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Sortir du nucléaire n°67



Novembre 2015

Congrès

Vive le premier congrès du Réseau "Sortir du nucléaire" !

Article paru dans la revue Sortir du nucléaire n°67 - Novembre 2015



Le premier Congrès du Mouvement antinucléaire aura lieu les 12, 13 et 14 février 2016 à Angers à l’initiative du Réseau “Sortir du nucléaire” et d’associations locales. Ce congrès a pour ambition de réunir toutes les composantes du mouvement antinucléaire français afin de repenser collectivement le fonctionnement structurel et stratégique du Réseau “Sortir du nucléaire” au service de l’ensemble des associations et groupes antinucléaires.

Il visera à interroger, réfléchir, débattre et décider d’un nouveau fonctionnement du Réseau, en particulier pour lui donner une assise plus horizontale, au plus près des groupes de terrain qui le composent. Il sera ouvert à tous les groupes antinucléaires, qu’ils soient ou non adhérents du Réseau.



Le premier congrès du Réseau SDN est en marche !

Une crise a secoué le Réseau “Sortir du nucléaire” en 2010. Il a fallu 5 ans, mais aujourd’hui nous sommes en train d’en sortir. La nouvelle équipe d’animation élue en janvier 2015, composée de militant-e-s issus de groupes antinucléaires, avait pris trois engagements devant l’AG.

Le premier consistait à redonner leur légitimité aux anciens membres du CA évincés en 2010 ainsi qu’au salarié licencié. Chose faite en juin 2015. Cet épisode va nous permettre de renouer les contacts avec de nombreux groupes ayant déserté le Réseau à la suite de cette crise.

Deux autres engagements restent à tenir : la régionalisation du Réseau et l’organisation d’un congrès de refondation.

La régionalisation

En organisant localement, en octobre et novembre, par grandes villes ou régions, des assemblées de préparation du congrès ouvertes à tous les groupes et militants antinucléaires, membres ou non du Réseau, c’est la perspective de la décentralisation du Réseau qui va pouvoir se réfléchir et se mettre en place, à partir des expériences et luttes locales diverses.

Le congrès de refondation

Un congrès exceptionnel du mouvement antinucléaire, se tiendra les 12, 13 et 14 février 2016 à Angers : ce congrès, ouvert à tous les groupes et associations engagés dans la bataille antinucléaire, se verra doté de toutes les prérogatives permettant de faire évoluer le Réseau : élection d’une nouvelle équipe d’animation (l’ancienne démissionnant à l’ouverture du congrès), débats sur les modes de fonctionnement (statuts et règlement intérieur), régionalisation, place des salariés dans le fonctionnement du Réseau, stratégie, etc.

Des outils, informatiques et papier, vont nous permettre d’élaborer des textes d’orientations structurelles et stratégiques, dont les thèmes seront soulevés et débattus lors des réunions de coordinations régionales : une liste de discussion “rezo-congrès” pour mener les débats : rezo-congres@sortirdunucleaire.org ; un espace Intranet pour en archiver les synthèses ; et un journal, Atomes crochus, pour les diffuser aux groupes.

Atomes crochus n°3 : un outil de réflexion pour aider les groupes à préparer le congrès - à télécharger sur le site du Réseau

Le numéro 3 d’Atomes crochus est d’ores et déjà consultable et téléchargeable sur le site du Réseau.

Alors que l’industrie nucléaire est en crise, que les réacteurs vieillissent, que les véhicules de transports de matières radioactives sont des dizaines chaque semaine à parcourir l’ensemble du pays, qu’ainsi les probabilités d’une catastrophe nucléaire augmentent, le Réseau Sortir du nucléaire réaffirme la nécessité d’un maillage du pays par des groupes actifs, et l’importance de ce Réseau constitué de dizaines de milliers de citoyennes qui lui fournissent une aide et le soutien financier indispensable à son indépendance.

Toutes les informations relatives au congrès, et le journal Atomes crochus, sont sur le site : https://www.sortirdunucleaire.org/congres

Vive le congrès donc...

Un groupe de travail, constitué d’administrateurs et de militants engagés dans la préparation du congrès, a élaboré une série de thèmes et de textes de présentation, pour stimuler le débat qui se poursuivra sur la liste de discussion dédiée. Ces textes, qui seront ainsi discutés, enrichis, complétés, contestés..., ont été publiés dans le numéro 3 d’Atomes crochus – téléchargeable à partir du site Internet. À l’issue de ces débats, et notamment des réunions régionales, le numéro 4 d’Atomes crochus recueillera les expressions des militants, et servira de base, associé au site internet, aux discussions du congrès.

Voici, succinctement, les thèmes traités dans Atomes crochus °3.

Nous les avons divisé en deux ensembles :

 structurels, c’est-à-dire touchant à l’organisa- tion et au fonctionnement du Réseau (La Charte, Quel Réseau et quel CA ?, La régionalisation, Statuts et Règlement Intérieur, Place des sala- riés, Communication, Finances),
 et stratégiques, c’est-à-dire concernant les grandes orientations stratégiques du Réseau, et plus généralement du mouvement anti-nucléaire (Sortir du nucléaire ou Arrêter le nucléaire ?, Fermeture de Fessenheim et des réacteurs de plus de trente ans, Le coût du nucléaire, un argument pour arrêter ?, Relations entre le nucléaire civil et militaire, Radioactivité et santé, Transports nucléaires, L’avenir radieux ? (Iter, Astrid, Bure), Les travailleurs du nucléaire, Nucléaire et démocratie, Les alternatives ?, Militer autrement).

Une réflexion est aussi proposée sur les relations entre Nucléaire et climat dans la perspective de la réunion à Paris de la conférence des Nations unies sur les changements climatiques, dite COP21, prévue du 30 novembre au 11 décembre 2015. En introduction à ces réflexions, nous vous proposons une présentation rapide de la place particulière de la France nucléaire dans le Monde.

