1er juin 2021
À Paluel, à Penly et aussi à Flamanville (Normandie), du cobalt 60 a été retrouvé dans les boues des stations d’épuration. Ces stations ne sont pas censées traiter quoique ce soit de radioactif, uniquement des eaux usées classiques.
EDF a expédié ces boues contaminées durant plusieurs années vers des filières conventionnelles, alors qu’elles auraient dû être traitées comme des déchets nucléaires. L’exploitant nucléaire n’a-t-il pas fait les contrôles préalables nécessaires ? Ou a-t-il décidé d’expédier quand même ces boues qu’il savait radioactives dans une filière qui coûte beaucoup moins chère ?
Le cobalt 60 (60Co) est un isotope radioactif du cobalt, un métal utilisé dans l’industrie. Le 60Co n’existe pas à l’état naturel, il est créé par les activités industrielles. Dans les centrales nucléaires, des phénomènes de corrosion-érosion entraînent des particules métalliques, qui deviennent radioactives lors de leur passage dans le flux neutronique du réacteur. Le cobalt 60 émet des rayons gamma, les plus pénétrants de tous, et reste radioactif plusieurs années (sa demie-vie est de plus de 5 ans) [1].
C’est par un discret communiqué qu’EDF annonce les faits début juin 2021. Des faits qui seraient connus de l’Autorité de sûreté nucléaire depuis plusieurs années déjà, puisque tout à commencé à Flamanville en 2019. Du cobalt 60 avait été détecté, en faible quantité, dans les boues de la station d’épuration du site [2]. Dans une installation nucléaire, la radioactivité doit pourtant être confinée, strictement limitée à quelques circuits. C’est un principe de base, plusieurs barrières de confinement sont censées éviter toute dispersion de radionucléides dans l’environnement. Comment du cobalt 60 peut-il se retrouver dans les résidus du traitement des eaux usées par des activités non nucléaires ? Car les stations d’épuration des sites nucléaires ne traitent pas d’effluents radioactifs, uniquement les eaux usées par des activités "classiques".
Détecté en 2019 à Flamanville dans les boues de la station d’épuration, du colbalt 60 a aussi été retrouvé dans les boues des stations d’épurations des centrales de Paluel et de Penly (toutes deux en Normandie) en 2020. Pourquoi pas avant ? Les contrôles et les seuils ont-ils évolués ? Quoiqu’il en soit, EDF et l’Autorité de sûreté semblent considérer que s’il y avait du cobalt60 dans les boues d’épuration en 2020, il y en avait aussi avant. Or les sites nucléaires ont évacué ces boues radioactives vers des filières de déchets conventionnels, à plusieurs reprises. En 2016 pour le site de Penly, en 2015, 2016 et 2018 pour Paluel, Quelle quantité au total de boues radioactive ont été envoyées dans des décharges ? Quelle masse de cobalt60 a été dispersée ? Là non plus, aucun élément précis : "quelques Bq par kg de boues" dira EDF.
On ne sait pas trop pourquoi EDF ne communique que le 1er juin 2021 sur ces faits. Déclarant bien tardivement un évènement significatif pour l’environnement, tout en précisant bien que "au regard des valeurs mesurées et des quantités de boues évacuées ", il n’y a aucun impact sur la santé ni sur l’environnement.
Alors qu’est-ce qui est significatif pour l’environnement selon EDF ? Pas le fait d’avoir rejeté du cobalt depuis des années sans le savoir. Pas non plus le fait que du cobalt 60 se retrouve dans des endroits où il n’est absolument pas censé être. Mais pour avoir envoyé, en filière conventionnelle, des déchets nucléaires. Car dès qu’il y a contamination d’une substance par de la radioactivité, c’est vers une filière spécifique que cette substance doit être orientée. Là encore pour éviter une dispersion dans l’environnement (rappelons-nous que le cobalt 60 émet des rayons puissants, pendant longtemps).
Quoiqu’il en soit, depuis mars 2021, les stations d’épuration des centrales de Penly et de Paluel sont classées (provisoirement précise EDF) en zone de production de déchets nucléaires. Ce qui va coûter plus cher. Espérons qu’EDF saura trouver d’où vient ce cobalt 60 et identifier les voies de contamination qui existent manifestement dans ses installations. Si de la radioactivité est retrouvée là où elle n’est pas censée se trouver, c’est qu’il y a une faille dans le confinement. Une faille qui n’est pas nouvelle. Et qui n’est pas un épiphénomène, puisque les boues de 3 sites sont marquées par ce radioélément.
Mais comment est-il possible qu’un exploitant nucléaire, même par simple précaution, n’ai pas mesuré les niveaux de radioactivité de ses boues d’épuration avant ? Que mesuraient les "contrôle ultimes" qu’EDF dit avoir fait avant d’expédier ses boues à l’extérieur du site ? L’exploitant aurait-il constaté la présence de cobalt 60 mais envoyé quand même sciemment les boues contaminées vers une filière non adaptée ? "Avant chacune de ces évacuations, les contrôles ultimes par spectrométrie ont permis de déterminer que les concentrations en radionucléides d’origine artificielle (Cobalt 60) étaient conformes aux procédures " mentionne EDF. Serait-ce que le cobalt était bien détecté, mais que les procédures d’EDF indiquaient de l’expédier quand même en filière de déchets conventionnelle, moins onéreuse ?
EDF annonce prévoir une nouvelle méthode de contrôle, incluant cette fois une spectrométrie gamma. Espérons que l’exploitant ne se contentera pas de jouer sur le niveau de détection et trouvera l’origine de ces contaminations. Car il y a clairement une perte de confinement de la radioactivité sur les sites nucléaires normands. Des circuits conventionnels contaminés par de la radioactivité, depuis des années....EDF ne contrôle manifestement pas si bien que ça ses centrales nucléaires, et la radioactivité n’y est pas si bien confinée. De fait, l’industriel ne protège pas si bien que ça l’environnement et les populations des conséquences ses activités.
