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Sortir du nucléaire n°40



Novembre 2008

International

Etats-Unis : selon la Commission de la Réglementation Nucléaire, la renaissance du nucléaire n’est pas pour demain !

Article paru dans la revue Sortir du nucléaire n°40 - Novembre 2008

 Politique énergétique
Article publié le : 1er novembre 2008


C’est d’une source improbable qu’est venu un démenti cinglant à la prétendue renaissance de l’énergie nucléaire dont on nous rebat les oreilles. En effet, c’est la NRC elle-même – la Commission de la Réglementation Nucléaire (1) des Etats-Unis – qui affirme que la conception des “modèles standardisés” de réacteurs censés permettre un retour du nucléaire sur le devant de la scène présente de graves lacunes. Ces modèles ne seraient probablement pas prêts pour une certification avant plusieurs années.



Pourtant formulé par l’une des administrations états-uniennes les plus notoirement dociles, cet avertissement affirme en substance que toutes les estimations du coût de nouveaux réacteurs nucléaires, de même que tous les calendriers prévisionnels d’autorisation et de construction, sont bons pour la poubelle, et dépourvus de tout fondement. Toute comparaison entre les futurs réacteurs et les technologies renouvelables est donc au mieux sujette à caution. Les investisseurs privés ne disposeront pas de chiffres solides avant
plusieurs années pour fonder leurs décisions – à supposer qu’ils en disposent jamais.

Un avertissement singlant de l’Autorité de sureté américaine

Ces points clés ont été exposés par Jim Warren, représentant le NC WARN (Réseau “Déchets : Sensibiliser et Réduire” de Caroline du Nord (2)), et par Tom Clements des Amis de la Terre de Caroline du Sud dans leurs témoignages sans concession devant les autorités régulatrices de ces deux Etats. D’autres mettent également en cause le principe d’un financement public des nouveaux réacteurs de type Westinghouse AP-1000. La NRC a émis en 2004 une “certification” conditionnelle de ce modèle de réacteur, autorisant la poursuite du travail de conception. Mais il y a quelques semaines à peine, le 27 juin, la NRC a émis une note d’avertissement signalant que des centaines de composants cruciaux du modèle restent non homologués à ce jour. En fait, Westinghouse a dû retirer nombre de ses plans, ce qui a précipité le processus de certification dans un chaos complet.

On peut d’ores et déjà toucher du doigt les conséquences catastrophiques de problèmes comparables. Commencée il y a deux ans en Finlande, la construction du premier réacteur de “nouvelle génération” (l’EPR) du français Areva accuse déjà plus de deux ans de retard, et plus de 2,5 milliards de dollars de surcoût. Voilà qui rappelle furieusement le désatre économique qui a frappé quantité de réacteurs de “première génération”, à raison de surcoûts faramineux et de retards se comptant régulièrement en décennies.
En Caroline de Nord et du Sud, des associations demandent l’annulation d’une décision des autorités qui accorde à Duke Energy quelque 230 millions de dollars au titre de “coûts de pré-construction” pour deux réacteurs en projet. Dans ces deux Etats, de même qu’en Floride, en Alabama et en Géorgie, les commissions de régulation ont eu à examiner le financement par les contribuables de la construction de plusieurs réacteurs Westinghouse AP-1000.

Ce système incroyablement favorable aux industriels du secteur contraint les consommateurs d’électricité à débourser des milliards de dollars pour des centrales qui pourraient bien ne jamais entrer en
service, et dont le coût réel reste indéterminé. Les industriels peuvent ainsi collecter (parfois au titre de la “construction en cours”) de l’argent pour financer le déblaiement des sites, la planification des projets, les acomptes exigés par les fournisseurs des équipements et des composants les plus lourds (conduites sous pression, pompes, générateurs...), ce qui peut représenter des centaines de millions de dollars avant même que les projets n’obtiennent une autorisation fédérale définitive. Par sa nature même, ce système incite les industriels à budgéter des coûts de construction aussi élevés que possible. Il leur permet de faire payer par les contribuables leurs frais de justice lors des procès intentés par ces mêmes contribuables. Et les citoyens paient la facture, quelle que soit la dépense, même si le réacteur n’entre jamais en service – ou s’il subit une fusion du coeur avant que ne soient amortis les coût de construction, comme ce fût le cas pour le réacteur n°2 de la centrale de Three Mile Island en 1979, après tout juste trois mois de fonctionnement.