L’incroyable erreur de la France atomique

Au-delà de toutes les tares bien connues du nucléaire (risques, déchets, etc.), la France atomique présente une incroyable particularité : elle a construit en quelques années une soixantaine de réacteurs. Cette option, présentée depuis des décennies comme un exploit extraordinaire – ce qui n’est d’ailleurs pas faux sur le simple plan industriel – était en réalité une faute magistrale, même du point de vue pronucléaire. En effet, cela revenait à programmer pour une trentaine d’années plus tard – c’est-à-dire depuis plusieurs années déjà – une situation inextricable : tous les réacteurs arrivent en fin de vie en même temps (ou presque).

Résultat, il est impossible de les rafistoler tous – le programme d’EDF dit de “grand carénage” est d’ail- leurs déjà en train de dérailler – et impossible aussi (et c’est heureux) de les remplacer par des nouveaux : Areva et EDF se révèlent incapables de construire un seul réacteur (respectivement l’EPR de Finlande et celui de Flamanville), alors comment pourraient- ils en construire des dizaines ? D’autre part, les grands parcs nucléaires (USA, France, Grande- Bretagne, Japon, etc.) ont été financés dans les fameuses Trente glorieuses, à une époque où l’argent coulait à flots... ce qui n’est plus du tout le cas de nos jours.

La conclusion est simple : dans la décennie qui vient, ce qui est terriblement court sur le plan de l’énergie, la France va se retrouver dans une impasse : nombre de réacteurs nucléaires vont s’arrêter (ce qui est très bien) mais aucune alternative ne sera au rendez-vous (ce qui est dramatique).

Il faudra alors espérer que nos voisins puissent nous vendre assez d’électricité pour assurer notre minimum vital.

Il faudra aussi apprendre à vivre enfin de façon sobre et raisonnable... et commencer à développer réellement des sources d’énergie alternatives.

Ces pages ont été réalisées collectivement, avec le comité de rédaction d’Atomes crochus, au sein duquel ont participé bon nombre d’administrateurs, mais aussi de militants. On notera, parmi les signataires collectifs, à la fin de cette présentation, le nom de certains militants qui ont été récemment réhabilités avec la résolution de la crise.

Le débat préparatoire au congrès

I Questions structurelles

Les questions structurelles, touchent à l’organisation et au fonctionnement du Réseau, et elles sont à la base de ses choix politiques et stratégiques.

Quelques exemples :

 veut-on d’une structure type ONG, avec une centralisation des prises de décisions et une force active sur le terrain mais qui ne participe pas à la stratégie ? - ou une coordination de groupes de terrain, organisée collectivement autour des luttes locales et qui se donne les moyens et l’imagination...
 quelle place donner aux donateurs du Réseau — et comment cet argent peut servir au mieux à la lutte antinucléaire ?

Ces questions, parmi bien d’autres, seront posées et débattues lors du congrès. Nous nous limiterons ici d’amener un éclairage sur la Charte fondatrice du Réseau, à travers l’extrait d’un texte dont vous pourrez trouver l’intégralité dans le numéro 3 d’Atomes crochus.

La Charte du Réseau

Le Réseau s’est doté d’un texte fondateur, une Charte (https://www.sortirdunucleaire.org/charte) qui est, encore aujourd’hui, la base de l’adhésion d’un groupe au Réseau. Mais cette Charte pose au moins deux types de problèmes majeurs.

I - Force est de constater que ce texte fondateur n’a jamais été respecté sur un point crucial (d’ailleurs mis en valeur en fin de Charte), à savoir la revendication explicite du recours, en phase transitoire, à des centrales à gaz :

Extrait de la Charte :

Sortir du nucléaire... c’est possible avec : le développement des économies d’énergie, la mise en place d’une autre politique énergétique basée sur les énergies renouvelables (éolien, solaire, bois...), fortement créatrices d’emplois, le recours, en phase transitoire, à des tech- niques de production énergétique les moins néfastes possible pour l’environnement (centrales au gaz, cogénération...). Ce point se situait pourtant au cœur du compromis fédérateur qui fonda le Réseau il y a 18 ans, face aux groupes qui, depuis Tchernobyl, insistaient aussi sur l’opportunité, vu la gravité de la situation, d’un recours temporaire massif à du thermique au charbon (et qui alertaient quant au verrou que constituait l’électronucléaire pour un quelconque essor préalable des énergies renouvelables et des économies d’électricité en France).

Assumer publiquement un recours au gaz naturel en attendant mieux (et l’inclure dans sa présentation récurrente des “alternatives” au nucléaire) relevait donc, a priori, pour le Réseau et ses membres, d’un cahier des charges minimal.

II - La formulation de la revendication de base de la Charte – “nous voulons une décision de sortie..”, même si la décision est immédiate et la sortie urgente, (plutôt que “nous voulons une sortie” – ou bien un “arrêt”...) – était sous-tendue par des postulats erronés, qui ont été reconduits sans véritable débat ni bilan d’année en année, et que l’on peut résumer à trois grands axes :

  • a) L’illusion (à l’extrême rigueur concevable en 1997, avec la décision effective d’arrêt définitif de Superphénix et l’entrée d’une ministre Verte au gouvernement), que l’arrivée "au pouvoir" en France par la voie des urnes d’une majorité assez rétive au nucléaire pour prendre une telle "décision" était envisageable.
  • b) La conviction, très idéologique, qu’il serait nécessaire et suffisant de "décider" pour que les choses importantes se fassent et que, à l’inverse, rien de sérieux ne pourrait s’obtenir en l’absence de décision officielle et juridique préalable.
  • c) L’idée que le nucléaire pourrait encore se définir, surtout en France, comme quelque chose dont on pourrait "sortir". Ce qui peut éventuellement s’argumenter d’un strict point de vue d’énergéticien, mais devient intenable si l’on prend en compte le volet radioactivité et l’ensemble de ses conséquences humaines et sociopolitiques (auquel cas l’exigence fédératrice ne peut désormais être que "l’arrêt" ...).

Débattre de tous ces points et en tirer des conséquences palpables semble incontournable pour quiconque souhaiterait jeter les bases d’une structure visant l’arrêt effectif du recours industriel à l’énergie atomique.

