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Sortir du nucléaire n°86



Été 2020

Changer

Des options à petite échelle plus efficaces pour réduire les émissions

Article paru dans la revue Sortir du nucléaire n°86 - Été 2020

 Alternatives et sortie du nucléaire  Energies renouvelables


Pour réduire rapidement les émissions mondiales de gaz à effet de serre, faut-il avant tout “mettre le paquet“ sur des infrastructures lourdes ? Au contraire : selon les travaux de certains économistes, les options à petite échelle sont plus efficaces.

© Stephan Rudolph-Kramer


Nous résumons ici les grandes lignes d’un article publié en avril dans la revue Science  [1] par les économistes Arnulf Grubler  [2], Charlie Wilson, Nuno Bento, Stephen Healey, Simon de Stercke et Caroline Zimm, chercheurs à l’International Institute for Applied System Analysis, l’Université d’East Anglia et l’Université de Lisbonne.

Ils se sont penchés sur 45 technologies associées à la production ou à la consommation d’énergie identifiées par l’Agence Internationale de l’Énergie, allant du réacteur nucléaire au panneau solaire ou au rouleau d’isolant, des taxis partagés aux vélos électriques, en étudiant leur capacité à accélérer une transition “bas-carbone“, notamment en termes de coût, d’innovation et d’accessibilité. Était-il préférable de privilégier les options à grande échelle, ou plutôt d’autres plus petites, moins coûteuses et plus modulaires, susceptibles d’être reproduites facilement ?

Leurs travaux démontrent que sur de très nombreux aspects, les technologies à plus petite échelle (panneaux solaires, vélos électriques, etc.) se révèlent bien plus efficaces que les grosses infrastructures pour réduire rapidement les émissions. Requérant un investissement moindre, souvent plus rentables et moins complexes, elles peuvent se diffuser plus rapidement et faire l’objet d’un apprentissage plus rapide. Par ailleurs, elles offrent plus de gains d’efficacité énergétique et des possibilités d’amélioration plus rapides. Généralement plus accessibles, elles peuvent favoriser l’équité sociale. En outre, elles créent proportionnellement plus d’emplois. Enfin, la généralisation d’options à petite échelle permettant de réduire les consommations d’énergie par les utilisateurs finaux s’avère particulièrement efficace, permettant de rendre moins coûteuse et complexe une transition d’ensemble.

À l’inverse, les gros projets, comme les réacteurs nucléaires ou les installations de capture et stockage du carbone, présentent des risques financiers plus élevés. Lents à construire, ils contribuent à mettre en place des infrastructures qui perdurent longtemps mais qui évoluent peu et peuvent constituer un verrou quand des évolutions rapides d’un système sont requises. En outre – comme le montre l’exemple du nucléaire – ils absorbent des financements publics considérables sans permettre de réduction rapide des émissions de gaz à effet de serre.

Bien sûr, les options à petite échelle ne constituent pas la solution universelle, certaines activités ne pouvant exister qu’à partir d’une certaine échelle. Par ailleurs, dans certaines situations, elles doivent s’appuyer sur une infrastructure existante plus lourde (réseau électrique par exemple). Toutefois, ces travaux soulignent que pour lutter contre le changement climatique, mieux vaut penser “small is beautiful“ que “grands projets“.

Charlotte Mijeon


Notes

[1Granular technologies to accelerate decarbonization, C. Wilson, A. Grubler, N. Bento, S. Healey, S. De Stercke and C. Zimm

[2Arnulf Grubler est notamment l’auteur de travaux sur les coûts du nucléaire en France. Il a ainsi mis en évidence le fait que chaque génération de centrale avait coûté plus cher que la précédente.

Nous résumons ici les grandes lignes d’un article publié en avril dans la revue Science  [1] par les économistes Arnulf Grubler  [2], Charlie Wilson, Nuno Bento, Stephen Healey, Simon de Stercke et Caroline Zimm, chercheurs à l’International Institute for Applied System Analysis, l’Université d’East Anglia et l’Université de Lisbonne.

Ils se sont penchés sur 45 technologies associées à la production ou à la consommation d’énergie identifiées par l’Agence Internationale de l’Énergie, allant du réacteur nucléaire au panneau solaire ou au rouleau d’isolant, des taxis partagés aux vélos électriques, en étudiant leur capacité à accélérer une transition “bas-carbone“, notamment en termes de coût, d’innovation et d’accessibilité. Était-il préférable de privilégier les options à grande échelle, ou plutôt d’autres plus petites, moins coûteuses et plus modulaires, susceptibles d’être reproduites facilement ?

Leurs travaux démontrent que sur de très nombreux aspects, les technologies à plus petite échelle (panneaux solaires, vélos électriques, etc.) se révèlent bien plus efficaces que les grosses infrastructures pour réduire rapidement les émissions. Requérant un investissement moindre, souvent plus rentables et moins complexes, elles peuvent se diffuser plus rapidement et faire l’objet d’un apprentissage plus rapide. Par ailleurs, elles offrent plus de gains d’efficacité énergétique et des possibilités d’amélioration plus rapides. Généralement plus accessibles, elles peuvent favoriser l’équité sociale. En outre, elles créent proportionnellement plus d’emplois. Enfin, la généralisation d’options à petite échelle permettant de réduire les consommations d’énergie par les utilisateurs finaux s’avère particulièrement efficace, permettant de rendre moins coûteuse et complexe une transition d’ensemble.

À l’inverse, les gros projets, comme les réacteurs nucléaires ou les installations de capture et stockage du carbone, présentent des risques financiers plus élevés. Lents à construire, ils contribuent à mettre en place des infrastructures qui perdurent longtemps mais qui évoluent peu et peuvent constituer un verrou quand des évolutions rapides d’un système sont requises. En outre – comme le montre l’exemple du nucléaire – ils absorbent des financements publics considérables sans permettre de réduction rapide des émissions de gaz à effet de serre.

Bien sûr, les options à petite échelle ne constituent pas la solution universelle, certaines activités ne pouvant exister qu’à partir d’une certaine échelle. Par ailleurs, dans certaines situations, elles doivent s’appuyer sur une infrastructure existante plus lourde (réseau électrique par exemple). Toutefois, ces travaux soulignent que pour lutter contre le changement climatique, mieux vaut penser “small is beautiful“ que “grands projets“.

Charlotte Mijeon



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