Dérogations aux normes de rejets d’eau chaude : EDF autorisée à cuire les poissons à petit feu !
Le 15 juillet 2022, des arrêtés exceptionnels ont été adoptés autorisant EDF, "nécessité publique" oblige, à déroger aux normes limitant l’échauffement des cours d’eau suite aux rejets d’eau chaude des centrales. Ce 22 juillet, ces dispositions ont été prorogées jusqu’au 7 août inclus. Nous alertons sur les conséquences de ces décisions sur la santé des cours d’eau et sur le risque d’une situation "exceptionnelle" qui devienne la nouvelle norme, quitte à asphyxier les milieux aquatiques.
Communiqué du 26 juillet 2022
La biodiversité aquatique sacrifiée sur l’autel de la production d’électricité nucléaire
En matière de nucléaire, lorsqu’une norme n’est pas respectée, il suffit d’obtenir une dérogation ! Cet été, le Rhône, la Garonne et l’estuaire de la Gironde font malheureusement les frais de ce principe.
Les centrales situées sur des cours d’eau font l’objet d’arrêtés censés limiter l’échauffement généré par le rejet de leurs eaux de refroidissement. Ceux-ci fixent, d’une part, la différence maximale de température entre l’amont et l’aval (avec un delta allant jusqu’à 11°C de moyenne journalière pour la centrale du Blayais !), et d’autre part la température maximale admissible des cours d’eau après rejet. En temps normal, si ces critères sont dépassés, les centrales doivent être arrêtées ou réduire leur puissance pour éviter de réchauffer encore plus des cours d’eau déjà souffrants.
Or, le 15 juillet 2022, des arrêtés exceptionnels ont été publiés sans aucune phase de consultation préalable, "nécessité publique" oblige. Ceux-ci autorisent les centrales de Blayais, Bugey, Saint-Alban et Golfech à s’en tenir au respect de l’écart de température amont/aval et à déroger au seuil fixant la température maximale admissible pour les cours d’eau. Pourtant, ces limites étaient déjà fixées très haut : jusqu’à 36,5°C pour l’eau en aval du rejet dans l’estuaire de la Gironde, température au-delà de laquelle seules quelques espèces de poissons survivent [1] ! Le 22 juillet 2022, ces dispositions ont quasiment été prorogées à l’identique jusqu’au 7 août inclus. Comment imaginer que la biodiversité aquatique ressortira indemne de trois semaines de cuisson à petit feu ? Quel crédit accorder aux études qui seront menées sur l’impact environnemental de ce mode de fonctionnement, dans la mesure où celles-ci seront réalisées... par EDF elle-même ?
Cette situation est, selon RTE, légitimée par la nécessité d’assurer le bon fonctionnement du réseau électrique et l’équilibre entre production et consommation. Elle constitue la conséquence directe de l’état catastrophique du parc nucléaire, entre maintenances en retard et arrêts pour défauts de corrosion. Face à cette défaillance, pour continuer à assurer la production d’électricité, EDF maintient aujourd’hui en fonctionnement, en pleine vague de chaleur exceptionnelle, les centrales qui, en temps normal, sont arrêtées en priorité lors des canicules car elles réchauffent le plus l’eau ou sont situées sur certains des fleuves les plus vulnérables [2] !
Face à la crise climatique, changer de cap en urgence pour protéger le vivant
La poursuite de ces rejets d’eau chaude en situation caniculaire ne crée pas seulement des conditions difficiles pour la faune et la flore aquatiques endémiques ; elle favorise aussi la prolifération des espèces invasives, et également d’algues et de micro-organismes qui peuvent être pathogènes. Et ce n’est pas seulement la santé des poissons, insectes, batraciens et algues vivant dans ces eaux qui est en jeu, mais aussi la survie de toutes les espèces qui en dépendent. Alors que notre interdépendance avec le vivant apparaît de plus en plus évidente, nous dénonçons fermement ce saccage autorisé.
Les vagues de chaleur longues et intenses sont malheureusement appelées à se multiplier. Quant à la disponibilité du parc nucléaire, quoi qu’en dise EDF, elle ne s’améliorera pas drastiquement dans les années à venir, de nombreux réacteurs vieillissants devant être mis à l’arrêt pour travaux. Cette situation exceptionnelle qui met à mal la biodiversité est-elle appelée à devenir la nouvelle norme ? Verra-t-on apparaître également des dérogations hors période estivale, lors des temps de reproduction et de migration de la faune aquatique [3] ?
La question de la sécurité d’approvisionnement à court et moyen terme est indéniablement un enjeu complexe. Mais faute d’une réorientation en urgence de notre modèle énergétique vers la sobriété et les énergies renouvelables, les cours d’eau et la vie qu’ils abritent souffriront de plus en plus. Face au changement climatique, l’image d’un nucléaire "vert" et performant n’est qu’un leurre !