II / Questions de stratégie

Nous vous proposons, en guise d’éclairage, d’aborder ici trois thèmes qui touchent la stratégie, interrogent les moyens pour arrêter le nucléaire, et sortir de cette impasse culturelle, économique et écologique : Sortir du Nucléaire, ou arrêter le nucléaire ?, Les alternatives au nucléaire, Militer autrement ?

1) Sortir du Nucléaire ou arrêter le nucléaire ?

Comment concilier le débat sur l’arrêt du nucléaire, les délais de sortie d’une part, et, de l’autre, le rassemblement souhaité des antinucléaires ? Ce débat est-il piégé ? Sans doute, si l’on fait d’une position nationale unique un point de rupture. D’autant plus si cette position se faisait sur l’une des deux options suivantes, difficilement conciliables : celle des partisans de l’arrêt immédiat ou celle d’un scénario de type Négawatt avec une sortie à plus de 20 ans...

Réflexions en forme de questions

Peut-on être pour un arrêt immédiat mais penser que ce mot d’ordre est difficile à défendre dans l’opinion publique ? Peut-on penser que la seule solution réaliste d’un point de vue social ou écono- mique ne peut se faire qu’avec une sortie program- mée sur 10 ans, 15 ans... voire plus...? Et y a-t-il un seuil à partir duquel on n’est plus un antinucléaire ?

Quelques pistes

Contourner le problème ? Une possibilité :

La Charte ne se prononce pas pour un délai de sortie Sortir du nucléaire n°67 précis... mais chaque groupe adhérent devrait logiquement porter localement la revendication de la fermeture immédiate des installations nucléaires qui le concernent, et dont beaucoup ont dépassé les 30 ans maximum d’autorisation prévus lors de leur construction. Ainsi la somme des entités constituant le Réseau porterait une revendication de fermeture immédiate partout sans porter un mot d’ordre national qui divise.

Il devrait être plus facile de convaincre de la nécessité de fermer immédiatement telle installation, car localement les militants connaissent les points faibles des installations qu’ils côtoient. Ils peuvent argumenter avec bon sens et exemples à la clé.

Le mot d’ordre “Arrêt immédiat” est-il discutable ?

Chacun sait, à commencer par ceux qui défendent ce mot d’ordre, qu’on peut difficilement arrêter nos 19 centrales nucléaires en actionnant un inter- rupteur. Ceux qui préconisent le mot d’ordre “Arrêt immédiat” programment en général un arrêt de la production en trois ans (Pierre Lucot et Jean-Luc Pasquinet, Nucléaire arrêt immédiat, Golias) ou en cinq ans (Mouvement Utopia, Idées reçues et scénarios de sortie, Utopia).

Pourquoi alors ne pas défendre plutôt le mot d’ordre “arrêt en 3 ans”, plus facilement audible par l’opinion publique ? Il laisse entendre, par sa précision, que le sujet a été réfléchi, alors que “Arrêt immédiat” peut laisser croire qu’il s’agit d’une exigence idéaliste qui ne s’appuie sur rien, même si ce n’est pas le cas. Sur un sujet où science et communication s’accordent pour imposer le point de vue du lobby, il est impératif de réfléchir à l’impact de nos formulations.

Et maintenant rêvons...

... au jour où nous aurons modifié le rapport de force en notre faveur.Enfin, l’arrêt de production d’électricité nucléaire est décidé (le nucléaire militaire n’est pas abordé dans cet article, mais fait l’objet d’un développement dans le numéro 3 d’Atomes crochus).

Se posera alors concrètement la question de la date de fermeture du dernier réacteur. Quel sera le rôle des antinucléaires ? Convaincre, bien sûr, pour arrêter au plus vite ! Mais, au-delà, à qui cette décision reviendra t-elle... entre un scénario à 3, 5, 10 ans voire plus...?

Beaucoup de critères entreront en ligne de compte à ce moment là : Dans quel contexte cette décision aura-t-elle été prise ? Un accident ? De quel niveau ? Un changement de régime radical (on est dans le rêve, n’est-ce pas...) ? On ne peut les imaginer tous...

2) Les alternatives au nucléaire

Pour produire de la chaleur, nous avons utilisé massivement le bois local, puis le charbon, le pétrole, et marginalement l’uranium, qu’il fallait aller chercher souvent très loin, occasionnant des transports coûteux, parfois dangereux, entraînant parfois des conflits armés, et au prix d’une exploitation des travailleurs locaux dans des conditions d’hygiène et de sécurité effroyables.

En ces temps de COP21, nous devons avoir une vision d’avenir pour bannir le plus rapidement possible l’utilisation des combustibles carbonés et nucléaires. Grâce aux progrès techniques, et à la production de masse de modules photovoltaïques et d’éoliennes, la voie nous est toute tracée pour entrer massive- ment dans l’utilisation de ces énergies renouvela- bles efficaces et désormais compétitives économiquement face aux fossiles.

C’est parmi toutes ces énergies renouvelables qu’on trouve le potentiel le plus important, et l’électricité produite localement peut être facile- ment transportée vers les villes, vers toute l’Europe, et aussi être stockée.

Il faudrait en outre développer la recherche dans d’autres sources d’énergies renouvelables très pro- metteuses, mais complètement sous-employées aujourd’hui : l’énergie des courants marins,la biomasse...

Le handicap de l’intermittence de ces énergies renouvelables peut être maîtrisé grâce à la mise en place de réseaux intelligents gérant la demande, à l’utilisation de compteurs communicants, au stockage massif sur quelques jours dans des STEP 1, sur quelques heures dans des batteries, et à des interconnexions européennes. Les techniques sont disponibles, et passer aux renouvelables serait une solution économiquement rentable, mais l’acceptabilité des éoliennes pose problème, et tout ce qu’il y aura à fabriquer comme matériels nécessitera l’extraction croissante de minerais et créera forcément des pollutions.

