20 juillet 2022
À la centrale nucléaire de Paluel (Normandie), une alarme retenti en salle de commande le 16 juillet 2022. Les équipes d’EDF mettront 3h30 à comprendre ce qu’elle signifie : sur les 2 voies du circuit qui permet le refroidissement de tous les matériels importants, une est hors-service.
Le circuit en question, dit SEC, sert à refroidir un autre circuit, appelé circuit de refroidissement intermédiaire, qui assure le refroidissement des matériels importants pour la sûreté du réacteur. C’est un circuit dit « de sauvegarde » constitué de deux lignes redondantes, comportant chacune deux pompes et deux échangeurs. Il fonctionne en permanence, même lorsque le réacteur est à l’arrêt. Ce circuit permet l’évacuation, via le circuit de refroidissement intermédiaire, de la puissance résiduelle du combustible dans certaines situations post-accidentelles (accident de perte de réfrigérant primaire, rupture de tuyauterie vapeur) et lors de la mise et du maintien en arrêt à froid du réacteur. Le circuit SEC contribue également, en fonctionnement normal et en cas de mise à l’arrêt du réacteur, au refroidissement d’un certain nombre d’autres équipements tels que les pompes primaires ou la piscine de stockage du combustible [1].
Étant donnée son importance, lorsque une des voies du circuit SEC est hors-service, le réacteur doit être arrêté dans l’heure. Mais comme les équipes d’EDF ont mis plus de 3 heures à comprendre la situation, cette règle n’a pas été respectée. Il faudra encore 45 minutes à l’industriel pour remettre en service le circuit de refroidissement. L’incident aura duré 4h15 au total . EDF ne précise pas sur quel réacteur il est survenu. L’industriel ne dit pas non plus pourquoi à la pompe n’a pas marché lors de sa remise en service. Une intervention de maintenance qui se serait mal passée ? Un contrôle qui n’a pas été fait ? Le communiqué ne dit pas non plus pourquoi les équipes en salle de commande ont mis tant de temps à comprendre ce que signifiait l’alarme et à saisir la situation. Manque de connaissances ? Inattention ? L’industriel ne dit pas non plus si l’autre voie à suffit à assurer un refroidissement suffisant pour évacuer la chaleur du combustible nucléaire entreposé sous l’eau en piscine et des équipements impactés par la panne où si des échauffements ont été constatés au cours de l’incident. Les faits ont été déclarés par EDF à l’Autorité de sûreté nucléaire comme significatifs [2] pour la sûreté puisqu’ils revêtent une importance particulière et ont mis à mal les dispositifs censés éviter les accidents [3]. L’origine de la panne de la pompe reste à élucider. Quant à l’erreur d’interprétation d’EDF sur les conséquences de cette panne et son temps de réaction... elles pointent un problème de compétences de fond de l’exploitant nucléaire qui vont bien au-delà de la portée de ce seul incident. .
L.B.
Déclaration d’un événement significatif de sûreté de niveau 1 relatif au non-respect d’une conduite à tenir prescrite par les spécifications techniques d’exploitation
Publié le 20/07/2022
Les spécifications techniques d’exploitation (STE) sont un recueil de règles d’exploitation approuvées par l’Autorité de sûreté nucléaire, qui définissent le domaine autorisé de fonctionnement d’une centrale nucléaire et les prescriptions de conduite du réacteur associées.
Constitué de deux voies redondantes assurant les mêmes fonctions, le circuit SEC contribue au refroidissement en eau des circuits et matériels importants pour la sûreté de l’installation. Chacune de ces voies est équipée de deux pompes.
Le 16 juillet 2022, vers 6h, une alarme apparait en salle de commande lors d’essais de remise en service d’une pompe du circuit SEC.
A 9h30, les équipes d’exploitation détectent que cette alarme génère un dispositif automatique conduisant à l’indisponibilité des deux pompes d’une des voies du circuit SEC et à son indisponibilité. Ils procèdent à leur remise en service à 10h16.