Selon Warren et Clements, “la majeure partie du dossier monté” par Duke Energy et ses acolytes “pour soumettre à autorisation les réacteurs que l’entreprise projette de construire” consiste en “quelque 6 500 pages de documents techniques estampillés Westinghouse”. Selon le NC WARN et les Amis de la Terre, “parmi les 172 documents de Westinghouse, qui sont interdépendants, seuls 21 ont été certifiés”. Les deux associations ajoutent que la majeure partie de ce qui a été certifié repose en fait sur des systèmes qui ne le sont pas, et qui sont pourtant des composants majeurs du réacteur, comme “le bâtiment réacteur, la salle de commande, le système de refroidissement, les plans d’ingénierie, les systèmes d’alarmes du site, les tuyauteries et les circuits électriques”.

Le mirage des centrales nouvelle génération

En clair, quoi qu’en dise le battage entretenu à coups de millions de dollars, la “nouvelle génération” de centrales de “conception standardisée” n’est à ce jour qu’une vue de l’esprit. Non seulement les plans de ces réacteurs ne sont pas homologués par les autorités, mais ils ne sont même pas finalisés par les constructeurs. Il n’existe pas un seul prototype de réacteur Westinghouse AP-1000 en service, qui pourrait fournir des données concrètes sur le fonctionnement réel d’une centrale de ce type, sur son impact
environnemental, ou sur ses coûts de construction et de fonctionnement.

En fait, ainsi qu’il apparaît dans la note de la NRC en date du 27 juin, Westinghouse a dû retirer des documents techniques essentiels du processus de certification. La NRC explique que cela pourrait retarder l’homologation technique du modèle AP-1000 jusqu’en 2012.

D’autres modèles rencontrent des problèmes similaires. Selon Michael Mariotte du NIRS (Service de ressources et d’Information sur le Nucléaire(3)), le modèle EPR du réacteur en projet à Calvert Cliffs dans le Maryland est “loin d’être certifié”, ce qui retarde le processus d’autorisation du projet lui-même. Idem en ce qui concerne le modèle ESBWR (4) présenté pour les sites de North Anna en Virginie et de Fermi dans le Michigan. Pour Mariotte, “tous ces industriels semblent favorables à la standardisation lorsqu’elle concerne le voisin, mais la rejettent pour eux-mêmes, la plupart introduisant des modifications dans les modèles "standardisés". “Même le modèle ABWR (5)”, pourtant déjà mis en oeuvre au Japon, et prévu dans le sud du Texas, “présente des problèmes de conception” qui ont entraîné des retards.

Selon Mariotte, le problème “est que la NRC s’obstine à poursuivre le processus d’autorisation, alors même que les modèles de réacteurs ne sont pas certifiés. Cela va aboutir à une énorme pagaille.”

Mais dans le même temps, des commissions de régulation comme celle de Floride ont accordé une autorisation préliminaire à des projets de réacteurs dont les coûts prévisionnels ont plus que doublé en à peine un an. Le coût de deux réacteurs présentés par Florida Power & Light (FP&L) pour le site de Turkey Point, à la limite du Parc National des Everglades, est estimé entre 6 et 9 milliards de dollars. FP&L refuse de s’engager sur un montant ferme, et exige des contribuables du sud de la Floride qu’ils paient la facture de ce projet pharaonique, dont il est virtuellement certain que le coût, mystérieux à ce jour, montera en flèche bien avant que la NRC ne certifie la conception du réacteur. Deux poids, deux mesures : l’”énorme” accord préliminaire auquel viennent d’aboutir l’Etat de Floride, les défenseurs de l’environnement et la société US Sugar, en vue du rachat à cette dernière de quelque 72 800 hectares de terrain pour sauver les Everglades, est actuellement estimé à 1,75 milliard de dollars - pas même le sixième de l’estimation basse du coût des deux réacteurs en projet à Turkey Point.

