Article publié le 26 juillet 2013
Le 9 août 2011, un camion provenant de la centrale nucléaire du Bugey a déchargé illégalement des gravats radioactifs dans une carrière utilisée pour stocker des déchets conventionnels. Deux ans après, EDF a été reconnue coupable par le Tribunal correctionnel de Bourg-en-Bresse.
Un déchargement de gravats radioactifs dans la nature
Le 9 août 2011, la centrale nucléaire du Bugey, implantée sur la commune de Saint-Vulbas, à 35 km de Lyon, a procédé à l’évacuation d’une benne de gravats radioactifs, pensant qu’il s’agissait simplement de déchets conventionnels, vers une carrière régulièrement utilisée par EDF et autorisée à recevoir uniquement ce type de matériaux. Quelques minutes après la sortie du camion, la direction de la centrale s’est rendue compte de son erreur. Cependant, le conducteur du camion n’a pas pu être prévenu avant d’avoir déchargé.
Le service radioprotection du site s’est rendu sur place et a établi une cartographie radiologique. Cette erreur a généré un risque réel de dispersion de radioéléments dans l’environnement : au point de contamination le plus élevé, le niveau de radioactivité était environ 3 fois supérieur au niveau naturel observé sur le site…
Des négligences qui conduisent inéluctablement à l’incident
Le camion a pourtant été contrôlé à la sortie de la centrale pour vérifier l’absence de radioactivité et pour confirmer la nature de son chargement. La présence de radioactivité a été détectée, mais le signal sonore et la barrière empêchant la sortie des véhicules ne fonctionnaient pas. Seul un gyrophare s’est déclenché, mais n’a pas été repéré immédiatement.
Les gravats sortis du site le 9 août provenaient d’un local situé sur le chantier de démantèlement du réacteur n° 1 de la centrale du Bugey qui n’était pas identifié comme zone réglementée au titre de la radioprotection. Les inspecteurs de l’Autorité de sûreté nucléaire ont constaté que ce local présentait plusieurs sources de contamination radioactive : un regard de collecte des eaux perdues ainsi qu’une cuve et divers matériels placés sur rétention [1] ! Voilà qui donne un avant-goût des problèmes susceptibles de survenir sur d’autres chantiers de démantèlement...
Le Réseau "Sortir du nucléaire", soutenu par Sortir du nucléaire Bugey, a porté plainte pour ces graves défaillances le 26 juin 2012 (voir la plainte, en document joint). Le Parquet de Bourg-en-Bresse a décidé d’engager des poursuites.
L’affaire a été examinée le 15 mai 2013, par le Tribunal correctionnel de Bourg-en-Bresse (voir nos conclusions et le compte-rendu d’audience, en documents joints). Le procureur de la République a requis :
▸ à l’encontre d’EDF : deux amendes de 10 000 euros chacune pour les délits relatifs au Code du travail, ainsi qu’une amende de 1 000 euros pour la contravention à la réglementation relative aux installations nucléaires ;
▸ à l’encontre du directeur de la centrale : deux amendes avec sursis de 1 500 euros chacune pour les délits relatifs au Code du travail, ainsi qu’une amende de 500 euros avec sursis pour la contravention à la réglementation relative aux installations nucléaires.
Le jugement a été rendu le 11 septembre 2013.
EDF a été condamnée à payer 3750 euros d’amende pour deux délits au Code du travail et 1500 euros pour une contravention à la réglementation sur les installations nucléaires. Et pour la première fois, le directeur d’une centrale nucléaire est lui aussi condamné : il devra payer 1500 euros pour les deux délits au Code du travail et 500 euros pour la contravention à la réglementation sur les installations nucléaires. 5000 euros de dommages et intérêts ont également été attribués au Réseau "Sortir du nucléaire", partie civile au procès.
Nous nous félicitons de ce verdict et espérons que cette nouvelle condamnation d’EDF alertera nos concitoyens sur les dysfonctionnements incessants de l’industrie nucléaire. EDF a renoncé à faire appel de cette condamnation.
▸ Voir les vidéos concernant cette affaire