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Des accidents nucléaires partout

France : Flamanville : Des gaz radioactifs rejetés sans autorisation

4ème incident environnement déclaré 5 semaines




17 juin 2021


Série noire pour l’environnement. La centrale nucléaire de Flamanville (Normandie) a déclaré avoir rejeté dans l’air, sans aucune vérification préalable, des gaz radioactifs lors du nettoyage d’un réservoir. On ne sait ni quand, ni quoi précisément. C’est le 4ème incident du genre en seulement quelques semaines.


On sait que c’est arrivé début juin. On sait aussi, selon les dires d’EDF, que les seuils réglementaires n’ont pas été dépassés. Car les industries ont acquis auprès de l’État le droit de rejeter dans l’eau, dans l’air et dans les terres, des substances polluantes et délétères pour ces milieux. Mais pas plus que certaines quantités et pas n’importe quand. Histoire de limiter les impacts négatifs de ces rejets dans l’environnement.
EDF a donc le "droit" de rejeter des gaz radioactifs dans l’air. Et le fait régulièrement, cela fait parti du fonctionnement "normal" des réacteurs nucléaires. Mais l’exploitant est censé, avant de faire ces rejets, s’assurer que toutes les conditions sont réunies. Comme par exemple, qu’un autre réacteur du site n’est pas en train de faire de même. Sinon, cela fait deux fois plus de gaz radioactifs rejetés au même endroit au même moment. Donc une concentration dans l’air à proximité deux fois plus importante. On imagine aussi qu’avant de rejeter toute substance dans l’environnement, l’industriel doit analyser précisément ce qu’il va rejeter. Quels radioéléments ? En quelles concentrations ?
Ces rejets étant réguliers et délétères pour l’environnement  [1], on penserait EDF emprunt de précautions et d’attentions, essayant de limiter tant que possible les impacts de ses activités. Et donc prompt à respecter à la lettre les règles qui visent à préserver tant que possible l’environnement des conséquences néfastes de son industrie.

Mais à Flamanville il n’est est rien. Après avoir en moins de six mois dépassé déjà deux fois le seuil maximum autorisé sur toute l’année en fuites de fluides frigorigènes (qui se transforment en puissants gaz à effet de serre dès qu’ils sont à l’air libre), après n’avoir pas surveillé les radioéléments produits par le réacteur 2 du site durant plusieurs jours pour cause d’épuisettes cassées et d’échantillons limités (voir à droite de cet article pour une revue des derniers incidents), c’est au tour de rejets de gaz radioactifs. Faits sans avoir reçu aucune autorisation. Sans avoir vérifié au préalable que les conditions légalement définies étaient réunies pour qu’EDF puisse relarguer dans l’air ces radioéléments résultants de son activité industrielle.
Comment est-il possible que lors d’une telle procédure, régulièrement faite sur le site nucléaire, qui a un enjeu environnemental manifeste, les rejets aient été faits sans validation préalable des conditions ? Méconnaissance des procédures ? Mauvaise organisation ? Pression temporelle liée aux nécessités de l’exploitation ?

Rappelons que la gestion du site nucléaire normand par EDF laisse grandement à désirer depuis plusieurs années. La centrale a d’ailleurs été mise sous surveillance renforcée en septembre 2019, après que le directeur du site ait été auditionné. Les réacteurs ont dû rester très longtemps à l’arrêt, l’état des équipements, dont pour certains dans un état de délabrement avancé, préoccupait fortement les autorités. Mais avec cette série d’incidents significatifs pour l’environnement il est clair que les problèmes du site nucléaire ne se limitent pas à un manque d’entretien des équipements. Les problèmes sont bien plus profonds, dans l’organisation et dans les moyens qu’EDF se donne. Si le personnel n’est pas en nombre suffisant et n’a pas les connaissances nécessaires, en terme de procédures opératoires certes, mais aussi concernant les règles de sûreté, les principes de radioprotection et de fonctionnement de l’installation, comment dès lors éviter la survenue des accidents ? Qu’ils soient significatifs pour la sûreté, la radioprotection ou l’environnement, au vu des déclarations faites par le site nucléaire normand, les difficultés d’EDF a tenir le site nucléaire de Flamanville sont encore et toujours bien présentes. Quand les difficultés perdurent malgré plus d’un an et demi de surveillance renforcée, quelle conclusion en tirer ?

Ce que dit EDF :

Déclaration d’un événement significatif environnement, lié au non-respect de la procédure définissant les conditions de rejets

Le 17/06/2021

La centrale de Flamanville réalise périodiquement des contrôles réglementaires d’étanchéité de ses réservoirs d’entreposage des effluents gazeux radioactifs. Pour la réalisation de ce contrôle, un réservoir a été vidangé en février 2021 et l’opération s’est déroulée conformément à nos procédures.

La poursuite des opérations doit se tenir en deux temps :

  • d’abord une première étape de balayage en azote pour retirer entièrement les gaz radioactifs. Cette étape doit se faire après la détermination des conditions de rejets, validée par le chef d’exploitation.
  • puis une deuxième étape de balayage pour retirer tout l’hydrogène se trouvant dans le réservoir avant sa mise en air. Ce rejet se fait sans autorisation particulière, puisque la totalité des gaz radioactifs a été nettoyé durant la première étape.

Lors de la réalisation de l’opération de rejets en juin 2021, la première étape a été lancée, sans avoir attendu la validation des conditions de rejets par le chef d’exploitation.

Même si aucune limite réglementaire n’a été dépassée, la direction de la centrale de Flamanville a déclaré cet événement le 11 juin 2021, à l’Autorité de sûreté nucléaire, comme événement significatif environnement.

https://www.edf.fr/la-centrale-nucleaire-de-flamanville-1-2/les-actualites-de-la-centrale-nucleaire-de-flamanville-1-2/declaration-d-un-evenement-significatif-environnement-lie-au-non-respect-de-la-procedure-definissant-les-conditions-de-rejets


[1Les rejets dans l’environnement : même avec une dilution, les radioéléments restent dans la nature, plus ou moins longtemps selon leur durée de vie, certains pour des centaines d’années. Ils se cumulent au fur et à mesure des rejets répétés par les industriels. La dilution n’annule pas l’existence des substances rejetées, elle les dissémine un peu partout pour diminuer leur concentration. Elle les rend moins visible, mais ne les efface pas.


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