Ne faudrait-il pas alors engager la réflexion sur les avantages et les inconvénients de sortir plus ou moins rapidement de l’ère des fossiles, et de changer de mode de vie ?

Ne doit on pas aussi, comme l’indique la Charte du Réseau, maintenir clairement “le recours, en phase transitoire, à des techniques de production énergétique les moins néfastes possible pour l’environne- ment (centrales au gaz, cogénération ...)” dans cette période de transition ?

3) Militer autrement ?

Le militantisme, c’est devenu un lieu commun, est en crise depuis de nombreuses années, non seulement au sein du Réseau mais d’une manière générale. Cinq facteurs sont en cause :

1 / Les mots employés Le terme militer a trop de proximité avec militaire, le mot lui-même ne doit-il pas être réinventé ? Une réflexion ne doit-elle pas être menée sur le vocabulaire ? Le succès du livre du “vieux” Stéphane Hessel a mis en avant des mots tels que : indignation, résistance, engagement. Voilà des mots forts qui ont été revisités et qui ont donné goût à la manifestation des opinions.

2 / Les façons de lutter ! Nous pouvons constater qu’avec les nouveaux mouvements plus spontanés et plus conjoncturels, les formes d’expression changent aussi. Le vécu est au centre de ces nouvelles actions. Ce que nous appelons l’art, l’expression artistique, est un enjeu de plus en plus central pour cette partie de la jeunesse qui veut vivre différemment. La musique, le théâtre, la poésie, le cinéma, mais aussi des formes nouvelles telles que le happening, le street art, le slam émergent y compris dans les mouvements sociaux. N’est-il pas nécessaire d’arrêter de séparer “l’art” de la “politique” ?

3 / Les structures

Toutes les formes d’organisation construites sur le modèle représentatif hiérarchique ont perdu de leur prestige et de leur pertinence, bien que restant le modèle dominant du fait de leur importance historique et de leur structuration en référence à la loi d’association 1901.

S’y exprime encore fortement l’ascension possible de ceux qui veulent exercer le pouvoir, tandis que pèsent sur elles des contraintes juridico-administratives de plus en plus dissuasives pour les bénévoles.

Les formes plus souples ne trouvent pas leur place. Ne faut-il donc pas repenser le cadre juridique d’association depuis 1901 ? Le Réseau n’a-t-il pas, lui aussi, comme la plupart des structures, un fonctionnement trop rigide ? Si c’est le cas, il doit être repensé. N’est-il pas nécessaire de nous poser la question d’une adhésion simplifiée au Réseau de manière à rapprocher celui-ci d’un mouvement non hiérarchique ? Par exemple tout groupe qui soutiendrait le Réseau en proposant une action artistique (musique, théâtre...) pourrait automatiquement devenir adhérent (sous réserve qu’il souscrive à la Charte). On aurait donc non seulement des groupes antinucléaires mais aussi des groupes artistiques engagés dans la lutte antinucléaire.

4 / L’idéologie

Plutôt qu’être seulement “anti”, il nous faut aussi être “pour” ! D’où la force des alternatives. N’est- il pas nécessaire de mieux intégrer les alternatives à l’intérieur de notre combat “contre” ? Le “pour” s’ajouterait ainsi au “contre”. Le discours sur la catastrophe (légitime) doit pouvoir s’associer à l’espoir et à la joie, tout aussi légitimes.

5 / Quoi d’autre encore ?

La fête comme acte politique. De tout temps, les arts, la littérature, la musique, le théâtre ont accompagné les mouvements d’émancipation. La “société du spectacle” a rompu ce lien ancestral en mettant “le spectacle” du côté du divertissement, de la technologie et de la marchandise. Les artistes eux-mêmes sont piégés par cette récupération. Ils ne conçoivent plus, par exemple, de jouer sans sono. Pourtant, les chorales “révolutionnaires”, les fanfares, les théâtres de rue, le cirque, le slam... sont des alternatives qui puisent leurs forces dans la tradition des luttes populaires. Depuis des temps immémoriaux, la fête est le ferment de la culture populaire, nous devons proposer de plus en plus de fêtes alternatives. Des fêtes pour la joie et la vie et contre le nucléaire. Cela nous paraît au moins aussi important que d’organiser des AG. Par exemple, organiser de grands festivals contre le nucléaire et pour la vie avec des concerts, des spectacles...

Le débat est lancé. Nous espérons que vous serez nombreux à réagir et à vous exprimer sur le site et dans les réunions régionales. Les esquisses de problématiques présentées ici ne doivent pas être prises comme des positions arrêtées mais comme des débuts de réflexion que l’on peut prolonger, compléter, contredire... Nous avons un objectif unique : rendre la lutte contre l’industrie nucléaire, civile et militaire, plus efficace. Pour cela, un mouvement antinucléaire plus fort est une condition essentielle, nous pourrons ainsi donner à la jeunesse des perspectives, et l’espoir d’une vie nouvelle pour la planète.

Vive le congrès !

Toutes les informations à propos du Congrès sont sur le site : www.sortirdunucleaire.org/congres contact : contact-congres@sortirdunucleaire.org Signature collective

Cette présentation est issu des textes publiés dans le numéro 3 d’Atomes crochus, auquel ont participé : [Par ordre alphabétique, Guillaume Blavette, Michel Boccara, Mimosa Bohn, Bruno Boussagol, Pierric Duflos (élu au CA), Jean-Louis Gaby (élu au CA), Marie-Christine Gamberini, Philippe Guiter (élu au CA), Claude Kaiser, Michel Lablanquie (élu au CA), Didier Latorre (élu au CA), Stéphane Lhomme, Dominique Malvaud (élu au CA), Jean-Marie Matagne, Pierre Péguin, Damien Renault et Laura Ruiz (élue au CA)].

La signature de ce texte est collective, tout comme pour le n°3 d’Atomes crochus, ce qui ne signifie pas que chaque auteur est d’accord avec l’ensemble des textes, loin s’en faut. Nous sommes dans un débat contradictoire, et cela est de bon augure pour le congrès. Les contributeurs mettent ainsi l’accent sur les textes et non sur les individus. Ces textes ne représentent donc pas la position du Réseau mais sont un aperçu des débats qui le traversent et ne demandent qu’à se tenir.