Des subventions considérables

Adoptons une perspective d’ensemble : l’étendue de cette arnaque est stupéfiante. Sans que sa conception ne soit finalisée, ni que ne soit connu son coût, une seconde génération de centrales nucléaires vient alourdir l’ardoise des contribuables du Sud-Est des Etats-Unis, dont les impôts accusent déjà une hausse considérable. Ces projets de réacteurs ne peuvent attirer de financements privés. Ils ne peuvent aboutir sans bénéficier soit de subventions considérables et de garanties de prêts, accordées par l’Etat fédéral, soit de l’arnaque en question, menée à grande échelle avec l’aval des Etats concernés. Aucune compagnie d’assurance n’accepte de couvrir le risque d’une possible fusion du coeur des réacteurs, et il n’existe pas de solution au problème des déchets radioactifs. Le site de stockage de Yucca Mountain, dont la mise en service n’est pas encore autorisée, voit actuellement son coût estimé grimper vers les 100 milliards de dollars, alors même qu’il pourrait bien, lui aussi, ne jamais ouvrir.

A l’opposé, les coûts prévisionnels des projets de parcs éoliens et photovoltaïques, d’efficacité énergétique et d’autres énergies “vertes”, sont démontrés et fiables. De tels projets sont aisément financés par des investisseurs privés, qui jouent des coudes pour y avoir leur part. Aux seuls Etats-Unis, les parcs éoliens en construction ou en commande représentent quelque 6 milliards de
dollars. Leur fonctionnement est rentable, et beaucoup peuvent être en service en moins d’un an.

La campagne largement relayée qui présente l’énergie nucléaire comme une possible réponse aux problèmes énergétiques des Etats-Unis se fracasse aujourd’hui sur ses contradictions économiques. La “renaissance” du nucléaire ne dispose d’aucun modèle de réacteur certifié, ne peut arguer d’aucun chantier en cours ni de coûts de fonctionnement démontrés. Il n’existe pas la moindre certitude quant au calendrier de construction des nouveaux réacteurs, excepté qu’il faudra au moins dix ans avant que le premier d’entre eux soit peut-être connecté au réseau, et ce à un coût que personne ne sait prévoir.

En résumé, la “renaissance du nucléaire” vacille au bord d’un gouffre technique et économique gigantesque, qui se profile chaque jour plus profond. L’idée même de construire de nouveaux réacteurs risque d’y être engloutie bientôt.

Harvey Wasserman

Publié le 25 juillet 2008 sur www.freepress.com
Traduit de l’anglais par Xavier Rabilloud

1. La NRC (Nuclear Regulatory Commission) est l’équivalent américain de l’ASN (Autorité de Sûreté Nucléaire) française.

2. North Carolina Waste Awareness and Reduction Network.

3. Nuclear Information and Resource Service.

4. Economic Simplified Boiling Water Reactor, en français Réacteur Economique et Simplifié à Eau Bouillante, conçu par General Electric.

5. Advanced Boiling Water Reactor, en français Réacteur Avancé à Eau Bouillante, conçu par General Electric.

Pourtant formulé par l’une des administrations états-uniennes les plus notoirement dociles, cet avertissement affirme en substance que toutes les estimations du coût de nouveaux réacteurs nucléaires, de même que tous les calendriers prévisionnels d’autorisation et de construction, sont bons pour la poubelle, et dépourvus de tout fondement. Toute comparaison entre les futurs réacteurs et les technologies renouvelables est donc au mieux sujette à caution. Les investisseurs privés ne disposeront pas de chiffres solides avant
plusieurs années pour fonder leurs décisions – à supposer qu’ils en disposent jamais.

Un avertissement singlant de l’Autorité de sureté américaine

Ces points clés ont été exposés par Jim Warren, représentant le NC WARN (Réseau “Déchets : Sensibiliser et Réduire” de Caroline du Nord (2)), et par Tom Clements des Amis de la Terre de Caroline du Sud dans leurs témoignages sans concession devant les autorités régulatrices de ces deux Etats. D’autres mettent également en cause le principe d’un financement public des nouveaux réacteurs de type Westinghouse AP-1000. La NRC a émis en 2004 une “certification” conditionnelle de ce modèle de réacteur, autorisant la poursuite du travail de conception. Mais il y a quelques semaines à peine, le 27 juin, la NRC a émis une note d’avertissement signalant que des centaines de composants cruciaux du modèle restent non homologués à ce jour. En fait, Westinghouse a dû retirer nombre de ses plans, ce qui a précipité le processus de certification dans un chaos complet.

