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Pétition contre l’exposition des enfants à la radioactivité

Réouverture des écoles irradiées de Fukushima, le Japon s’émeut

Article publié le 11 mai 2011



Vendredi 6 mai 2011, Par Cécile Asanuma-Brice

Le 6 avril 2011, moins d’un mois après la triple catastrophe subie par la côte Nord-Est de la principale île nippone du Honshu (séisme de magnitude 9, tsunami, explosion de la centrale nucléaire de Fukushima), alors que d’autres séismes viennent s’ajouter aux répliques, et que la nature ne cesse de s’acharner autour des bâtiments de la centrale, le gouvernement japonais décide de rouvrir les écoles du département de Fukushima. Le Nikkei Weekly dans un article daté du 11 avril consacré aux relations américano-japonaises, laisse apparaître un petit encadré dans lequel l’on peut voir une photo d’enfants de primaire alignés dans une classe1. Les sous-titres expliquent aux lecteurs que la rentrée scolaire s’est déroulée normalement dans cette petite école nommée Sahara à quelques 50km des réacteurs endommagés. L’école accueillerait 85 nouveaux élèves transférés des régions victimes du tsunami et du tremblement de terre.

“L’invisibilité de l’ennemi” a permis la réouverture des écoles.

Le même jour, un article du Tôyôkeizai2 reprend la nouvelle de façon plus détaillée. Des mesures effectuées par le laboratoire de recherches nucléaires du Professeur Imanaka Tetsuji de l’Université de Kyôto3 concernant la contamination par radioactivité de l’air et du sol dans le village de Iitate à 40 km au nord-ouest de la centrale de Fukushima les 28 et 29 mars, ont révélé un taux de 95 millisievert de radioactivité cumulés depuis le 15 mars4. Dans ce village, des mesures effectuées à divers endroits attestent de taux dépassant les 30 millisievert cumulés. Alors que des écoles affichant un taux de radioactivité parfois supérieur à celui enregistré dans la zone d’évacuation des 30 km sont ré-ouvertes, l’agence gouvernementale pour la sécurité nucléaire japonaise, demande à toutes personnes résidant dans les territoires dont les taux de radioactivité sont compris entre 10 et 50 millisievert de rester confinées, ou de se réfugier sur des terres plus saines. Au-delà de 50 millisievert, il est fortement recommandé à la population de se confiner dans une pièce de béton, ou de partir…

Des politiques sourdes aux mesures de la radioactivité.

Le 29 mars, la même équipe de recherche récidive sa prise de mesures en l’élargissant à 130 points du village. Les relevés obtenus ont mis à jour des taux dépassant parfois 10 millisievert par heure.
Par ailleurs, du 5 au 7 avril, le département de Fukushima, soucieux de savoir s’il pouvait procéder en temps et en heure à la rentrée des classes5, a effectué des mesures sur la totalité des établissements scolaires présents sur son territoire. Selon les résultats de l’enquête menée auprès des écoles primaires et collèges, 75,9% enregistraient un taux dépassant la norme acceptable établie par la constitution, et 20,4% entraient dans la catégorie nécessitant un « traitement particulier pour risque d’irradiation ». Malgré une mise en ligne publique de ces données par le ministère de l’éducation, données qui révèlent notamment un taux de 21 microsievert/heure à un mètre du sol et 30 microsievert/heure au sol dans l’école primaire de Tsushima (commune de Namie), la rentrée des classes a eu lieu comme à l’accoutumée du 5 au 7 avril dans la totalité des écoles.

Si les particules d’iode 131 comprises dans les projections du 15 et du 21 mars perdent de leur activité de moitié tous les 8 jours, les particules de césium 134 et 137 au nombre de respectivement 4597 becquerel/m3 et 5446 becquerel/m3 sur ce même site préserveront le même taux de radioactivité durant trente années.

