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Sortir du nucléaire n°70



Août 2016

L’avenir du froid solaire thermique

Article paru dans la revue Sortir du nucléaire n°70 - Août 2016

 Energies renouvelables


La demande croissante dans les domaines de la réfrigération et de la climatisation a conduit à une augmentation dramatique des pics de la demande d’électricité dans de nombreux pays. Cette évolution s’accompagne de l’augmentation de son coût et de pannes partielles en été, qui ont été imputées au grand nombre de systèmes de climatisation classiques fonctionnant à l’électricité. La prolifération des compresseurs de réfrigération (plus de 100 millions d’unités vendues en 2014) va de pair avec l’augmentation des rejets de gaz à effet de serre, qu’il s’agisse de fuites directes de frigorigène à haut pouvoir de réchauffement (PRG) tel que les HFC ou de rejets indirects liés à la consommation d’électricité produite dans des centrales fonctionnant aux combustibles fossiles.

Pour contrer cette tendance, le plus simple consiste à utiliser la même énergie pour la production de froid que celle qui en suscite la demande, à savoir l’énergie solaire.



L’avantage clair du froid solaire (FS) réside dans la coïncidence élevée du rayonnement solaire et de la demande en froid (c’est-à-dire que l’utilisation de la climatisation culmine quand le rayonnement solaire est au maximum). Cette coïncidence réduit la nécessité de stocker l’énergie, la production de froid par l’énergie solaire étant utilisée presque immédiatement.

Alors que de nombreux professionnels, tels que les architectes et les installateurs, envisagent d’emblée et a juste titre de coupler des systèmes photovoltaïques à des appareils de refroidissement à compression de vapeur classiques, l’alternative, à savoir les systèmes solaires thermiques combinés à des refroidisseurs thermiques à sorption, est aujourd’hui une technologie commercialement viable.

Technologie et industrie : état des lieux

L’état de la technologie du froid solaire (FS) dont il est question ci-dessous tient compte de la maturité technique, des performances énergétiques et des coûts, ainsi que de l’état du déploiement commercial.

Maturité technique

Les éléments essentiels des systèmes FS sont le sous- système capteur solaire thermique et le sous-système de réfrigération thermique. Ils sont complétés par un dissipateur thermique, qui rejette la chaleur excédentaire provenant du climatiseur thermique et d’un système de stockage thermique (chaud, froid) pour gérer la disponibilité intermittente de la ressource solaire.

À Banyuls, depuis 1990, les caves à vin du GICB sont rafraîchies par une installation de froid solaire thermique. Les capteurs solaires et les systèmes de capteurs solaires sont répandus et techniquement très au point. Pour les systèmes FS fonctionnant à moins de 110°C, il existe bon nombre de capteurs solaires économiques et robustes. Au cours des dernières années, on a développé de nouveaux capteurs solaires, plus sûrs et d’un meilleur rendement. Parmi les capteurs solaires fonctionnant à l’éau, on peut citer les systèmes autovidangeables et à recirculation nocturne.

Les systèmes conçus pour les températures plus élevées, qui sont nécessaires pour les climatiseurs par absorption à plusieurs étages et les applications à sauts de température élevés, sont encore peu répandus. Cependant, un nombre sans cesse croissant de fabricants arrivent sur le marché avec de nouveaux produits, les plus courants reposant sur un suivi du rayonnement solaire sur un seul axe avec concentration optique.

Vue du champ de capteurs et de la tour de refroidissement de l’installation de climatisation solaire qui rafraîchit les salles de cours de l’Université de la Réunion à Saint-Pierre, en fonctionnement depuis 2007.

Les climatiseurs thermiques de grande puissance et les cycles de sorption ouverts existent depuis de nombreuses décennies, et sont bien implantés sur le marché. Aujourd’hui, ils exploitent principalement la chaleur excédentaire (par exemple, la chaleur provenant d’un système de cogénération ou rejetée par l’industrie), ou fonctionnent directement au gaz. En règle générale, ils sont conçus pour une climatisation minimum, mais pas spécialement optimisés pour une énergie solaire intermittente. Un système bien conçu doit permettre un flux thermique relativement constant vers le refroidisseur.

