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Des accidents nucléaires partout

France : Golfech : Le redémarrage houleux du réacteur 2

Surpression dans le circuit primaire, second incident en 3 semaines




13 octobre 2021


EDF a du mal à conduire le réacteur 2 de la centrale nucléaire de Golfech (Occitanie) sans le faire de sortir de la route qu’il est censé suivre scrupuleusement. Lors de son redémarrage après plus de 5 mois d’arrêt pour travaux, la pression du circuit primaire est montée un peu trop vite, un peu trop haut. EDF ne livre aucune explication sur l’origine de l’incident. Erreur de conduite, manque de surveillance, problème d’ouverture des soupapes censées éviter justement les surpressions ?


Le 9 octobre 2021 durant près d’une heure, le réacteur 2 était en dehors du domaine de fonctionnement autorisé, la pression du circuit primaire [1] étant supérieure à ce qu’elle aurait dû être (de 3 bars précisera l’ASN). Les phases de redémarrage et les transitoires sont pourtant des passages particulièrement risqués, où le réacteur doit être piloté avec le plus grand soin, et les différents paramètres (températures et pressions des différents circuits) respectés à la lettre. Alors, pourquoi ? Pourquoi cette sortie du domaine de fonctionnement autorisée, pourquoi trop de pression dans le circuit primaire ? Et pourquoi a-t-il fallu aux équipes trois quart d’heure pour s’en rendre compte ? Autant de questions suscitées par la lecture du communiqué d’EDF mais qui n’y trouvent aucune réponse. EDF s’y veut rassurant plus qu’explicatif : la sortie de route du réacteur nucléaire n’a pas durée longtemps, moins d’une heure, et oui, la pression était un peu trop forte dans le circuit primaire, mais l’amplitude de l’écart était faible alors tout ça n’a eu aucun impact, aucune conséquence réelle affirme l’exploitant.

L’incident a quand même été déclaré significatif [2] pour la sûreté [3], ce qui n’est pas rien (avant les "significatifs", il y a les "intéressants" qiu sont considérés comme moins graves, et encore avant les intéressants il y a les "signaux faibles"). Et c’est le second du genre en à peine trois semaines. Le précédent concernait aussi le réacteur 2. Et là encore, une histoire de paramètres censés être surveillés de près et ne pas être dépassés qui l’ont pourtant été. Entre le 15 et le 17 septembre, EDF a laissé monter la température du circuit qui refroidissait le réacteur jusqu’au maximum autorisé et peut être même au delà. À vrai dire l’industriel ne sait pas jusqu’où est montée la température. Alors même que le réacteur montait en puissance. Il a fallu tout stopper et engager son repli (baisser la température et la pression du circuit primaire). Les équipes se sont alors rendues compte que les informations remontées en salle de commande étaient erronées, la température indiquée était sous-estimée. Le capteur de température du circuit était HS (ou mal réglé peut être ? Là non plus EDF n’explique pas l’origine du problème, l’industriel mentionne seulement une valeur "non représentative" de la température réelle). Quoiqu’il en soit, durant 2 jours, EDF s’est fié à une valeur qui n’était pas fiable pour surveiller la température du circuit qui refroidissait son réacteur nucléaire alors qu’il en montait la puissance. Et le 9 octobre, c’est la pression du circuit primaire qui monte un peu trop haut (selon EDF la pression était "légèrement supérieure" à ce qui est autorisé, sans plus de précisions sur les valeurs exactes qui ont été relevées). Et les équipes aux commande ont mis trois quart d’heure à s’en rendre compte. Manifestement, les 5 mois d’arrêt n’ont pas suffit à régler tous les problèmes à Golfech, qu’ils soient matériels, organisationnels ou plus basiquement, simplement fonctionnels.

Ce que dit EDF :

Non-respect d’une règle générale d’exploitation relative à la sortie d’un domaine d’exploitation

Evénement sûreté

Publié le 13/10/2021

Le 9 octobre 2021, l’unité de production n°2 de la centrale de Golfech est en phase de redémarrage après qu’aient été réalisées, lors d’un arrêt programmé, des opérations de maintenance et le rechargement du combustible dans la cuve du réacteur.

Le redémarrage du réacteur passe par une succession d’états, appelés domaines d’exploitation, correspondant à des limites de pression et de température. Le passage d’un domaine d’exploitation à un autre constitue un transitoire encadré par des procédures de conduite de l’installation.

Lors d’un transitoire, un contrôle d’étanchéité des soupapes dites SEBIM, situées sur le circuit primaire, doit être mené. Ces soupapes ont pour objectif d’éviter les surpressions dans le circuit primaire.