Le seuil maximal recommandé pour « les personnes affectées à des travaux sous rayonnements ionisants » appliqué à des enfants

Les effets de la radioactivité étant plus sensibles chez l’enfant que chez l’adulte, et les sols des cours d’écoles étant recouvertes de sables volatiles facilement inhalables, le représentant du groupe de réflexion sur l’obsolescence des équipements de la centrale de Fukushima, M. Sakagami Takeshi, a demandé la révision de la décision de la réouverture des groupes scolaires, après consultation auprès des habitants.

Malgré les voix qui s’élèvent, non seulement les classes continuent leur activité, mais c’est cette fois au tour des garderies d’ouvrir leurs portes. Afin de se mettre en accord avec les règles de sécurité, les autorités décident de permettre le fonctionnement normal de tout établissement dont les taux n’excèderaient pas 3,8 microsievert par heure. Selon un document distribué aux familles, ces consignes auraient été recommandées par l’International Commission on Radiological Protection (ICRP), organisme selon lequel, dans la situation exceptionnelle présente, il serait envisageable de remonter « le taux de radiation acceptable par tout citoyen de 1 à 20 millisievert par an », soit « le seuil maximal recommandé ordinairement pour les personnes affectées à des travaux sous rayonnements ionisants » selon l’IRSN (Institut français de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire). Le ministère de l’éducation japonais a décidé d’appliquer cette recommandation. On peut s’interroger sur les effets sanitaires de cette décision concernant une population d’enfants dont l’âge s’échelonne de quelques mois à 15 ans.
Concernant 13 établissements qui enregistrent malgré tout un niveau supérieur à la nouvelle norme établie, le ministère de l’éducation japonais décide de limiter toute activité à l’extérieur des bâtiments à une heure par jour. Il est par ailleurs recommandé de se laver mains et visage lorsque l’on rentre dans les bâtiments, et d’encourager aux gargarismes en cas de contact buccal avec du sable et/ou de la terre. Le nombre de nourrissons et d’enfants accueillis par ces structures très fortement radioactives s’élèvent à 35606.
Le ministère de l’éducation précise que ces 13 écoles feront l’objet de prises de mesures de la radioactivité une fois par semaine, et préconise un retour au fonctionnement habituel dans le cas où les taux enregistrés se situeraient en deçà du seuil de 3.8 microsievert/h deux fois consécutives.

Selon un reportage de la NHK du 26 avril, les écoles (collèges, primaires et maternelles) dont l’activité extérieures est limitée à une heure journalière prévoient de retirer une couche superficielle de 1 à 2 cm de terre recouvrant 28 cours extérieures afin de pouvoir reprendre un rythme normal.

Le conseiller du ministère de l’intérieur, originairement Professeur spécialisé dans le nucléaire à l’université de Tôkyô, M. Toshisô Kosako, a donné sa démission le 29 avril. Le professeur motive sa décision dans une lettre rendue publique par la NHK le 30 du même mois. Depuis l’explosion de la centrale de Fukushima, le gouvernement n’aurait pas tenu compte des demandes de mesures à prendre émises par la commision de sécurité nucléaire pour préserver la population contre la radioactivité présente sur le territoire. M. Kosako, estime que la politique à cet égard est toujours insuffisante et met en danger la population. Il réclame une coopération internationale d’urgence sur la question7.

Les familles de Fukushima, inquiètent du sort de leurs enfants, soutenues par diverses associations japonaises se mobilisent pour une meilleure gestion de la radioactivité dans l’espoir d’une révision des décisions de réouverture prises par le gouvernement nippon.
Asanuma-Brice Cécile (Tokyo)

  1. Ndr : voir à ce propos, Le bleu du ciel à Fukushima []
  2. Tôyôkeizai 11 /04/2011 []
  3. Nuclear safety research Group. []
  4. Arrondissement de Kyokuda. []
  5. La rentrée des classes a lieu début avril au Japon. []
  6. Selon un article du journal Mainichi daté du 20/04/2011. []
  7. Voir le texte complet : https://www9.nhk.or.jp/kabun-blog/200/80519.html []

