21 novembre 2023
Les faits se sont produits mi-octobre, mais n’ont été communiqués au public que plusieurs semaines après. Une alarme s’est déclenchée à la centrale nucléaire de Saint-Laurent (Centre - Val de Loire), signalant un taux de radioactivité trop élevé dans les rejets liquides que le site avait lancé.
Crédit photo : André Paris
Les centrales nucléaires produisent des déchets nucléaires solides, mais aussi des résidus liquides et gazeux lors de leur fonctionnement. Non catégorisés en déchets, ces résidus de production (dits "effluents" [1] ) sont rejetés dans l’environnement : par une cheminée pour les effluents gazeux, par une canalisation rejoignant un cours d’eau pour ceux qui sont liquides. Ces rejets sont surveillés car des limites sont fixées pour chaque substance chimique et radioactive qu’ils contiennent.
Le communiqué d’EDF ne dit pas grand chose, mais on apprend fin novembre 2023 que le 16 octobre, une alarme a retenti sur le site nucléaire de Saint-Laurent : trop de radioactivité a été mesurée dans les rejets liquides de la centrale. Des rejets qui vont directement dans la Loire.
Quel(s) type(s) de radioélément(s) étai(en)t trop présent(s) ? Pour quelle raison la radioactivité était trop concentrée, y-a-t-il eu un dysfonctionnement dans le système de traitement des effluents ? Et pourquoi les rejets ont-ils été lancés alors qu’ils dépassaient les limites autorisées ? EDF ne donne aucune détail, aucune explication. L’industriel insiste cependant sur l’absence de conséquence : les rejets ont été stoppés avant d’avoir rejoint le fleuve. L’environnement a été épargné. Les effluents trop radioactifs ont été récupérés et les canalisations nettoyées. Puis EDF a repris ses rejets. C’est que le flux est tendu : les possibilités de stockage ne sont pas infinies, or les effluents sont produits en permanence par le site nucléaire.
La centrale a donc évité de justesse une pollution radioactive, mais elle a quand même été sur le point de rejeter dans la Loire des substances interdites. Pour que le site nucléaire autorise à procéder aux rejets alors que leur contenu n’était pas conforme aux limites qui lui sont fixées, c’est qu’il y a eu, à un moment, des procédures qui n’ont pas été respectées. Des analyses du contenu des effluents et des contrôles de conformité aux autorisations de rejets sont censés être faits avant d’ouvrir les vannes.
Sous couvert d’un discours rassurant - "nous maîtrisons, les rejets radioactifs n’ont pas atteint l’environnement" - c’est en réalité un défaut de contrôle et de respect des procédures destinées à la préservation de l’environnement que pointe cette déclaration d’incident. Car EDF n’est pas censé agir lorsqu’une alarme retentit. EDF est censé faire en sorte que les alarmes ne retentissent jamais. Les alarmes sont le dernier rempart. Lorsqu’elles sonnent, c’est pour donner l’alerte, c’est pour annoncer que l’accident est sur le point d’arriver. Lorsqu’une alarme se déclenche, c’est que tous les autres remparts, les dispositifs de prévention des accidents, n’ont pas fonctionné. Cette déclaration d’incident est un signal, une alarme : les mesures de protection de l’environnement sont mises à mal à Saint-Laurent.
L.B.
Les événements déclarés à l’Autorité de sûreté nucléaire en octobre 2023
Publié le 21/11/2023
Déclaration du 19 octobre 2023
En application de la règlementation, chaque centrale nucléaire du parc d’EDF réalise une surveillance continue de la radioactivité au niveau de la canalisation de rejet des effluents. Le 16 octobre, une alarme d’atteinte du seuil réglementaire apparaît sur un des capteurs de mesure situé sur notre installation, en amont du rejet en Loire. Les dispositifs automatiques d’arrêt de rejet ont alors été activés pour éviter un déversement d’effluents non maîtrisé. Ainsi les effluents ont été piégés dans les canalisations avant d’atteindre le rejet en Loire. L’ensemble des tuyauteries a été vidangé et rincé, et les effluents issus de ces vidanges et rinçages ont été récupérés pour être traités et analysés. Une fois la certitude de la propreté des canalisations acquise, les rejets ont pu reprendre normalement. Les dispositifs automatiques d’arrêt de rejet ont permis d’éviter un envoi d’effluents radioactifs dans la Loire. Cet événement n’a donc pas entraîné de conséquence sur l’environnement, conformément aux résultats des analyses des prélèvements effectués au niveau de la station de rejet en Loire.
[1] Effluent radioactif : Gaz ou liquide contenant des substances radioactives, sous-produit d’un processus industriel ou de laboratoire, qui peut être recyclé, traité ou rejeté dans l’environnement après que son activité a été réduite par des dispositifs appropriés avant le rejet ou l’utilisation. https://www.asn.fr/lexique/E/Effluent-radioactif