1er septembre 2022
Lors du redémarrage du réacteur 3 de la centrale nucléaire du Blayais (Nouvelle Aquitaine) fin août 2022, EDF a coupé le circuit de refroidissement à l’arrêt (RRA) trop tôt. L’industriel n’a pas respecté la procédure qui guide cette phase délicate et ne s’en est pas rendu compte immédiatement.
Les arrêts et les redémarrages de réacteurs nucléaires sont des périodes où toute l’attention de l’exploitant doit être mobilisée. Les différentes étapes, réglementées par des consignes d’exploitations validées par l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), doivent être appliquées avec rigueur et les paramètres donnant des indications sur la réaction nucléaire et le refroidissement du réacteur suivis de près.
Il aura pourtant fallu une heure à EDF pour réaliser que le circuit de refroidissement utilisé lorsque le réacteur est à l’arrêt (pour évacuer la chaleur que dégage le combustible nucléaire) était coupé. Le refroidissement était déjà assuré par un autre circuit, via les générateurs de vapeur [1]
, il n’y a donc pas eu d’interruption de l’évacuation de la chaleur. Mais si les règles prévoient une étape où les 2 circuits de refroidissement fonctionnent simultanément, il y a certainement de bonnes raisons justifiées par des questions de sûreté.
Au delà de son caractère qui pourrait sembler anecdotique et sans conséquence, l’incident montre un industriel qui brûle les étapes d’une phase qu’il sait pourtant être délicate en configurant les circuits par anticipation d’un état dans lequel le réacteur n’est pas encore. Un industriel nucléaire qui ne détecte pas rapidement les coupures de refroidissement, laissant entrevoir une surveillance trop peu rapprochée, là encore alors que l’état du réacteur exige au contraire une vigilance particulière. Mauvaise communication, problème de coordination, méconnaissance des procédures, manques de moyens et inattention ? Aucune explication n’est donnée, ni dans le communiqué d’EDF ni dans celui de l’autorité de sûreté. Cette prise de largesses avec la surveillance des installations et les règles d’exploitations a valu à EDF la déclaration aux autorités d’un incident significatif [2] pour la sûreté le 30 août 2022.
L.B.
Déclaration d’un événement significatif de sûreté de niveau 1 relatif au non-respect d’une spécification technique d’exploitation
Publié le 01/09/2022
Le 23 août 2022, les équipes de la centrale du Blayais procèdent aux opérations de montée en puissance et température, par changements d’états, des circuits du réacteur n°3 en vue de son redémarrage, après un arrêt programmé pour visite partielle.
Durant ces opérations, différents circuits sont isolés et d’autres mis en service, afin d’adapter leur configuration aux spécifications techniques d’exploitation.
Les équipes ont procédé à une fermeture anticipée de vannes sur un circuit de refroidissement, conduisant à une configuration non autorisée.
Dès détection, les vannes concernées ont été réouvertes permettant de poursuivre les opérations vers l’état suivant.
Cet événement n’a eu aucune conséquence réelle sur la sûreté des installations car la fermeture des vannes a été de courte durée et le refroidissement du circuit primaire était assuré par les générateurs de vapeur. Toutefois, le non-respect des spécifications techniques d’exploitation a conduit la direction de la centrale nucléaire du Blayais à déclarer le 30 août 2022, à l’Autorité de sûreté nucléaire, un événement significatif de sûreté de niveau 1 sur l’échelle INES, qui en compte 7.
Non-respect des règles générales d’exploitation concernant le refroidissement du réacteur
Publié le 09/09/2022
Centrale nucléaire du Blayais Réacteurs de 900 MWe - EDF
Le 30 août 2022, l’exploitant de la centrale nucléaire du Blayais a déclaré à l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) un événement significatif pour la sûreté relatif au non-respect des règles générales d’exploitation (RGE) [3] concernant le refroidissement du réacteur 3.
Le 24 août 2022, le réacteur 3 était en cours de redémarrage à la suite de son arrêt pour maintenance et renouvellement du combustible. L’exploitant réalisait les opérations pour changer de domaine d’exploitation du réacteur 3, passant du domaine d’« arrêt normal refroidi par le système de refroidissement à l’arrêt » (AN/RRA [4]) vers le domaine d’ « arrêt normal refroidi par les générateurs de vapeur » (AN/GV [5]).
Bien que se trouvant formellement dans le domaine AN/RRA, le réacteur était déjà refroidi par les générateurs de vapeur. Avant d’avoir complètement terminé les opérations lui permettant de valider le passage du réacteur dans le domaine AN/GV, l’exploitant a arrêté le refroidissement du circuit du système de refroidissement à l’arrêt RRA, ce qui est contraire aux prescriptions des règles générales d’exploitation lorsque le réacteur se trouve dans le domaine AN/RRA.
L’arrêt du refroidissement du circuit RRA a duré environ une heure, durant laquelle le refroidissement du réacteur a été assuré par les générateurs de vapeur.
Cet événement n’a pas eu de conséquence sur les installations, les personnes et l’environnement.
En raison du non-respect des règles générales d’exploitation du réacteur, cet événement a été classé au niveau 1 de l’échelle INES (échelle internationale des événements nucléaires et radiologiques, graduée de 0 à 7 par ordre croissant de gravité).
Dès la découverte de l’événement le refroidissement du circuit RRA a été rétabli.
[1] Un générateur de vapeur (GV) est un échangeur thermique entre l’eau du circuit primaire, portée à haute température (320 °C) et à pression élevée (155 bars) dans le cœur du réacteur, et l’eau du circuit secondaire qui se transforme en vapeur et alimente la turbine. Chaque générateur de vapeur comporte plusieurs milliers de tubes en forme de U, qui permettent les échanges de chaleur entre l’eau du circuit primaire et l’eau des circuits secondaires pour la production de la vapeur alimentant la turbine https://www.asn.fr/Lexique/G/Generateur-de-vapeur
[2] Événements significatifs : incidents ou accidents présentant une importance particulière en matière, notamment, de conséquences réelles ou potentielles sur les travailleurs, le public, les patients ou l’environnement. https://www.asn.fr/Lexique/E/Evenement-significatif
[3] Les RGE (Règles générales d’exploitation) sont un recueil de règles approuvées par l’ASN qui définissent le domaine autorisé de fonctionnement de l’installation et les prescriptions de conduite associées.
[4] Le circuit de refroidissement du réacteur à l’arrêt (RRA) assure l’évacuation de la puissance résiduelle dégagée par le combustible, quand il est encore dans la cuve, pendant les périodes d’arrêt.
[5] Les générateurs de vapeur (GV) sont des échangeurs thermiques entre l’eau du circuit primaire dans le cœur du réacteur, et l’eau du circuit secondaire qui se transforme en vapeur.