Vendredi 6 mai 2011, Par Cécile Asanuma-Brice

Le 6 avril 2011, moins d’un mois après la triple catastrophe subie par la côte Nord-Est de la principale île nippone du Honshu (séisme de magnitude 9, tsunami, explosion de la centrale nucléaire de Fukushima), alors que d’autres séismes viennent s’ajouter aux répliques, et que la nature ne cesse de s’acharner autour des bâtiments de la centrale, le gouvernement japonais décide de rouvrir les écoles du département de Fukushima. Le Nikkei Weekly dans un article daté du 11 avril consacré aux relations américano-japonaises, laisse apparaître un petit encadré dans lequel l’on peut voir une photo d’enfants de primaire alignés dans une classe1. Les sous-titres expliquent aux lecteurs que la rentrée scolaire s’est déroulée normalement dans cette petite école nommée Sahara à quelques 50km des réacteurs endommagés. L’école accueillerait 85 nouveaux élèves transférés des régions victimes du tsunami et du tremblement de terre.

“L’invisibilité de l’ennemi” a permis la réouverture des écoles.

Le même jour, un article du Tôyôkeizai2 reprend la nouvelle de façon plus détaillée. Des mesures effectuées par le laboratoire de recherches nucléaires du Professeur Imanaka Tetsuji de l’Université de Kyôto3 concernant la contamination par radioactivité de l’air et du sol dans le village de Iitate à 40 km au nord-ouest de la centrale de Fukushima les 28 et 29 mars, ont révélé un taux de 95 millisievert de radioactivité cumulés depuis le 15 mars4. Dans ce village, des mesures effectuées à divers endroits attestent de taux dépassant les 30 millisievert cumulés. Alors que des écoles affichant un taux de radioactivité parfois supérieur à celui enregistré dans la zone d’évacuation des 30 km sont ré-ouvertes, l’agence gouvernementale pour la sécurité nucléaire japonaise, demande à toutes personnes résidant dans les territoires dont les taux de radioactivité sont compris entre 10 et 50 millisievert de rester confinées, ou de se réfugier sur des terres plus saines. Au-delà de 50 millisievert, il est fortement recommandé à la population de se confiner dans une pièce de béton, ou de partir…

Des politiques sourdes aux mesures de la radioactivité.

Le 29 mars, la même équipe de recherche récidive sa prise de mesures en l’élargissant à 130 points du village. Les relevés obtenus ont mis à jour des taux dépassant parfois 10 millisievert par heure.
Par ailleurs, du 5 au 7 avril, le département de Fukushima, soucieux de savoir s’il pouvait procéder en temps et en heure à la rentrée des classes5, a effectué des mesures sur la totalité des établissements scolaires présents sur son territoire. Selon les résultats de l’enquête menée auprès des écoles primaires et collèges, 75,9% enregistraient un taux dépassant la norme acceptable établie par la constitution, et 20,4% entraient dans la catégorie nécessitant un « traitement particulier pour risque d’irradiation ». Malgré une mise en ligne publique de ces données par le ministère de l’éducation, données qui révèlent notamment un taux de 21 microsievert/heure à un mètre du sol et 30 microsievert/heure au sol dans l’école primaire de Tsushima (commune de Namie), la rentrée des classes a eu lieu comme à l’accoutumée du 5 au 7 avril dans la totalité des écoles.

Si les particules d’iode 131 comprises dans les projections du 15 et du 21 mars perdent de leur activité de moitié tous les 8 jours, les particules de césium 134 et 137 au nombre de respectivement 4597 becquerel/m3 et 5446 becquerel/m3 sur ce même site préserveront le même taux de radioactivité durant trente années.