Les progrès accomplis depuis une décennie dans le domaine des climatiseurs thermiques de faible capacité (jusqu’à environ 35 kW) et du FS ont largement contribué à stimuler cette évolution. Aujourd’hui, les nombreux systèmes de divers fabricants commercialisés ont atteint un niveau de maturité technique considérable. Cependant, la plupart restent de petites startups. Certaines ont toutefois acquis une capacité de production industrielle.

L’installation d’un système de stockage tampon est assez courante avec les systèmes FS. Cela va des petits stockages conçus pour les fluctuations à court terme aux systèmes de grande capacité servant à stocker l’énergie solaire plusieurs heures (par exemple, de midi à la fin de l’après-midi). Le stockage peut être appliqué du côté chaud et/ou froid, le système étant généralement rempli d’eau. Dans quelques cas, on a stocké de la glace côté froid pour accroître la densité de stockage (dans les applications nécessitant une réfrigération à moins de 0°C). Quant aux autres matériaux à changement de phase, ils sont encore peu répandus dans le domaine du froid solaire.

Ci-contre : Vue du champ de capteurs de l’installation de climatisation solaire de l’arche Jacques Coeur à Montpellier (34) en fonctionnement depuis 2013. Application froid solaire pour des bureaux et production d’eau chaude sanitaire pour des logements collectifs. Performance énergétique

Les systèmes de froid solaire ont démontré leur capacité à économiser l’énergie par rapport à la technologie conventionnelle. Les économies réalisées dépendent étroitement de la conception et du fonctionnement du système. Les facteurs-clés qui les déterminent sont 1) la partie d’origine solaire de la chaleur nécessaire pour actionner l’appareil de réfrigération thermique et 2) la demande totale d’électricité des composants auxiliaires, tels que les ventilateurs (par exemple, ceux de la tour de refroi- dissement) et les pompes des circuits hydrauliques.

Les principales conditions requises pour réaliser des économies d’énergie avec un système FS sont les suivantes :

  • La conception doit être la plus simple possible, afin d’éviter les risques d’erreur dans la mise en œuvre, l’utilisation et la maintenance.
  • Le dimensionnement doit être conçu et planifié pour définir la taille optimale des composants essentiels, et adapté au profil de charge réel, en incluant des stratégies pour une réfrigération efficace en l’absence de chaleur solaire.
  • Les éléments auxiliaires (pompes et ventilateurs) doivent avoir une efficacité énergétique élevée.
  • Une stratégie d’utilisation et de contrôle doit être mise au point pour assurer l’efficacité énergétique à charge partielle et à pleine charge.
  • Une phase de mise en service prudente du système est nécessaire pour s’assurer qu’il fonctionne comme prévu. Un programme de surveillance permanente (“mise en service continue”) est également utile pour obtenir durablement des performances maximales.

Viabilité économique et avantages environnementaux

À l’instar des autres systèmes reposant sur les énergies renouvelables, le coût initial (investissement englobant la planification, l’assemblage, la construction et la mise en service) des systèmes FS est nettement supérieur au coût des solutions standard alimentées par le réseau public. Le coût initial des installations FS est entre 2 et 5 fois supérieur à celui d’un système moderne conventionnel, selon les conditions locales, les exigences de construction, la taille du système et, bien entendu, la solution tech- nique retenue. Des études récentes ont montré que le coût initial des systèmes globaux était compris entre 2000 et 5000 € par kW de froid, voire plus dans certains cas particuliers. Cette large fourchette est due à la diversité de la taille des systèmes, des technologies employées, des domaines d’application et autres conditions aux limites.

On assiste depuis peu à l’apparition de kits de réfrigération (solaire), c’est-à-dire de solutions toutes prêtes comprenant les principaux composants d’un système et où ceux-ci sont bien intégrés les uns avec les autres. Ces kits sont mis au point principalement pour les petites capacités ne dépassant pas 35 kW. Les prix (hors coût d’installation et système de distribution dans le bâtiment) de ces solutions clés en main ont chuté, passant de quelque 6000 ¤ par kW en 2007 à environ 4500 € par kW en 2015.

