Faire un don

Des accidents nucléaires partout

France : Bugey : Erreur lors de la visite décennale du réacteur 4

EDF découvre qu’un circuit était hors service depuis 5 mois : manque de surveillance et de formation des intervenants




16 novembre 2021


Alors que le temps de panne maximum autorisé est de 24h, EDF a découvert que le circuit d’injection de soude en cas d’accident dans le réacteur 4 du Bugey (Rhône-Alpes) était inopérant depuis 5 mois. Une erreur de montage a été faite lors de la visite décennale et n’a pas été repérée. Le circuit a même été requalifié, c’est à dire considéré comme apte à remplir ses fonctions. Et pour cause ! Les intervenants pensaient que la vanne devait se fermer pour que le circuit fonctionne, alors qu’il fallait qu’elle s’ouvre. Manifestement, EDF ne surveille pas assez ses équipiers et ne s’assure pas qu’ils comprennent le fonctionnement des équipements sur lesquels ils interviennent.


L’aspersion d’eau et de soude permet en cas d’accident de diminuer la pression et la température dans l’enceinte du réacteur nucléaire. Le but est d’éviter que l’enceinte en béton n’explose sous la pression, de rabattre au sol les radioéléments et de permettre aux systèmes de secours, qui doivent limiter les conséquences de l’accident, de fonctionner. L’addition de soude permet d’accélérer l’élimination de l’iode radioactif et de limiter le dégagement d’hydrogène, un gaz hautement explosif.

Ce circuit d’aspersion de l’enceinte avec de la soude doit être toujours fonctionnel, et ne doit pas rester plus de 24h en panne. Sauf que la panne - générée par une erreur lors d’une intervention sur une vanne du circuit au printemps 2021 durant la visite décennale, n’a pas été repérée par EDF. Le circuit a même été requalifié suite à cette intervention, c’est à dire testé, vérifié et considéré comme apte à remplir ses fonctions, et ce alors même que la vanne qui venait d’être changée s’est fermée au lieu de s’ouvrir. Les visites décennales, ces grands programmes de vérifications, de remises en conformité des équipements et de modifications des systèmes qui ont lieu tous les 10 ans, sont pourtant présentées par l’industriel comme étant censées améliorer la sûreté des réacteurs nucléaires, pas l’aggraver. Ce n’est que le 5 novembre 2021 que l’exploitant nucléaire a découvert que l’injection de soude ne fonctionnait pas puisque la vanne se fermait au lieu de s’ouvrir.

Aucune conséquence réelle sur la sûreté ni sur l’environnement dira l’industriel ! Encore heureux qu’il n’y ait pas eu besoin d’utiliser le circuit d’aspersion de sécurité du réacteur 4 du Bugey entre juin et novembre 2021. Par contre, se tromper sur le fonctionnement d’un composant d’un circuit essentiel en cas d’accident, lorsqu’on intervient sur un réacteur nucléaire, c’est pour le moins problématique. L’incident a été considéré comme significatif pour la sûreté et déclarés par EDF à L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) le 9 novembre 2021. Des faits qui donnent matière à douter très sérieusement de l’efficacité des tests faits par EDF pour vérifier le bon fonctionnement de ses circuits. Et de l’efficience des visites décennales comme vecteurs de sûreté.

Ce que dit EDF :

Écart de montage sur une vanne d’injection de soude sur le système d’aspersion de l’enceinte de l’unité de production n°4

Evénement sûreté

Publié le 15/11/2021

Le 21 mai 2021, au cours de la visite décennale de l’unité de production n°4 de la centrale du Bugey, les équipes procèdent au changement d’un robinet et d’une vanne associée sur un système de sauvegarde d’aspersion de l’enceinte du bâtiment réacteur (EAS). Le matériel est requalifié : le robinet doit se fermer lorsque l’alimentation en air est coupée.

Le circuit EAS pulvérise, en cas d’accident, de l’eau contenant de la soude dans l’enceinte du réacteur. Son objectif est de conserver l’intégrité de l’enceinte du réacteur, en diminuant notamment la pression de l’enceinte. La disponibilité de ce circuit d’aspersion est requise au titre du référentiel de sûreté depuis les opérations de redémarrage de l’unité de production débutées le 1er juin.