On peut d’ores et déjà toucher du doigt les conséquences catastrophiques de problèmes comparables. Commencée il y a deux ans en Finlande, la construction du premier réacteur de “nouvelle génération” (l’EPR) du français Areva accuse déjà plus de deux ans de retard, et plus de 2,5 milliards de dollars de surcoût. Voilà qui rappelle furieusement le désatre économique qui a frappé quantité de réacteurs de “première génération”, à raison de surcoûts faramineux et de retards se comptant régulièrement en décennies.
En Caroline de Nord et du Sud, des associations demandent l’annulation d’une décision des autorités qui accorde à Duke Energy quelque 230 millions de dollars au titre de “coûts de pré-construction” pour deux réacteurs en projet. Dans ces deux Etats, de même qu’en Floride, en Alabama et en Géorgie, les commissions de régulation ont eu à examiner le financement par les contribuables de la construction de plusieurs réacteurs Westinghouse AP-1000.

Ce système incroyablement favorable aux industriels du secteur contraint les consommateurs d’électricité à débourser des milliards de dollars pour des centrales qui pourraient bien ne jamais entrer en
service, et dont le coût réel reste indéterminé. Les industriels peuvent ainsi collecter (parfois au titre de la “construction en cours”) de l’argent pour financer le déblaiement des sites, la planification des projets, les acomptes exigés par les fournisseurs des équipements et des composants les plus lourds (conduites sous pression, pompes, générateurs...), ce qui peut représenter des centaines de millions de dollars avant même que les projets n’obtiennent une autorisation fédérale définitive. Par sa nature même, ce système incite les industriels à budgéter des coûts de construction aussi élevés que possible. Il leur permet de faire payer par les contribuables leurs frais de justice lors des procès intentés par ces mêmes contribuables. Et les citoyens paient la facture, quelle que soit la dépense, même si le réacteur n’entre jamais en service – ou s’il subit une fusion du coeur avant que ne soient amortis les coût de construction, comme ce fût le cas pour le réacteur n°2 de la centrale de Three Mile Island en 1979, après tout juste trois mois de fonctionnement.

Selon Warren et Clements, “la majeure partie du dossier monté” par Duke Energy et ses acolytes “pour soumettre à autorisation les réacteurs que l’entreprise projette de construire” consiste en “quelque 6 500 pages de documents techniques estampillés Westinghouse”. Selon le NC WARN et les Amis de la Terre, “parmi les 172 documents de Westinghouse, qui sont interdépendants, seuls 21 ont été certifiés”. Les deux associations ajoutent que la majeure partie de ce qui a été certifié repose en fait sur des systèmes qui ne le sont pas, et qui sont pourtant des composants majeurs du réacteur, comme “le bâtiment réacteur, la salle de commande, le système de refroidissement, les plans d’ingénierie, les systèmes d’alarmes du site, les tuyauteries et les circuits électriques”.

Le mirage des centrales nouvelle génération

En clair, quoi qu’en dise le battage entretenu à coups de millions de dollars, la “nouvelle génération” de centrales de “conception standardisée” n’est à ce jour qu’une vue de l’esprit. Non seulement les plans de ces réacteurs ne sont pas homologués par les autorités, mais ils ne sont même pas finalisés par les constructeurs. Il n’existe pas un seul prototype de réacteur Westinghouse AP-1000 en service, qui pourrait fournir des données concrètes sur le fonctionnement réel d’une centrale de ce type, sur son impact
environnemental, ou sur ses coûts de construction et de fonctionnement.

En fait, ainsi qu’il apparaît dans la note de la NRC en date du 27 juin, Westinghouse a dû retirer des documents techniques essentiels du processus de certification. La NRC explique que cela pourrait retarder l’homologation technique du modèle AP-1000 jusqu’en 2012.

D’autres modèles rencontrent des problèmes similaires. Selon Michael Mariotte du NIRS (Service de ressources et d’Information sur le Nucléaire(3)), le modèle EPR du réacteur en projet à Calvert Cliffs dans le Maryland est “loin d’être certifié”, ce qui retarde le processus d’autorisation du projet lui-même. Idem en ce qui concerne le modèle ESBWR (4) présenté pour les sites de North Anna en Virginie et de Fermi dans le Michigan. Pour Mariotte, “tous ces industriels semblent favorables à la standardisation lorsqu’elle concerne le voisin, mais la rejettent pour eux-mêmes, la plupart introduisant des modifications dans les modèles "standardisés". “Même le modèle ABWR (5)”, pourtant déjà mis en oeuvre au Japon, et prévu dans le sud du Texas, “présente des problèmes de conception” qui ont entraîné des retards.

