3 mars 2023
C’est en préparant l’arrêt du réacteur 4 de la centrale de Chinon (Centre - Val de Loire) qu’EDF s’est aperçu qu’un robinet était resté ouvert depuis...le dernier arrêt, en avril 2022. Ce robinet permet l’injection de liquide sous très haute pression dans le circuit primaire, le principal circuit de refroidissement du réacteur [1] . C’est dire si le redémarrage a été correctement préparé... Et si les configurations des circuits sont correctement vérifiées et suffisamment souvent testées !
Ce n’est pas au moment où il sera nécessaire d’utiliser le circuit de refroidissement d’urgence qu’il sera temps de s’assurer qu’il est bien configuré et fonctionne correctement. L’industriel est-il si sûr de lui, si certain que ses centrales nucléaires sont parfaitement sûres que les circuits d’urgence en deviendraient superflus ?
Violation des règles, détection tardive, manque de surveillance et méconnaissance de l’état réel de l’installation, les faits, significatifs [1] pour la sûreté [2] , ont été déclarés par EDF le 2 mars à l’autorité de contrôle (ASN).
L.B.
Détection tardive de l’indisponibilité du système d’injection de sécurité haute pression de l’unité de production numéro 4
Publié le 03/03/2023
Evénement sûreté
Le 27 février 2023, dans le cadre des activités programmées de mise à l’arrêt de l’unité de production numéro 4, lors de la réalisation d’essais de fonctionnement par les équipes de la centrale, une des vannes du circuit d’injection de sécurité haute pression au circuit primaire du réacteur est constatée ouverte alors qu’elle aurait dû être fermée. Le circuit d’injection de sécurité est un circuit de sauvegarde qui permet d’assurer le refroidissement du réacteur uniquement en cas d’accident.
Suite à ce constat, les équipes de la centrale ont procédé à la fermeture de la vanne rendant ainsi le système de sécurité conforme. L’analyse réalisée démontre que suite à des opérations de maintenance réalisées lors du dernier arrêt de l’unité de production n°4 en avril 2022, la vanne était restée ouverte. Cette situation n’a pas eu d’impact sur le fonctionnement normal de l’unité, mise à disposition du réseau électrique depuis cette date.
Cet événement, qui représente un non-respect des spécifications techniques d’exploitation, n’a eu aucune conséquence réelle sur la sûreté des installations, la sécurité des salariés ou sur l’environnement.
Au regard de sa détection tardive et en raison du non-respect des règles générales d’exploitation, cet événement a été déclaré, le jeudi 2 mars 2023, par la Direction de la Centrale Nucléaire de Chinon à l’Autorité de sûreté nucléaire, comme Significatif pour la Sûreté au niveau 1 sur l’échelle INES qui en compte 7.
Détection tardive de l’indisponibilité partielle du système d’injection de sécurité du réacteur 4
Publié le 12/04/2023
Centrale nucléaire de Chinon B Réacteurs de 900 MWe - EDF
Le 14 mars 2023, l’exploitant de la centrale nucléaire de Chinon a confirmé à l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) la déclaration, après des investigations complémentaires, d’un évènement significatif pour la sûreté relatif au non-respect des règles générales d’exploitation du réacteur 4 concernant l’indisponibilité partielle du système d’injection de sécurité (RIS).
Les règles générales d’exploitation (RGE) sont un recueil de règles approuvées par l’ASN qui définissent le domaine autorisé de fonctionnement de l’installation et les prescriptions de conduite des réacteurs associées. Elles prescrivent notamment les délais maximums de réparation et la conduite à tenir en cas d’indisponibilité des systèmes requis pour assurer la sûreté des réacteurs.
Le circuit d’injection de sécurité (RIS) permet, en cas d’accident causant une brèche importante au niveau du circuit primaire du réacteur, d’introduire de l’eau borée sous pression dans celui-ci afin d’étouffer la réaction nucléaire et d’assurer le refroidissement du cœur. Le circuit RIS se compose de trois systèmes d’injections différents : le circuit d’injection haute pression (RISHP), le circuit d’injection moyenne pression et le circuit d’injection basse pression. Les circuits d’injection haute pression et basse pression sont composés de deux voies redondantes.
Le 27 février 2023, à la suite de la réalisation d’un essai périodique du système RIS lors de l’arrêt pour maintenance du réacteur, l’exploitant a constaté qu’une des vannes du circuit d’injection de sécurité haute pression était restée ouverte alors qu’elle aurait dû être fermée dans cette configuration. La non-fermeture de cette vanne a provoqué l’indisponibilité du système RISHP.
Les investigations menées a posteriori par l’exploitant ont révélé que cette vanne était demeurée ouverte depuis le dernier arrêt du réacteur en avril 2022 et que par conséquent le système RISHP est resté indisponible alors que le réacteur était en puissance. Les règles générales d’exploitation, qui prévoient l’arrêt du réacteur sous 1 heure en cas d’indisponibilité du système RISHP quand le réacteur est en puissance, n’ont donc pas été respectées a posteriori.
Cet événement n’a pas eu de conséquence sur les installations, les personnes et l’environnement. Toutefois, il a affecté la fonction de sûreté liée au refroidissement du réacteur. En raison de l’indisponibilité partielle d’un système de sûreté associés et compte tenu de sa détection tardive, cet événement a été classé au niveau 1 de l’échelle INES (échelle internationale des événements nucléaires et radiologiques, graduée de 0 à 7 par ordre croissant de gravité).
À la suite de la détection de l’écart, l’exploitant a remis en conformité l’installation en fermant la vanne incriminée et a engagé une analyse approfondie de cet événement. L’ASN sera vigilante quant à l’analyse des causes humaines et organisationnelles ayant entraîné cette anomalie, aux conséquences potentielles de cet écart pendant le cycle de production et aux actions prises pour en éviter le renouvellement.
[1] Le circuit primaire est un circuit fermé, contenant de l’eau sous pression. Cette eau s’échauffe dans la cuve du réacteur au contact des éléments combustibles. Dans les générateurs de vapeur, elle cède la chaleur acquise à l’eau du circuit secondaire pour produire la vapeur destinée à entraîner le groupe turboalternateur. Le circuit primaire permet de refroidir le combustible contenu dans la cuve du réacteur en cédant sa chaleur par l’intermédiaire des générateurs de vapeur lorsqu’il produit de l’électricité ou par l’intermédiaire du circuit de refroidissement à l’arrêt lorsqu’il est en cours de redémarrage après rechargement en combustible. La température du circuit primaire principal est encadrée par des limites afin de garantir le maintien dans un état sûr des installations en cas d’accident. https://www.asn.fr/Lexique/C/Circuit-primaire
[2] Événements significatifs : incidents ou accidents présentant une importance particulière en matière, notamment, de conséquences réelles ou potentielles sur les travailleurs, le public, les patients ou l’environnement. https://www.asn.fr/Lexique/E/Evenement-significatif En dessous des évènements significatifs, il y a les évènements dits « intéressants », et encore en dessous les « signaux faibles ». Un évènement catégorisé « significatif » est donc déjà « en haut de l’échelle » d’importance des évènements
[3] La sûreté nucléaire est l’ensemble des dispositions techniques et des mesures d’organisation relatives à la conception, à la construction, au fonctionnement, à l’arrêt et au démantèlement des installations nucléaires de base, ainsi qu’au transport des substances radioactives, prises en vue de prévenir les accidents ou d’en limiter les effets. https://www.asn.fr/Lexique/S/Surete-nucleaire