Ces quatre pages ont été réalisées collectivement, avec le comité de rédaction d’Atomes crochus, au sein duquel ont participé bon nombre d’administrateurs, mais aussi de militants. On notera, parmi les signataires collectifs, à la fin de cette présentation, le nom de certains militants qui ont été récemment réhabilités avec la résolution de la crise.

Le premier congrès du Réseau SDN est en marche !

Une crise a secoué le Réseau “Sortir du nucléaire” en 2010. Il a fallu 5 ans, mais aujourd’hui nous sommes en train d’en sortir. La nouvelle équipe d’animation élue en janvier 2015, composée de militant-e-s issus de groupes antinucléaires, avait pris trois engagements devant l’AG.

Le premier consistait à redonner leur légitimité aux anciens membres du CA évincés en 2010 ainsi qu’au salarié licencié. Chose faite en juin 2015. Cet épisode va nous permettre de renouer les contacts avec de nombreux groupes ayant déserté le Réseau à la suite de cette crise.

Deux autres engagements restent à tenir : la régionalisation du Réseau et l’organisation d’un congrès de refondation.

La régionalisation

En organisant localement, en octobre et novembre, par grandes villes ou régions, des assemblées de préparation du congrès ouvertes à tous les groupes et militants antinucléaires, membres ou non du Réseau, c’est la perspective de la décentralisation du Réseau qui va pouvoir se réfléchir et se mettre en place, à partir des expériences et luttes locales diverses.

Le congrès de refondation

Un congrès exceptionnel du mouvement antinucléaire, se tiendra les 12, 13 et 14 février 2016 à Angers : ce congrès, ouvert à tous les groupes et associations engagés dans la bataille antinucléaire, se verra doté de toutes les prérogatives permettant de faire évoluer le Réseau : élection d’une nouvelle équipe d’animation (l’ancienne démissionnant à l’ouverture du congrès), débats sur les modes de fonctionnement (statuts et règlement intérieur), régionalisation, place des salariés dans le fonctionnement du Réseau, stratégie, etc.

Des outils, informatiques et papier, vont nous permettre d’élaborer des textes d’orientations structurelles et stratégiques, dont les thèmes seront soulevés et débattus lors des réunions de coordinations régionales : une liste de discussion “rezo-congrès” pour mener les débats : rezo-congres@sortirdunucleaire.org ; un espace Intranet pour en archiver les synthèses ; et un journal, Atomes crochus, pour les diffuser aux groupes.

Atomes crochus n°3 : un outil de réflexion pour aider les groupes à préparer le congrès - à télécharger sur le site du Réseau

Le numéro 3 d’Atomes crochus est d’ores et déjà consultable et téléchargeable sur le site du Réseau.

Alors que l’industrie nucléaire est en crise, que les réacteurs vieillissent, que les véhicules de transports de matières radioactives sont des dizaines chaque semaine à parcourir l’ensemble du pays, qu’ainsi les probabilités d’une catastrophe nucléaire augmentent, le Réseau Sortir du nucléaire réaffirme la nécessité d’un maillage du pays par des groupes actifs, et l’importance de ce Réseau constitué de dizaines de milliers de citoyennes qui lui fournissent une aide et le soutien financier indispensable à son indépendance.

Toutes les informations relatives au congrès, et le journal Atomes crochus, sont sur le site : https://www.sortirdunucleaire.org/congres

Vive le congrès donc...

Un groupe de travail, constitué d’administrateurs et de militants engagés dans la préparation du congrès, a élaboré une série de thèmes et de textes de présentation, pour stimuler le débat qui se poursuivra sur la liste de discussion dédiée. Ces textes, qui seront ainsi discutés, enrichis, complétés, contestés..., ont été publiés dans le numéro 3 d’Atomes crochus – téléchargeable à partir du site Internet. À l’issue de ces débats, et notamment des réunions régionales, le numéro 4 d’Atomes crochus recueillera les expressions des militants, et servira de base, associé au site internet, aux discussions du congrès.

Voici, succinctement, les thèmes traités dans Atomes crochus °3.

Nous les avons divisé en deux ensembles :

 structurels, c’est-à-dire touchant à l’organisa- tion et au fonctionnement du Réseau (La Charte, Quel Réseau et quel CA ?, La régionalisation, Statuts et Règlement Intérieur, Place des sala- riés, Communication, Finances),
 et stratégiques, c’est-à-dire concernant les grandes orientations stratégiques du Réseau, et plus généralement du mouvement anti-nucléaire (Sortir du nucléaire ou Arrêter le nucléaire ?, Fermeture de Fessenheim et des réacteurs de plus de trente ans, Le coût du nucléaire, un argument pour arrêter ?, Relations entre le nucléaire civil et militaire, Radioactivité et santé, Transports nucléaires, L’avenir radieux ? (Iter, Astrid, Bure), Les travailleurs du nucléaire, Nucléaire et démocratie, Les alternatives ?, Militer autrement).

Une réflexion est aussi proposée sur les relations entre Nucléaire et climat dans la perspective de la réunion à Paris de la conférence des Nations unies sur les changements climatiques, dite COP21, prévue du 30 novembre au 11 décembre 2015. En introduction à ces réflexions, nous vous proposons une présentation rapide de la place particulière de la France nucléaire dans le Monde.

L’incroyable erreur de la France atomique

Au-delà de toutes les tares bien connues du nucléaire (risques, déchets, etc.), la France atomique présente une incroyable particularité : elle a construit en quelques années une soixantaine de réacteurs. Cette option, présentée depuis des décennies comme un exploit extraordinaire – ce qui n’est d’ailleurs pas faux sur le simple plan industriel – était en réalité une faute magistrale, même du point de vue pronucléaire. En effet, cela revenait à programmer pour une trentaine d’années plus tard – c’est-à-dire depuis plusieurs années déjà – une situation inextricable : tous les réacteurs arrivent en fin de vie en même temps (ou presque).

