regrettable quaucun point « zéro » sur la santé des Foréziens nait été envisagé. Compte tenu de la durée de vie des éléments radioactifs qui vont transiter par Feurs Métal, les cumuls de doses risquent davoir des conséquences visibles sur la santé dans dix ou quinze ans. Comment, dans quinze ans, pourrons-nous mesurer limpact si aucun état des lieux nest fait aujourdhui. La contamination extérieure à lusine par des fumées et des poussières porteuses de radioéléments de nature diverse va cheminer dans la chaîne alimentaire et se concentrer dans les tissus biologiques.
Une entreprise incompétente
Cette entreprise présente une inaptitude notoire à capter lensemble des fumées produites par son activité de fonte dacier. Celles-ci séchappent régulièrement dans latmosphère sans passer par la filtration. Toute la transparence devrait déjà être faite autour de ses activités traditionnelles. Elles ont fait lobjet de plusieurs procès-verbaux, classés sans suite, concernant des pollutions chroniques provoquées par ses sables de fonderie.
Ce projet annonce une activité inadaptée au contexte, et la légèreté de son instruction est intolérable. Elle ne procède pas dune démarche scientifique et de toute la rigueur indispensable qui va de pair. Les risques sur lenvironnement, la santé et la nature nont pas été évalués correctement. Le site de Feurs Métal est totalement inapproprié et lentreprise na ni les moyens techniques, ni les compétences pour cette activité.
Le nucléaire ne doit pas sortir du nucléaire
Dans le pire des cas, cest-à-dire si ces essais se révélaient absolument indispensables, ils devraient être conduits par des experts et en milieu confiné. Nous navons pas le droit de prendre un tel risque pour la population et pour la nature qui cohabitent tant bien que mal avec cette entreprise. Mais ce dossier dépasse le strict cadre de la plaine du Forez et repose implicitement la question du nucléaire. Le démantèlement des installations, qui ont maintenant trente ans, et la dissémination de leurs déchets posent des problèmes cruciaux. Les producteurs de déchets doivent assumer leurs responsabilités jusquau bout et ne pas se cacher derrière la sacro-sainte méthode de la dilution.
Dans combien de jours des ferrailles radioactives vont-elles se réincarner dans nos batteries de cuisine ?
Qui est prêt à pousser la roue de cet engrenage funeste ? Certainement pas nous.
Peut-on raisonnablement se lancer dans un deuxième programme de production dénergie nucléaire alors que lon na toujours pas résolu les problèmes posés par le premier ?
Que met-on derrière la notion de développement durable ?
Ne serait-ce pas une nouvelle fuite en avant ?
Dernière minute : Feurs Métal suspend son projet !
Face à l’opposition massive de la population, des associations et des syndicats, la SOCATRI (Areva) ne devrait plus désormais se débarrasser de ses stocks radioactifs en les bradant à la fonderie Feurs métal. Les dirigeants de la fonderie Feurs métal ont annoncé, dans un communiqué datant de début février 2005, leur décision « de suspendre leur campagne dessais » de fusion de ferrailles issues de la filière nucléaire. Les dirigeants précisent : "Nous sommes sensibles à l’image et à la bonne intégration de notre usine dans son environnement et nous constatons que l’ensemble des soutiens nécessaires à ce projet n’a pu être retenu".
Il s’agit d’une réelle victoire mais il faut rester extrêmement prudent : il ny aurait pas de « perspectives dindustrialisation du procédé à court terme » mais il nexiste, à ce jour, aucune garantie quà moyen terme cette campagne dessais ne reprenne pas à Feurs ou ailleurs.
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Jean-Jacques COGNARD
Vice-président de la FRAPNA Loire
Maison de la nature
4 rue de la Richelandière
42100 Saint-Etienne
Tél. 04 77 41 46 60
Contact
A.D.S.E. (Association pour la Défense de la Santé et de lEnvironnement)
Maison de la Commune
24, rue Camille Pariat
42110 Feurs
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