Dans cette configuration et comme le prescrivent les STE, les procédures de mise à l’arrêt du réacteur doivent être initiés sous une heure. Ce délai n’a donc pas été respecté a posteriori.
Cet événement n’a pas eu de conséquences réelles sur la sûreté des installations, la voie redondante du circuit SEC étant toujours restée disponible. Toutefois, en raison du non-respect des spécifications techniques d’exploitation et du délai de détection de l’écart, la direction de la centrale nucléaire de Paluel a déclaré, le 19 juillet 2022, à l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), un événement significatif relatif à la sûreté au niveau 1 de l’échelle INES qui en compte 7.
Non-respect de la conduite à tenir prévue par les règles générales d’exploitation
Publié le 26/07/2022
Centrale nucléaire de Paluel Réacteurs de 1300 MWe - EDF
Le 20 juillet 2022, EDF a déclaré à l’ASN un événement significatif pour la sûreté relatif au non-respect de la conduite à tenir prévue par les règles générales d’exploitation du réacteur 3 concernant la durée d’indisponibilité d’une voie du circuit de refroidissement d’eau brute secourue (SEC).
Les règles générales d’exploitation sont un recueil de règles approuvées par l’ASN qui définissent le domaine autorisé de fonctionnement de l’installation et les prescriptions de conduite des réacteurs associées. Elles prescrivent notamment les délais maximums de réparation en cas d’indisponibilité des systèmes requis pour assurer la sûreté des réacteurs.
Le circuit SEC sert à refroidir un autre circuit, appelé circuit de refroidissement intermédiaire (RRI), qui assure le refroidissement de tous les circuits et matériels importants pour la sûreté du réacteur. Le circuit SEC est constitué de deux lignes redondantes, comportant chacune deux pompes et deux échangeurs.
Le 16 juillet 2022 à 6h00, alors que des essais sur une des pompes du circuit SEC étaient en cours à la suite d’une opération de maintenance, une alarme concernant cette pompe est apparue en salle de commande. Cette alarme a aussitôt été prise en compte par l’exploitant. Toutefois, ce dernier n’a alors pas identifié que des actions automatiques en lien avec l’alarme ont provoqué l’indisponibilité de la deuxième pompe, entraînant par conséquent l’indisponibilité totale de la voie.
Ce n’est qu’à 9h30 que cette indisponibilité a été identifiée par l’exploitant, qui a alors engagé les opérations pour retrouver le fonctionnement d’une pompe. Vers 10h15, une pompe a été remise en service. EDF n’a donc pas respecté la règle relative à l’indisponibilité d’une des voies du refroidissement d’eau brute secourue à l’état « réacteur en production », qui impose de retrouver son fonctionnement sous une heure.
Cet évènement n’a pas eu de conséquence pour les personnes et l’environnement. Néanmoins, en raison de la détection tardive, cet événement a été classé au niveau 1 de l’échelle internationale des événements nucléaires (INES).
L’analyse de cet événement devra s’attacher à en comprendre l’origine exacte, ainsi que les raisons ayant conduit à l’erreur d’interprétation par les équipes et définir des actions correctives visant à éviter le renouvellement de cet écart.
[2] Événements significatifs : incidents ou accidents présentant une importance particulière en matière, notamment, de conséquences réelles ou potentielles sur les travailleurs, le public, les patients ou l’environnement. https://www.asn.fr/Lexique/E/Evenement-significatif
[3] La sûreté nucléaire est l’ensemble des dispositions techniques et des mesures d’organisation relatives à la conception, à la construction, au fonctionnement, à l’arrêt et au démantèlement des installations nucléaires de base, ainsi qu’au transport des substances radioactives, prises en vue de prévenir les accidents ou d’en limiter les effets. https://www.asn.fr/Lexique/S/Surete-nucleaire