Résultat, il est impossible de les rafistoler tous – le programme d’EDF dit de “grand carénage” est d’ail- leurs déjà en train de dérailler – et impossible aussi (et c’est heureux) de les remplacer par des nouveaux : Areva et EDF se révèlent incapables de construire un seul réacteur (respectivement l’EPR de Finlande et celui de Flamanville), alors comment pourraient- ils en construire des dizaines ? D’autre part, les grands parcs nucléaires (USA, France, Grande- Bretagne, Japon, etc.) ont été financés dans les fameuses Trente glorieuses, à une époque où l’argent coulait à flots... ce qui n’est plus du tout le cas de nos jours.

La conclusion est simple : dans la décennie qui vient, ce qui est terriblement court sur le plan de l’énergie, la France va se retrouver dans une impasse : nombre de réacteurs nucléaires vont s’arrêter (ce qui est très bien) mais aucune alternative ne sera au rendez-vous (ce qui est dramatique).

Il faudra alors espérer que nos voisins puissent nous vendre assez d’électricité pour assurer notre minimum vital.

Il faudra aussi apprendre à vivre enfin de façon sobre et raisonnable... et commencer à développer réellement des sources d’énergie alternatives.

Ces pages ont été réalisées collectivement, avec le comité de rédaction d’Atomes crochus, au sein duquel ont participé bon nombre d’administrateurs, mais aussi de militants. On notera, parmi les signataires collectifs, à la fin de cette présentation, le nom de certains militants qui ont été récemment réhabilités avec la résolution de la crise.

Le débat préparatoire au congrès

I Questions structurelles

Les questions structurelles, touchent à l’organisation et au fonctionnement du Réseau, et elles sont à la base de ses choix politiques et stratégiques.

Quelques exemples :

 veut-on d’une structure type ONG, avec une centralisation des prises de décisions et une force active sur le terrain mais qui ne participe pas à la stratégie ? - ou une coordination de groupes de terrain, organisée collectivement autour des luttes locales et qui se donne les moyens et l’imagination...
 quelle place donner aux donateurs du Réseau — et comment cet argent peut servir au mieux à la lutte antinucléaire ?

Ces questions, parmi bien d’autres, seront posées et débattues lors du congrès. Nous nous limiterons ici d’amener un éclairage sur la Charte fondatrice du Réseau, à travers l’extrait d’un texte dont vous pourrez trouver l’intégralité dans le numéro 3 d’Atomes crochus.

La Charte du Réseau

Le Réseau s’est doté d’un texte fondateur, une Charte (https://www.sortirdunucleaire.org/charte) qui est, encore aujourd’hui, la base de l’adhésion d’un groupe au Réseau. Mais cette Charte pose au moins deux types de problèmes majeurs.

I - Force est de constater que ce texte fondateur n’a jamais été respecté sur un point crucial (d’ailleurs mis en valeur en fin de Charte), à savoir la revendication explicite du recours, en phase transitoire, à des centrales à gaz :

Extrait de la Charte :

Sortir du nucléaire... c’est possible avec : le développement des économies d’énergie, la mise en place d’une autre politique énergétique basée sur les énergies renouvelables (éolien, solaire, bois...), fortement créatrices d’emplois, le recours, en phase transitoire, à des tech- niques de production énergétique les moins néfastes possible pour l’environnement (centrales au gaz, cogénération...). Ce point se situait pourtant au cœur du compromis fédérateur qui fonda le Réseau il y a 18 ans, face aux groupes qui, depuis Tchernobyl, insistaient aussi sur l’opportunité, vu la gravité de la situation, d’un recours temporaire massif à du thermique au charbon (et qui alertaient quant au verrou que constituait l’électronucléaire pour un quelconque essor préalable des énergies renouvelables et des économies d’électricité en France).

Assumer publiquement un recours au gaz naturel en attendant mieux (et l’inclure dans sa présentation récurrente des “alternatives” au nucléaire) relevait donc, a priori, pour le Réseau et ses membres, d’un cahier des charges minimal.

II - La formulation de la revendication de base de la Charte – “nous voulons une décision de sortie..”, même si la décision est immédiate et la sortie urgente, (plutôt que “nous voulons une sortie” – ou bien un “arrêt”...) – était sous-tendue par des postulats erronés, qui ont été reconduits sans véritable débat ni bilan d’année en année, et que l’on peut résumer à trois grands axes :

  • a) L’illusion (à l’extrême rigueur concevable en 1997, avec la décision effective d’arrêt définitif de Superphénix et l’entrée d’une ministre Verte au gouvernement), que l’arrivée "au pouvoir" en France par la voie des urnes d’une majorité assez rétive au nucléaire pour prendre une telle "décision" était envisageable.
  • b) La conviction, très idéologique, qu’il serait nécessaire et suffisant de "décider" pour que les choses importantes se fassent et que, à l’inverse, rien de sérieux ne pourrait s’obtenir en l’absence de décision officielle et juridique préalable.
  • c) L’idée que le nucléaire pourrait encore se définir, surtout en France, comme quelque chose dont on pourrait "sortir". Ce qui peut éventuellement s’argumenter d’un strict point de vue d’énergéticien, mais devient intenable si l’on prend en compte le volet radioactivité et l’ensemble de ses conséquences humaines et sociopolitiques (auquel cas l’exigence fédératrice ne peut désormais être que "l’arrêt" ...).

Débattre de tous ces points et en tirer des conséquences palpables semble incontournable pour quiconque souhaiterait jeter les bases d’une structure visant l’arrêt effectif du recours industriel à l’énergie atomique.

II / Questions de stratégie

Nous vous proposons, en guise d’éclairage, d’aborder ici trois thèmes qui touchent la stratégie, interrogent les moyens pour arrêter le nucléaire, et sortir de cette impasse culturelle, économique et écologique : Sortir du Nucléaire, ou arrêter le nucléaire ?, Les alternatives au nucléaire, Militer autrement ?

1) Sortir du Nucléaire ou arrêter le nucléaire ?

