14 mai 2024
L’affaire suit son cours depuis 3 ans, et à chaque printemps EDF fait une discrète mise à jour. La dernière, datée du 13 mai 2024, porte à 26 le nombre de réacteurs (répartis sur 9 centrales nucléaires différentes) dont les plans de conception n’ont pas été respectés. Leurs équipements étaient mal fixés.
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Quels équipements ? EDF ne le dit pas. Pas plus que l’industriel ne livre de détails sur les erreurs commises (nombre de chevilles, diamètre, implantation des systèmes de fixation...), leur nombre par réacteur, et encore moins sur leur raison. Tout ce que l’on sait c’est que les plans de conception de ces réacteurs, qui prévoyaient un certain nombre de dispositifs d’ancrages au sol et aux murs pour les différents équipements, n’ont pas été respectés. Les centrales de Belleville (Centre-Val de Loire), Blayais (Nouvelle-Aquitaine), Bugey (Rhône-Alpes), Chinon (Centre-Val de Loire), Civaux (Nouvelle-Aquitaine), Cruas (Rhône-Alpes), Dampierre (Centre-Val de Loire), Gravelines (Nord) et Tricastin (Rhône-Alpes) sont concernées. Le problème remonte donc à plus de 40 ans, mais il s’est étalé tout au long de la période de construction des réacteurs puisque même les modèles en fonctionnement les plus récents (1450 MWe, Civaux) sont touchés par cette "anomalie" (comme la nomme EDF).
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La première annonce d’EDF remonte à 2021. C’est à l’occasion de contrôles de conformité réalisés lors des 4ème visites décennales du réacteur 1 du Tricastin et du réacteur 2 du Bugey que ces problèmes d’arrimage des équipements ont été détectés. Pourquoi n’ont-ils jamais été détectés avant, durant les 40 premières années de fonctionnement ? L’accident nucléaire de Fukushima, qui aura fait réaliser aux industriels et aux autorités l’importance des risques liés aux tremblement de terre, n’y est probablement pas pour rien.
Les autorités ont donné 4 années entières à EDF pour vérifier l’intégralité de son parc nucléaire (18 centrales, 56 réacteurs en fonctionnement au total). Un délai qui peut paraître très long au regard de l’importance des enjeux pour la sûreté. Les ancrages des équipements sont conçus pour être adaptés à leur taille, leur masse et leur position, et permettent de les fixer au bâti (murs, sols) afin de les immobiliser. En cas de défaut de fixation, un choc provoqué par un séisme, une explosion, la chute d’un objet ou encore par un accident de manutention, peut déstabiliser ces équipements, qui pourraient eux-mêmes en détériorer d’autres en les entraînant dans leur chute. Un effet domino impactant le fonctionnement de plusieurs dispositifs simultanément dans un réacteur nucléaire... Le genre de phénomène qu’on préfère éviter.
Au printemps 2022, EDF a annoncé que 2 autres réacteurs, toujours au Bugey et au Tricastin, étaient affectés des mêmes problèmes d’ancrages de leurs équipements. Puis en 2023, le périmètre s’est étendu à Dampierre et Gravelines, portant à 8 le nombre de réacteurs ayant ces "anomalies" de conception. À chaque fois, l’annonce d’EDF se fait discrète, et lorsque que tout a été réparé. Et sans jamais donner la somme totale des réacteurs impactés. Puis subitement, en mai 2024, on passe de 8 à 26. Il faut dire que le temps file, et qu’il ne reste que quelques mois à l’industriel pour terminer ses vérifications. EDF ne dit pas quels réacteurs n’ont pas encore été vérifiés. Il n’est pas possible pour le moment de savoir si des centrales ont été épargnées par ces erreurs de conception. EDF aura-t-il su construire une centrale nucléaire en se conformant aux plans ? La question trouvera sa réponse d’ici quelques mois, si l’industriel arrive à tenir les délais, pour une fois.
L.B.
Déclaration d’un événement significatif sûreté générique de niveau 1 relatif à une anomalie de conception identifiée lors d’un contrôle de maintenance préventive
Publié le 14/05/2024
EDF réalise sur l’ensemble des réacteurs des contrôles réguliers dans l’objectif de vérifier le maintien en bon état des équipements.
Les équipements sont fixés au sol par des dispositifs appelés ancrages (cheville et dispositif de fixation).
Les « Programmes de Base de maintenance Préventive Ancrages » (PBMP) définissent les contrôles de maintenance à réaliser de manière préventive sur les ancrages de matériels identifiés comme étant importants pour la sûreté. Ces contrôles consistent à vérifier le respect du plan technique correspondant à chaque ancrage et à contrôler l’absence d’anomalies sur l’ancrage. L’échéance de ces contrôles est prévue dans les 6 mois qui suivent le redémarrage pour les réacteurs du palier 900 MWe réalisant leur 4ème visite décennale et au plus tard d’ici fin 2024 pour l’ensemble des réacteurs du parc nucléaire.
Les contrôles des « PBMP ancrages » du réacteur 1 de la centrale nucléaire du Tricastin et du réacteur 2 de la centrale nucléaire du Bugey sont terminés. Toutes les anomalies relevées ont été traitées (nombre de chevilles, diamètre d’une cheville, implantation des chevilles, …).
Les contrôles des « PBMP Ancrages » se poursuivent sur les autres réacteurs du Parc. EDF considère que ces contrôles ne remettent pas en cause la fonctionnalité des équipements.
A ce stade, EDF considère toutefois que les différences identifiées par rapport au plan sur ces ancrages et la justification du fait que cette différence est acceptable, n’ont pas fait l’objet d’une traçabilité adéquate au moment de la réception des équipements lors de la construction.