L’économie réalisée pendant la période d’exploitation dépend très largement des conditions aux limites. Celles dont le délai d’amortissement est le plus court sont les suivantes :

  • un rayonnement solaire annuel élevé assurant un rendement élevé du système solaire ;
  • une durée de production de froid longue et, en conséquence, nombre élevé d’heures d’utilisation du système ;
  • la présence d’autres charges thermiques, telles que l’eau chaude sanitaire et/ou de chauffage industriel, qui renforcent l’importance du système solaire, en particulier à la saison inter- médiaire, où les charges de chauffage et de réfri- gération des bâtiments sont réduites voire nulles ;
  • un prix élevé de l’énergie conventionnelle, qui rend une alternative solaire plus compétitive.

Quant au coût du cycle de vie complet d’un système FS (hors mesures incitatives ou financements) comparé à une solution standard, la situation apparaît beaucoup plus avantageuse que dans le cas des coûts. Selon les conditions locales, les systèmes FS sont bien souvent amortis pendant leur durée de vie. Dans des conditions prometteuses, il est possible de miser sur un amortissement en dix ans, voire moins. Cependant, les sociétés commerciales tablent souvent sur un amortissement en cinq ans ou moins pour justifier un investissement. Des délais d’amor- tissement aussi courts ne sont toutefois possibles que dans des conditions très spéciales. Les applications FS ont quelques autres avantages qu’il est souvent difficile de traduire en termes économiques, mais que les décideurs doivent prendre en considération :

  • Les systèmes FS peuvent contribuer à réduire le coût de l’infrastructure de distribution de l’électricité (et, en conséquence, ses tarifs) dans les régions où une grande part du pic de la consommation enregistré sur le réseau est due à la climatisation conventionnelle. De même, ils peuvent contribuer à stabiliser le réseau de distribution dans les régions où l’infrastructure est insuffisante pour répondre à la demande.
  • L’application de systèmes FS peut permettre des économies d’énergie (primaire) et, en consé- quence, contribuer à réduire la dépendance aux combustibles fossiles, dont les réserves ne sont pas inépuisables et qui doivent souvent être importés.
  • De même, la mise en œuvre des systèmes FS réduira les rejets de CO2, contribuant ainsi à réduire les effets du dérèglement climatique et connexes. Au-delà de l’indicateur CO2, si l’on considère les pays dont une large part de l’électricité est d’origine nucléaire – comme la France -, les systèmes FS permettent de réduire l’utilisation d’électricité responsable de la production de déchets hautement radioactifs.
  • Les systèmes FS reposant sur des cycles de réfri- gération thermiques présentent d’autres avan- tages environnementaux, car ils emploient généralement des frigorigènes sans risque pour la couche d’ozone, et dont l’incidence sur le réchauffement global est nulle ou négligeable.
  • Les systèmes FS peuvent également être utilisés dans toutes les applications de chauffage d’un bâtiment ou d’un secteur d’activité. Un vaste champ de capteurs fournit également de la chaleur pour d’autres usages que la réfrigération, évitant de consommer des combustibles (ou de l’électricité) pour le chauffage.

Obstacles actuels

Actuellement, les principales insuffisances des systèmes FS, du point de vue technique, résident dans leur niveau d’intégration. Nombre de systèmes ne permettent pas de réaliser les économies d’énergie escomptées à cause d’une conception insuffisamment poussée et d’une gestion de l’énergie imparfaite, entraînant une consommation globale d’électricité élevée par les composants auxiliaires. C’est plus particulièrement au niveau du sous-système de rejet de la chaleur que des erreurs ont été faites dans le passé en lui accordant une attention insuffisante. L’autre erreur est que de nombreux systèmes étaient beaucoup trop complexes. En conséquence, ils ne permettaient pas un contrôle optimal et se montraient très exigeants en termes de maintenance.

