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Des accidents nucléaires partout

France : Cruas : Incident de radioprotection de niveau 2

Un travailleur reçoit en une seule fois plus que le maximum autorisé en 12 mois




27 août 2021


En une seule intervention sur le réacteur 2 de la centrale nucléaire de Cruas (Drôme) le 24 août 2021, un travailleur a reçu plus de rayons ionisants  [1] que la limite maximale autorisée sur toute une année. Une particule radioactive s’est collée à sa peau et l’a irradié directement au niveau de la nuque. C’est le quatrième en quelques semaines à être contaminé lors d’une intervention en zone nucléaire, sans qu’EDF ne sache où ni comment, à chaque fois aucune anomalie n’ayant été détectée en terme de propreté radiologique des zones concernées. Les contrôles réalisés par l’industriel sont-ils suffisamment exhaustifs et faits avec des seuils de détection permettant de repérer les zones contaminées ? EDF considère-t-il comme "normal" que des particules radioactives soient dispersées dans les bâtiments et contaminent les intervenants ?


Car c’est la quatrième déclaration d’accident de (non)radioprotection dans les centrales nucléaires d’EDF en moins de 4 semaines. Le 29 juillet 2021, un salarié a été contaminé lors d’une intervention sur le réacteur 1 de la centrale de Saint-Laurent (Centre - Val de Loire), une particule radioactive est venue se nicher dans son oreille. Un autre travailleur a été contaminé au visage le 4 août 2021 lors d’une intervention en zone nucléaire sur un des réacteurs de Fessenheim (Grand Est). Le 14 août 2021, un travailleur est ressorti du réacteur 3 de la centrale nucléaire de Cattenom (Grand Est) avec une particule radioactive collée au visage. À chaque fois, ils ont reçu une dose  [2] supérieure au quart du maximum annuel (sans qu’EDF ne précise de combien ce quart a été dépassé). À chaque fois le réacteur était arrêté et les travailleurs intervenaient sur un chantier.

Cette fois le travailleur a donc reçu, en une seule intervention en zone nucléaire, plus que la limite maximale légale en 12 mois. La dose réglementaire est donc dépassée. Il ne pourra plus travailler en zone nucléaire car pour sa santé il ne doit plus recevoir de rayonnements ionisants. Il devra être suivi médicalement, plus que ce qu’il n’est déjà entant que travailleur du nucléaire, qui rappelons-le sont exposés à des doses de rayonnements 20 fois supérieures à celles du grand public. EDF n’a pas su protéger cette personne, alors que c’est son devoir en tant qu’employeur de protéger tous les intervenants - qu’ils soient ses salariés ou des sous-traitants - des risques générés par ses activités industrielles.

L’incident considéré comme significatif [3], est classé au niveau 2 de l’échelle de gravité des accidents nucléaires INES  [4] . Il est survenu, comme les autres, sur des chantiers. EDF met-il a disposition tous les équipements de protection nécessaires et adaptés ? Les interventions sont-elles suffisamment préparées,les risques correctement identifiés ? Les intervenants sont-ils formés correctement à intervenir dans ces zones radioactives ? Et si l’industriel n’a pas su déterminer où, quand ni comment ce travailleur a été contaminé, comment peut-il protéger correctement les autres ?

Manifestement, les zones nucléaires des centrales d’EDF ne sont pas aussi propres qu’elles ne le devraient, la radioactivité n’est pas si bien confinée que ça et EDF ne maîtrise pas si bien que ça les risques encourus par ses travailleurs. Sinon comment expliquer 4 contaminations en moins de 4 semaines, sur 4 sites nucléaires différents ?

Ce que dit EDF :

Evénement radioprotection

Publié le 27/08/2021

Contamination corporelle externe ayant entraîné une exposition radiologique « dose peau » supérieure à la limite réglementaire annuelle

Mardi 24 août 2021, un salarié EDF a réalisé des contrôles visuels sur plusieurs vannes dans le bâtiment réacteur de l’unité de production n°2, actuellement en arrêt programmé pour maintenance.

A sa sortie de zone contrôlée, le salarié se présente aux portiques de contrôle de la radioactivité. Une contamination externe est détectée.

Le salarié a été immédiatement pris en charge par le service médical de la centrale, pour réaliser des contrôles complémentaires et traiter le point de contamination selon les procédures usuelles. Une particule radioactive a été identifiée au niveau de sa nuque et retirée.

L’exposition du salarié est calculée à partir du niveau de radioactivité de la particule présente sur la peau (activité) et du temps durant lequel cette particule a exposé effectivement le salarié.

Les équipes du service prévention des risques ont mené différentes investigations dans le bâtiment réacteur, pour déterminer l’origine de la contamination du salarié en retraçant son parcours. Les résultats n’ont pas permis d’en préciser l’origine.

De manière conservatoire, EDF considère donc que le salarié a pu être exposé durant la totalité de son parcours en zone contrôlée, depuis son entrée jusqu’au retrait de la source d’exposition. Cette mesure, prise par précaution dans le calcul estimatif de l’exposition, conduit à un dépassement de la limite réglementaire annuelle dite « dose peau » de 500 mSv.

