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Sortir du nucléaire n°29



Décembre 2005

Histoire

Des cobayes humains lors de l’explosion de la bombe la plus puissante jamais expérimentée

Article paru dans la revue Sortir du nucléaire n°29 - Décembre 2005

 Nucléaire militaire
Article publié le : 1er décembre 2005


1er mars 1954 dans le Pacifique Sud

L’essai nucléaire atmosphérique américain Bravo du 1er mars 1954 à partir de l’atoll inhabité de Bikini, dans le Pacifique, a entraîné la dispersion d’un panache radioactif et l’exposition à doses élevées des habitants de plusieurs îles. Des documents classés secret défense ont été révélés récemment.



Lors des cérémonies qui ont marqué l’anniversaire du tir de la bombe thermonucléaire Bravo, James Matayoshi, le maire de Rongelap, un atoll des Iles Marshall, a fait quelques révélations devant ses invités venus du monde entier. S’appuyant sur des documents militaires américains déclassifiés par l’administration Clinton, le maire révèle que "l’oubli" des habitants de Rongelap ce 1er mars 1954 avait été "volontaire" !

En effet, un rapport de 1953 décrivait la planification de la campagne de tirs "Castle" dont fit partie l’essai Bravo. Ce rapport désigné sous le nom de "Project 4.1", rédigé des mois auparavant, explique que les tirs de la série Castle permettraient d’étudier les effets de la bombe thermonucléaire sur les êtres humains.

En effet, les études qui avaient été faites par les services de santé américains sur les survivants d’Hiroshima et Nagasaki avaient permis de recueillir d’importantes informations sur les effets d’une bombe atomique "ordinaire". Il fallait donc voir ce que donnerait - sur les êtres humains - une bombe thermonucléaire.

Des études nombreuses et très minutieuses

Autrement dit, les habitants de Rongelap ont été laissés sous le tir Bravo "à des fins d’études"... Des études qui ont été nombreuses et très minutieuses ! Les habitants de Rongelap ont bien sûr été déplacés quelques jours après le tir du 1er mars 1954 tant leur atoll avait été contaminé. Ils ont subi par la suite toutes sortes d’examens par les médecins

américains.

Chaque année, ils étaient l’objet de nouveaux examens comme cela avait été conçu et planifié auparavant dans le rapport de 1953 intitulé "Project 4.1".

James Matayoshi a retrouvé des photos datées du 16 mars 1954, soit deux semaines après le tir Bravo, où une armada de "scientifiques" américains étaient venus examiner avec toutes sortes d’appareils les habitants de Rongelap. Il n’était pas possible de mettre toute cette infrastructure médicale en place sans une programmation technique et logistique prévue bien longtemps à l’avance. Les gens de Rongelap rappellent qu’ils étaient examinés par les médecins américains, mais qu’ils n’étaient pas soignés pour tout ce qu’ils ressentaient...

D’autres documents déclassifiés expliquent qu’on avait donné des matériels radioactifs à des gens classés selon deux catégories : "exposés" et "non exposés"... Cela a abouti à classer ceux qui n’avaient pas subi d’exposition au tir Bravo dans la catégorie des "personnes exposées"...

Les Américains avaient prétexté que "les vents avaient tourné" au moment du tir Bravo, mais l’étude des documents météorologiques de l’époque montre qu’il n’y eut aucun changement inattendu et que les généraux et scientifiques savaient très bien que les vents provoqueraient des retombées sur des zones habitées. Lors des précédents essais, les militaires américains déplaçaient les insulaires "par précaution" alors que ces tirs étaient de faible puissance. Mais pour le tir Bravo, ils ont laissé les gens sur place qui n’avaient pas conscience du danger encouru par l’explosion de la bombe la plus puissante que l’homme ait jamais expérimentée (15 mégatonnes, soit 1000 fois la puissance de la bombe d’Hiroshima).

Le jour où le monde s’est arrêté

D’autres documents doivent encore être exploités et rendus publics. Mais des photos et des dossiers médicaux concernant des habitants des Marshall ont été jetés au feu par des agents du gouvernement américain et d’autres ont été détruits lors d’incendies qui se sont produits au cours des années.

Cinquante ans après, le maire de Rongelap regrette que l’Amérique n’assume pas pleinement ses responsabilités vis-à-vis de ses concitoyens. Il affirme que les habitants des Marshall comprennent bien que le 11 septembre a bouleversé l’Amérique. "Nous partageons les préoccupations des Américains dans leur lutte contre le terrorisme, mais nous voulons aussi qu’ils comprennent que pour les habitants de Rongelap, le 1er mars 1954 représente pour eux "le jour où le monde s’est arrêté".
En savoir plus !

- Les irradiés de la République - Les victimes des essais nucléaires français prennent la parole.

Livre de 240 pages, 18 € (port compris).

- Le complexe nucléaire. Des liens entre l’atome civil et l’atome militaire. Livre de 144 pages, 12 € (port compris).