La seconde insuffisance principale des systèmes FS est d’ordre économique. Le coût initial des installations RAS est entre 2 et 5 fois supérieur à celui d’un système conventionnel réalisé selon l’état de l’art. Il est donc impératif de le réduire. Pour surmonter cet obstacle, les deux principales possibilités consistent à 1) se concentrer sur des systèmes de taille moyenne à grande, qui permettent des économies d’échelle, 2) standardiser le plus possible les systèmes afin de faciliter les interventions sur site et de réduire les risques. Il conviendrait également de se focaliser sur des stratégies offrant un moyen d’internaliser les coûts d’infrastructure électrique dans le prix d’achat initial des systèmes de réfrigération solaire.

Daniel Mugnier Vice-président du programme Solar Heating & Cooling de l’Agence Internationale de l’Énergie

L’avantage clair du froid solaire (FS) réside dans la coïncidence élevée du rayonnement solaire et de la demande en froid (c’est-à-dire que l’utilisation de la climatisation culmine quand le rayonnement solaire est au maximum). Cette coïncidence réduit la nécessité de stocker l’énergie, la production de froid par l’énergie solaire étant utilisée presque immédiatement.

Alors que de nombreux professionnels, tels que les architectes et les installateurs, envisagent d’emblée et a juste titre de coupler des systèmes photovoltaïques à des appareils de refroidissement à compression de vapeur classiques, l’alternative, à savoir les systèmes solaires thermiques combinés à des refroidisseurs thermiques à sorption, est aujourd’hui une technologie commercialement viable.

Technologie et industrie : état des lieux

L’état de la technologie du froid solaire (FS) dont il est question ci-dessous tient compte de la maturité technique, des performances énergétiques et des coûts, ainsi que de l’état du déploiement commercial.

Maturité technique

Les éléments essentiels des systèmes FS sont le sous- système capteur solaire thermique et le sous-système de réfrigération thermique. Ils sont complétés par un dissipateur thermique, qui rejette la chaleur excédentaire provenant du climatiseur thermique et d’un système de stockage thermique (chaud, froid) pour gérer la disponibilité intermittente de la ressource solaire.

À Banyuls, depuis 1990, les caves à vin du GICB sont rafraîchies par une installation de froid solaire thermique. Les capteurs solaires et les systèmes de capteurs solaires sont répandus et techniquement très au point. Pour les systèmes FS fonctionnant à moins de 110°C, il existe bon nombre de capteurs solaires économiques et robustes. Au cours des dernières années, on a développé de nouveaux capteurs solaires, plus sûrs et d’un meilleur rendement. Parmi les capteurs solaires fonctionnant à l’éau, on peut citer les systèmes autovidangeables et à recirculation nocturne.

Les systèmes conçus pour les températures plus élevées, qui sont nécessaires pour les climatiseurs par absorption à plusieurs étages et les applications à sauts de température élevés, sont encore peu répandus. Cependant, un nombre sans cesse croissant de fabricants arrivent sur le marché avec de nouveaux produits, les plus courants reposant sur un suivi du rayonnement solaire sur un seul axe avec concentration optique.

Vue du champ de capteurs et de la tour de refroidissement de l’installation de climatisation solaire qui rafraîchit les salles de cours de l’Université de la Réunion à Saint-Pierre, en fonctionnement depuis 2007.

Les climatiseurs thermiques de grande puissance et les cycles de sorption ouverts existent depuis de nombreuses décennies, et sont bien implantés sur le marché. Aujourd’hui, ils exploitent principalement la chaleur excédentaire (par exemple, la chaleur provenant d’un système de cogénération ou rejetée par l’industrie), ou fonctionnent directement au gaz. En règle générale, ils sont conçus pour une climatisation minimum, mais pas spécialement optimisés pour une énergie solaire intermittente. Un système bien conçu doit permettre un flux thermique relativement constant vers le refroidisseur.

Les progrès accomplis depuis une décennie dans le domaine des climatiseurs thermiques de faible capacité (jusqu’à environ 35 kW) et du FS ont largement contribué à stimuler cette évolution. Aujourd’hui, les nombreux systèmes de divers fabricants commercialisés ont atteint un niveau de maturité technique considérable. Cependant, la plupart restent de petites startups. Certaines ont toutefois acquis une capacité de production industrielle.