Comment concilier le débat sur l’arrêt du nucléaire, les délais de sortie d’une part, et, de l’autre, le rassemblement souhaité des antinucléaires ? Ce débat est-il piégé ? Sans doute, si l’on fait d’une position nationale unique un point de rupture. D’autant plus si cette position se faisait sur l’une des deux options suivantes, difficilement conciliables : celle des partisans de l’arrêt immédiat ou celle d’un scénario de type Négawatt avec une sortie à plus de 20 ans...

Réflexions en forme de questions

Peut-on être pour un arrêt immédiat mais penser que ce mot d’ordre est difficile à défendre dans l’opinion publique ? Peut-on penser que la seule solution réaliste d’un point de vue social ou écono- mique ne peut se faire qu’avec une sortie program- mée sur 10 ans, 15 ans... voire plus...? Et y a-t-il un seuil à partir duquel on n’est plus un antinucléaire ?

Quelques pistes

Contourner le problème ? Une possibilité :

La Charte ne se prononce pas pour un délai de sortie Sortir du nucléaire n°67 précis... mais chaque groupe adhérent devrait logiquement porter localement la revendication de la fermeture immédiate des installations nucléaires qui le concernent, et dont beaucoup ont dépassé les 30 ans maximum d’autorisation prévus lors de leur construction. Ainsi la somme des entités constituant le Réseau porterait une revendication de fermeture immédiate partout sans porter un mot d’ordre national qui divise.

Il devrait être plus facile de convaincre de la nécessité de fermer immédiatement telle installation, car localement les militants connaissent les points faibles des installations qu’ils côtoient. Ils peuvent argumenter avec bon sens et exemples à la clé.

Le mot d’ordre “Arrêt immédiat” est-il discutable ?

Chacun sait, à commencer par ceux qui défendent ce mot d’ordre, qu’on peut difficilement arrêter nos 19 centrales nucléaires en actionnant un inter- rupteur. Ceux qui préconisent le mot d’ordre “Arrêt immédiat” programment en général un arrêt de la production en trois ans (Pierre Lucot et Jean-Luc Pasquinet, Nucléaire arrêt immédiat, Golias) ou en cinq ans (Mouvement Utopia, Idées reçues et scénarios de sortie, Utopia).

Pourquoi alors ne pas défendre plutôt le mot d’ordre “arrêt en 3 ans”, plus facilement audible par l’opinion publique ? Il laisse entendre, par sa précision, que le sujet a été réfléchi, alors que “Arrêt immédiat” peut laisser croire qu’il s’agit d’une exigence idéaliste qui ne s’appuie sur rien, même si ce n’est pas le cas. Sur un sujet où science et communication s’accordent pour imposer le point de vue du lobby, il est impératif de réfléchir à l’impact de nos formulations.

Et maintenant rêvons...

... au jour où nous aurons modifié le rapport de force en notre faveur.Enfin, l’arrêt de production d’électricité nucléaire est décidé (le nucléaire militaire n’est pas abordé dans cet article, mais fait l’objet d’un développement dans le numéro 3 d’Atomes crochus).

Se posera alors concrètement la question de la date de fermeture du dernier réacteur. Quel sera le rôle des antinucléaires ? Convaincre, bien sûr, pour arrêter au plus vite ! Mais, au-delà, à qui cette décision reviendra t-elle... entre un scénario à 3, 5, 10 ans voire plus...?

Beaucoup de critères entreront en ligne de compte à ce moment là : Dans quel contexte cette décision aura-t-elle été prise ? Un accident ? De quel niveau ? Un changement de régime radical (on est dans le rêve, n’est-ce pas...) ? On ne peut les imaginer tous...

2) Les alternatives au nucléaire

Pour produire de la chaleur, nous avons utilisé massivement le bois local, puis le charbon, le pétrole, et marginalement l’uranium, qu’il fallait aller chercher souvent très loin, occasionnant des transports coûteux, parfois dangereux, entraînant parfois des conflits armés, et au prix d’une exploitation des travailleurs locaux dans des conditions d’hygiène et de sécurité effroyables.

En ces temps de COP21, nous devons avoir une vision d’avenir pour bannir le plus rapidement possible l’utilisation des combustibles carbonés et nucléaires. Grâce aux progrès techniques, et à la production de masse de modules photovoltaïques et d’éoliennes, la voie nous est toute tracée pour entrer massive- ment dans l’utilisation de ces énergies renouvela- bles efficaces et désormais compétitives économiquement face aux fossiles.

C’est parmi toutes ces énergies renouvelables qu’on trouve le potentiel le plus important, et l’électricité produite localement peut être facile- ment transportée vers les villes, vers toute l’Europe, et aussi être stockée.

Il faudrait en outre développer la recherche dans d’autres sources d’énergies renouvelables très pro- metteuses, mais complètement sous-employées aujourd’hui : l’énergie des courants marins,la biomasse...

Le handicap de l’intermittence de ces énergies renouvelables peut être maîtrisé grâce à la mise en place de réseaux intelligents gérant la demande, à l’utilisation de compteurs communicants, au stockage massif sur quelques jours dans des STEP 1, sur quelques heures dans des batteries, et à des interconnexions européennes. Les techniques sont disponibles, et passer aux renouvelables serait une solution économiquement rentable, mais l’acceptabilité des éoliennes pose problème, et tout ce qu’il y aura à fabriquer comme matériels nécessitera l’extraction croissante de minerais et créera forcément des pollutions.

Ne faudrait-il pas alors engager la réflexion sur les avantages et les inconvénients de sortir plus ou moins rapidement de l’ère des fossiles, et de changer de mode de vie ?

Ne doit on pas aussi, comme l’indique la Charte du Réseau, maintenir clairement “le recours, en phase transitoire, à des techniques de production énergétique les moins néfastes possible pour l’environne- ment (centrales au gaz, cogénération ...)” dans cette période de transition ?

3) Militer autrement ?