Pour cette raison et à titre conservatif, EDF a déclaré le 21 septembre 2021, à l’Autorité de sûreté nucléaire, un événement significatif pour la sureté à caractère générique pour les centrales nucléaires du Tricastin et du Bugey au niveau 1 de l’échelle INES, qui en compte 7.
Cet événement est mis à jour au premier trimestre de chaque année depuis 2022, afin d’intégrer les réacteurs ayant terminé les contrôles des « PBMP Ancrages » et cela jusqu’au solde de la réalisation de ces contrôles pour l’ensemble des réacteurs du parc nucléaire.
Ainsi, au premier trimestre 2024, en plus des centrales du Tricastin et du Bugey, les centrales de Gravelines, Dampierre, Blayais, Chinon, Cruas, Belleville et Civaux sont également concernées par cet évènement.
Mise à jour du 11/04/2022 :
Au premier trimestre 2022, les contrôles d’ancrage ont été réalisé pour les réacteurs n°2 de la centrale nucléaire du Tricastin et n°4 de la centrale nucléaire du Bugey. Toutes les anomalies relevées ont été traitées.
Mise à jour du 19/05/2023 :
Au premier trimestre 2023, les contrôles d’ancrage ont été réalisé pour les réacteurs n°3 de la centrale nucléaire du Tricastin, n°5 de la centrale nucléaire du Bugey et n°1 des centrales de Gravelines et Dampierre. Toutes les anomalies relevées ont été traitées. Ces contrôles se poursuivent sur les autres réacteurs du parc.
Mise à jour du 13/05/2024 :
Au premier trimestre 2024, les contrôles d’ancrage ont été réalisé pour les réacteurs n°1, n°2 et n°4 de la centrale nucléaire du Blayais, n°2, n°3 et n°4 de la centrale nucléaire de Chinon, n°1 et n°2 de la centrale nucléaire de Cruas, n°2 et n°3 de la centrale nucléaire de Dampierre, n°2, n°3 et n°6 de la centrale nucléaire de Gravelines, n°4 de la centrale nucléaire du Tricastin, n°1 et n°2 de la centrale nucléaire de Belleville et n°1 et n°2 de la centrale nucléaire de Civaux. Toutes les anomalies relevées ont été traitées. Les contrôles et traitements associés se poursuivent sur les autres réacteurs du parc nucléaire.
Défauts d’ancrage d’équipements importants pour la sûreté de dix-huit réacteurs des centrales nucléaires du Blayais, de Chinon B, de Cruas, de Dampierre, de Gravelines, du Tricastin, de Belleville et de Civaux
Publié le 29/05/2024
Centrale nucléaire du Blayais Réacteurs de 900 MWe - EDF
Centrale nucléaire de Chinon B Réacteurs de 900 MWe - EDF
Centrale nucléaire de Cruas-Meysse Réacteurs de 900 MWe - EDF
Centrale nucléaire de Dampierre-en-Burly Réacteurs de 900 MWe - EDF
Centrale nucléaire de Gravelines Réacteurs de 900 MWe - EDF
Centrale nucléaire du Tricastin Réacteurs de 900 MWe - EDF
Centrale nucléaire de Belleville-sur-Loire Réacteurs de 1300 MWe - EDF
Centrale nucléaire de Civaux Réacteurs de 1450 MWe - EDF
Le 13 mai 2024, EDF a déclaré à l’ASN un événement significatif pour la sûreté portant sur des défauts d’ancrage au génie civil de certains équipements importants pour la sûreté. Ces défauts concernent les réacteurs 1, 2 et 4 de la centrale nucléaire du Blayais, 2, 3 et 4 de la centrale nucléaire de Chinon B, 1 et 2 de la centrale nucléaire de Cruas, 2 et 3 de la centrale nucléaire de Dampierre, 2, 3 et 6 de la centrale nucléaire de Gravelines, 4 de la centrale nucléaire du Tricastin, 1 et 2 de la centrale nucléaire de Belleville et 1 et 2 de la centrale nucléaire de Civaux.
Dans le cadre du contrôle de l’état de ses installations, EDF vérifie la conformité des ancrages (chevilles, tiges scellées…) au génie civil des équipements (tuyauteries, matériels électriques, moteurs, pompes...) importants pour la sûreté.
La déclaration d’EDF constitue une troisième mise à jour de celle du 21 septembre 2021. Jusqu’à présent, huit réacteurs étaient concernés : les réacteurs 1, 2 et 3 de la centrale nucléaire du Tricastin, les réacteurs 2, 4 et 5 de la centrale nucléaire du Bugey, le réacteur 1 de la centrale nucléaire de Dampierre et le réacteur 1 de la centrale nucléaire de Gravelines. L’événement significatif concerne désormais vingt-six réacteurs.
Cette mise à jour fait suite à la finalisation des contrôles pour les réacteurs concernés. Ces contrôles ont mis en évidence des écarts sur certains ancrages portant notamment sur le nombre, le diamètre et l’implantation des chevilles. Ces écarts datent de la construction des réacteurs et auraient pu remettre en cause la tenue des équipements supportés en cas de séisme.
Cet événement n’a pas eu de conséquence sur les installations, les personnes et l’environnement. Compte tenu de ses conséquences potentielles pour ces réacteurs, cet événement est classé au niveau 1 de l’échelle INES (échelle internationale des événements nucléaires et radiologiques graduée de 0 à 7 par ordre croissant de gravité).
Les écarts constatés ont été corrigés par EDF.
EDF poursuit les contrôles sur ses autres réacteurs.