7 juin 2021
En seulement quelques mois, le site nucléaire de Paluel a déjà dépassé le maximum autorisé sur toute l’année 2021 en terme de fuites de fluides frigorigènes. Ces liquides se transforment en gaz à effet de serre lorsqu’ils sont mis au contact de l’air, certains bien plus puissant que le CO2 en terme de pouvoir réchauffant. Ce fuites proviennent de problèmes matériels sur les systèmes qui refroidissent certains équipements et la ventilation des centrales nucléaires. Il s’agit donc d’émissions de gaz à effet de serre qui auraient pu être évitées. Et qui ne seront certainement pas les seules de l’année.
Les émissions induites par ces fuites varient selon le type de fluide utilisé et auront un effet différent sur le climat, d’autant qu’ils ont des durées de vies différentes. Mais chaque fuite de ces liquides de refroidissement revient à rejeter dans l’air des gaz à effet de serre dont certains ont un pouvoir réchauffant global bien plus grand que le CO2 (Par exemple, 1 kg de fluide de type HFC-134a vaut 3710 kgeqCO2 à l’horizon de 20 ans. [1]). Sans parler du SF6 (Hexafluorure de soufre), utilisé dans les centrales nucléaires comme isolant électrique, qui une fois relâché dans l’atmosphère devient le plus puissant des gaz à effet de serre (1 kg de SF6 émis dans l’atmosphère a le même impact sur l’effet de serre global à long terme que 22 800 kg de CO2) et qui y restera plus de 3 000 ans avant de se décomposer. Pour autant, jusqu’en 2018, ces fuites ne faisaient pas l’objet de déclaration d’évènement significatif pour l’environnement par EDF.
Le problème de ces émissions est bien connu des industriels et des autorités. Et si un seuil maximum est fixé - 100 kg/ an de fuites de ces fluides frigorigènes sont autorisés pour chacune des 18 centrales nucléaires en France - il n’est pas rare qu’il soit dépassé. Cela a déjà été le cas à Belleville-sur-Loire (Centre-Val de Loire), au Bugey (Rhône-Alpes), et à Flamanville (Normandie).
Le bref communiqué de déclaration d’évènements significatifs pour l’environnement est à trouver tout en bas d’une longue liste d’incidents déclarés significatifs pour la sûreté par le site de Paluel en avril 2021 au plus bas niveau de l’échelle de gravité. Elliptique au possible, ne faisant que quelques lignes, il est difficile d’en extraire quoique ce soit de précis. D’où viennent ces fuites ? Problème de maintenance ou dysfonctionnement des équipements ? Quand sont-elles survenues ? Quel type de fluide frigorigène a fuité ?
Tout ce qu’on sait, c’est que le site à rejeté dans l’atmosphère 106 kg de ces fluides frigorigènes. De quand à quand ? Tout ce que dit EDF, c’est que le site a déclaré en février et en avril des évènements significatifs pour l’environnement et que ce cumul a été calculé dans le cadre du bilan annuel des émissions. On comprend donc que la quantité totale des fuites et donc des émissions de ces gaz à effet de serre n’est pas suivie au jour le jour, mais que l’exploitant nucléaire fait de temps en temps un bilan. Comment avec une telle méthode de suivi ponctuel, EDF peut-il engager des actions rapides et réactives afin de surveiller et de limiter au maximum ces fuites au fil de leur survenue ? L’exploitant nucléaire montre une fois de plus avec cette déclaration et les faits qui la sous-tendent, que protéger l’environnement n’est pas sa priorité. Qui a dit que le nucléaire était bon pour le climat ?
L.B.
Cumul annuel d’émission de gaz frigorigènes supérieur à 100 kg en 2021
Le 07/06/2021
La direction de la centrale nucléaire de Paluel a déclaré, le 24 février et le 29 avril 2021, des événements intéressants environnement de niveau 0 à l’ASN. Un cumul de 106 kg d’émissions a été enregistré dans le cadre du bilan annuel d’émissions de fluides frigorigènes.
Ce dépassement sur seuil de 100 kg de ce type de fluide sur l’année pour le site est redevable de la déclaration d’un événement significatif.
[1] Voir l’article "Certains gaz à effet de serre des centrales nucléaires" de Bernard Laponche pour plus de détails