L’installation d’un système de stockage tampon est assez courante avec les systèmes FS. Cela va des petits stockages conçus pour les fluctuations à court terme aux systèmes de grande capacité servant à stocker l’énergie solaire plusieurs heures (par exemple, de midi à la fin de l’après-midi). Le stockage peut être appliqué du côté chaud et/ou froid, le système étant généralement rempli d’eau. Dans quelques cas, on a stocké de la glace côté froid pour accroître la densité de stockage (dans les applications nécessitant une réfrigération à moins de 0°C). Quant aux autres matériaux à changement de phase, ils sont encore peu répandus dans le domaine du froid solaire.

Ci-contre : Vue du champ de capteurs de l’installation de climatisation solaire de l’arche Jacques Coeur à Montpellier (34) en fonctionnement depuis 2013. Application froid solaire pour des bureaux et production d’eau chaude sanitaire pour des logements collectifs. Performance énergétique

Les systèmes de froid solaire ont démontré leur capacité à économiser l’énergie par rapport à la technologie conventionnelle. Les économies réalisées dépendent étroitement de la conception et du fonctionnement du système. Les facteurs-clés qui les déterminent sont 1) la partie d’origine solaire de la chaleur nécessaire pour actionner l’appareil de réfrigération thermique et 2) la demande totale d’électricité des composants auxiliaires, tels que les ventilateurs (par exemple, ceux de la tour de refroi- dissement) et les pompes des circuits hydrauliques.

Les principales conditions requises pour réaliser des économies d’énergie avec un système FS sont les suivantes :

  • La conception doit être la plus simple possible, afin d’éviter les risques d’erreur dans la mise en œuvre, l’utilisation et la maintenance.
  • Le dimensionnement doit être conçu et planifié pour définir la taille optimale des composants essentiels, et adapté au profil de charge réel, en incluant des stratégies pour une réfrigération efficace en l’absence de chaleur solaire.
  • Les éléments auxiliaires (pompes et ventilateurs) doivent avoir une efficacité énergétique élevée.
  • Une stratégie d’utilisation et de contrôle doit être mise au point pour assurer l’efficacité énergétique à charge partielle et à pleine charge.
  • Une phase de mise en service prudente du système est nécessaire pour s’assurer qu’il fonctionne comme prévu. Un programme de surveillance permanente (“mise en service continue”) est également utile pour obtenir durablement des performances maximales.

Viabilité économique et avantages environnementaux

À l’instar des autres systèmes reposant sur les énergies renouvelables, le coût initial (investissement englobant la planification, l’assemblage, la construction et la mise en service) des systèmes FS est nettement supérieur au coût des solutions standard alimentées par le réseau public. Le coût initial des installations FS est entre 2 et 5 fois supérieur à celui d’un système moderne conventionnel, selon les conditions locales, les exigences de construction, la taille du système et, bien entendu, la solution tech- nique retenue. Des études récentes ont montré que le coût initial des systèmes globaux était compris entre 2000 et 5000 € par kW de froid, voire plus dans certains cas particuliers. Cette large fourchette est due à la diversité de la taille des systèmes, des technologies employées, des domaines d’application et autres conditions aux limites.

On assiste depuis peu à l’apparition de kits de réfrigération (solaire), c’est-à-dire de solutions toutes prêtes comprenant les principaux composants d’un système et où ceux-ci sont bien intégrés les uns avec les autres. Ces kits sont mis au point principalement pour les petites capacités ne dépassant pas 35 kW. Les prix (hors coût d’installation et système de distribution dans le bâtiment) de ces solutions clés en main ont chuté, passant de quelque 6000 ¤ par kW en 2007 à environ 4500 € par kW en 2015.

L’économie réalisée pendant la période d’exploitation dépend très largement des conditions aux limites. Celles dont le délai d’amortissement est le plus court sont les suivantes :

  • un rayonnement solaire annuel élevé assurant un rendement élevé du système solaire ;
  • une durée de production de froid longue et, en conséquence, nombre élevé d’heures d’utilisation du système ;
  • la présence d’autres charges thermiques, telles que l’eau chaude sanitaire et/ou de chauffage industriel, qui renforcent l’importance du système solaire, en particulier à la saison inter- médiaire, où les charges de chauffage et de réfri- gération des bâtiments sont réduites voire nulles ;
  • un prix élevé de l’énergie conventionnelle, qui rend une alternative solaire plus compétitive.