L.B.
Publié le 01/06/2021
L’ASN a constaté qu’en 2019, la centrale nucléaire de Flamanville avait détecté la présence de très faibles traces de radionucléides d’origine artificielle (cobalt 60) dans des boues de stations d’épuration. L’ASN a fait des constats similaires en 2020 lors de contrôles croisés sur d’autres sites d’EDF (Paluel et Penly).
A Paluel, des évacuations de boues d’épuration vers des filières conventionnelles ont été réalisées en mai 2015, novembre 2016 et mai 2018.
Avant chacune de ces évacuations, les contrôles ultimes par spectrométrie réalisés par les sites ont permis de déterminer que les concentrations en radionucléides d’origine artificielle (Cobalt 60) étaient conformes aux procédures applicables. Ces concentrations étaient de l’ordre de quelques Bq par kg de boues, soit environ 100 fois inférieures à la valeur de concentration d’activité de 0,1 Bq par gramme définie par la directive Euratom 2013/59 pour ce radioélément. Les boues concernées ne justifient donc pas un contrôle de radioprotection, mais la réglementation française ne prévoit pas de seuil d’exemption pour les déchets, ce qui conduit, en France, à orienter en filière nucléaire tous les déchets présentant des radionucléides d’origine artificielle, y compris sous forme de traces.
Les stations d’épuration des centrales nucléaires sont initialement classées zone à déchets conventionnels. Sur la base du guide n° 23 de l’ASN datant de 2016 - Établissement et modification du plan de zonage déchets des installations nucléaires de base -, toute contamination par des substances radioactives de déchets provenant de zones à déchets conventionnels constitue un écart. En conséquence, l’Autorité de sûreté nucléaire a demandé en mars 2021 à ce que la station d’épuration de la centrale de Paluel soit classée temporairement en zone à production possible de déchets nucléaires compte-tenu de la présence de traces de cobalt 60 dans certains échantillons analysés.
Au regard des valeurs mesurées et des quantités de boues évacuées par la centrale de Paluel, cet événement ne présente pas d’impact sur l’environnement ou la santé. La Direction de la centrale de Paluel a déclaré, le 28 mai 2021, un événement significatif environnement au niveau 0 de l’échelle INES et engagé la mise à jour de sa procédure de contrôle des boues issues de sa station d’épuration. Des contrôles par spectrométrie gamma seront systématiquement réalisés en complément des contrôles ultimes opérés au moment de l’évacuation.
Publié le 01/06/2021
L’ASN a constaté qu’en 2019, la centrale nucléaire de Flamanville avait détecté la présence de très faibles traces de radionucléides d’origine artificielle (cobalt 60) dans des boues de stations d’épuration. L’ASN a fait des constats similaires en 2020 lors de contrôles croisés sur d’autres sites d’EDF (Paluel et Penly).
A Penly, des évacuations de boues d’épuration vers des filières conventionnelles ont été réalisées en mai 2016.
Avant chacune de ces évacuations, le site réalise des contrôles ultimes par spectrométrie qui ont permis de déterminer que la concentration en radionucléides d’origine artificielle (Cobalt 60) était conforme aux procédures applicables. Cette concentration était de l’ordre de quelques Bq par kg de boues, soit environ 100 fois inférieures à la valeur de concentration d’activité de 0,1 Bq par gramme définie par la directive Euratom 2013/59 pour ce radioélément. Les boues concernées ne justifient donc pas un contrôle de radioprotection, mais la règlementation française ne prévoit pas de seuil d’exemption pour les déchets, ce qui conduit, en France, à orienter en filière nucléaire tous les déchets présentant des radionucléides d’origine artificielle, y compris sous forme de traces.
La station d’épuration de la centrale nucléaire de Penly est initialement classée zone à déchets conventionnels. Sur la base du guide n° 23 de l’ASN datant de 2016 - Établissement et modification du plan de zonage déchets des installations nucléaires de base -, toute contamination par des substances radioactives de déchets provenant de zones à déchets conventionnels constitue un écart. En conséquence, l’Autorité de sûreté nucléaire a demandé en mars 2021 à ce que la station d’épuration de la centrale nucléaire de Penly soit classée temporairement en zone à production possible de déchets nucléaires compte-tenu de la présence de traces de cobalt 60 dans certains échantillons analysés.
Au regard des valeurs mesurées et des quantités de boues évacuées par la centrale de Penly, cet événement ne présente pas d’impact sur l’environnement ou la santé. La direction de la centrale de Penly a déclaré le 25 mai, un événement significatif environnement au niveau 0 de l’échelle INES et engagé la mise à jour de leur procédure de contrôle des boues issues des stations d’épuration. Des contrôles par spectrométrie gamma seront systématiquement réalisés en complément des contrôles ultimes opérés au moment de l’évacuation.
[1] https://www.irsn.fr/FR/Larecherche/publications-documentation/fiches-radionucleides/environnement/Pages/Cobalt-60-environnement.aspx#.YMMdbzo6_Eo
[2] Station d’épuration : Station de traitement des eaux usées des usagers (particuliers et industriels) raccordés au réseau d’assainissement et des eaux pluviales (dans le cas de réseaux non-séparatifs). La station rejette une eau épurée dans le milieu naturel qui doit être conforme aux valeurs limites définies par arrêté préfectoral. Les résidus de traitement sont récupérés sous forme de boues. https://www.actu-environnement.com/ae/dictionnaire_environnement/definition/station_d_epuration_urbaine.php4