Le militantisme, c’est devenu un lieu commun, est en crise depuis de nombreuses années, non seulement au sein du Réseau mais d’une manière générale. Cinq facteurs sont en cause :

1 / Les mots employés Le terme militer a trop de proximité avec militaire, le mot lui-même ne doit-il pas être réinventé ? Une réflexion ne doit-elle pas être menée sur le vocabulaire ? Le succès du livre du “vieux” Stéphane Hessel a mis en avant des mots tels que : indignation, résistance, engagement. Voilà des mots forts qui ont été revisités et qui ont donné goût à la manifestation des opinions.

2 / Les façons de lutter ! Nous pouvons constater qu’avec les nouveaux mouvements plus spontanés et plus conjoncturels, les formes d’expression changent aussi. Le vécu est au centre de ces nouvelles actions. Ce que nous appelons l’art, l’expression artistique, est un enjeu de plus en plus central pour cette partie de la jeunesse qui veut vivre différemment. La musique, le théâtre, la poésie, le cinéma, mais aussi des formes nouvelles telles que le happening, le street art, le slam émergent y compris dans les mouvements sociaux. N’est-il pas nécessaire d’arrêter de séparer “l’art” de la “politique” ?

3 / Les structures

Toutes les formes d’organisation construites sur le modèle représentatif hiérarchique ont perdu de leur prestige et de leur pertinence, bien que restant le modèle dominant du fait de leur importance historique et de leur structuration en référence à la loi d’association 1901.

S’y exprime encore fortement l’ascension possible de ceux qui veulent exercer le pouvoir, tandis que pèsent sur elles des contraintes juridico-administratives de plus en plus dissuasives pour les bénévoles.

Les formes plus souples ne trouvent pas leur place. Ne faut-il donc pas repenser le cadre juridique d’association depuis 1901 ? Le Réseau n’a-t-il pas, lui aussi, comme la plupart des structures, un fonctionnement trop rigide ? Si c’est le cas, il doit être repensé. N’est-il pas nécessaire de nous poser la question d’une adhésion simplifiée au Réseau de manière à rapprocher celui-ci d’un mouvement non hiérarchique ? Par exemple tout groupe qui soutiendrait le Réseau en proposant une action artistique (musique, théâtre...) pourrait automatiquement devenir adhérent (sous réserve qu’il souscrive à la Charte). On aurait donc non seulement des groupes antinucléaires mais aussi des groupes artistiques engagés dans la lutte antinucléaire.

4 / L’idéologie

Plutôt qu’être seulement “anti”, il nous faut aussi être “pour” ! D’où la force des alternatives. N’est- il pas nécessaire de mieux intégrer les alternatives à l’intérieur de notre combat “contre” ? Le “pour” s’ajouterait ainsi au “contre”. Le discours sur la catastrophe (légitime) doit pouvoir s’associer à l’espoir et à la joie, tout aussi légitimes.

5 / Quoi d’autre encore ?

La fête comme acte politique. De tout temps, les arts, la littérature, la musique, le théâtre ont accompagné les mouvements d’émancipation. La “société du spectacle” a rompu ce lien ancestral en mettant “le spectacle” du côté du divertissement, de la technologie et de la marchandise. Les artistes eux-mêmes sont piégés par cette récupération. Ils ne conçoivent plus, par exemple, de jouer sans sono. Pourtant, les chorales “révolutionnaires”, les fanfares, les théâtres de rue, le cirque, le slam... sont des alternatives qui puisent leurs forces dans la tradition des luttes populaires. Depuis des temps immémoriaux, la fête est le ferment de la culture populaire, nous devons proposer de plus en plus de fêtes alternatives. Des fêtes pour la joie et la vie et contre le nucléaire. Cela nous paraît au moins aussi important que d’organiser des AG. Par exemple, organiser de grands festivals contre le nucléaire et pour la vie avec des concerts, des spectacles...

Le débat est lancé. Nous espérons que vous serez nombreux à réagir et à vous exprimer sur le site et dans les réunions régionales. Les esquisses de problématiques présentées ici ne doivent pas être prises comme des positions arrêtées mais comme des débuts de réflexion que l’on peut prolonger, compléter, contredire... Nous avons un objectif unique : rendre la lutte contre l’industrie nucléaire, civile et militaire, plus efficace. Pour cela, un mouvement antinucléaire plus fort est une condition essentielle, nous pourrons ainsi donner à la jeunesse des perspectives, et l’espoir d’une vie nouvelle pour la planète.

Vive le congrès !

Toutes les informations à propos du Congrès sont sur le site : www.sortirdunucleaire.org/congres contact : contact-congres@sortirdunucleaire.org Signature collective

Cette présentation est issu des textes publiés dans le numéro 3 d’Atomes crochus, auquel ont participé : [Par ordre alphabétique, Guillaume Blavette, Michel Boccara, Mimosa Bohn, Bruno Boussagol, Pierric Duflos (élu au CA), Jean-Louis Gaby (élu au CA), Marie-Christine Gamberini, Philippe Guiter (élu au CA), Claude Kaiser, Michel Lablanquie (élu au CA), Didier Latorre (élu au CA), Stéphane Lhomme, Dominique Malvaud (élu au CA), Jean-Marie Matagne, Pierre Péguin, Damien Renault et Laura Ruiz (élue au CA)].

La signature de ce texte est collective, tout comme pour le n°3 d’Atomes crochus, ce qui ne signifie pas que chaque auteur est d’accord avec l’ensemble des textes, loin s’en faut. Nous sommes dans un débat contradictoire, et cela est de bon augure pour le congrès. Les contributeurs mettent ainsi l’accent sur les textes et non sur les individus. Ces textes ne représentent donc pas la position du Réseau mais sont un aperçu des débats qui le traversent et ne demandent qu’à se tenir.

Ces quatre pages ont été réalisées collectivement, avec le comité de rédaction d’Atomes crochus, au sein duquel ont participé bon nombre d’administrateurs, mais aussi de militants. On notera, parmi les signataires collectifs, à la fin de cette présentation, le nom de certains militants qui ont été récemment réhabilités avec la résolution de la crise.



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