Quant au coût du cycle de vie complet d’un système FS (hors mesures incitatives ou financements) comparé à une solution standard, la situation apparaît beaucoup plus avantageuse que dans le cas des coûts. Selon les conditions locales, les systèmes FS sont bien souvent amortis pendant leur durée de vie. Dans des conditions prometteuses, il est possible de miser sur un amortissement en dix ans, voire moins. Cependant, les sociétés commerciales tablent souvent sur un amortissement en cinq ans ou moins pour justifier un investissement. Des délais d’amor- tissement aussi courts ne sont toutefois possibles que dans des conditions très spéciales. Les applications FS ont quelques autres avantages qu’il est souvent difficile de traduire en termes économiques, mais que les décideurs doivent prendre en considération :

  • Les systèmes FS peuvent contribuer à réduire le coût de l’infrastructure de distribution de l’électricité (et, en conséquence, ses tarifs) dans les régions où une grande part du pic de la consommation enregistré sur le réseau est due à la climatisation conventionnelle. De même, ils peuvent contribuer à stabiliser le réseau de distribution dans les régions où l’infrastructure est insuffisante pour répondre à la demande.
  • L’application de systèmes FS peut permettre des économies d’énergie (primaire) et, en consé- quence, contribuer à réduire la dépendance aux combustibles fossiles, dont les réserves ne sont pas inépuisables et qui doivent souvent être importés.
  • De même, la mise en œuvre des systèmes FS réduira les rejets de CO2, contribuant ainsi à réduire les effets du dérèglement climatique et connexes. Au-delà de l’indicateur CO2, si l’on considère les pays dont une large part de l’électricité est d’origine nucléaire – comme la France -, les systèmes FS permettent de réduire l’utilisation d’électricité responsable de la production de déchets hautement radioactifs.
  • Les systèmes FS reposant sur des cycles de réfri- gération thermiques présentent d’autres avan- tages environnementaux, car ils emploient généralement des frigorigènes sans risque pour la couche d’ozone, et dont l’incidence sur le réchauffement global est nulle ou négligeable.
  • Les systèmes FS peuvent également être utilisés dans toutes les applications de chauffage d’un bâtiment ou d’un secteur d’activité. Un vaste champ de capteurs fournit également de la chaleur pour d’autres usages que la réfrigération, évitant de consommer des combustibles (ou de l’électricité) pour le chauffage.

Obstacles actuels

Actuellement, les principales insuffisances des systèmes FS, du point de vue technique, résident dans leur niveau d’intégration. Nombre de systèmes ne permettent pas de réaliser les économies d’énergie escomptées à cause d’une conception insuffisamment poussée et d’une gestion de l’énergie imparfaite, entraînant une consommation globale d’électricité élevée par les composants auxiliaires. C’est plus particulièrement au niveau du sous-système de rejet de la chaleur que des erreurs ont été faites dans le passé en lui accordant une attention insuffisante. L’autre erreur est que de nombreux systèmes étaient beaucoup trop complexes. En conséquence, ils ne permettaient pas un contrôle optimal et se montraient très exigeants en termes de maintenance.

La seconde insuffisance principale des systèmes FS est d’ordre économique. Le coût initial des installations RAS est entre 2 et 5 fois supérieur à celui d’un système conventionnel réalisé selon l’état de l’art. Il est donc impératif de le réduire. Pour surmonter cet obstacle, les deux principales possibilités consistent à 1) se concentrer sur des systèmes de taille moyenne à grande, qui permettent des économies d’échelle, 2) standardiser le plus possible les systèmes afin de faciliter les interventions sur site et de réduire les risques. Il conviendrait également de se focaliser sur des stratégies offrant un moyen d’internaliser les coûts d’infrastructure électrique dans le prix d’achat initial des systèmes de réfrigération solaire.

Daniel Mugnier Vice-président du programme Solar Heating & Cooling de l’Agence Internationale de l’Énergie



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