Lors de cette phase, l’opérateur en salle de commande assure le suivi des paramètres de température et de pression. Il constate alors un niveau de pression dans le circuit primaire légèrement supérieur à celui autorisé par nos règles d’exploitation. Dès détection de la sortie de domaine, l’équipe en salle de commande engage les actions permettant de retrouver les critères de pression et de température attendus.

Cette sortie du domaine d’exploitation qui a duré moins d’une heure n’a pas eu de conséquence réelle sur la sûreté des installations, ni sur l’environnement en raison de la faible amplitude de dépassement de pression.

Toutefois, cet événement constituant un non-respect des règles d’exploitation, il a été déclaré à l’Autorité de sûreté nucléaire le 12 octobre 2021, comme événement significatif de sûreté au niveau 1 de l’échelle INES, graduée de 1 à 7.

https://www.edf.fr/la-centrale-nucleaire-de-golfech/les-actualites-de-la-centrale-nucleaire-de-golfech/non-respect-d-une-regle-generale-d-exploitation-relative-a-la-sortie-d-un-domaine-d-exploitation


Ce que dit l’ASN :

Sortie du domaine de fonctionnement autorisé

Publié le 15/10/2021

Centrale nucléaire de Golfech Réacteurs de 1300 MWe - EDF

Le 12 octobre 2021, l’exploitant de la centrale nucléaire de Golfech a déclaré à l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) un événement significatif pour la sûreté relatif à la sortie du domaine de fonctionnement autorisé par les règles générales d’exploitation, en raison d’une pression trop élevée du circuit primaire principal.

Le circuit primaire est un circuit fermé, contenant de l’eau sous pression. Le pressuriseur est un réservoir dont la fonction est de contrôler la pression du circuit primaire à l’aide de chaufferettes et d’un système d’aspersion.

Les règles générales d’exploitation (RGE) sont un recueil de règles approuvées par l’ASN qui définissent le domaine autorisé de fonctionnement de l’installation et les prescriptions de conduite associées. Elles précisent notamment les limites minimales et maximales autorisées pour la pression et la température de l’eau du circuit primaire. Ces limites définissent le domaine de fonctionnement autorisé.

Le 9 octobre 2021, le réacteur était à l’arrêt pour maintenance et renouvellement du combustible. Dans le cadre des activités de redémarrage du réacteur 2, chargé en combustible, l’exploitant a procédé à une montée en température et en pression du circuit primaire. Durant cette opération, la pression du circuit primaire a dépassé pendant 46 minutes la limite maximale autorisée pour la pression, avec un écart maximum d’environ 3 bars.

Cet événement n’a pas eu de conséquence sur les personnes et l’environnement. Toutefois, en raison de la sortie du domaine autorisé de fonctionnement du réacteur, cet événement a été classé au niveau 1 de l’échelle INES (échelle internationale des événements nucléaires et radiologiques, graduée de 0 à 7 par ordre croissant de gravité).

Les opérateurs ont détecté le dépassement de la limite maximale de pression au bout de 45 minutes. Ils ont immédiatement engagé des actions permettant au réacteur de revenir en une minute dans sa plage de fonctionnement autorisée.

https://www.asn.fr/l-asn-controle/actualites-du-controle/installations-nucleaires/avis-d-incident-des-installations-nucleaires/sortie-du-domaine-de-fonctionnement-autorise


[1Le circuit primaire est un circuit fermé, contenant de l’eau sous pression. Cette eau s’échauffe dans la cuve du réacteur au contact des éléments combustibles. Dans les générateurs de vapeur, elle cède la chaleur acquise à l’eau du circuit secondaire pour produire la vapeur destinée à entraîner le groupe turboalternateur. Le circuit primaire permet de refroidir le combustible contenu dans la cuve du réacteur en cédant sa chaleur par l’intermédiaire des générateurs de vapeur lorsqu’il produit de l’électricité ou par l’intermédiaire du circuit de refroidissement à l’arrêt lorsqu’il est en cours de redémarrage après rechargement en combustible. La température du circuit primaire principal est encadrée par des limites afin de garantir le maintien dans un état sûr des installations en cas d’accident. https://www.asn.fr/Lexique/C/Circuit-primaire

[2Événements significatifs : incidents ou accidents présentant une importance particulière en matière, notamment, de conséquences réelles ou potentielles sur les travailleurs, le public, les patients ou l’environnement. https://www.asn.fr/Lexique/E/Evenement-significatif

[3La sûreté nucléaire est l’ensemble des dispositions techniques et des mesures d’organisation relatives à la conception, à la construction, au fonctionnement, à l’arrêt et au démantèlement des installations nucléaires de base, ainsi qu’au transport des substances radioactives, prises en vue de prévenir les accidents ou d’en limiter les effets. https://www.asn.fr/Lexique/S/Surete-nucleaire


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Installation(s) concernée(s)

Golfech

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75