- L’héritage de la bombe. Les faits, les personnels, les populations. Sahara, Polynésie (1960-2002). Livre de 304 pages, 21 € (port compris).

Tous ces livres sont à commander au Réseau "Sortir du nucléaire" 9 rue Dumenge 69317 Lyon Cedex 04

Chèque à l’ordre de "Sortir du nucléaire".
Bruno Barillot, Stop Essais n°137, avril 2004

Lors des cérémonies qui ont marqué l’anniversaire du tir de la bombe thermonucléaire Bravo, James Matayoshi, le maire de Rongelap, un atoll des Iles Marshall, a fait quelques révélations devant ses invités venus du monde entier. S’appuyant sur des documents militaires américains déclassifiés par l’administration Clinton, le maire révèle que "l’oubli" des habitants de Rongelap ce 1er mars 1954 avait été "volontaire" !

En effet, un rapport de 1953 décrivait la planification de la campagne de tirs "Castle" dont fit partie l’essai Bravo. Ce rapport désigné sous le nom de "Project 4.1", rédigé des mois auparavant, explique que les tirs de la série Castle permettraient d’étudier les effets de la bombe thermonucléaire sur les êtres humains.

En effet, les études qui avaient été faites par les services de santé américains sur les survivants d’Hiroshima et Nagasaki avaient permis de recueillir d’importantes informations sur les effets d’une bombe atomique "ordinaire". Il fallait donc voir ce que donnerait - sur les êtres humains - une bombe thermonucléaire.

Des études nombreuses et très minutieuses

Autrement dit, les habitants de Rongelap ont été laissés sous le tir Bravo "à des fins d’études"... Des études qui ont été nombreuses et très minutieuses ! Les habitants de Rongelap ont bien sûr été déplacés quelques jours après le tir du 1er mars 1954 tant leur atoll avait été contaminé. Ils ont subi par la suite toutes sortes d’examens par les médecins

américains.

Chaque année, ils étaient l’objet de nouveaux examens comme cela avait été conçu et planifié auparavant dans le rapport de 1953 intitulé "Project 4.1".

James Matayoshi a retrouvé des photos datées du 16 mars 1954, soit deux semaines après le tir Bravo, où une armada de "scientifiques" américains étaient venus examiner avec toutes sortes d’appareils les habitants de Rongelap. Il n’était pas possible de mettre toute cette infrastructure médicale en place sans une programmation technique et logistique prévue bien longtemps à l’avance. Les gens de Rongelap rappellent qu’ils étaient examinés par les médecins américains, mais qu’ils n’étaient pas soignés pour tout ce qu’ils ressentaient...

D’autres documents déclassifiés expliquent qu’on avait donné des matériels radioactifs à des gens classés selon deux catégories : "exposés" et "non exposés"... Cela a abouti à classer ceux qui n’avaient pas subi d’exposition au tir Bravo dans la catégorie des "personnes exposées"...

Les Américains avaient prétexté que "les vents avaient tourné" au moment du tir Bravo, mais l’étude des documents météorologiques de l’époque montre qu’il n’y eut aucun changement inattendu et que les généraux et scientifiques savaient très bien que les vents provoqueraient des retombées sur des zones habitées. Lors des précédents essais, les militaires américains déplaçaient les insulaires "par précaution" alors que ces tirs étaient de faible puissance. Mais pour le tir Bravo, ils ont laissé les gens sur place qui n’avaient pas conscience du danger encouru par l’explosion de la bombe la plus puissante que l’homme ait jamais expérimentée (15 mégatonnes, soit 1000 fois la puissance de la bombe d’Hiroshima).

Le jour où le monde s’est arrêté

D’autres documents doivent encore être exploités et rendus publics. Mais des photos et des dossiers médicaux concernant des habitants des Marshall ont été jetés au feu par des agents du gouvernement américain et d’autres ont été détruits lors d’incendies qui se sont produits au cours des années.

Cinquante ans après, le maire de Rongelap regrette que l’Amérique n’assume pas pleinement ses responsabilités vis-à-vis de ses concitoyens. Il affirme que les habitants des Marshall comprennent bien que le 11 septembre a bouleversé l’Amérique. "Nous partageons les préoccupations des Américains dans leur lutte contre le terrorisme, mais nous voulons aussi qu’ils comprennent que pour les habitants de Rongelap, le 1er mars 1954 représente pour eux "le jour où le monde s’est arrêté".
En savoir plus !

- Les irradiés de la République - Les victimes des essais nucléaires français prennent la parole.

Livre de 240 pages, 18 € (port compris).

- Le complexe nucléaire. Des liens entre l’atome civil et l’atome militaire. Livre de 144 pages, 12 € (port compris).

- L’héritage de la bombe. Les faits, les personnels, les populations. Sahara, Polynésie (1960-2002). Livre de 304 pages, 21 € (port compris).

Tous ces livres sont à commander au Réseau "Sortir du nucléaire" 9 rue Dumenge 69317 Lyon Cedex 04

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Bruno Barillot, Stop Essais n°137, avril 2004



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