4 août 2022
Le 26 juillet 2022, un des capteurs qui surveille l’activité nucléaire dans la cuve du réacteur 2 de la centrale de Cruas (Ardèche) tombe en panne. La réparation est programmée. Le temps qu’elle soit effectuée, une alarme se déclenche, signalant un dysfonctionnement. EDF pense que l’alarme est liée à la défaillance du capteur qui doit être réparé et ne pousse pas plus loin ses investigations. Une fois la réparation effectuée, l’alarme persiste. Il s’est avéré que l’alarme n’était pas lié à l’avarie du capteur : l’autre système qui permet de surveiller l’activité nucléaire dans la cuve du réacteur était aussi en panne.
Selon les règles censées régir l’exploitation nucléaire, si les 2 systèmes qui permettent de surveiller l’activité dans la cuve du réacteur sont hors-service en même temps, la puissance du réacteur doit être diminuée dans les heures qui suivent. Ce qui n’a pas pu être le cas, puisque EDF n’a détecté la panne du second système que plus de 24 heures après l’apparition de l’alarme. Pourquoi EDF n’a pas pris la peine de vérifier le bon fonctionnement du second système lorsque l’alarme est apparue ? La précaution aurait semblé raisonnable, sachant que l’autre système de surveillance était défaillant. L’incident, significatif pour la sûreté [1] [2] , a été déclaré à l’Autorité de sûreté le 2 août 2022.
L.B.
Non-respect de la conduite à tenir lié à un cumul de deux indisponibilités matérielles dont une détectée a posteriori
Publié le 04/08/2022
Les règles générales d’exploitation (RGE) sont un recueil de règles qui définissent le domaine autorisé de fonctionnement de l’installation et les prescriptions de conduite des réacteurs associées. Elles encadrent notamment les interventions réalisées sur les équipements contribuant à la sûreté et prescrivent la conduite à tenir en cas d’indisponibilité de matériels.
Le 26 juillet 2022, l’unité de production n°2 fonctionne à 50% de puissance. A 17h21, la défaillance d’un composant électronique au niveau d’une des chaînes de mesure neutronique de puissance entrant dans les protections réacteur, rend celle-ci indisponible. Les équipes de la centrale lancent une intervention pour corriger la défaillance (cette intervention s’achèvera le 27 juillet à 21h25). Pendant leur investigation, le matériel est mis en position de sécurité, et plusieurs alarmes ou signaux en lien avec la régulation des circuits sont présents en salle de commande. Le 27 juillet, à 6h17, de manière fortuite et concomitante, une autre anomalie matérielle, sans aucun rapport avec l’intervention en cours, actionne un signal d’alarme déjà présent sur l’écran en salle de commande. Il est donc considéré comme normal et lié à l’intervention sur la chaîne de mesure neutronique de puissance. A 21h25, la chaîne de mesure neutronique est de nouveau disponible mais un signal sur l’écran en salle de commande est toujours présent. Une analyse est menée permettant de détecter l’anomalie présente depuis 6h17 sur une autre voie de protection réacteur, qui est considérée indisponible a posteriori depuis 6h17. Celle-ci est mise en position de sécurité, et une nouvelle intervention est lancée permettant de remplacer le module défaillant et de retrouver la disponibilité de la voie le 28 juillet à 19h.
Du fait de la concomitance des deux anomalies matérielles, le 27 juillet de 6h17 à 21h25, la conduite à tenir imposée par les RGE indique que les procédures de mise à l’arrêt du réacteur doivent être initiées dans un délai de 8 heures. Ce délai n’a donc pas été respecté a posteriori.
Cet événement n’a pas eu de conséquences réelles sur la sûreté de l’installation. Toutefois, en raison du non-respect des règles générales d’exploitation dans la gestion d’un cumul de deux anomalies matérielles, la direction de la centrale de Cruas-Meysse a déclaré, le 2 août 2022, à l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), un évènement significatif sûreté au niveau 1 sur l’échelle INES qui en compte 7.
Non-respect de la conduite à tenir prévue par les règles générales d’exploitation du réacteur 2
Publié le 08/08/2022
Centrale nucléaire de Cruas-Meysse Réacteurs de 900 MWe - EDF
Le 2 aout 2022, EDF a déclaré à l’ASN un événement significatif pour la sûreté relatif au non-respect de la conduite à tenir prévue par les règles générales d’exploitation (RGE) en cas cumul d’indisponibilités d’équipements de protection du réacteur.
Les RGE sont un recueil de règles approuvées par l’ASN qui définissent le domaine autorisé de fonctionnement de l’installation et les prescriptions de conduite des réacteurs associées. Elles prescrivent notamment les délais maximums de réparation en cas d’indisponibilité des systèmes requis pour assurer la sûreté des réacteurs.
Sur un réacteur à eau sous pression, la réaction nucléaire au sein du cœur est surveillée par un système de mesure, appelé RPN, constitué de quatre capteurs de mesure indépendants situés autour de la cuve. Ce système permet de connaître en continu le niveau et la distribution de puissance le long des assemblages de combustible et autour du cœur.
Les réacteurs sont également équipés d’une série de sondes de températures qui sont situées dans le cœur du réacteur et qui permettent de mesurer la répartition de la puissance dans le cœur.
Le 26 juillet 2022, une panne est survenue sur l’un des quatre capteurs de mesure du système RPN. Le capteur a alors été déclaré indisponible et mis en position sûre, le temps d’intervenir pour traiter la panne. La conduite à tenir préconisée par les RGE a bien été respectée.
Le 27 juillet 2022, alors que l’intervention était en cours, un signal d’alarme est apparu en salle de commande, concernant un capteur de mesure de la répartition de la puissance thermique dans le cœur. Les intervenants ont considéré que ce signal était dû à l’intervention en cours sur le système RPN car celle-ci devait générer des alarmes sur les calculateurs du système de surveillance du cœur du réacteur.
Dans la soirée du 27 juillet 2022, les opérateurs ont identifié que le signal d’alarme sur la mesure de la répartition de la puissance dans le cœur était toujours présent, malgré la fin de l’intervention initiale sur le système RPN. Les investigations conduites à ce moment-là ont mis en évidence que ce signal provenait d’une défaillance, indépendante de la première panne, de la mesure de la répartition de la puissance dans le cœur et qu’il rendait donc partiellement indisponible ce système. Ce capteur a été remis en fonction dans la nuit du 27 au 28 juillet 2022.
Toutefois, en cas d’indisponibilités concomitantes sur les deux systèmes de surveillance de la réaction nucléaire, les RGE imposent un repli du réacteur dans les 8 heures. Or, la 2ème indisponibilité n’ayant été détectée qu’après le traitement de la première, la conduite à tenir n’a pas été respectée.
Cet événement n’a pas eu de conséquence sur les installations, sur l’environnement ou sur les travailleurs. Toutefois, en raison du non-respect des règles générales d’exploitation, cet incident a été classé au niveau 1 de l’échelle INES.
[1] Événements significatifs : incidents ou accidents présentant une importance particulière en matière, notamment, de conséquences réelles ou potentielles sur les travailleurs, le public, les patients ou l’environnement. https://www.asn.fr/Lexique/E/Evenement-significatif
[2] La sûreté nucléaire est l’ensemble des dispositions techniques et des mesures d’organisation relatives à la conception, à la construction, au fonctionnement, à l’arrêt et au démantèlement des installations nucléaires de base, ainsi qu’au transport des substances radioactives, prises en vue de prévenir les accidents ou d’en limiter les effets. https://www.asn.fr/Lexique/S/Surete-nucleaire