Le salarié a poursuivi son activité. Il fera l’objet d’un suivi médical par la médecine du travail, complémentaire au suivi classique des personnes intervenant en zone contrôlée.

La direction de la centrale nucléaire de Cruas-Meysse a déclaré cet événement le 27 août 2021 à l’Autorité de sureté nucléaire, comme un événement significatif radioprotection de niveau 2 (incident) de l’échelle INES qui en compte 7, du fait du dépassement de la limite réglementaire annuelle pour la dose peau.

https://www.edf.fr/la-centrale-nucleaire-de-cruas-meysse/les-actualites-de-la-centrale-nucleaire-de-cruas-meysse/contamination-corporelle-externe-ayant-entraine-une-exposition-radiologique-dose-peau-superieure-a-la-limite-reglementaire-annuelle


Ce que dit l’ASN :

Contamination externe d’un intervenant conduisant au dépassement de la limite annuelle réglementaire pour la dose équivalente reçue par la peau

Publié le 02/09/2021

Centrale nucléaire de Cruas-Meysse - Réacteurs de 900 MWe - EDF

Le 27 août 2021, l’exploitant de la centrale nucléaire de Cruas a déclaré à l’Autorité de sûreté nucléaire un évènement significatif relatif à la radioprotection concernant le dépassement, pour un salarié d’EDF, d’une limite de dose individuelle annuelle.

Le 24 août 2021, deux intervenants réalisaient, dans le bâtiment du réacteur 2, une vérification de l’étanchéité des alimentations d’air de robinets pneumatiques. Cette activité consistait à pulvériser un aérosol permettant de détecter une éventuelle fuite sur les liaisons de ces robinets avec le circuit d’air comprimé de régulation (SAR).

Lors du contrôle réalisé à la sortie de zone contrôlée, une contamination a été détectée dans la zone « épaule - tête » d’un des intervenants. L’agent a été immédiatement pris en charge par le service médical, qui a localisé la particule radioactive à l’origine de cette contamination au niveau de la nuque. La particule a été retirée.

Pour les travailleurs susceptibles d’être exposés aux rayonnements ionisants lors de leur activité professionnelle, les limites réglementaires annuelles de doses sont, pour douze mois consécutifs, de 20 millisieverts pour le corps entier et de 500 millisieverts pour une surface de 1 cm2 de peau.

Malgré les investigations menées sur le parcours suivi par l’intervenant, les zones ou les points de contamination qui ont pu être à l’origine de cette contamination n’ont pas pu être déterminés.

En conséquence, EDF a procédé à une évaluation de la dose reçue en considérant que la particule était présente dès l’entrée de l’intervenant dans le bâtiment réacteur jusqu’à son retrait. Cette évaluation atteint, au niveau de la nuque de l’intervenant, une valeur supérieure à la limite réglementaire fixée pour la dose équivalente peau. La dose reçue par l’intervenant pour le corps entier est quant à elle nettement inférieure à la limite réglementaire annuelle.

L’ASN a mené une inspection sur le site le 31 août 2021. Les inspecteurs ont vérifié qu’EDF avait pris toutes les mesures nécessaires pour gérer l’événement de manière adéquate et pour en analyser les causes. Un rapport d’analyse de cet événement, présentant les actions correctives mises en place pour prévenir son renouvellement, devra être transmis à l’ASN sous deux mois.

En raison du dépassement d’une limite réglementaire d’exposition d’un travailleur, cet événement a été classé au niveau 2 de l’échelle internationale de gravité des événements nucléaires et radiologiques (INES).

https://www.asn.fr/Controler/Actualites-du-controle/Avis-d-incident-des-installations-nucleaires/Contamination-externe-d-un-intervenant-conduisant-au-depassement-de-la-limite-annuelle


[1Rayonnement ionisant : Processus de transmission d’énergie sous forme d’ondes électromagnétiques (photons gamma) ou de particules (alpha, bêta, neutrons) capable de produire directement ou indirectement des ions en traversant la matière. Les rayonnements ionisants sont produits par des sources radioactives. En traversant les tissus vivants, les ions provoquent des phénomènes biologiques pouvant entraîner des lésions dans les cellules de l’organisme. https://www.asn.fr/Lexique/R/Rayonnement-ionisant

[2Dose : Quantité d’énergie communiquée à un milieu par un rayonnement ionisant. https://www.asn.fr/Lexique/D/Dose

[3Événements significatifs : incidents ou accidents présentant une importance particulière en matière, notamment, de conséquences réelles ou potentielles sur les travailleurs, le public, les patients ou l’environnement. https://www.asn.fr/Lexique/E/Evenement-significatif

[4INES : International nuclear and radiological event scale (Échelle internationale des événements nucléaires et radiologiques) - Description et niveaux ici - https://www.asn.fr/Lexique/I/INES


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Installation(s) concernée(s)

Cruas

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140