Notes
[1] Les températures "exceptionnelles" des eaux après rejet pour les centrales du Bugey, Golfech étaient quant à elles de 27°C, 29°C et 30°C, ce qui n’est pas anodin pour la faune aquatique
[2] La centrale de Golfech est régulièrement arrêtée lorsque les eaux de la Garonne sont trop chaudes et/ou trop basses. Quant aux réacteurs de Saint-Alban, du Blayais et de Bugey 2 et 3, ils fonctionnent en circuit dit "ouvert", prélevant de grandes quantités d’eau et la rejetant à une température très élevée. Lors des derniers étés (notamment 2018, 2019 et 2020), ils ont connu des réduction de puissance ou arrêts.
[3] Déjà, en mai 2022, la centrale du Blayais a dû réduire sa production pour éviter de dépasser les limites fixées. Avec des vagues de chaleur à la fois plus précoces et plus tardives, verra-t-on également apparaître des dérogations au printemps et en automne ?
La biodiversité aquatique sacrifiée sur l’autel de la production d’électricité nucléaire
En matière de nucléaire, lorsqu’une norme n’est pas respectée, il suffit d’obtenir une dérogation ! Cet été, le Rhône, la Garonne et l’estuaire de la Gironde font malheureusement les frais de ce principe.
Les centrales situées sur des cours d’eau font l’objet d’arrêtés censés limiter l’échauffement généré par le rejet de leurs eaux de refroidissement. Ceux-ci fixent, d’une part, la différence maximale de température entre l’amont et l’aval (avec un delta allant jusqu’à 11°C de moyenne journalière pour la centrale du Blayais !), et d’autre part la température maximale admissible des cours d’eau après rejet. En temps normal, si ces critères sont dépassés, les centrales doivent être arrêtées ou réduire leur puissance pour éviter de réchauffer encore plus des cours d’eau déjà souffrants.
Or, le 15 juillet 2022, des arrêtés exceptionnels ont été publiés sans aucune phase de consultation préalable, "nécessité publique" oblige. Ceux-ci autorisent les centrales de Blayais, Bugey, Saint-Alban et Golfech à s’en tenir au respect de l’écart de température amont/aval et à déroger au seuil fixant la température maximale admissible pour les cours d’eau. Pourtant, ces limites étaient déjà fixées très haut : jusqu’à 36,5°C pour l’eau en aval du rejet dans l’estuaire de la Gironde, température au-delà de laquelle seules quelques espèces de poissons survivent [1] ! Le 22 juillet 2022, ces dispositions ont quasiment été prorogées à l’identique jusqu’au 7 août inclus. Comment imaginer que la biodiversité aquatique ressortira indemne de trois semaines de cuisson à petit feu ? Quel crédit accorder aux études qui seront menées sur l’impact environnemental de ce mode de fonctionnement, dans la mesure où celles-ci seront réalisées... par EDF elle-même ?
Cette situation est, selon RTE, légitimée par la nécessité d’assurer le bon fonctionnement du réseau électrique et l’équilibre entre production et consommation. Elle constitue la conséquence directe de l’état catastrophique du parc nucléaire, entre maintenances en retard et arrêts pour défauts de corrosion. Face à cette défaillance, pour continuer à assurer la production d’électricité, EDF maintient aujourd’hui en fonctionnement, en pleine vague de chaleur exceptionnelle, les centrales qui, en temps normal, sont arrêtées en priorité lors des canicules car elles réchauffent le plus l’eau ou sont situées sur certains des fleuves les plus vulnérables [2] !
Face à la crise climatique, changer de cap en urgence pour protéger le vivant
La poursuite de ces rejets d’eau chaude en situation caniculaire ne crée pas seulement des conditions difficiles pour la faune et la flore aquatiques endémiques ; elle favorise aussi la prolifération des espèces invasives, et également d’algues et de micro-organismes qui peuvent être pathogènes. Et ce n’est pas seulement la santé des poissons, insectes, batraciens et algues vivant dans ces eaux qui est en jeu, mais aussi la survie de toutes les espèces qui en dépendent. Alors que notre interdépendance avec le vivant apparaît de plus en plus évidente, nous dénonçons fermement ce saccage autorisé.
Les vagues de chaleur longues et intenses sont malheureusement appelées à se multiplier. Quant à la disponibilité du parc nucléaire, quoi qu’en dise EDF, elle ne s’améliorera pas drastiquement dans les années à venir, de nombreux réacteurs vieillissants devant être mis à l’arrêt pour travaux. Cette situation exceptionnelle qui met à mal la biodiversité est-elle appelée à devenir la nouvelle norme ? Verra-t-on apparaître également des dérogations hors période estivale, lors des temps de reproduction et de migration de la faune aquatique [3] ?
La question de la sécurité d’approvisionnement à court et moyen terme est indéniablement un enjeu complexe. Mais faute d’une réorientation en urgence de notre modèle énergétique vers la sobriété et les énergies renouvelables, les cours d’eau et la vie qu’ils abritent souffriront de plus en plus. Face au changement climatique, l’image d’un nucléaire "vert" et performant n’est qu’un leurre !
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