Selon Mariotte, le problème “est que la NRC s’obstine à poursuivre le processus d’autorisation, alors même que les modèles de réacteurs ne sont pas certifiés. Cela va aboutir à une énorme pagaille.”

Mais dans le même temps, des commissions de régulation comme celle de Floride ont accordé une autorisation préliminaire à des projets de réacteurs dont les coûts prévisionnels ont plus que doublé en à peine un an. Le coût de deux réacteurs présentés par Florida Power & Light (FP&L) pour le site de Turkey Point, à la limite du Parc National des Everglades, est estimé entre 6 et 9 milliards de dollars. FP&L refuse de s’engager sur un montant ferme, et exige des contribuables du sud de la Floride qu’ils paient la facture de ce projet pharaonique, dont il est virtuellement certain que le coût, mystérieux à ce jour, montera en flèche bien avant que la NRC ne certifie la conception du réacteur. Deux poids, deux mesures : l’”énorme” accord préliminaire auquel viennent d’aboutir l’Etat de Floride, les défenseurs de l’environnement et la société US Sugar, en vue du rachat à cette dernière de quelque 72 800 hectares de terrain pour sauver les Everglades, est actuellement estimé à 1,75 milliard de dollars - pas même le sixième de l’estimation basse du coût des deux réacteurs en projet à Turkey Point.

Des subventions considérables

Adoptons une perspective d’ensemble : l’étendue de cette arnaque est stupéfiante. Sans que sa conception ne soit finalisée, ni que ne soit connu son coût, une seconde génération de centrales nucléaires vient alourdir l’ardoise des contribuables du Sud-Est des Etats-Unis, dont les impôts accusent déjà une hausse considérable. Ces projets de réacteurs ne peuvent attirer de financements privés. Ils ne peuvent aboutir sans bénéficier soit de subventions considérables et de garanties de prêts, accordées par l’Etat fédéral, soit de l’arnaque en question, menée à grande échelle avec l’aval des Etats concernés. Aucune compagnie d’assurance n’accepte de couvrir le risque d’une possible fusion du coeur des réacteurs, et il n’existe pas de solution au problème des déchets radioactifs. Le site de stockage de Yucca Mountain, dont la mise en service n’est pas encore autorisée, voit actuellement son coût estimé grimper vers les 100 milliards de dollars, alors même qu’il pourrait bien, lui aussi, ne jamais ouvrir.

A l’opposé, les coûts prévisionnels des projets de parcs éoliens et photovoltaïques, d’efficacité énergétique et d’autres énergies “vertes”, sont démontrés et fiables. De tels projets sont aisément financés par des investisseurs privés, qui jouent des coudes pour y avoir leur part. Aux seuls Etats-Unis, les parcs éoliens en construction ou en commande représentent quelque 6 milliards de
dollars. Leur fonctionnement est rentable, et beaucoup peuvent être en service en moins d’un an.

La campagne largement relayée qui présente l’énergie nucléaire comme une possible réponse aux problèmes énergétiques des Etats-Unis se fracasse aujourd’hui sur ses contradictions économiques. La “renaissance” du nucléaire ne dispose d’aucun modèle de réacteur certifié, ne peut arguer d’aucun chantier en cours ni de coûts de fonctionnement démontrés. Il n’existe pas la moindre certitude quant au calendrier de construction des nouveaux réacteurs, excepté qu’il faudra au moins dix ans avant que le premier d’entre eux soit peut-être connecté au réseau, et ce à un coût que personne ne sait prévoir.

En résumé, la “renaissance du nucléaire” vacille au bord d’un gouffre technique et économique gigantesque, qui se profile chaque jour plus profond. L’idée même de construire de nouveaux réacteurs risque d’y être engloutie bientôt.

Harvey Wasserman

Publié le 25 juillet 2008 sur www.freepress.com
Traduit de l’anglais par Xavier Rabilloud

1. La NRC (Nuclear Regulatory Commission) est l’équivalent américain de l’ASN (Autorité de Sûreté Nucléaire) française.

2. North Carolina Waste Awareness and Reduction Network.

3. Nuclear Information and Resource Service.

4. Economic Simplified Boiling Water Reactor, en français Réacteur Economique et Simplifié à Eau Bouillante, conçu par General Electric.

5. Advanced Boiling Water Reactor, en français Réacteur Avancé à Eau Bouillante, conçu par General Electric.



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