Le seuil maximal recommandé pour « les personnes affectées à des travaux sous rayonnements ionisants » appliqué à des enfants

Les effets de la radioactivité étant plus sensibles chez l’enfant que chez l’adulte, et les sols des cours d’écoles étant recouvertes de sables volatiles facilement inhalables, le représentant du groupe de réflexion sur l’obsolescence des équipements de la centrale de Fukushima, M. Sakagami Takeshi, a demandé la révision de la décision de la réouverture des groupes scolaires, après consultation auprès des habitants.

Malgré les voix qui s’élèvent, non seulement les classes continuent leur activité, mais c’est cette fois au tour des garderies d’ouvrir leurs portes. Afin de se mettre en accord avec les règles de sécurité, les autorités décident de permettre le fonctionnement normal de tout établissement dont les taux n’excèderaient pas 3,8 microsievert par heure. Selon un document distribué aux familles, ces consignes auraient été recommandées par l’International Commission on Radiological Protection (ICRP), organisme selon lequel, dans la situation exceptionnelle présente, il serait envisageable de remonter « le taux de radiation acceptable par tout citoyen de 1 à 20 millisievert par an », soit « le seuil maximal recommandé ordinairement pour les personnes affectées à des travaux sous rayonnements ionisants » selon l’IRSN (Institut français de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire). Le ministère de l’éducation japonais a décidé d’appliquer cette recommandation. On peut s’interroger sur les effets sanitaires de cette décision concernant une population d’enfants dont l’âge s’échelonne de quelques mois à 15 ans.
Concernant 13 établissements qui enregistrent malgré tout un niveau supérieur à la nouvelle norme établie, le ministère de l’éducation japonais décide de limiter toute activité à l’extérieur des bâtiments à une heure par jour. Il est par ailleurs recommandé de se laver mains et visage lorsque l’on rentre dans les bâtiments, et d’encourager aux gargarismes en cas de contact buccal avec du sable et/ou de la terre. Le nombre de nourrissons et d’enfants accueillis par ces structures très fortement radioactives s’élèvent à 35606.
Le ministère de l’éducation précise que ces 13 écoles feront l’objet de prises de mesures de la radioactivité une fois par semaine, et préconise un retour au fonctionnement habituel dans le cas où les taux enregistrés se situeraient en deçà du seuil de 3.8 microsievert/h deux fois consécutives.

Selon un reportage de la NHK du 26 avril, les écoles (collèges, primaires et maternelles) dont l’activité extérieures est limitée à une heure journalière prévoient de retirer une couche superficielle de 1 à 2 cm de terre recouvrant 28 cours extérieures afin de pouvoir reprendre un rythme normal.

Le conseiller du ministère de l’intérieur, originairement Professeur spécialisé dans le nucléaire à l’université de Tôkyô, M. Toshisô Kosako, a donné sa démission le 29 avril. Le professeur motive sa décision dans une lettre rendue publique par la NHK le 30 du même mois. Depuis l’explosion de la centrale de Fukushima, le gouvernement n’aurait pas tenu compte des demandes de mesures à prendre émises par la commision de sécurité nucléaire pour préserver la population contre la radioactivité présente sur le territoire. M. Kosako, estime que la politique à cet égard est toujours insuffisante et met en danger la population. Il réclame une coopération internationale d’urgence sur la question7.

Les familles de Fukushima, inquiètent du sort de leurs enfants, soutenues par diverses associations japonaises se mobilisent pour une meilleure gestion de la radioactivité dans l’espoir d’une révision des décisions de réouverture prises par le gouvernement nippon.
Asanuma-Brice Cécile (Tokyo)

  1. Ndr : voir à ce propos, Le bleu du ciel à Fukushima []
  2. Tôyôkeizai 11 /04/2011 []
  3. Nuclear safety research Group. []
  4. Arrondissement de Kyokuda. []
  5. La rentrée des classes a lieu début avril au Japon. []
  6. Selon un article du journal Mainichi daté du 20/04/2011. []
  7. Voir le texte complet : https://www9.nhk.or.jp/kabun-blog/200/80519.html []


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