Le 5 novembre dernier, un agent constate lors d’un test, après maintenance sur la vanne, que celle-ci se ferme sur un manque d’air contrairement à l’exigence d’ouverture requise. En moins de 24h, les équipes procèdent à la remise en conformité du matériel.

Cependant, en raison de la détection tardive de l’indisponibilité de la vanne, la direction de la centrale nucléaire de Bugey a déclaré le 9 novembre, un événement significatif sûreté de niveau 1 à l’Autorité de sûreté nucléaire.

Cet événement n’a eu aucune conséquence réelle sur la sûreté des installations ni sur l’environnement.

https://www.edf.fr/la-centrale-nucleaire-du-bugey/les-actualites-de-la-centrale-nucleaire-du-bugey/ecart-de-montage-sur-une-vanne-d-injection-de-soude-sur-le-systeme-d-aspersion-de-l-enceinte-de-l-unite-de-production-ndeg4


Ce que dit l’ASN :

Détection tardive de l’indisponibilité de l’injection de soude du système d’aspersion dans l’enceinte du réacteur 4

Publié le 16/11/2021

Le 9 novembre 2021, EDF a déclaré à l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) un événement significatif pour la sûreté relatif à la détection tardive de l’indisponibilité de l’injection de soude du système d’aspersion dans l’enceinte du réacteur 4 de la centrale nucléaire du Bugey.

Le système d’aspersion dans l’enceinte (EAS) est un système de sauvegarde, constitué de deux voies redondantes, qui pulvérise de l’eau contenant de la soude, en cas d’accident dans l’enceinte du réacteur afin d’y diminuer la pression et la température. L’injection de soude permet d’accélérer l’élimination de l’iode potentiellement radioactif et de limiter le dégagement d’hydrogène dans l’enceinte de confinement du réacteur en cas d’accident.

Le 5 novembre 2021, dans le cadre d’une mise à jour, dans le logiciel de maintenance, des caractéristiques d’une vanne du circuit d’injection de soude du système EAS du réacteur 4, l’exploitant a identifié une incohérence entre les paramètres attendus et ceux obtenus lors de la requalification effectuée à l’issue de la dernière opération de maintenance réalisée sur cette vanne. En effet, cette vanne doit s’ouvrir par manque d’air de régulation, alors qu’elle s’était fermée lors de la requalification effectuée le 21 mai 2021 après la maintenance réalisée lors de l’arrêt pour visite décennale.

Le 6 novembre 2021, cette vanne a été remise en conformité, permettant ainsi de retrouver la disponibilité de l’injection de soude du système EAS du réacteur 4. Ce circuit était indisponible depuis le 1er juin 2021, date à partir de laquelle sa disponibilité était requise par les règles générales d’exploitation. La durée totale d’indisponibilité de ce circuit, supérieure à 5 mois, est supérieure à celle permise par les règles générales d’exploitation du réacteur, qui est de 24 heures.

Cet événement n’a eu aucune conséquence sur l’installation, l’environnement, ou le personnel. Toutefois, compte tenu de la détection tardive de l’indisponibilité d’un système requis par les règles générales d’exploitation, cet événement a été classé au niveau 1 de l’échelle INES.

https://www.asn.fr/l-asn-controle/actualites-du-controle/installations-nucleaires/avis-d-incident-des-installations-nucleaires/detection-tardive-de-l-indisponibilite-de-l-injection-de-soude-du-systeme-d-aspersion


La surveillance des installations nucléaires au quotidien ? C’est grâce à vos dons que nous pouvons la mener !
Pour surveiller au jour le jour les incidents dans les installations nucléaires, les décrypter et dénoncer les risques permanents qui sont trop souvent minimisés - voire cachés par les exploitants, nous mobilisons tout au long de l’année des moyens humains et techniques.
Pour continuer ce travail de lanceur d’alerte et donner, au plus proche de leur survenue, des informations sur les inquiétants dysfonctionnements d’un parc nucléaire vieillissant, nous avons besoin de votre soutien financier !

Faire un don



Installation(s) concernée(s)

Bugey

Nombre d'événements enregistrés dans notre base de données sur cette installation
151